Il est sans doute trop tôt de faire l'histoire objective du Congo moderne sans buter sur les partis pris, tant est-il que les bénéficiaires et les victimes se côtoient encore. Je le sais. Mais je ne peux m'empêcher de m'inquiéter de la surenchère sur le personnage de Marien N'Gouabi que beaucoup essaient de nous vendre.
En 1972, le fils unique de maman Mboualé alors président de la république, autoproclamé bien sûr, fait une visite dans la Chine de Mao d'où (comme Mobutu, Sékou Touré, Eyadema et la plupart de ses congénères la même année) il reviendra avec la manuel du parfait dictateur. Et en chapitre premier figure le culte de la personnalité. Avec l'aide de certains collaborateurs fraichement rentrés de Moscou et pour qui la propagande n'avait plus de secret, le natif d'Ombélé va enclencher une redoutable machine de louanges, masquant un régime aux aboies: tribalisation (c'est l'arrivée des Ebaka, Ondoko, Okongo, Mouambenga, Tsomambé, Ibata, Yhombi, Okabé... tous Koyo/Makoua agrémentés de quelques mbochis, aux firmaments de la république) élevant l'incompétence et le népotisme comme rigueur morale, le crime comme constitution, le discours fleuves à la place de l'évaluation des politiques publiques.
Ce qui est encore plus terrible dans l'affaire, c'est que des gamins de l'époque ayant bu jusqu'à la lie cette propagande à deux balles, n'ont jamais réussi à s'en dessoûler, malgré la maturité qu'ils ont acquis par l'âge et l'école (problème de l'école de Marien aussi, qui forme des diplômés sans intelligence). Ce sont encore des bouteilles de jus offerts à la victoire des diables rouges à la CAN, des récits d'un homme discutant avec des paysannes ou raccompagnant des malafoutiers dans sa propre voiture qui font un bilan politique de 9 ans, ou encore un président qui va assister à des cours de physiques donnés par un cousin comme preuve de son intelligence de gestion du pays, et non, comme il se doit, un regard analytique sur les finances publiques, l'éducation, la santé, la cohésion nationale etc... Et sur ce plan, le bilan de Marien Ngouabi est horriblement catastrophique.
Finalement évincé du pouvoir par un moyen que lui même avait inventé, il laissera un pays plus que jamais appauvri, divisé, aux mains d'une classe d'incapables qu'il s'était attelé à mettre en place. Mais surtout une philosophie politique qui consiste en des arrestations arbitraires, la police politique (sécurité d'Etat) en place de justice, et l'exposition des opposants dans des stades avant ou après leurs assassinats. Exactement ce dont se plaignent les membres du club "Marien Ngouabi et éthique". Il faut savoir ce que l'on veut. Quand on se dit stalinien, on est pour les goulags, quand on se veut hitlérien on est pour la suprématie de la race blanche. Quand on se veut ngouabiste, il faut accepter d'être enlevé chez soi vers la sécurité d'Etat pour une suite non maîtrisée si non que par les maîtres du pays dont la volontés et les caprices deviennent lois. Mais on ne peut pas se dire démocrate et adepte de l'Etat de droit, en ayant pour repère un Ngouabi qui n'en a jamais eu la moindre considération. Car en effet, Marien Ngouabi et éthique, ça fait deux!