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Roga-Roga : la bataille de Paris aura lieu ce 26 mai ou...n’aura pas lieu

La musique dit-on adoucit les mœurs. Mais pas n’importe quelle musique, pas n’importe quelles mœurs, pas n’importe quel artiste. Roga-Roga, musicien congolais, semble en l’occurrence exaspérer son monde au point que son arrivée à Paris a déclenché une crise politique majeure au sein de la diaspora congolaise de France.

Soupçonné d’être de connivence avec le régime dictatorial de Brazzaville, Roga-Roga a vu sa personne cristalliser toute la haine que l’Opposition a accumulée contre Sassou. A deux jours d’un concert de l’artiste brazzavillois d’abord prévu au Bataclan de Paris puis programmé au Palais des Congrès de Montreuil (le 26 mai 2018) la tension est si palpable dans la communauté congolaise de Paris qu’il suffit d’une étincelle pour que l’incendie se déclenche.

Le silence des médias français

Dans une ville parisienne en alerte permanente, il est étonnant que la presse française ne fasse pas état de cette crise inter-congolaise qui aura forcément des effets collatéraux dans cette ville du 93, ce d’autant plus que les protagonistes annoncent la participation aux échauffourées de jeunes des banlieues, rodés à la guérilla urbaine.

« Ce concert n’aura pas lieu » disent, catégoriques, les anti-Roga congolais auxquels se sont automatiquement associés ceux, voisins, de la RDC, les Inguéta. «  Mountou hou fwa. » promettent les membres de cette coalition.

Pour ne pas perdre la face, un petit fan club du groupe brazzavillois, roulant les mécaniques, écume les échoppes de Château-Rouge et une gargote appelée « Chez Carine », sise à un jet de flèche de la gare du Nord. Bien entendu, pour ce fan-club, Roga-Roga chantera à Montreuil.

Ces supporters parisiens de l’artiste de Ouenzé à la tête desquels se trouve un certain Rostel Bakoua, auraient, dit-on, bénéficié d’un renfort de gros bras venus de Brazzaville. Il s’agirait de plus d’une centaine de Cobras qu’un charter a transbahutés sur la place de Paris. Pour l’anecdote, à l’issue de la mission, le commando compte demander asile en France car, par les temps qui courent, il ne viendra jamais à l’esprit d’un migrant africain de rentrer chez lui après avoir mis pied en Occident. Ca en dit long sur la philosophie de ce concert présenté par Brazzaville comme « l’expression de l’identité musicale congolaise » et « l’opportunité de défendre la rumba ».

Accusé d’être un agent de propagande du régime de Brazzaville, il est évident que ce n’est pas tant l’artiste Roga-Roga qui est visé mais son mentor, Jean-Dominique Okemba et, évidemment, Denis Sassou-Nguesso le patron d’Okemba. Il se susurre, par ailleurs, que le directeur de la sécurité du Congo-Brazzaville, ledit Okemba, profiterait du concert de Roga pour tester sa puissance car il voudrait se débarrasser de Sassou qui a désigné comme dauphin son fils Kiki.

Bouc-émissaire

Dans cette hypothèse, Roga-Roga est un animal qui court le risque d’être sacrifié à l’autel des ambitions politiques de Jean-Dominique Okemba. Ce griot d’une puissance inouïe n’est alors qu’un instrument. Il est surtout le bouc-émissaire arrogant qui n’a pas volé la...volée de bois vert qui s’abat sur son dos. En tout cas, on comprend très mal son obstination à faire le concert de Paris alors qu’il y a péril en la demeure et, notamment, après avoir présenté, voici peu, ses excuses à la diaspora après avoir dénigré ses membres dans une chanson de son cru intitulé « Métro-Boulot-Dodo ».

Bataille médiatique

En attendant que les protagonistes s’étripent sur le terrain (on a promis casse et incendies de voitures), ceux-ci se livrent à une violente bataille médiatique dont le nœud central est la politique congolaise sous Sassou.

Il reste que pendant que les musiciens du groupe de Mpila ont commencé la balance du son dans la salle de spectacles de Montreuil, leurs adversaires, les Indignés et les Combattants, font le siège dudit Palais du Congrès depuis le 20 mai.

Pétitions, slogans hostiles, porte-à-porte et coups de fils intempestifs aux autorités culturelles de Montreuil se multiplient en milieu Combattant pour faire annuler le concert. A en croire les anti-Roga, le conseil municipal communiste de Montreuil semble faire la sourde oreille. La menace de trouble à l’ordre public ne paraît pas émouvoir les élus locaux et nationaux en dépit du plan Vigipirate déployé depuis les attentas contre Charlie-Hebdo et le Bataclan. Quant aux organisateurs, ils semblent trop contents de cette pub gratuite faite malgré tout à Roga pour songer à une annulation de l’évènement.

« Même quand on camoufle un cadavre, il finit toujours par sentir » dit Roga-Roga qui aime les proverbes. Il a beau présenter son spectacle comme une démarche purement artistique (la musique étant neutre selon lui) les Combattants ont senti la puanteur que dégage sa future performance parisienne. A travers ce concert, c’est soit Dominique Okemba qui lance son offensive contre Sassou soit ce dernier qui veut redorer son blason en France. Or les Congolais ne veulent plus entendre parler de cette racaille politique.

De toute façon le 26 mai 2018 ça va sentir le roussi à Paris.

Thierry Oko

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