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Congo-Chine : restructuration de la dette dans l’opacité

Dans la perspective de la conclusion d’un appui budgétaire avec les institutions de Bretton Woods, le Congo-Brazzaville a signé le 29 avril 2019 avec la Chine un accord sur la restructuration de sa dette dont l’encours représente 110 % du PIB en 2017, dont plus d’un tiers en mains chinoises, soit environ 3,15 milliards de dollars (quelque 2,8milliard d’euros), selon les sources.

Soutenabilité

L’objectif de cet accord tant attendu est de rendre soutenable la dette du Congo-Brazzaville envers l’Empire du milieu représentant environ 35 %. C’est une condition sine qua non dans les négociations entre le Congo-Brazzaville et le Fonds monétaire international (FMI). La soutenabilité de la dette n’est autre que la capacité d’un Etat de rembourser ses emprunts et donc sa solvabilité. Elle est liée aux recettes prévisibles qui permettront de rembourser, à moyen terme, la dette et l’ensemble des frais associés, ainsi que les intérêts qui s’y rattachent.

Cet accord, déterminant pour notre pays, est une longue marche, la résultante de deux ans de négociations avec les partenaires financiers, techniques et politiques chinois et augure des perspectives intéressantes quant à la suite des négociations avec nos partenaires techniques et financiers, notamment le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, note le compte-rendu du Conseil des ministres (Les Dépêches de Brazzaville, 2 mai 2019).

Toutefois, il y a un hic. Les termes de cet accord n’ont pas été rendus publics. Un allègement d’une partie de la dette du Congo-Brazzaville et un moratoire c’est-à-dire l’étalement de son solde sur le long terme ont été concédés par la Chine. Sous quelles conditions ? Le pays de Mao ne fait pas de la philanthropie. Il fait du business. Comment et pendant combien de temps la Chine va-t-elle se faire rembourser ? A quel taux d’intérêt ? A un taux variable ou un taux fixe ? En titres miniers ? Les crédits chinois aux pays d’Afrique producteurs de matières premières sont remboursables en titres miniers. Ce troc est connu sous le vocable « d’infrastructures contre matières premières. » Cette pratique qui a cours dans les pays à économie de rente s’accompagne d’un manque de transparence. Pendant combien d’années le pétrole du Congo-Brazzaville va-t-il être pompé ? Et, combien d’années les forêts vont-elles être dévastées par la Chine ? Le Congo-Brazzaville risque-t-il de se retrouver dans la même situation que celle du Sri Lanka sous le poids de la dette, qui a lâché la gestion de son port maritime pour 99 ans à la Chine ?

Renards dans le poulailler

L’accord avec la Chine du 29 avril 2019 a été paraphé pour le compte du Congo-Brazzaville par Calixte Nganongo assisté de Jean-Jacques Bouya. Comment faire confiance aux hommes, véritables prédateurs, qui sont les responsables de cet énorme endettement et qui ont participé à la dilapidation des fonds ? L’équipe technique du Congo-Brazzaville chargée de mener les négociations avec La Chine d’une part et les experts du FMI d’autre part regorge en son sein les auteurs de l’évasion fiscale révélée par les « paradis papers » et cités dans l’affaire dite de « Panama Papers »

Opacité

La Chine, partenaire stratégique, a pris en charge la dette des entreprises chinoises évoluant au Congo-Brazzaville. Plusieurs d’entre elles exerçant dans le secteur du BTP dans le cadre de la municipalisation accélérée de Jean-Jacques Bouya appartiennent aux membres du clan Sassou. Quel est le montant exact de la dette intérieure ? Quelles sont les conclusions de l’audit de la société pétrolière du Congo-Brazzaville, la SNPC dirigée autrefois par le fils du chef de l’Etat Denis Christel Sassou Nguesso ? Où en sont les pourparlers entre le Congo-Brazzaville et les traders pétroliers Gunvor, Glencore, Vitol, Mercuria et Trafigura ? Une mafia autour de la dette du Congo-Brazzaville s’est mise en place. Tout se passe dans l’opacité.

Flou artistique

Chassez le naturel, il revient au galop. Alors que les cours de l’or noir grimpaient et tutoyaient les sommets, Brazzaville continuait de gager ses barils. Qu’en est-il aujourd’hui avec le retournement de la conjoncture à la baisse ? A quel prix le rééchelonnement de la dette du Congo-Brazzaville vis-à-vis de la Chine a-t-il été arraché ? Quel est le montant total de la dette du Congo-Brazzaville ? Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup.

Benjamin BILOMBOT BITADYS

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