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Du bon usage des mots : candidat ou peuple malheureux ?

Une presse africaine addictive aux espèces sonnantes et trébuchantes des dictateurs Noirs (dont l’ineffable Monsieur 8%) a coutume d’agrémenter son discours du substantif « candidat malheureux » pour qualifier soit le général Mokoko soit Parfait Kolélas soit encore Claudine Munari. Ce langage, en plus de vouloir valider un état de fait, en dit long sur le niveau des journalistes. Elle est révolue l’époque des Georges Collinet, André Bernard, Alphonse Marie-Toukas, Michel Belvain, Claude Alain, Claude Bivoua, Mongo Slim, hommes de presse aux analyses de haut vol. Pire : le propos des journalistes « aux ordres » corrobore l’idée que Sassou serait l’heureux bénéficiaire d’une compétition où il aurait battu ses adversaires honnêtement, sans faute, dans les règles de l’art.

Autant, fonctionner suivant le principe de « qui perd gagne, », au moins ça serait clair.

« Wa ba houna wé na messo » - Or il n’a échappé à personne que s’il y a un malheureux dans cette affaire ce n’est ,ni Mokoko, ni Pako mais le peuple congolais à 92%, contraint de se taper encore pour une durée indéterminée un tyran de la pire espèce. Par conséquent, le bonheur de Sassou (alias Papa Bonheur) c’est moins d’avoir été confortablement élu que d’avoir évité un soulèvement populaire à Pointe-Noire et Brazzaville, à l’inverse de Blaise Compaoré, malheureux ex-Président bouté hors de l’histoire et, aujourd’hui, en exil en Côte d’Ivoire.

L’expression « candidat malheureux » utilisée à tort et à travers par ladite presse « aux ordres » fait partie d’une langue de bois de journalistes sans audace intellectuelle, champions de clichés sémantiques, placés dans des rédactions africaines de la diaspora par népotisme. Ces journalistes font penser à des chauffagistes qui se permettraient de donner des cours sur la thermodynamique. C’est le cas de la journaliste camerounaise Marie-Roger Biloa, poissonnière qui se mêle de choses qui la dépassent. Et comme pour enfoncer le clou, depuis un certain moment, nos journaleux opposent un péremptoire « on ne va plus revenir sur les élections », chaque fois qu’un invité hostile au tyran d’Oyo tente d’évoquer dans un débat la manière dont le « candidat heureux » (i.e Sassou) a berné son monde. On comprend leur agacement : c’est comme si on demandait à Sassou de revenir sur son alibi le 18 mars 1977. Le malaise ! Corrompue jusqu’à la moelle épinière, la presse africaine demeure un adversaire coriace de l’Opposition.

Recadrage : c’est précisément ce qui est arrivé récemment au porte-parole de Guy Brice Parfait Kolélas (Vivien Romain Manangou) sur le plateau d’un certain Richard Togba, journaliste d’une obscure chaîne de télé. Le tonitruant représentant de Pako s’est fait taper sur les doigts quand il a osé critiquer le scrutin du 20 mars 2016 face à R. Togba où il était invité de donner son point de vue sur le Dialogue que réclameraient «  de tous leurs vœux  » les Congolais. Ce dialogue, selon les épithètes entendues ici et là, devrait être inclusif, exclusif, sans exclusive, incisif, décisif, explosif, implosif, que sais-je ! Nous y reviendrons.

Du bon usage des mots

En 1981, quand Giscard d’Estaing fut battu par François Mitterrand, dans ce cas l’expression « candidat malheureux » était approprié. Face à François Mitterrand, Jacques Chirac fut également candidat malheureux. Récemment Nicolas Sarkozy fut candidat malheureux face à François Hollande. Ségolène Royal fut candidate malheureuse face à Sarkozy. En 2017, si jamais François Hollande est battu par Alain Juppé ou François Bayrou, le lexique de la science politique pourra parler à juste titre de « candidat malheureux » quand bien-même cela fera de nombreux heureux parmi les Congolais de la diaspora qui ont encore au travers la gorge le malheureux « Sassou a le droit de consulter son peuple » lâché perfidement par l’actuel locataire de L’Elysée la veille du référendum sollicité par Monsieur « Eight ».

On parle de « candidat malheureux » dans une élection loyale où l’adversaire est battu sans appel, à plate couture, de façon régulière, transparente, propre, incolore, inodore sans un goût de viande faisandée. Sassou est-il dans ce cas de figure ? Evidemment NON. Ce ne fut pas le cas le 20 mars 2016 où on a vu des misérables en col blanc s’accaparer d’une victoire malgré 8 malheureux points obtenus sur 100, annonçant, de surcroit, les résultats à 3 heures du matin, comme des sorciers revenus d’un bal sabbatique. Sassou : candidat de malheur, OUI. candidat heureux, NON. « Candidat pour le malheur et pour le pire » pourrait-on, à la limite, parodier.

Du dialogue

Désormais le sujet du jour est le dialogue. Chacun n’a que ce terme à la bouche comme s’il y avait une panne subite de la pensée. Peut-on dialoguer avec des malfrats ? A vrai dire, dialoguer avec Sassou est aussi crédible qu’un congrès de félins où le lion fait une communication sur les vertus du régime végétarien. Mieux : c’est comme si Platon était invité par Hitler pour faire un séminaire sur la démocratie à des chefs SS.

Chose paradoxale, ce sont ceux qui ont réellement gagné (Sassou n’ayant recueilli que 8%) qui ont le mot dialogue à la bouche. C’est Mohamed Ali demandant réparation à Foreman après la victoire de Kinshasa. Absurde ! Le fait est qu’après la victoire à 60%, Monsieur « Allons seulement » continue tranquillement sa route, bon an mal an, effectuant ses voyages comme à l’accoutumée, inaugurant quelque édifice ça et là, signant des décrets, accordant des audiences, serrant des mains d’officiels, se proposant dans des médiations internationales comme par exemple dans la prévisible crise électorale en Rdc, etc. etc.

En effet, pour le dictateur d’Oyo, les élections du 20 mars 2016, c’est de l’histoire ancienne. « Le temps passé ne revient plus » peut-il chanter avec Franco. Et, pourvu que Dieu lui prête vie, il devra logiquement aborder les élections législatives avec sérénité. Puis dans cinq ans, si L’Eternel continue de lui prêter vie, il va se succéder à lui-même ou alors passer le témoin à son rejeton, Cristel le dauphin. Bref tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Alors le khalife d’Oyo doit pouffer de rire (un rire méphistophélique, évidemment) quand il entend parler de dialogue. Autant parler musique à un sourd. Echaudé par la Conférence Nationale en 1991, Sassou voue aux gémonies le moindre entretien avec qui que ce soit. Quand on a été piqué par un serpent, la vue d’un ver de terre est épouvantable. Et comme pour montrer que l’hypothèse du dialogue ne lui effleure même pas l’esprit, Sassou a enfermé à double-tour son principal rival Mokoko dans une cellule de La Maison d’arrêt. Bâillonné et emprisonné : deux précautions valent mieux qu’une.

En clair, Monsieur « Allons seulement, vroum vroum !!!! » n’a pas organisé la tricherie électorale de 2016 pour se laisser déposséder le pouvoir à l’issue d’un dialogue ! « Ce pouvoir, je l’ai eu par la force, reprenez-le si tant est que vous les ayez bien suspendues » lance-t-il à qui veut l’entendre ; lion affamé qui invite une biche d’ôter une arête au fond de sa gorge. Le malheureux prédécesseur de Sassou, Marien Ngouabi, donna à son cousin Sassou un précieux conseil qu’il a appliqué à la lettre le long de son existence : « le pouvoir est au bout du fusil. » Traduction : « il n’y a que le coup d’état comme forme de changement »

L’opposition, désemparée, ne semble pas l’avoir compris. Vivien Romain Manangou, représentant de Monsieur Brice Parfait Kolélas Yuki, propose un dialogue délocalisé. « Comme les Ivoiriens à Marcoussy ». Manangou omet de préciser que les Ivoiriens s’entre-déchirèrent chez eux une fois rentrés de Marcoussy. Au plus fort de la guerre civile en 1997 les Congolais délocalisèrent le dialogue à Libreville, chez le beau-fils Bongo. Résultat : Sassou roula son monde dans la farine.

Le mot juste a été trouvé par Andréa Papus Ngombet Malewa, représentant de la société civile (collectif Sassoufit) : « on veut un dialogue sans le dictateur Sassou dont la peau servira de parchemin, le crâne d’encrier, son sang d’encre, sa bouche de porte-plume . »
J’ajoute : « sa dépouille servira d’humus où fleurira la démocratie. »

Oui, pour changer d’état, il faut un coup d’état.

Simon Mavoula

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