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10 mars 2018 : samedi noir dans les Brazzavilles Noires

A en croire le réseau du caporal-chef Ferdinand Masson, au moment où nous publions ce papier, on ne sait pas dans quel état sera le pouvoir de Sassou ce samedi 10 mars 2018 à compter de 4 h du main. Après les érosions de Ngamakosso, on nous a promis une avalanche politique à Mpila.

Sociologie de Brazzaville

Cependant quand Georges Balandier publia ses « Brazzavilles Noires », le sociologue se doutait bien que la ville de 1950 allait avoir des extensions péri-urbaines cinquante années plus tard (2018) tandis que la composition hétérogène de Poto-Poto d’une part, et celle homogène de Bacongo d’autre part, allaient évoluer vers un statu quo. Là dessus le théoricien de « L’école de Chicago » s’était trompé. La périphérie de Brazzaville Nord dont la grande agglomération de Poto-Poto est la matrice s’est reproduite en structure homogène si ce n’est ethniquement, du moins politiquement. Bien que biaisés par l’indicateur méthodologique des tricheries électorales, tout porte à croire que le maximum des votes pro-Sassou a été fourni par les quartiers dits Ngamakosso, Kombo, Massengo, Mama Mboualé, Virage, Centrafricains, Simba Pelle, Kanga Mbazi, Mikalou, Thomas Sankara etc., champ urbain à partir duquel le caporal Ferdinand Masson, justicier masqué, a projeté lancer son insurrection.

Technique de communication

Quand bien-même la chose ne soit pas surprenante car le régime de Sassou a tant cristallisé l’animosité chez ses compatriotes, personne, voici encore une semaine, ne connaissait l’existence du soldat Ferdinand Masson qui, comme Hercules avec les écuries d’Augias, veut nettoyer en une journée la situation socioéconomique ô combien nauséabonde que Sassou a créée en presque quarante ans de règne sans partage.

De sa voix configurée avec un logiciel informatique, Ferdinand Masson a semblé être habité par le comique et le tragique. Le champ linguistique puisé dans ce que les banlieues nord ont de plus canaille est manié par le jeune révolutionnaire de façon à toucher les cordes sensibles des riverains des périphéries citées supra.

Bien que travesti, le timbre du leader de la sédition trahit des intonations mbochi couplées à des occurrences indoubil. Cette normalité syntaxique repérée comme une connivence entre l’idiome mbochi et le véhiculaire lingala a semblé légitimer, en ce temps des fake et d’intox, l’appel auprès de ceux auxquels il était adressé en exclusivité.

Car la thèse que posa Balandier dans ses « Brazzavilles Noires », selon laquelle la résistance est une donnée bakongo de Bacongo, cette thèse a suscité une émulation dans l’adresse du caporal-chef Masson Ferdinand quand, notamment, il souligne que les quartiers Sud avaient déjà assez donné en matière insurrectionnelle et que, cette fois-ci, c’était le tour de l’Alter Ego nordique d’aller au charbon.

Développant un instinct de défense, tout aussi légitime, le régime de Sassou s’est répandu, sur les réseaux sociaux, en explications rassurantes sur le mode « nous contrôlons la situation, que le Congo est un pays de paix, que le fauteur de troubles de Ngamakosso était un plaisantin etc. etc. ».

Porte-parole du gouvernement, Thierry Moungalla peut-il arrêter la fronde en assimilant Ferdinand à un brigand, qui plus est dans un simple tweed ?

Flip

Comment ne pas comprendre la peur au ventre du régime puisqu’il risque d’être pris en sandwich. Il y a de quoi flipper. Même si le caporal en chef dit aux quartiers Sud de prendre des vacances durant la castagne, le subliminal du langage n’est que trop évident, étant donné qu’il leur demande dans le même temps une petite commission : libérer les prisonniers politiques à la maison d’arrêt. C’est une tautologie doublée d’un oxymore : ne bougez pas mais agissez !

En somme c’est toutes les Brazzavilles Noires qui vont entrer dans la danse ce samedi noir. Ou alors il ne se passera rien. Dimanche les religieux se rendront à l’église, au temple, lundi matin ceux qui ont un travail iront au boulot. Jusqu’à la prochaine alerte.

Thierry Oko

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