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LIBRE OPINION

La paix vue de Mpila

Par Lyonel Tchifounga

Aucun honnête homme ne peut éprouver du plaisir à exercer un pouvoir sur ses concitoyens. Thomas Jefferson, Extrait d’une Lettre à John Melish

Depuis son retour au pouvoir le président Denis Sassou n’a cessé de vouloir se forger une image d’homme de paix. Il faut dire que ce désir de lier son nom à la paix ne date pas d’aujourd’hui. Ne s’était-il fait appeler en plein boom de son
premier mandat ,1979 à 1992, l’homme des masses, garant de la paix des coeurs et la tranquillité des esprits ? Il faut dire que le manteau de l’homme de la paix est certes très beau, mais ce n’est pas Monsieur Sassou qui l’endossera car cette
stature de pacifiste tant convoitée est aujourd’hui irrémédiablement ternie et fracassée du fait que l’histoire retiendra plus de lui l’homme qui revenu au pouvoir après une
guerre sanglante et dévastatrice aux origines jusqu’à lors obscures et douteuses et assassiné 350 congolais : les disparus du Beach.

A l’aube des élections dont la date reste à fixer par Mpila, l’homme des masses revient à l’assaut à travers le matraquage médiatique et la multiplication de forums et Platte formes les uns aussi bizarres et rocambolesques que les autres. Les raisons de ce tumulte sont à trouver dans l’absence d’un bilan socio-économique positif sur lequel Mr Sassou pourrait se fonder pour justifier sa candidature et dans la carence désormais notoire de sa ribambelle de conseillers en communication à inventer un discours accrocheur, (est- ce parce que le produit est si mauvais que ca ?)

Du latin pax, la paix désigne habituellement un état de calme ou de tranquillité,une absence de perturbation, d’agitation ou de conflit entre groupes humains.Elle est universellement considérée comme un idéal, dans ce sens, la paix entre
les nations et entre les individus est l’objectif de nombreux hommes et organisations. La paix est aussi un état d’esprit personnel, exempt de crainte et de sentiments négatifs. C’est donc à juste titre que la paix est souhaitée pour soi-même et pour les autres, au point de devenir une salutation, (la paix soit sur toi , salam alei kum en arabe, shalom en hébreu) un souhait et un don.

Vue de Mpila, seul Sassou parmi les trois millions des congolais serait en mesure garantir la paix. Quelle mégalomanie me diriez vous lorsque nous savons tous que
la paix se fait à plusieurs. Pour faire simple, la paix ici se traduit par cette équation : voter Sassou = paix. Au fameux théorème sida + drogue = rwanda du prof, Mpila nous propose : voter contre Sassou = Congo 5/6/1997.
La paix apparait ici comme un objet dont Mr Sassou serait le possesseur, aux congolais donc de sacrifier leurs libertés : de penser, de juger, de choisir, de délibérer, de sanctionner et voter Sassou pour avoir la tranquillité des esprits. Quel chantage ? Quel Destin peu enviable pour ce peuple qui ne demande qu’a vivre décemment et dignement ? Thomas Jefferson disait : « Si tu es prêt à sacrifier un peu de liberté pour te sentir en sécurité, tu ne mérites ni l’une ni l’autre ». Les congolais doivent rejeter ce deal de marchands de tapis car Mr Sassou ne nous demande pas seulement de sacrifier nos libertés, mais aussi de ne pas avoir d’opinion, donc de faire le mort selon la célebre phrase du poète Français Jean L’Anselm :« Puisque la mort est la paix éternelle, si tu veux la paix, fais le mort ». telle est malheureusement l’attitude adoptée par nombre de congolais qui s’étonnent d’ailleurs chaque fois que des
congolais de mon acabit osent interpeler le pouvoir en place ici et ailleurs. A ceux là je rétorque ce qu’une grande connaissance de Mr Sassou du nom de Fidel Castro disait dans son message au peuple souffrant de Cuba : « Même les morts
ne peuvent reposer en paix dans un pays opprimé
 ».

En effet Comment demeuré muet face à un tel gâchis ? Comment rester insensible et impassible face à un tel délire ? Dire que rien ne concourt davantage à la paix de l’âme que de n’avoir point d’opinion dans le contexte actuel Congolais serait irresponsable. Là où la modération est une erreur,
l’indifférence est un crime.

La définition que Mpila donne à la paix devrait sucsiter en tous congolais de la révolte car les conditions d’un soulèvement populaire sont réunies. Dans son ouvrage Devise, Thomas Jefferson disait que « se révolter contre la tyrannie,c’est obéir à Dieu », avant lui l’évangéliste Mathieu dans le chapitre 5e de son livre disait :« Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu ! » Combattre pour la paix,nous dit -on, c’est de bonne guerre…la guerre des idées ».

Marchander la paix comme nous le propose Mpila est une démarche périlleuse et rétrograde. Pour qu’il y’ait la paix il faudra que tous les congolais soient intérieurement en paix, ce qui est loin d’être le cas, car la paix rend les peuples plus heureux, et les hommes plus faibles. La paix est inexistante là ou les droits de l’homme sont absents. La paix est l’exaltation des libertés individuelles.

Julien Benda dit dans La Trahison des clercs : « La paix, si jamais elle existe ne reposera pas sur la crainte de la guerre mais sur l’amour de la paix » , or le discours actuel de Mpila est un discours d’intimidation, de mise en garde ;il suffit comme le dit Jean Giraudoux de chanter un chant de paix avec gesticulations et grimaces pour qu’il devienne un chant de guerre. Le discours de Mpila est un discours de guerre car la paix y est vue à travers le trou du fusil.
La paix n’est pas statique et acquise, elle est à gagner, à bâtir, à consolider par les paroles et les actes ; brandir le spectre de la guerre chaque fois que les congolais demandent des comptes sur la gestion du pays est purement et simplement un aveu d’échec qui mérite sanction du peuple.

A l’étroit à Brazzaville due à la prolifération épidémique des associations pro-Sassou, ses rejetons se tournent vers la diaspora pour l‘emberlificoter à travers le forum raté de Paris et autres initiatives de mauvais gout. Cette diaspora
vilipendée, détestée, accusée de tous les maux et complots, mise au ban de la vie socio–politique car privée du droit de vote, joue et jouera un rôle primordial dans le reformatage de l’opinion congolaise dans les jours à venir. Les strateges de Mpila l’ont compris et essaient la museler...en vain !

Terminons par cette sagesse de Ptahhotep « Qu’on ne mette pas la crainte chez l’homme, qu’on lui procure une vie au sein de la paix, et que l’on obtienne qu’il donne volontiers ce qu’on lui prenait en l’effrayant ».

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