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Le Congo, le SIDA et l’hypocrisie

Les politiciens et les douairières du monde entier se sont donnés, comme tous les ans à date fixe, bonne conscience en ornant d’un ruban rouge leur boutonnière, comme si ce geste de mouton de Panurge était suffisant pour éradiquer l’abominable pandémie.

C’est vrai qu’au Congo, on communique de plus en plus sur la lutte contre le VIH. C’est vrai aussi que le message trilogique absurde d’hier : « Fidélité, Abstinence, Protection » ne fait plus recette, personne n’ignore que le(la) congolais(e) n’est ni abstinent(e) ni fidèle. Le message aujourd’hui insiste, fort heureusement, sur la protection. Des psychologues et des pédagogues sillonnent les lycées en y donnant des conférences plutôt crues afin de sensibiliser les jeunes aux risques de l’inconséquence sexuelle. Des couples séropositifs s’affichent dans les médias et parlent de leur expérience ainsi que des possibilités de vivre presque normalement avec le virus dans le corps.

Pourtant, l’essentiel est oublié : comment la jeunesse peut-elle avoir peur de cette saloperie si personne n’en meurt ? Car au Congo, personne ne meurt du SIDA, on meurt de longue et pénible maladie, de pneumopathie, de sorcellerie, jamais du VIH. Les familles taisent les raisons de la disparition de leurs proches comme si l’opprobre devait tomber sur elles les si la cause du décès était rendue publique.

Imaginez l’impact si dans les rubriques nécrologiques des télévisions de proximité, la plupart des décès dus au mortel virus étaient annoncés, si on mettait enfin des visages et des noms sur les victimes.

C’est sans doute aux malades que revient la responsabilité de faire le pas, de déclarer publiquement l’affection dont ils sont atteints, car on ne peut pas compter sur les familles pour franchir le Rubicon.

Allez voir le Centre de Traitement Ambulatoire de Pointe-Noire, ce centre de la Croix Rouge Française distribue les trithérapies, voyez comme la plupart qui s’y rendent, nombreux, chercher les quelques cachets du salut, viennent en se dissimulant. Il est malheureux que ceux-là même qui sont victimes ne fassent rien pour aider à la lutte, quand il suffirait qu’ils s’affichent en tant que malades. S’ils se taisent, ne serait-ce pas aussi par crainte de ne plus trouver de partenaire ? Ce sont les séropositifs et les malades qui sont les vecteurs de la contagion alors qu’ils pourraient mener une vie sexuelle normale et sans risque pour les autres s’ils usaient de préservatifs.

L’amour est meurtrier. Dans un couple, chacun sait s’il est sujet à risque ou pas, il ne peut jamais avoir de certitude en ce qui concerne les relations extra conjugales de son partenaire, quelle que soit la confiance qu’il lui fait. C’est particulièrement vrai dans le cas des couples adultérins, si l’un des partenaires est adultère pourquoi serait il fidèle à son amant/maîtresse ?

On meurt tous les jours du Sida, à Brazzaville, Pointe-Noire, Ouesso, Sibiti, comme à Paris, New-York ou Pékin. Qu’on nous montre les victimes, qu’on fasse réellement peur à la jeunesse pour laquelle le VIH ne semble être qu’un épouvantail puritain pour l’empêcher de s’envoyer en l’air. Ne disent ils pas : Syndrôme Inventé pour Décourrager les Amoureux.

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