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La presse indépendante en danger

Vous avez dit liberté de presse ?

En délicatesse avec le pouvoir, nos confrères "La Rue Meurt" et "L’observateur" font l’objet d’attaques judiciaires dont ils ne pourront se tirer sans dommages.
Ce second titre dans sa dernière édition nous fait part de la dernière offensive à son égard. La SNPC lui a déclaré une guerre sans merci dans laquelle la puissance financière de l’attaquant fait figure d’arme de destruction massive devant le journal en la personne de son directeur.
On peut trouver discutable la forme donnée à l’article incriminé, mais il ne fait que dire tout haut ce que la plupart pense tout bas.
Nous ne pouvons que nous insurger devant cette attaque d’une liberté de la presse tant vantée par le pouvoir et qui après les déclarations vengeresses de 3A (Alain Atipault Akouala, ministre de la communication et porte parole du gouvernement) nous font craindre les pires débordements envers les journalistes ne se pliant pas à la vision que le gouvernement et ses féaux veulent donner du Congo.

I - Les faits selon L’Observateur

L’observateur dans le collimateur du pouvoir via la SNPC

Le pasteur JRB Itoua lâche huit chiens sur GSO

Six citations à comparaître devant la première chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Brazzaville contre Gislain Simplice Ongouya. Et pour Cause : attendu que dans le N° 230 du 13 au 21 novembre l’hebdomadaire, pris en la personne de son Directeur de Publication, aurait diffamé "tous les agents de la SNPC".
_...Faites sur des pratiques peu amènes constatées dans « la boite de la famille régnante. » Il s’agit de Mboungou-Kiongo Michel, Ta-Liane Ignace (Pointe-Noire), Paulin Mongo... Une enquête de gendarmerie ayant précédé ces plaintes continue à "fliquer" et à suivre les mouvements de notre Directeur de publication. Elle n’a abouti à rien : D’où cet harcèlement judiciaire en cours.

Les faits

L’homme a abattre

C’est une longue histoire d’amour entre la SNPC et L’Obs. Tout part depuis la création de cet outil que tous les Congolais appelaient de tous leurs voeux pour une réelle expertise nationale et indépendance en matière pétrolière. Avec la création de la Société Nationale des Pétroles du Congo (SNPC), enfin les Congolais pouvaient disposer, pensaient-on, un tant soi peu de leur "pétrole", qui en 25 ans d’extraction a été plutôt pour eux source de malheur et de pauvreté que de prospérité et de développement.
Mais, tout de suite après sa création commencent les désillusions. D’abord avec la "destruction de Hydro-Congo" et la non prise en compte des ex travailleurs de Hydro Congo Recherche comme le voulait l’esprit des choses et ensuite par la transformation de la société d’Etat en "une boîte familiale" de gestion et de commercialisation du pétrole congolais.
L’Obs. qui est en guerre totale contre toutes les injustices, les iniquités et les ignominies, d’où qu’elles viennent, en avait fait son affaire en son temps ; dénonçant cette dérive. Bien mal lui en a pris.
La SNPC va rechercher à vouloir corrompre notre Directeur de publication par personne interposée pour que celui-ci lui livre le nom ou les noms de ces agents de l’ex Hydro-Congo Recherche qui faisaient alors feux de tous, bois pour faire valoir leur droit à être reversé à la SNPC. Que nenni !
L’injustice demeure jusqu’à ce jour et nous mettons au défi la SNPC de nous prouver que ce sont "les cadres congolais du pétrole qui ont été recrutés prioritairement dans, notre société nationale des Pétroles. "
Puis vint la campagne de l’unicité des caisses de l’Etat et de la transparence dans la gestion du pétrole congolais. Sujet qui fâche u 146 avenue du Général de Gaulle. Les fastes de la société sont de notoriété publique aussi bien auprès des Institutions de Bretton Woods que des créanciers congolais à l’étranger. C’est une lapalissade que d’affirmer que la SNPC et le pétrole congolais sont gérés dans l’opacité totale. Les opérations poudre aux yeux, dont les journées pétrolières parlementaires (13/11103), ou le site Internet de la « Boîte », ne sont destinées qu’à "blouser" le premier venu. Mais, pour peu qu’on ait de bon sens, car c’est simplement une question de bon sens, cela va sans dire. Pourquoi les bureaux de Londres et de Paris sont ils fermés à ce jour ? Pour bonne gestion assurément ou pour faire d économies.

Délit d’opinion

Disons le tout de suite, dans cette sale affaire, qui pue le complot politique "pour tuer le journal L ’Observateur", c’est une histoire du fameux déficit démocratique constaté par Sidiki Kaba, président de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH) lors de son dernier passage à BrazzavillE (2 au 10/11) parmi les trois handicaps majeurs qui gangrènent le Congo : la culture de l’impunité ; le déficit démocratique ; et la mal gouvernance.
En effet, prenant le cas de la brève ci-dessous, attaquée de surcroît par un journaliste, il emploie le « semble-t-il » et le conditionnel. On ne peut pas l’attaquer sans dévoiler son intention "de poursuivre pour poursuivre". Pourquoi notre confrère n’a-t-il pas commencé par nous adresser son droit de réponse de stricte observance ou demander un rectificatif comme nous l’oblige la déontologie ? Non, il est, semble-t-il, obsédé par l’idée de son maître « de régler son cas à Gislin Simplice ou à L’Obs. » Signalons que cette démarche aurait aussi été suivie par la SNPC et son pédégé qui ont été cités dans la dénonciation présente.

La preuve par l’absurde

N’est-ce pas absurde que des "gens" qui n’ont pas été concernés nommément par l’article se soient coalisés pour porter plainte, chacun de son côté, le même jour, contre "personnellement" Gislin Simplice Ongouya", qu’ils condamnent déjà à leur payer des millions- l’argent ne suffit donc pas, dans une procédure de citation directe à comparaître devant le tribunal correctionnel. Pourquoi huit individus, là où une seule et unique plainte de la SNPC aurait suffi ? C’est pour démontrer leur hargne à faire disparaître "proprement" un journal pour délit d’opinion, attendu que la diffamation est un délit subjectif propre aux pouvoirs autocratiques, crime de lèse majesté.
Devant la meute des inquisiteurs, notre DP, se dit zen et sans illusion sur la suite de l’affaire. Le top a été donné "politiquement" et l’argent sale va jouer dans le procès en sorcellerie intenté contre 1ui. Le but le pousser a plaider "exception veritatis", un autre mauvais est allé jusqu’à l’accuser de vol de document interne pour le condamner à un an de prison ferme. Il a dit, pétant les plombs :
« M’nant-Ià, nous avo’s pris toutes lé disposichio. C’est Ongouya-là, Iboho Mbi la Ngoho- la tête comme sa mère en mbochi-, il n’a qu’à encore écrire. On va l’écraser » Dont acte I

ZARATHOUSTRA


II - LE CORPUS DELICTI

L’article par lequel le scandale arrive L’Observateur N°230 du 13 au 21 novembre 2003

Arrêtez le scandale à la SNPC

Ce jeudi 13 novembre s’ouvrent au palais du parlement les journées pétrolières parlementaires organisées par une « boite » suspecte de mauvaise gestion, la SNPC. L’Observateur participe à ces journées à sa manière pour aider les parlementaires à débusquer le lièvre. La SNPC est au centre d’un grand scandale financier. Près de dix comptes à l’étranger portent la très exclusive signature du Pasteur Jean Bruno Itoua. Le pédégé perçoit à lui tout seul en moyenne, chaque mois, près de soixante et quinze millions de francs CFA. Scandaleux ! Le Président de la République aurait demandé le blocage des comptes du couple régnant à la « boite ».

Jeudi 13 novembre sont ouvertes journées pétrolières pour le parlement, organisées par la Société nationale des pétroles du Congo. Espérons que cette fois au moins la lumière va être faite sur la gestion du pétrole congolais.

La question que tout le monde se pose : « Où va l’argent du pétrole ? »

Tout le monde croit que cette société ne vit que du fruit de la vente des cargaisons pour le compte de l’Etat. Si ce n’était que cela, la SNPC n’aurait pas eu un budget de plus de 20 milliards de francs CFA, le tiers du budget de l’Etat congolais, confié à une seule entreprise. En réalité, la SNPC a hérité des différentes associations sur pratiquement tous les champs pétroliers en exploitation que gênèrent énormément d’argent. C’est ce qui fait que cette société ait à elle seule un budget équivalent au tiers du budget de l’Etat congolais.
Va-t-on continuer à regarder sans réagir la mauvaise gestion des ressources tant financières qu’humaines à laquelle nous assistons depuis 5 ans ?

« Arrêtons le scandale »
Les parlementaires devront faire les observations suivantes à M. Jean Richard Bruno Itoua :

  1. Pendant sa conférence de presse, qu’il a improvisé au sortir de Mpila, le PDG a prétendu que le FMI s’est trompé dans ses calculs déclarant 57 milliards de différence, la réalité est que1a différence est de 30 milliards pourquoi cette différence ?
  2. Itoua Bruno JR est un PDG fantôme. Il passe la clair de son temps, en moyenne trois semaines par mois à l’extérieur du pays. Pendant cette période d’absence, il perçoit, tenez-vous bien, un million cinq cent mille francs CFA (1.500.000 F : CFA par jour). Il ne se déplace jamais seul, Il emmène toujours avec lui deux de ses gardes du corps qui perçoivent chacun deux cent vingt mille francs CFA (220 000F CFA) par jour.
    Le PDG vient de se rendre compte qu’il est sous payé en tant que président directeur général d’une société pétrolière : de deux millions et demi (2.500.000) de salaire mensuel, il décide de passer à sept millions (7.000.000 F CFA) avec un rappel depuis la création de la société.
    Il vient de se rappeler que depuis bientôt trois ans, c’est lui qui assure j’intérim de la direction générale de la filiale SNPC UK à Londres. Pour cela, il vient de se faire verser sur son compte un pactole de plus de trois cent millions de francs CFA (300.000.000), en guise de rappel. Et ce n’est pas tout : il est à la tête de plusieurs autres structures pour lesquelles il est salarié. Le PDG perçoit donc à lui tout seul en moyenne chaque mois près de soixante et quinze millions de francs CFA. Scandaleux !...
  3. La SNPC possède près de dix comptes à l’étranger. Il y a un seul signataire pour chacun de ses comptes, le PDG. Il fait ce qu’il veut et n’a jamais été contrôlé. « Va-t-on continuer à assister à cette mauvaise gestion ? »
  4. Les bureaux de Paris et de Londres sont fermés pour cause de mauvaise gestion ?
  5. La création des filiales tous azimuts se fait sans études préalables de faisabilité ni de rentabilité. Certaines filiales son déjà fermées sans avoir rien produit du tout et d’autres sont en création. Le seul objet de leur mise en place n’est que pour enrichir certaines personnes. La majorité des agents salariés des filiales étant déjà agents salariés de la SNPC.
  6. Le « pédégé » n’est seul pas à avoir moult salaires. Tous les conseillers du pédégé, ainsi que de nombreux autres agents, sont doublement ou triplement salarié : en tant qu’agents à la fois de fa SNPC et des filiales. Pendant que de nombreux Congolais, cadres formés sont au chômage, certains s’amusent à exercer plusieurs fonctions comme s’ils étaient seuls à avoir les compétences requises. .
  7. Le recrutement se fait de façon anarchique. La société que l’on présente comme possédant la crème de la nation regorge, en fait, de cadres au rabais, la plupart sans aucune référence académique : Le fichier du personnel n’est rempli qu’à moitié, l’autre moitié des agents ne pouvant donner la preuve de leurs diplômes déclarés.
    Certains d’entre eux savent à peine lire. Demandez-leur d’écrire et vous serez ahuris !
  8. Sur ordre du roi, plusieurs passeports de service pour des personnes extérieures à la société (en majorité membres du CIFMC) ont été établis. Des billets d’avion aussi, des chèques de montant très élevés sont établis à t’ordre de ces même personnes.
  9. Quelle est la raison d’être du Fonds de dépôt et de Garanti ?
  10. Cette structure a été mise en place pour gérer les fonds qui serviraient au démantèlement des installations pétrolières (plate-forme) en fin d’exploitation. Ces fonds devraient être alimentés par les sociétés opératrices depuis notre pays. Jusqu’à ce jour aucune entreprise n’a versé un rond. La SNPC seule a fait à cette entité une avance qui sert entre autre à doubler les salaires de certains agents (la quasi-totalité des salaires du Fonds de dépôt et de Garantie sont aussi salariés de la SNPC) et acheter des voitures de fonction pour une structure fictive.

III - L’Avis du Sociologue

Le procès en diffamation ou la loi du plus fort

Beaumarchais, dans la mouvance des idées qui ont mené à la Révolution française de 1789, disait : « Sans la Liberté de blâmer, il n’est d’éloge flatteur ». Ce postulat Institue toute la dimension de la Liberté d’expression qui va de la simple question qu’on pose publiquement, au doute qu’on émet jusqu’à la critique radicale. Si l’un des chaînons est phagocyté, toute la liberté d’expression est mise à mal. Et souvent dans l’exercice de cette liberté, tous les chaînons sont mis en branle. Les sociétés progressives ont l’obsession du débat, de la critique, de la revendication et finalement de la proposition et de la participation pour conjurer périodiquement la sclérose. Car, la liberté d’expression est celle d’informer ne sont pas des fins en soi. Ce sont des mécanismes qui visent, dans une société libérée des archaïsmes dictatoriaux ou tyranniques, à implanter le débat citoyen qui lui même a pour objectif de demander des comptes aux acteurs publics, afin d’arrêter leur tendance « normale » à abuser du pouvoir (l’idée est de Montesquieu, on le sait). Toute personnalité exerçant un devoir public doit se plier à ce jeu de contrôle par le débat, c’est en cela qu’on lui reconnaît des qualités. Ainsi, les libertés d’expression et d’informer sont des procédés qui permettent aux emplois publics de ne pas sombrer dans une gestion sectaire ou secrète. Ces libertés se déploient en société pour impulser des évolutions et des mutations vers plus de responsabilité administrative, c’est-à-dire vers le service sans lequel aucun état ne peut s’engager dans le développement et la quête de la justice sociale. Les autoritarismes usent de la tactique du procès en diffamation, non comme tremplin pour étendre le débat citoyen, pour éclairer les zones d’ombre susceptibles d’abuser I’opinion publique, mais pour faire taire le droit au contrôle public, un droit inaliénable de la démocratie. Une personne exerçant une fonction publique qui est attaquée publiquement et qui doit rendre compte de sa responsabilité publique, se réfugie astucieusement dans une espèce « d’intimité privée » qui va prétendre la décharger de son statut public. La nature du débat se trouve ainsi détournée vers une « atteinte à la dignité personnelle » et le poisson se noie, tout demeure opaque, secret, inaccessible et c’est l’opinion toujours désireuse de transparence qui va trinquer. La loi du plus fort s’installe
Alors, elle ressemble bien à une lâcheté du plus fort.
Le procès en diffamation, survivance de la pensée monolithique et déjà didactique autoritariste, est souvent utilisé comme un ajournement de la bonne gouvernance, une croisade contre l’orthodoxie de la gestion publique ; une dilution de la relation démocratique nécessaire entre les dirigeants et l’opinion. La corruption des directeurs de publication, le harcèlement judiciaire deviennent peu à peu les sauf conduits d’un plan génnéral destiné à tordre la langue et l’œil des organes de presse indépendants. Quand l’une n’a pas réussi, on passe à l’autre et vice versa. Qui veut tuer sa petite démocratie, commence par tuer son petit journal.

MATONDO KUBU TURE, Sociologue

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