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Affaires congolaises

Congo-France : le général Mokoko ou l’enjeu d’une bataille politique entre Macron et Sassou Nguesso !

Les relations politiques entre le Congo et la France ne semblent pas être au beau fixe ! Les symptômes de la fièvre qui monte le mercure au plus haut niveau du thermomètre, au risque de le faire éclater, sont entre autres le fait que Paris a refusé, à la dernière minute, de recevoir le ministre congolais des Affaires étrangères, Jean Claude Gakosso.

Il était porteur d’une invitation officielle de Denis Sassou Nguesso au Président français, Emmanuel Macron, pour assister aux cérémonies marquant le 80e anniversaire du manifeste de Brazzaville par le général De Gaulle que le pouvoir de Brazzaville veut célébrer, cette année, avec faste, en octobre prochain.

Malgré la relance du projet du voyage du ministre Gakosso qui a été faite le mardi 15 septembre 2020, le Quai d’Orsay a encore dit « niet ».

Mais, il y a aussi la société Total E&P Congo, très influente dans les relations politiques entre la France et le Congo, qui a refusé de payer, par anticipation, à Sassou Nguesso ( le propriétaire des champs pétroliers du Congo puisque c’est lui qui, personnellement, confie aux métayers : sociétés internationales, personnalités d’institutions internationales qu’il corrompt, et membres de la famille ou du clan), une somme de 600 milliards de Francs Cfa pour organiser les élections et payer les salaires, les bourses des étudiants ainsi que les pensions des retraités avant 2021, date des prochaines élections présidentielles.

Pourtant, l’exploitation de la plate forme de Djeno arrive à échéance en octobre 2020. En plus, Total E&P Congo a déjà déménagé et installé une partie de ses bureaux à Luanda, en Angola. Elle a aussi tracté une partie de sa plate-forme à Libreville, au Gabon.

Entre la France et le Congo, un vrai divorce ou un simple chantage avant de resserrer l’alliance matrimoniale ?

Stratégie politique du pouvoir de Brazzaville

Brazzaville a été la dixième capitale de la France, après Lyon (27 av. J.-C. à 297), Tournai, ville belge, (431 à 508), Soissons (486 à 508), Paris, pour la première fois, (de 508 et jusqu’en 768), Troyes (1417 à 1422), Tours (1588 à 1594), Versailles (1682 à 1715), Bordeaux (septembre 1914, et après de nombreux changements de capitale entre Paris et Versailles), Vichy (1940 à 1944) et Brazzaville, pendant l’occupation de la France par les Allemands. Tout ça avant que Paris ne reprenne sa fonction politique et administrative.

Le général Charles De Gaulle y a séjourné et lancé, le 27 Octobre 1940, ce que l’on appelle Le Manifeste de Brazzaville qui avait annoncé la création d’un Conseil de Défense de l’Empire qui était composé du général Catroux, de l’amiral Muselier, du général Larminat, des gouverneurs Eboué et Sautot, du colonel Leclerc, du médecin général Sicé, du professeur Cassin et du révérend-père Georges Thierry d’Argenlieu. La France était menacée de destruction.

Néanmoins, à travers la commémoration de cette date que Denis Sassou Nguesso veut célébrer à l’image de l’Appel de Londres fait par De Gaulle, alors que la France était occupée par les Allemands, il y a une stratégie politique du pouvoir de Brazzaville.

Denis Sassou Nguesso veut, en effet, dépoussiérer cette page d’histoire pour refaire de Brazzaville, même pendant quelques jours, la capitale de la France même si toutes les institutions de la république française n’y seront pas installées.

Néanmoins, à travers ces festivités et la présence à Brazzaville du président Macron, le pouvoir impopulaire de Brazzaville veut redorer son image ternie par les crimes de sang, de démocratie et économiques, ainsi que la mauvaise gouvernance, et marquer l’actualité politique internationale pendant quelques jours.

Aussi, veut-il profiter de la présence d’Emmanuel Macron à Brazzaville pour tromper les Congolais, prétendre avoir l’autorisation ou le soutien de la France, afin de légitimer la candidature de Denis Sassou Nguesso à la prochaine élection présidentielle de 2021, et valider, en avance, son hold up électoral.

Malheureusement pour lui, la France ne veut pas, cette fois-ci, lui tendre la perche.

Emmanuel Macron n’est pas Jacques Chirac !

La France l’a signifié au ministre Jean-Claude Gakosso à travers son ministre des Affaires étrangères.

En effet, ce dernier a demandé à son homologue congolais de rentrer chez lui, alors qu’il s’était déjà confortablement installé dans le jet privé que le gouvernement congolais avait affrété pour le conduire en France.

Ce sont les services du protocole français qui lui ont, tout simplement et très gentiment, prié de ne pas quitter Brazzaville pour Paris. Pour cause, le ministre français des affaires étrangères, Jean- Yves Le Drian, n’étant pas disposé à le recevoir.

Pourtant, le triste épisode du ministre Jean Claude Gakosso qui a eu lieu, le jeudi 10 septembre dernier, à l’aéroport international Maya Maya, n’est qu’une partie d’un long métrage dont Emmanuel Macron et Denis Sassou Nguesso sont les principaux acteurs. Il a commencé avec la demande des “actes” de Denis Sassou Nguesso envers l’opposant Jean-Marie Michel Mokoko, condamné 20 ans de prison.

Paris reproche à Brazzaville sa défiance pour n’avoir pas observé les instructions de la mère-patrie, notamment la libération de Jean-Marie Michel Mokoko, et celle d’André Okombi Salissa.

Stratégie politique pour la France : récupérer Mokoko !

La France veut récupérer le général Jean-Marie Michel Mokoko, alors qu’elle ne l’avait pas soutenu lors des dernières élections présidentielles.

Son ambassadeur est même allé voir Mokoko pour lui sommer de reconnaître la réélection frauduleuse de Sassou Nguesso.

Mais, pourquoi ce revirement, aujourd’hui ? Y aurait-il, cette fois-ci, un deal entre Mokoko et la France, par l’intermédiaire des lobbies ?

Nous avons appris qu’un institut français de sondage a travaillé discrètement à Brazzaville et s’est rendu compte de la popularité inébranlable et de l’élection de Jean-Marie Michel Mokoko en 2021.

Et, ce serait donc pour court-circuiter la France, dans son plan de vouloir récupérer Mokoko, que le pouvoir de Brazzaville qui a été au courant des résultats de cette enquête a voulu faire de Mokoko un malade du Covid 19, afin de l’éliminer par empoisonnement dans un hôpital congolais.

Même son évacuation sanitaire en Turquie a été obtenue sous la pression de la France, avec elle toute la communauté internationale, qui voulait se rassurer de la santé de Moukoko, avant sa libération bien que l’homme avait un accès palustre qui pouvait être traité à Brazzaville. Et, son retour à Brazzaville et en prison a été une demande de la France et la communauté internationale auprès du général Mokoko pour emmerder Sassou Nguesso.

Pourquoi Jean-Marie Michel Mokoko ?

L’homme est soutenu devant la France et la communauté internationale par des officiers généraux et subalternes des Forces armées congolaises qui sont, certains à Brazzaville, d’autres en exil à l’étranger, et qui ont constitué un lobbying.

Les raisons de leur choix et soutien à Mokoko sont entre autres celle-ci : on pense que devant la militarisation de la partie septentrionale du Congo par Denis Sassou Nguesso, seul le général Jean-Marie Michel Mokoko est capable de faire renaître la confiance et rassurer les Congolais.

Mokoko est reconnu, dans l’armée, comme étant un bon officier, et il a été massivement élu dans la partie australe du pays, notamment à Pointe Noire où la France a des grands intérêts.

Les officiers militaires congolais se servent donc de ces deux grands atouts que présente le général Jean-Marie Michel Mokoko pour proposer en quelque sorte une transition au cours de laquelle il faudra démilitariser toute la partie septentrionale du Congo et éviter une guerre civile, faire sortir du pays tous les mercenaires étrangers, éviter la vengeance des populations du sud sur celles du nord. Autant de missions qu’un président civil ne pourra pas facilement effectuer.

Aussi, craignent-on que Sassou et son clan qui ne veulent pas aller en exil à l’étranger, pour ne pas être traînés devant les juridictions étrangères, rendent le pays ingouvernable, au cas ou le pouvoir sera dans les mains d’un civil qui n’a pas de soutien dans l’armée.

D’où la nomination précipitée du colonel Edgard Nguesso au poste de Conseiller spécial qui, selon le clan au pouvoir, est un officier républicain, qui, lui aussi, est aimé par les troupes. Mais, il y a aussi le projet de faire voter les militaires dans les casernes, avant les civils, qui permettra à Sassou Nguesso de prendre, lui-même, la température des Forces armées congolaises afin de détecter les traîtres. Le couvre-feu s’inscrit dans la peur de ce lobby militaire.

Conséquences de ce plan

La principale conséquence de ce plan est que le Congo sera encore redevable à la France.

Le général Jean-Marie Michel Mokoko risquera de ne plus être un grand nationaliste. Car, il devra son pouvoir à la France qui lui rappellera cette redevance chaque fois qu’il voudra se passer d’elle.

Pourtant, il y a une issue : organiser une Conférence nationale souveraine qui devra élaborer un Projet de Société pour le nouveau Congo, et préparer la tenue d’une Conférence internationale sur le Congo. Le contenu du Projet de Société est défini dans notre livre «  Jean-Marie Michel Mokoko, mon Président ». Mais, nous pouvons citer la définition du partenariat du Congo avec la France, et la politique sur les contrats avec les multinationales. En bref, le Président Mokoko devra redonner le pouvoir au Souverain primaire, et à toutes les institutions qui représentent les Congolais. Lui, il ne devra être qu’un fonctionnaire de l’Etat congolais et un locataire du Palais des Plateaux. Pas le premier magistrat, la justice étant séparée de l’Exécutif.

Serge Armand Zanzala,
journaliste et écrivain

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