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Analyse

La dernière entourloupe de Sassou

La dernière entourloupe de Sassou l’interlope. (Analyse)

« Les hommes sont si simples et si faibles que celui qui veut tromper trouve toujours des dupes. »
Nicolas Machiavel « Le Prince »

Comme à l’accoutumée, dès que la difficulté se dresse devant lui, le tyran d’Oyo cherche à la contourner en tirant doctement les ficelles, dans le clair-obscur. Il concocte des ingrédients à base « du sang et des larmes des autres », qu’il fait touiller dans le chaudron du diable afin d’assouvir sa gloutonnerie du pouvoir. Dernier fil d’Ariane : « Un accord de cessez-le- feu et de cessation des hostilités dans le département du Pool  », tiré par les cheveux, signé le 23 décembre 2017 à Kinkala dans des conditions rocambolesques.

NTOUMI, un caillou dans la chaussure dictatoriale ?

Ne vous y méprenez pas : ni la magnanimité tant vantée par les laudateurs de Sassou, ni un éventuel attachement à la paix, ne peuvent expliquer ce processus supposé aboutir à un hypothétique accord. En réalité, ces atermoiements procèdent d’une manœuvre dilatoire orchestrée par le plus cynique scénariste machiavélique tropical, le temps de neutraliser le RP NTOUMI. Ce dernier devra éviter de tomber de charybde en scylla, d’autant plus que le boutefeu d’Oyo, toujours enclin à se montrer fourbe et déloyal, n’a coutume de faire semblant de négocier qu’avec un couteau entre les dents.

A mon humble avis, la logique et le bon sens commanderaient moins d’euphorie, mais plus de circonspection quant à l’appréciation du probable accord. Les contours flous de ce salmigondis sont loin de nous donner une idée sur les termes définitifs qui, rappelons-le, seront à l’avantage de la partie qui sera en réelle position de force. Comme on peut le pressentir aisément, les revendications majeures du RP NTOUMI ne seront jamais prises en compte, et pour cause, le rapport de forces reste la composante essentielle en négociation. Plus on est fort, plus on peut mettre la pression sur son interlocuteur et plus on a de chance d’obtenir ce qu’on veut. Quid de NTOUMI ?

Par ailleurs, le secret de polichinelle sécuritaire est hélas bien connu : le Congo n’a plus d’armée. La milice ethnique qui fait office d’armée est essentiellement composée d’analphabètes et toujours plus intéressés par les prébendes et les trafics que par la sécurité des populations. Chassés comme des pestiférés en RCA, ils sont passés maîtres dans le saccage des villages, l’assassinat, le viol des paysannes et le vol. Le constat est ahurissant dans le Pool : une armada de miliciens, appuyée par des mercenaires de tout acabit, a été incapable de mettre la main sur un homme seul, retranché dans la forêt avec quelques compagnons, sans base- arrière !

Au final, le général-tyran Dénis Sassou-Nguesso est désormais soumis à un dilemme cornélien entre l’exigence imposée par la communauté nationale et internationale de faire la paix dans le Pool et son orgueil atavique de prétendu « kani » qui voudrait qu’il gagnât toutes les guerres, même les plus picrocholines.

C’est un truisme de le rappeler : les dribles, feintes machiavéliques et autres tacles stupéfiants de Sassou à ses adversaires politiques, considérés comme une marque de génie, ont toujours jalonné son parcours politique. Il ne fera pas l’économie de son impudence en ces temps périlleux où les fourches caudines du FMI, suspendues comme une épée de Damoclès, menacent de s’abattre sur lui.

NTOUMI reste le gros caillou dans la chaussure du tyran, l’empêchant de vivre une vie qu’il croyait désormais paisible, après avoir jeté sans ménagement deux de ses concurrents à la pseudo élection présidentielle du 20 mars 2016 dans ses sinistres geôles et après avoir mis en place (avec les moyens de ce qui reste d’Etat) un redoutable dispositif de terreur qui confine l’opposition au mutisme et à l’inaction . Il était pourtant persuadé que l’affaire était totalement dans le sac dès lors qu’il avait réussi à rallier à sa cause les deux leaders susceptibles de mobiliser des troupes, uniquement par la taille de leur potentiel électorat. Point par leur charisme.

Alors que les populations du Pool ploient sous les bombes du dictateur, le « fils adoptif  » (d’autres parlent de fils putatif) Guy Brice Parfait KOLELAS prend un malin plaisir à accompagner sans réserve son « papa » dans sa folle cavalcade. Quant à Pascal Tsaty MABIALA, copté par la politique du ventre, il a tout bonnement été récompensé en acceptant d’être nommé en conseil de ministres, à une fonction macérée dans la collusion « Chef de l’opposition ». En effet, « Monsieur 4% », ainsi qu’il a été cruellement brocardé ne représente en rien l’opposition, sinon son maître « Monsieur 8%  ».

Quand la guigne s’installe, le faste s’efface

Les impartiaux aficionados de la politique congolaise déconstruisent patiemment l’image d’un Congo qui attirerait les investissements étrangers ou d’un pays totalement pacifié. C’est une image à mille lieues de la réalité, que nous a servie le Grand Timonier d’Oyo dans sa logorrhée de fin d’année devant son Congrès. Ce tableau à la Potemkine (luxueuses façades érigées à base de carton-pâte, à la demande du ministre russe Grigori Potemkine, afin de masquer la pauvreté des villages lors de la visite de l’impératrice Catherine II en Crimée en 1787) s’écroule devant la dure réalité qui vous nargue, une pauvreté tenace, agressive et, presque structurelle qui s’est obstinément installée au Congo.

Triste. Catastrophique. Voir ce que le Congo est devenu sous les coups de boutoir des prédateurs qui l’ont capturé ( « l’animal est dans le filet » cf. Discours de Sassou devant ses "sages" à Oyo le 11 mai 2012 ), donne à penser que ce pays n’est plus sournoisement que le siège d’une nouvelle faune de perroquets dont le seul projet consiste à meubler les caprices d’un homme en mal d’ambitions pour son pays et qui joue au tyranneau de village.

Prenant la pleine mesure de l’état apocalyptique dans lequel ils ont délibérément plongé notre pays, les rats de l’Oyocratie quittent le navire. La tonitruante saillie du député Jean Claude IBOVI contre le criminel économique Jean Jacques BOUYA n’est pas l’expression d’une vitalité patriotique, elle relève de toute vraisemblance d’une logique de « la nuit des longs couteaux ». Le nombre d’idolâtres qui s’agglutinaient hier aux pieds de leur Dieu Sassou s’amenuise comme peau de chagrin, préoccupés chacun par le salut de sa petite personne. Pendant ce temps, l’esquif Congo, balloté par les vagues fonce droit sur un récif.

La ruée des vautours des temps modernes (DSK, De Villepin, famille PIGASSE) vers le Congo, pour tenter de sauver leur coffre-fort tropical, n’y fera rien. C’est le temps de la guigne. Le dictateur nu, ne fait plus florès. A très court terme, le contexte économique désastreux, conjugué à la lame de fond d’une rue vociférante, vont assurément sonner le glas de ce système criminogène, tribaliste et impopulaire. Les esprits éclairés n’ont plus qu’à soutenir l’élan du peuple pour une rupture insurrectionnelle, qui semble être la seule alternative pour que notre pays retrouve ses lettres de noblesse. Nul destin inexorable ne nous prédispose en effet à être sous la botte d’un tyran. Toute misère mène à la révolte ou à la soumission ; le choix est donc clair. L’histoire de l’humanité n’est-elle pas d’une certaine manière, l’histoire des révoltes et des révolutions ? Il est temps, alors vraiment grand temps, pour le vaillant peuple Congolais d’exhumer son état d’esprit salvateur d’août 1963 !

Djess dia Moungouansi

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