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Sociologie congolaise

Congo-Brazzaville - Diaspora congolaise : prolétariat en cravate et récupération politique

Un spectre hante le monde congolais. Il s’appelle « achat des consciences » Compatriotes de toute la planète, unissons-nous pour écraser la racaille en col blanc de Mpila alimentée par l’idéologie dite du « Chemin d’avenir », vaste champ de corruption.

Peurs et sapeurs

Passé maître en manipulation, le régime de Sassou fait une razzia chez les plus farouches des opposants de la diaspora en l’occurrence ceux qui se disent cracks, s’affichent « cravate au cou, crocos aux pieds » pour « bouder » l’ordre établi ; un snobisme dont n’ont plus que fiche certains sapeurs de très haut vol : Norbat de Paris, Fullizioni Daluzoni. Désormais ils dressent leur col pour Mpila.

Pour les amateurs, voici une définition du phénomène, laconique, de Bedel Baouna dans son roman « Brazzaville, ma mère » : « La Sape c’est cette grâce d’exister » p.56. Les existentialistes, de Boris Vian à Sartre, reproduiront le dandysme du 19è siècle dans cette optique car ils en comprirent les enjeux de résistance.

Récupération

Comme les dandies congolais font beaucoup de bruit (parfois pas pour rien) leur grâce est exposée à toute forme de récupération politique précisément par le régime totalitaire de leur pays, suspectant dans tout mouvement social des germes de révolte et de soulèvement contre l’ordre établi. La parade de nos disgracieux stratèges de Mpila contre tout risque de débordement social reste, à ce jour, la corruption de ce « prolétariat en chiffons de marque » pour paraphraser ceux qui parlent de « sous-prolétariat flottant », c’est-à-dire les migrants de la Méditerranée.

Défis, défilés

Depuis les travaux ethnologiques de Justin Gandoulou voire de Côme Manckasa, jusqu’aux œuvres musicales de Rapha Boundzéki et Papa Wemba, les observateurs ont compris que la Sape ( se vêtir avec art en plus de la grâce ) est un sujet auquel nos compatriotes étaient farouchement attachés et, par conséquent, étaient de plus en plus la proie de possibles séductions/répressions par le régime avant que le mouvement ne déclenche un incendie social. En raison de cette crainte, les sapeurs de Bacongo (quartier très à risques), Moungali, Ouenzé, Talangaï sont désormais intégrés dans les défilés du 15 août (Fête Nationale), à la satisfaction des officiels, moyennant quelques miettes financières.

Sassou sapologue

La porosité entre sapologie et politique, deux espaces en apparence éloignés l’un de l’autre, est si massive qu’elle est même rétroactive ainsi que le montre le personnage de Sassou dont le goût immodéré du port de chaussures en peau de crocodile a ému la presse occidentale tant leur prix est exorbitant alors que la population de ce pays pétrolier vit en deçà du seuil intolérable de pauvreté. Cet amoureux des Weston est sans doute dans un processus de mimétisme identitaire de son cousin Marien Ngouabi dont le bottier fut l’Allemand Salamander et de son beau-fils Omar Bongo, fan des chaussures à talons compensés.

Pour faire un peu de vulgate marxiste, disons que le prolétariat et l’infra-prolétariat sont un réservoir dans lequel ceux qui détiennent les moyens de production recrutent. Pourquoi ? Pour constituer une armée de supplétifs qui leur sert de rabatteurs et, au besoin, de forces de répression.

Séduction des sapeurs

Le renversement de stigmate pour une finalité politique n’est que trop visible au Congo-Brazzaville quand on voit le grapin que jettent les kiki, koko, Claudia, Ngouolondélé, Alain Akouala sur la « tribu-classe » des sapeurs (sapologues selon leur propre terminologie) au moment où, précisément le rejet de leur politique par la diaspora se fait plus violent, même si dans le réseau de la résistance extra muros le jadis virulent collectif Casuffit a mis beaucoup d’eau dans son tsamou-tsamou.

De fil en aiguille, les stratèges politiques de Mpila, qui likent les guerres des sapeurs par vidéo interposées, ont compris qu’ils pouvaient tisser leur cocon sur la base des coups de griffes des dandies.

Parmi les premiers à étoffer une infiltration non cousue de fil blanc, on peut signaler l’ancien maire Hugues Ngouolondélé et l’ancien ministre Alain Akoua. L’ex-maire enverra le cheval de Troie, Rostel Bakoua, une armoire à glace qui jouera du bâton et de la carotte notamment à l’occasion du concert téléguidé de Roga-Raga et son Extra-Musica à Montreuil.

Implosion

La dernière récupération en date risque de faire imploser le mouvement tant ceux qui ont mission de recruter dans le sous-prolétariat de la diaspora ont visé une de ses têtes d’affiche la plus en vue et misé de grosses fortunes pour parvenir à leurs fins. Il s’agit de Norbat de Paris, surnommé Mivé Témoin par Ben Moukacha (le Moïse des Dix commandements de la Sape) ou Matondo National par Pipo Inganzi qui multiplie des vidéos cherchant à tourner en ridicule le Roi du Shoping alias le Zarathoustra.

Tout s’est enclenché lorsque le président (autoproclamé) des sapologues, Norbat de Paris, héros d’une célèbre émission de divertissement, a présenté (dans plusieurs vidéos) les hommes politiques congolais comme désormais fréquentables alors que notre prince de l’esthétique les avait longtemps critiqués comme « dictateurs ayant volé toutes les richesses du pays et affamé le peuple. »

Ainsi parle Norbat

Norbat de Paris au surnom nietzschéen de Zarathoustra a taillé en pièces les « leaders charismatiques », Alphonse Massambat-Débat, Bernard Kolélas tout en invitant les Congolais de laisser le temps à Sassou de travailler en lui demandant, au passage, de baisser les taxes douanières afin de faciliter les investissements des membres de la diaspora « au pays » (entendez au Congo)

Le sang des internautes n’a fait qu’un tour et aucun nom d’oiseau n’a manqué à l’appel pour habiller le sapeur devenu traître et surnommé désormais « Zoba de Paris ».

Donald Imperator des métros parisiens, Castor de Belgique, Faye Monama, autant de gardiens du temple de la doxa, ont lancé alors les premières salves anti-Norbat (toujours) par vidéos interposées. La corruption dont le Zarathoustra aurait fait l’objet passe, du simple soupçon, à l’accusation avérée. « Pour faire un virage à quatre-vingt dix degrés, c’est qu’il a été « nguirisé » » s’emportent ses détracteurs.

Vidéos avides de violence

Le point asymptotique de cette « querelle » ( si on ose dire) de « chiffonniers », a été atteint dans la video de Pipo Inganzy, sapeur de son état, où il réduit en lambeaux le nietzschéen Norbat de Paris après l’avoir cravaté à au moins vingt reprises, à raison d’un direct sur YouTube tous les deux jours parfois deux par jour.

Dans le travail de sape auquel se livre Pipo, les internautes assistent à une descente en enfer de Norbat. La géolocalisation toponymique change au fur et à mesure de la montée des diatribes. Ce n’est plus « de Paris », c’est désormais « Norbat de Choisy le Roi », une banlieue difficile du 94. C’est une rétrogradation en règle. Le refoulement géo-local va crescendo : de citoyen congolais rive droite, le natif de Makazou-Brazzaville devient natif rdécéen (RDC) rive gauche. Mieux : lui qui se vante porter exclusivement du luxe est stigmatisé comme un client du faux et usage de faux. Sa panoplie de chaussures en peaux de crocodile exposée dans une vidéo fait verser des larmes à ses détracteurs. Balivernes ! « Ce n’est qu’un ramassis de faux » s’irrite Pipo. Ses fameux blousons croco ? Du simili cuir. Norbat s’est lancé dans la chanson. Escroquerie ! « Détournement d’œuvres d’artistes connus, notamment Rapha Boundzéki » rage Pipo Inzangui. « Plagiaire ! » s’insurge Izangui

Coup d’essai

Norbat de Paris fit l’objet d’une première tentative de récupération qui échoua. C’était le milliardaire kleptomane Willy Etoka qui lança le ballon d’essai. Norbat mordit à l’hameçon. Après lui avoir posé un lapin dans un bar des Champs Elysée, Willy Etoka compris d’emblée que le Zarathoustra était une proie facile malgré ses fanfaronnades sur la toile.

Les observateurs crièrent à la trahison. Mais après s’être débattu comme un diable dans un bénitier, Norbat de Paris s’en tira à bons comptes. Deux à trois vidéos plus tard, il recouvra sa virginité de sapologue anti-pouvoir.

Après ses récentes vidéos où il semble avoir retourné la veste comme l’opportuniste de Jacques Dutronc, Norbat a sapé le capital/confiance qu’il eut du mal à retrouver après l’épisode Willy Etoka le voleur.

L’infra-prolétariat, quel qu’il soit (même celui des dandies sapés comme jamais) a besoin d’être alimenté financièrement. C’est ce dont se chargent les VRP du chemin d’avenir sillonnant les capitales occidentales en quête de sujets à corrompre. En séjour à Monaco, au mois d’octobre de cette année, il se murmure que Kiki de Mbujimayi reçut Norbat sur le Rocher. Une vidéo présentée par les détracteurs du Roi du shoping comme preuve irréfutable le montre en train de prendre un vol vers la Suisse pour les besoins de tournage d’un film en tant qu’acteur principal. « Mensonges ! Il était parti à un rendez-vous avec Christel Sassou qui l’attendait à Monte-Carlo afin de prendre sa part  » accusent ses ennemis. Norbat se rendait à Monaco toucher son salaire de la trahison en quelque sorte. Le même week-end, un célèbre animateur congolais des réseaux sociaux fut aperçu dans un palace de la Côte d’Azur. « Je me rends à Monaco confia-t-il à une connaissance locale ». Lui aussi.

Simon Mavoula

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