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Les mots et les choses

Conférence internationale, conférence nationale bis et dialogue national : La lutte a atteint la vitesse de croisière. Il suffit maintenant de vaincre la peur !

Performance aérienne - Située entre le temps de la montée et celui de la descente pour ce qui concerne un avion, la phase de croisière est la partie la plus longue de son vol. Et, c’est au cours de cet intervalle dans le temps et dans l’espace qu’un avion révèle ses performances.

Vol au dessus d’un nid de tricheurs

La métaphore de la navigation aérienne peint la phase dans laquelle se trouve aujourd’hui la lutte des Congolais contre le pouvoir illégitime de Brazzaville. Il a, à sa tête, un Denis Sassou Nguesso qui pourtant n’avait atteint que 8% des suffrages exprimés à l’issue de l’élection présidentielle anticipée du 20 mars 2016. Un faux vainqueur comme le faux fou dans le film de Milos Forman qui vient de mourir.

Méthode - Cependant, les mots et groupes de mots « décollage  », « vitesse de croisière », « atterrissage, descente », « dialogue national » voulu par une certaine opinion congolaise, ainsi que ceux de « Conférence internationale  », par Modeste Boukadia (président du Cercle des démocrates et républicains du Congo (Cdrc), Jean-Luc Malékat de L’Acodesa et « Conférence nationale bis », par Adrien Houabaloukou (président de la Cdi) vont aider à faire asseoir notre argumentaire.

Décollage

Il a été très difficile. Il part du débat sur le changement de la Constitution de 2002 jusqu’à l’élection présidentielle anticipée.
Dans cet espace, les leaders politiques de l’opposition Frocad-Idc et les composantes J3M ont eu du mal à s’affirmer, à avoir un seul message, parler d’une seule voix et élaborer une stratégie de combat.
Les observateurs de la politique congolaise qui analysent ce «  temps du décollage  » et l’inefficacité qui la caractérise, pensent que la course au leadership et au vedettariat en serait les causes fondamentales. Même s’il n’était pas facile de déraciner une dictature vieille de près de 40 ans, il eut fallu taire son Ego !

Néanmoins, le grand perdant pendant ce temps a été le peuple. Car, il a été complètement désaxé par les discours incohérents et instables des leaders politiques. C’est ainsi qu’il finit par abandonner la lutte et se mettre dans les gradins pour suivre le jeu des politiciens.

Malgré les disparitions forcées, les enlèvements, les arrestations arbitraires et les assassinats crapuleux enregistrés dans les rangs des partis de l’opposition, ainsi que le génocide qui a eu lieu dans le département du Pool, les Congolais n’ont pas bougé.
Ils ne comptaient plus que sur la communauté internationale qui devait, peut être, intervenir comme elle l’avait fait en Irak dans la chute de Saddam Hussein, en Lybie dans celle de Mouammar Kadhafi ou en Côte d’Ivoire dans celle de Laurent Gbagbo.

L’exception syrienne - Pourtant, depuis les révélations faites par la « grande presse » sur les causes réelles de toutes ces guerres en Irak, en Lybie et en Côte d’Ivoire, et les revirements que prennent aujourd’hui toutes ces affaires devant les tribunaux, aucune puissance occidentale ne veut plus s’hasarder à aller déstabiliser de cette façon un Président de la République. L’intervention internationale en Syrie semble se justifier par le fait que Bachar El-Assad aurait utilisé des armes chimiques.

C’est donc en vain que les Congolais ont attendu l’intervention militaire de la communauté internationale.

Mais, ils semblent se ressaisir et refaire leur unité autour du général Jean-Marie Michel Mokoko dont ils réclament non seulement la libération sans conditions ; mais aussi l’élévation au statut de Président du Congo. Et, les Congolais semblent être cette fois-ci très déterminés à défendre leur Président.
Avec cette unité autour du général Jean Marie Michel Mokoko et l’environnement international, la lutte a atteint la « vitesse de croisière ». Il ne reste aux Congolais que de révéler leurs performances à l’image d’un avion en phase de croisière.

La vitesse de croisière
Elle est favorisée par l’environnement national et international.

L’environnement national

Luttes internes - Le pouvoir de Brazzaville est très affaibli par les divisions qu’il connait en son sein. La question de la succession au trône se complique. L’ « Affaire des généraux Dabira et Ngatse Nianga Mbouala  » suspectés d’avoir planifié un coup d’état est un gros point d’interrogation qui met tous les généraux du pouvoir dans le suspense. Que va-t-il se produire ?

Les audits menés par la brigade de la DGST et la déclaration des partis de la mouvance présidentielle risquent d’aggraver cette déchirure.

Poudre d’escampette - Car, qui, de tous les cadres du pouvoir, dira avoir les mains propres ? Il paraît que l’ancien ministre de l’Agriculture et de l’Elevage, actuellement directeur du cabinet du premier ministre Clément Mouamba, Rigobert Maboundou, voyant l’étau se resserrer autour de lui, dans une affaire de 40 milliards qui concerneraient le Fonds agricole, aurait déjà pris le chemin de l’exil.

Guerre et paix - Le cessez-le-feu signé entre le gouvernement et Frédéric Binsamou alias Ntumi sur la guerre du Pool ne rassure pas. Les Congolais le prennent pour une simple trêve. Parait-il que Sassou Nguesso tient à l’éliminer physiquement.

La crise économique et financière ne cesse de s’aggraver. De nombreuses sociétés privées et étatiques licencient quand elles ne ferment pas complètement.
Le chômage augmente alors que l’Etat ne paye pas les allocations de chômage. Les arriérés de salaires, les pensions de retraite non payées ne font que renforcer la grogne sociale.

Perte de souveraineté - Sur le plan de la défense, l’armée est remplacée par des mercenaires. Combat médiatique - Mais, il y a aussi les publications, dans des réseaux sociaux et par des anonymes, des informations (tentative de coups d’état) sur les points stratégiques à partir desquels, on peut attaquer le cortège de Sassou Nguesso ou abattre son avion en plein vol, qui créent la panique au sein du haut commandement.

Ennemi dans l’ombre - Car, elles sont prises au sérieux comme cette affaire du caporal-chef Ferdinand Masson, le soldat inconnu. Rumeur ou vérité : le militaire anonyme serait un citoyen libanais, résident au Congo.

Crime financier - Et, quand on voit l’affaire Commisimpex qui oppose son patron Mohsen Hojeij, à l’Etat congolais, depuis les années 1980, il faudra craindre que les Libanais y foutent leurs nez.

Cet environnement national pousse à croire que les Congolais n’accepteront pas de payer les pots qui ont été cassés par Sassou Nguesso et son clan. Quel qu’en soit le prix à payer.

L’environnement international

Solidarité régionale -Sassou Nguesso a perdu un grand allié, l’Angola. Ce pays l’avait aidé, en 1997, dans sa guerre de la reconquête du pouvoir.

Interaction politique - Mais, il y a aussi le bloc formé par les présidents Yoweri Musseveni (Ouganda), Paul Kagamé (Rwanda), Joseph Kabila Congo démocratique), Ali Bongo (Gabon), Denis Sassou Nguesso (Congo Brazzaville) et Idriss Deby (Tchad), pour résister contre l’ouragan qui souffle dans la sous-région d’Afrique centrale et celle des Grands Lacs, qui commence à céder.

Isolement - Du côté de Kinshasa, le président Kabila est aujourd’hui dans le collimateur de la communauté internationale. Ses homologues de la Sadc (Communauté de développement de l’Afrique australe) l’ont lâché.

Paul Kagamé veut sauver son mandat à la tête de l’Union africaine. Pourtant, il est rattrapé par ses crimes en RDC. Impérialisme régional : Notamment son occupation et son expropriation des Congolais sur leurs terres, et son projet sur la balkanisation de ce pays.

Travaux pharaoniques - Du côté de Ndjamena, Idriss Deby ouvre, lui aussi, un front contre Kabila. Il veut transférer les eaux du fleuve Congo vers le Lac Tchad.
Institution de Bretton Wood - Les négociations entre le gouvernement de Brazzaville avec le FMI sont encore dans une zone de turbulence. Rien ne rassure qu’elles vont aboutir.

Tricherie - Les dernières révélations faites par le journal « Le Monde » sur l’aide que la société pétrolière Total aurait apportée au gouvernement congolais pour contourner les règles du FMI, convainquent la communauté internationale et les institutions de Bretton Wood sur la mauvaise foi du pouvoir de Brazzaville, et sa volonté de cacher la vérité sur sa gouvernance.

Luttes intestines - Une situation très délicate. Car, elle pourra fragiliser le bloc des pays membres de la CEMAC. Et, Sassou Nguesso risquera d’être en conflit avec ses homologues présidents Paul Biya (Cameroun), Idriss Deby (Tchad), Ali Bongo (Gabon) et Theodoros Obiang Nguema. La « diplomatie de proximité  » risquera, elle aussi, de voler en éclats.

Exil - Au Maroc où les dignitaires du pouvoir installent déjà leurs familles, les populations sont dans la rogne. Elles boudent cette migration congolaise qui semble prendre les allures d’un asile politique.

Colère - Même l’invitation que Sassou Nguesso a faite au roi Mohammed VI pour participer au sommet sur le Fonds bleu, qui se tiendra à Brazzaville, le 25 avril prochain, irrite les grands intellectuels marocains. Ils ne veulent pas voir leur roi aller dans un pays où l’on ne respecte les règles de la démocratie.

Un précédent - Ils se demandent si après Mobutu, l’ancien président du Zaïre qui avait obtenu le droit de se refugier dans le royaume chérifien, jusqu’à y trouver une place dans un cimetière chrétien, le tour revient aux dignitaires politiques du Congo Brazzaville ?

Dragon asiatique - Aussi, faut-il dire que l’ouverture à Brazzaville de la Banque sino-congolaise pour l’Afrique est prise par une certaine opinion occidentale, notamment française comme étant l’acte à travers lequel Sassou Nguesso sort complètement le Congo de l’influence de Paris. Ca crée donc la jalousie.

Et, en évitant de rencontrer le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, qui s’est rendu à Brazzaville, le vendredi 13 avril dernier, pour participer à la réunion des ministres des Finances de la zone Franc, UEMOA, la CEMAC et des Comores, Sassou Nguesso qui a prétexté se rendre en Afrique du Sud pour prendre part aux obsèques de Winnie Mandela, semble confirmer cette rupture avec la France qu’il a pourtant toujours servie au détriment des Congolais.

Un boulet - Néanmoins, on apprend dans les milieux diplomatiques que c’est à travers le FMI que Paris veut régler les comptes à Sassou Nguesso. Il ne veut pas y aller directement et seul car Sassou Nguesso est une pierre que la France ne veut pas soulever seule. Car, elle risque de lui tomber sur les pieds. Sassou Nguesso fut ramené au pouvoir par la France. Il est aussi un grand financier de la Françafrique.

Mafia - Mais, il y a aussi l’ « Affaire ENI » dans laquelle la justice italienne enquête sur une possible corruption au Congo Brazzaville par ce groupe pétrolier ; et celle du groupe Bolloré dans laquelle son PDG Vincent Bolloré va devoir s’expliquer sur ses activités africaines. Sans compter toutes ces nombreuses poursuites judiciaires par les tribunaux internationaux et la Cour pénale internationale sur les affaires des Biens mal acquis, la guerre de 1997, et la guerre de 1997 et le génocide du Pool qui sont suspendues sur sa tête.

Sur le plan communicationnel, on peut dire que la voix de Brazzaville est étouffée et ne va plus loin. Pour preuve, Sassou Nguesso est obligé d’inviter régulièrement, à Brazzaville, les grandes chaines françaises de télévision pour s’exprimer, lui-même. La voix du porte-parole du gouvernement étant enrouée par des mensonges. Sassou Nguesso projetterait carrément de créer un poste de porte-parole de la présidence de la république.

Censure - Le cas le plus amusant est celui de cette coupure d’électricité, dans toutes les grandes villes du pays, alors que Me Jessica Finelle, avocate de Jean Marie Michel Mokoko, démontait sur Tv5, pièces par pièces, les chefs d’inculpations qui sont émis contre le Général Mokoko.

Comme riposte et pour se faire entendre lui aussi, Denis Sassou Nguesso a envoyé urgemment à Paris son directeur de cabinet, Florent Tsiba, son conseiller juridique, Wilfrid Magloire Obili, et l’avocat de l’Etat, Me Devillers Gérard pour négocier, eux aussi, une interview à Tv5 et autres grandes chaines de télévision.

Dans cet environnement international qui va bientôt être alourdi par les mandats d’arrêts internationaux et les interdictions de séjour dans certains pays qui seront faites aux dignitaires du pouvoir de Brazzaville, il est très difficile que Sassou Nguesso y sorte victorieux. La tension va monter dans le pays. Le Congo va bouillonner comme une marmite au feu. Il deviendra invivable pour tous. Et, les vapeurs renverseront le couvercle. Ce n’est qu’une affaire de temps !

Atterrissage

Devant l’obstination de Sassou Nguesso et les multiples fronts qui sont ouverts dans le pays et à l’étranger, l’atterrissage de notre avion risque d’être forcé. C’est-à-dire le point de vue de Sassou Nguesso ne comptera plus, désormais. Les Congolais, avec eux, la communauté internationale ne supporteront plus ses caprices. Ils décideront d’en découdre une fois pour toutes. Un complot international va être monté contre lui.

Dialogue national, conférence internationale et conférence nationale bis

Les Congolais peuvent donc se dire avoir le vent en poupe et le soutien de la communauté internationale. C’est pourquoi, ce serait une faiblesse de leur part de revenir au Dialogue national que Sassou Nguesso a, lui-même, refusé à plusieurs reprises.

Devant tout ce décor, la conférence internationale et la conférence nationale bis risqueront d’être des contours pour rien.

Notons qu’à l’issue de ces rendez-vous projetés, on aura besoin de la communauté internationale pour imposer les résolutions ou recommandations au pouvoir de Brazzaville puisque Modeste Boukadia et Adrien Houabaloukou ne disent pas que le pouvoir de Brazzaville y prendra part. Or cette communauté internationale fait déjà le voyage avec les Congolais dans ce vol (selon notre métaphore) qui a atteint la vitesse de croisière !

« Pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant ? » dirions-nous avec les deux anges qui étaient dans le tombeau et occupaient la place où le corps de Jésus avait été déposé. Autrement dit, cessons de rêver. Mais, Osons ! Car la vie continue.

Serge Armand Zanzala, journaliste et écrivain

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