Le livre collectif

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Message par Invité » Ven 15 Mars, 02 2:12

Michel Diakouansamou fut introduit dans la case de Serign El Hadj Gaïndé. L'air apeuré, il jeta un coup d'oeil rapide et cracha par terre, sur le sable qui ne faisait pas de différence entre l'intérieur de la case et la cour du village. « Ils appellent ça case, Mam'amunu hé ! »

- « Waou, Moussé, Sé vihin ! » cria une voix de l'intérieur de la case .
« Waou, c'est qu'est c' cé ? ». Une jeune femme aux seins nus se tenait devant Diakouansamou et le regardait droit dans les yeux !

Diakouansamou ne comprit pas ce qui se passait.
- « Moussé, Moussé, cé moi Mame, waou, Mame cé moi ! Toi appelé moi !»
- Oh ! Non, je parlais tout seul ! J'ai dit « mam'amunu hé » c'est-à-dire « Ah ma mère! », mais ce n'est pas toi que j'appelais ! » fit Michel, visiblement agacé.
- « Waou ! moi cé Mame ! Mame Kodou ! Cé Fatou mon mère ! »

Mame Kodou se tenait devant Diankouansamou les mains sur les hanches. Elle défiait du regard l'étranger au regard hautain et dédaigneux. Ses yeux parlaient le langage de l'insolence et Diankouansamou parvenait à y lire comme dans un livre ouvert. Le temps s'était arrêté là, au -dessus de la tête embrouillée de Diankouansamou. Il n'osait déplacer son regard. Il était comme hypnotisé par l'insolence de cette jeune personne qui lui rappelait Fatou. Fatou aurait-elle eu un enfant ?

- « Que veux-tu ? » finit-il par dire
- « A rien ! Toi vihin serser quoi ici ? »
- « Rien »
- « Wa yo ! menteur ! ». Elle s'éloigna en balançant ses hanches comme pour lui signifier qu'il n'était pas le bienvenu dans ce village de Mbénguène.
Invité
 

Message par Benda Bika » Ven 15 Mars, 02 6:00

Or donc, le chef piaffait littéralement! Dans la chambre torve de cet hôtel de Bamako où l'avait laissé Michel Diakouasamou, il rongeait son frein. Le cercle des inconditionnels s'était restreint. Quelques uns avaient décidé de rentrer au pays, subrepticement. Ils y étaient arrivés de nuit, mélangés à la cohorte des marchands revenant de Kinshasa. Ils avaient atteint Brazzaville dans l'humiliation de l'anonymat, sursautant à chaque fois que quelqu'un ou quelque chose les frolait. Ils avaient peur d'être reconnus et d'être arrêtés.
Le chef était convaincu que Michel avait fini par se lasser lui aussi et qu'il était retourné auprès de son épouse, de qui il avait eu huit enfants!
La radio qu'il avait toujours branchée sur les chaînes internationales annonçait, un à un, les retours et les ralliements; les retournements d'alliance; les trahisons et les coups de gueule de ceux qui ne trouvaient plus aucun sens à cette situation de résistance qui n'en était plus. L'exil avait été diversement vécu par ceux qui, il y a quelques temps encore, étaient les tout-puissants du Congo.
Le chef se lissait la barbe, entrait dans des phases de prostration. Mais cette fois-ci, son majordome d'infirmier n'était plus là pour les gestes qui apaisent.
C'est dans cette phase de grande déprime qu'il reçut ce coup de fil, bizarre au départ:
- Allô miché?
- Oui? Qui êtes-vous et que me voulez-vous? Je le suis le Président ..."
- Non, pas lé préjident miché. Y en a quelqu'un ichi qui dit lui parlé vous.
Le chef crut avoir à faire à un importun et s'apprêtait à l'envoyer paître quand la voix de Michel se matérialisa dans le combiné, posément:
- Allô, chef? C'est Michel
-.............................................. !
- Chef, vous êtes là?
- Heu.. oui; enfin... heu... mais où es-tu? Tu as rejoint le camp des traîtres, c'est cela hein? Tu te fais engraisser par l'ennemi ?
- Mais non Chef; je suis au Sénégal. Je consulte au Sénégal. Et c'est d'ailleurs pour cela que je vous appelle: pouvez-vous venir ici? C'est arrangé. Votre billet et votre séjour sont assurés. A l'aéroport vous serez priz en charge par un certain Rochan, dit Ashanti. Je pense que vous devriez venir par vous-même voir et entendre ceux d'ici, qu'en dites-vous chef?

Le chef prit de l'inspiration et se plongea dans une longue méditation pendant que la communication internationale scandait les unités de consommation.

Benda Bika
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Message par Nyelenga » Sam 11 Mai, 02 4:03

Michel Diankouansamou sirotait le thé maure, appelé ici thé sénégalais en compagnie de ses nouveaux copains sénégalais, quand un gamin morveux aux pieds nus le tira par le pan du boubou que le marabout lui avait offert: " Tui ferais mieux de venir à la cabine téléphonique, je crois que Dieu t'attend; Il n'est pas pressé!".

Une sueur froide perla sur le front de Diank ( c'est ainsi qu'on l'appelait désormais, depuis qu'il était arrivé dans ce village en pensant à Fatou)! Il se souvint du film " Out of Africa" qu'il avait vu il y a quelques années et surtout du passage ou le boy, pour annoncer la catastrophe a sa patronne, l'avait tirée du lit en disant: " Maaame, tu ferais mieux de te lever, je crois que Dieu arrive"

Diank se leva et courut vers la cabine téléphonique en récitant les versets du Coran que le Marabout lui avait appris et en remerciant et maudissant l'inventeur du téléphone portable.

" Allo, Michel? Il faut absolument que tu viennes par le premier avion et meme à pied s'il le faut. Nos deux fils viennent d'etre enlevés par des agents en tenue militaire. On les accuse d'etre des Ninjas!" C'était la voix de sa femme à l'autre bout du fil: Diank fit un "han, quoi?" et s'évanouit.

Nyelenga
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Message par Nyelenga » Mar 01 Oct, 02 11:45

Posté le: 29 May 2002 20:18 Sujet du message: La fille de Missolobélé

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Quand Michel Diakouansamou revint à lui. Il était entouré de tous les habitants de Mbénguène. Des « ndeysaane » fusaient de toutes les bouches de ces visages qui le regardaient avec empathie. Il se sentit fils de ce village, fils de Mbéguène. La souffrance unit ; elle ne connaît pas de frontières ; elle se partage parfois mieux qu'un plat de riz au poisson (tchiébou jen) ou de feuille de manioc (saka-saka)! Là-bas, dans son village, les mêmes bouches humaines des mêmes visages humains auraient dit «Mawa hé ! ». Dans un autre village, on aurait dit « Yakô !» , dans un autre « mâasâ » et dans un autre encore on se serait exclamé en appelant Dieu au secours « Ayô mba na Loba hé ! »

Michel Diankouansamou croyait en la solidarité humaine comme il savait les humains capables d'inhumanité, des pires atrocités. Il pensa à ses deux fils : deux larmes perlèrent de part et d'autre de ses joues. Il ferma les yeux...

Tout à coup, un âne se mit à braire. Les têtes de toutes ces personnes venues partagées la douleur de Michel Diankouansamou se tournèrent du côté d'où venaient les braiements de l'âne. Un tourbillon de poussière s'approchait du village. Les visages étonnés se durcirent un instant. On cligna des yeux ! Un cavalier ? D'où pouvait venir un cavalier ? Depuis l'époque des Buur, on avait plus vu de vrais cavaliers par ici !

Le tourbillon de poussière s'approchait et on y distinguait de plus en plus, non pas la forme d'un cavalier mais celle d'une cavalière assise sur son cheval à la manière des femmes, c'est-à-dire pas à califourchon. Le cheval avait une robe couleur peau noire d'Afrique : une femme chevauchant l'étalon du Yennenga !

Elle freina net à côté de Michel Diankouansamou ; d'un bond, descendit de sa monture, remonta son pagne sur la tête pour se couvrir et salua :

-« As salam aleikum !
- Aleikum salam !
- Avez-vous la paix ?
- Par la grâce de Dieu !
- Comment va ce village ?
- Bien, Dieu merci !
- Et la saison, a-t-elle été bonne ?
- Pa la grâce de Dieu !
- Et le bétail, s'est-il enrichi de quelques têtes ?
- Nous en remercions Dieu !
- Et les enfants du village, j'espère qu'ils se portent tous bien !
- Dieu veille sur ses bouts de bois !
- Le village n'a pas souffert de la famine ?
- Dieu veille, merci ! »

Un homme se détache de la foule, c'était le porte-parole du marabout :
- « Ma soeur, quel est ton nom ?
- Misssowaogo !
- As-tu la paix Missowaogo ?
- La paix seulement ?
- D'où viens-tu avec cette fatigue ?
- Je remercie Dieu, je viens du Nabadougou !
- Là-bas à Nabadougou, nos frères ont-ils la paix !
- Ils remercient Dieu !
- Tu peux me suivre, le marabout va te recevoir ! »

Un gamin de 12 ans s'empara du cheval à la robe de peau africaine et alla l'attacher au pied du caïlcédrat du village.

Missowaogo suivit le porte-parole du marabout dans la case de ce dernier. Tout le village se demandait qu'était venue faire cette femme à cheval. Ici, on ne dit pas « étranger ou étrangère », on dit « invité ou hôte » !

Quand Missowaogo sortit de la case du marabout, ses yeux crachaient la fumée et son pagne exhalait un parfum de tchouraï (encens) jusque là jamais senti dans Mbèguène. Elle s'accroupit aux côtés de Michel Diankouansamou, le prit par le bras et dit : « On y va ! Mon père Missolobélé t'attend ! »

Nyelenga

Dernière édition par Nyelenga le 30 May 2002 15:34, édité 1 fois



Posté le: 30 May 2002 09:04 Sujet du message:

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Il ne fit pas un pas. L'enfant dut reprendre sa requête par deux fois, pour s'assurer que Dikansamou avait bien entendu. Celui-ci avait le regard vide, tourné vers un lointain qu'il ne voyait pas. Quelques gouttes de sueur perlaient surson front plat. Il se ressaisit, s'ébroua et adressa un sourire tendre à l'enfant :
- Dis à ton père, fit-il, que je mets mes affaires en ordre ; je le rejoindrai avant le coucher du soleil. Aujourd'hui même il entendra parler de moi.
L'étrange délégation s'évanouit dans le néant. De leur passage, pas même la trace des sabots du cheval, ni les déjections de l'âne. La contrée était baignée d'une lumière qu'on dirait posée à dessein. Le violet de l'infini contrastait avec le jaune or du désert commençant. Pas même un oiseau ne chantait pourtant. Il comprit le signe et se mit en situation.
________________

Le verre était là, à côté de son lit, maculé du rouge à lèvre de Parfaite Himbou, sa femme. Il l'avait gardé comme une relique, un signe de présence d'un être au loin, à côté de ses levers et couchers quotidiens. Le verre était là, posé sur une Bible à reliure noire.

La première tentative ne donna rien. Car remplissant son verre d'alcool fort à ras-bord, il farfouilla dans son armoire et en retira six cachets d'un quelconque produit. Il se recoucha donc et attendit : « je vais planer », dit-il. Or il n'en fut rien. Jusqu'à l'aube suivante, ses yeux étaient toujours grands ouverts et commençaient à le piquer.

Lui revinrent alors en mémoire les événements de la veille et la promesse faite à l'enfant. Il se leva, tituba, vit le monde tournoyer, puis s'abattit sur le sol, un sourire aux lèvres. Heureux, enfin.

Benda Bika


Posté le: 31 May 2002 12:46 Sujet du message:

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Etait-il vraiment heureux ? Il le crut au moment où il tituba. Missowaogo le regarda : elle était partagée entre le dégoût et la pitié. Son père lui avait toujours appris qu'un homme ça ne craquait pas, c'était solide ! Son père lui avait parlé de Diakouansamou comme d'un dur : elle découvrait un être faible ! Non, elle ne fera pas la route avec lui ! Elle ira seule, dans le Pays qui tue !

Elle le fixa là par terre, à l'endroit où il s'était écroulé. Elle ressentit de la tristesse et une grande lassitude. Pourquoi ? Pourquoi de telles choses n'arrivaient-elles qu'à elle ? Pourquoi Diakouansamou qui, selon les dires de son père, avait traversé tant de contrées à la recherche de solutions qu'il a toujours trouvées, pourquoi Diakouansamou qui avait bravé toutes les milices du Pays qui tue a-t-il attendu qu'elle vienne le chercher pour se donner la mort ? Pourquoi a-t-il choisi cet instant ? Pourquoi ne s'est-il pas tué tout de suite après avoir parlé au téléphone avec sa femme ? Quelle responsabilité voulait-il lui faire porter à elle Missowaogo, la fille unique de son père ? Pourquoi a-t-il attendu qu'elle arrive pour tenter de se donner la mort ?

Toutes ces questions tourbillonnaient dans sa tête ! Elle regarda encore Michel Diakouansamou étalé par terre, et elle eut envie de hurler. Hurler sa colère, sa révolte à la face de ce monde injuste où les plus forts tuent les plus faibles et où les plus faibles usent de cynisme pour faire porter aux innocents le poids des responsabilités dont ils ne sont pas coupables. Elle voulut cracher par terre comme on crache de dégoût, mais elle n'avait plus de salive. Elle avait souffert depuis le décès de sa mère qu'elle n'avait pas connue : cette mère qui s'en est allée en lui donnant la vie, parce que des armes en armes les pourchassaient alors que le travail avait déjà commencé. Elle avait été élevée par son père qui n'avait plus eu la force de ne rien faire d'autre si ce n'est de l'élever.

Dans l'état où il se trouvait, elle ne pouvait transporter cet homme sur son cheval. Elle décida donc de passer la nuit là par terre, à côté de lui, à surveiller chaque mouvement de son corps, chaque inspiration et chaque expiration. Pourvu qu'il ne s'en aille pas comme ça !

Elle se souvint de la mort de son cousin : celui qui avait été initié en même temps qu'elle et qui était devenu par la puissance de l'initiation, son frère jumeau ! Elle leva la tête vers le ciel et se demanda s'il était là parmi les étoiles, s'il pouvait lire la détresse de son âme, l'échec de sa vie qui s'annonçait. Comment allait-elle se présenter devant son père et lui dire qu'elle avait échoué dans cette première mission et que Michel Diakouansamou qui avait supporté toute une vie d'errance, de frustrations, de traumatismes, de privations, d'injustices, de tortures morales et psychologiques, comment et pourquoi avait-il décidé aujourd'hui et maintenant de se donner la mort, alors qu'elle venait pour lui apporter secours ?

Il n'y eut qu'une réponse à ses interrogations : Michel Diakouansamou était un être foncièrement égoïste qui n'aimait personne, qui n'aimait que lui -même et s'il s'était évanoui à l'annonce de l'enlèvement de ces deux fils, c'était encore par amour pour lui-même et non pas chagrin pour ses fils. Michel Diakouansamou ne pouvait aimer que lui-même : pas une autre personne !

Nyelenga





Posté le: 05 Jun 2002 12:14 Sujet du message:

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Missowaogo se tint debout devant son père Missolobélé ! Ils se regardèrent. Une puissante énergie passa du père à la fille et de la fille au père. Missolobélé baissa les yeux. Il comprit que le moment était venu ! Il ne pourrait pas échapper à son destin ni sa fille au sien. Il fit une dernière tentative d’invocation, la tentative de l’homme désespéré qui veut arrêter le temps ou changer le cours de l’histoire !
-« Esprits de mes pères, je vous en conjure, ce n’est qu’une fille ! Vous m’aviez promis des fils et je n’ai qu’une fille, c’est la seule garantie pour mes vieux jours ! »

C’est alors qu’il aperçut la lame qui avait servi, il y a des années, à faire de lui un homme ! Le cheval s’ébroua quelques secondes et se calma. Missolobélé comprit le message de l’étalon du Yennenga. Mais il n’entendait pas abandonner si facilement. Il s’adressa à sa fille :

-« Tu n’es qu’une petite fille ! Le pays où l’on t’envoie est un pays qui tue ses propres enfants et tu n’es qu’une moitié d’enfant de ce Pays… »

- « Père, l’interrompit Missowaogo, ma mère fut une Ouédraogo, ne l’oublie pas ! Et chez les Ouédraogo nous sommes liés à jamais avec la volonté de nos morts. Moi je n’étais pas là quand je venais au monde et que ma mère en est morte. Mais toi comme tout le monde m’avez dit que ma mère n’avait qu’une douleur : celle de ne pas avoir connu cette femme qui t’a donné la vie : ma grand-mère, restée là-bas au Pays qui tue ! Et l’oiseau, Père, ton oiseau –compagnon nous avait bien prévenus : mon chemin ne sera pas facile ! Mais j’irai quan même là-bas, retrouver ta mère ! N’ayant pas connu ma mère, je veux au moins connaître ma grand-mère ; ta mère à toi. J’ai attendu trop longtemps et il ne faut pas qu’elle soit tuée avant que je l’aie vue ! »

- « Ils vont te violer, comme ils violent toutes les femmes là-bas ! » fit Missolobélé.

- « Si ce n’est que pour ça, ne t’en fais pas, Père ! J’ai une arme plus redoutable que leurs membranes ! Il faut que j’y aille ! Donne-moi ta bénédiction !»

Missolobélé prit la tête de sa fille entre les deux mains et cracha dessus en chantonnant :

- « Na ho tsétsa mutéko nzari, ntéla mama ka bandzakani kiari… ! » (toi qui descends le long du fleuve, dis à ma mère de ne pas s’en faire)

Au loin, le cri d’un oiseau reprit le chant pourtant entonné à voix à peine audible par Missolobélé :

-« Kâ ma pâpâ mani mpo ni lundila mwana, boutsana … ! » (et mes sandales, je les conserverai pour mon enfant, quelle tristesse !)

Sur ce, l’étalon du Yennenga, le cheval des merveilles lança :

-« Oli dza mbia ili o nzoro hé , w’ébaga, otsaga l’otéma ! A hiru a mbaga a nzaga éwa yo menga a ngongo a yaga éwa yo ! » ( calmement assis, tu ne sais pas qu’une affaire est en toi, homme, il faut avoir du cœur ! Les femmes d’autrefois ne sont-elles pas mortes pour des causses nobles afin que celles d’aujourd’hui n’aient plus à craindre la mort ?)

Missolobélé comprit définitivement que nul n’échappe à son destin : sa fille non plus n’échappera pas au sien. Il se leva, tourna les pas et disparut dans sa case à Nabadougou pour ne pas assister à la scène du départ de Missowaogo. Il n’y aura personne pour la supplier de rester : elle n’était pas le Moronaba !

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Nyelenga



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Posté le: 14 Jun 2002 11:56 Sujet du message:

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Missowaogo éperonna l’étalon du Yennenga qui s’ébroua, poussa un puissant hennissement et s’élança vers la sortie Est de Nabadougou. Les habitants de Nabadogou sortirent en courant de leurs cases et regardèrent, les mains sur les mentons soutenant leurs têtes, la fille de leur défunte cousine, tante, amie, voisine, sœur …s’en aller vers son destin. Un destin que tous savaient semé d’embûches, mais que nul ne pouvait dire à haute voix de quoi il était ou serait fait.

Quand l’étalon du Yennenga fut hors de la vue des habitants ou de quelques passants, Missowaogo frotta de ses talons, les flans de la bête. Deux ailes poussèrent aussi simultanément que spontanément et, le cheval se souleva de terre, tel un avion qui se soulève du tarmac d’un aéroport. La fille de Missolobélé et de Ouédraogo, planait à présent dans les airs, au milieu des nuages. Elle se dit qu’il lui fallait passer par Dori avant de rejoindre le Niger, et de là, elle descendrait vers le Nigéria, puis piquerait sur le Cameroun avant d’atteindre le Pays qui tue. Elle venait de tracer ainsi l’itinéraire qu’elle jugeait le plus rapide.

Quand elle eut à peine fini de fixer son trajet dans son esprit, elle baissa les yeux et aperçut les minarets d’une mosquée qui ressemblait à s’y tromper à la célèbre mosquée de Djenné. Le doute lui traversa l’esprit pendant une seconde : elle ne pouvait pas être au Mali, le Mali n’était pas sur la route qu’elle s’était tracée. Elle effleura de son talon le flan gauche du cheval, qui, fit disparaître ses ailes et se posa devant la mosquée de terre battue. Elle descendit de son cheval, ajusta les pans de sa robe de manière à ce qu’ils cachent le pantalon qu’elle portait en dessous, ramena son écharpe sur la tête de telle sorte qu’elle soit suffisamment couverte pour entrer dans l’enceinte de la mosquée. La mosquée sur la route de Dori ressemblait à celle de Djenné, mais elle n’était pas celle de Djenné.

Le gardien de la mosquée, la voyant se diriger vers la porte d’entrée, s’avança vers elle et lui adressa un « Assalam Aleikoum » qui n’avait rien d’un salut de bienvenue, encore moins d’une salutation de paix. Elle répondit « Maleikoum Salam » en le fixant droit dans les yeux, ce qui fit courir un frisson de terreur le long de la colonne vertébrale du gardien de la mosquée.

- « Je veux prier » fit-elle
- « Mais tu ne peux pas entrer dans la mosquée ! Tu n’es pas assez vieille », la voix de l’homme tremblait.
- « Non ! ! ! Toi non plus tu ne vas pas t’y mettre ! Je ne suis pas assez vieille, je ne suis pas assez vieille ! Toujours la même chanson, dans toutes les mosquées ! Je ne vais tout de même pas attendre la vieillesse pour commencer à prier mon Dieu ? » . Elle était exaspérée, agacée et, cela se voyait !
- « C’est la tradition ! Tu ne peux pas entrer dans une mosquée tant que tu n’es pas ménopausée ! » ; l’homme transpirait maintenant à grosses gouttes, il commençait à réaliser qu’il avait à faire à un être peu ordinaire !

Comme si elle n’avait pas entendu ce que venait de lui dire l’homme, Missowaogo, s’agenouilla, posa son front contre terre et chanta :

« Ku benga njé Mfumu Nzambi, Ngué ni ta bingula ah ah ! Ah Mfumu Nzambi wirikila ndi nsakila miani ! » (Du fond de ma détresse, Seigneur, je t'appelle! ö Dieu tout-puissant entend ma prière!)

Aussitôt, le gardien de mosquée, terrorisé par la puissance de cette voix pourtant fine, une voix de femme certes, mais une voix qui sortait des profondeurs de la terre, saisit la fille de Missolobélé par le pan de sa robe et dit :
-« Elle est à toi la mosquée, tu peux y entrer ! Va et prie ton Dieu ! »

Nyelenga





Posté le: 27 Jun 2002 22:26 Sujet du message:

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Missowaogo s'agenouilla et sortit de la poche de son pantalon une pierre, la pierre qui, dans certaines circonstances remplace l'eau des ablutions. Elle fit les gestes reglémentaires des ablutions et se sentit, du même coup propre, pure.

Elle s'inclina pour le premier rakka, et voulut murmurer "Allahou Akbar". De sa gorge, sortit un seul mot : "Wend!" Et elle fit: "Oh Wend, Oh Dieu, aie pitié, pardonne à mes pères, à mes mères et à moi-même"

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Arcade Kani-Jefferson
Posté le: 28 Jun 2002 14:49 Sujet du message:

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Les astres et les planetes ne se rencontreront jamais, ni les montagnes non plus.
Missowaogo commence a voir claire sur toutes les situations qu'il a vecu.
Tout tourne autour de Missowaogo. Tout ceci se passe pendant la nuit quand Missowaogo se trouve en plein milieu de la cours du village et ses yeux regardent le ciel, il jette ce cri de desespoir:
-Ce n'est pas possible, ce n'est pas vrai sur tout ce tralala qui vient de m'ouvrir les yeux...Oh mon Dieu, puisque le mal est deja fait, comment devrais-je faire pour regler tous ces mensonges et honteux problemes qui n'ont ni tete ni queue? Il se rappelle subitement du mot innocence et se dit: que ceux qui payent les pots casses sont souvent les boucs-emissaires qui sont des personnes interposees. Maintenant il a compris.
Missowaogo venait de voir clair sur toutes les situations qu'ont vecu tout le monde dans le village.
Les astres et les planetes ne se rencontreront jamais certes, oui seulement les humains, les hommes ont le pouvoir de se rencontrer, se parler, se cotoyer afin de trouver les vrais solutions a tous leurs problemes passes et presents. Voila la raison pour laquelle la famille existe et le cercle d'amis existe aussi. Mais tard dans la nuit, un bruit se fait entendre au loin
c'est un hibou qui etait perche sur le toi de la maison du fils de Missolobele. Ce hibou ne venait pas-la d'habitude. que c'est etrange d'entendre un hibou chanter aux premieres heures de la matinee. Non! il ya quelque chose qui ne va pas. La presence de l'hibou, est surement pour annoncer un malheur. Oui, d'apres une legende africaine, la presence d'un hibou est signe de malhuer. Le malheur qui doit surement s'abattre dans la famille mais pas d'une facon iminente. On dire de lui qu'il est un sorcier. Enfant j'ai entendu les gens dire qu'il n'ya pas de difference avec un hibou et un sorcier. Mais notre cher hibou etait probablement venu annoncer des malheurs qui devaient s'abbatre dans la famille...{Je...je ...je reviens demain pour la suite} (A suivre).[/u]




Nyelenga




Posté le: 03 Jul 2002 14:20 Sujet du message:

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Missowaogo se redressa sans trop savoir si elle avait fini ses deux rakkas surérogatoires. Elle se demandait si sa prière était valable puisque le nom d’Allah n’était pas sorti de sa bouche et qu’à la place, elle avait prononcé « Wend », le nom de Dieu en Moré ! Elle secoua la tête et s’approcha du gardien de la mosquée :

- « Dis-moi, homme, le Dieu des musulmans, est le même du celui des Mossi n’est-ce pas ? »

- « Astafourlahi ! » fit le vieux gardien. « Femme, continue ta route, et que Dieu soit ton ombre : qu’Il soit Celui des musulmans ou Celui des Mossi ! »

Missowaogo, sortit de l’enceinte de la mosquée, s’approcha de son cheval dont elle caressa le museau et lui murmura à l’oreille : « Changement de programme, mon ami ! Je crois que nous allons piquer vers Fada-Gourma. Je dois absolument passer par Bogandé, Gayéri et Fada-Gourma. Ensuite nous nous arrêterons à Diapaga avant de quitter le Faso. Ne sois pas mécontent, ce sont là des étapes obligées ! ».

Le cheval piétina d’impatience. Missowaogo, d’un geste preste et inattendu était déjà sur le cheval et lança un « Nê zaãbré ! Pusèrè baraka » (Bonsoir et merci) au gardien de la mosquée qui n’en revenait pas ! Une femme qui entre dans la mosquée, monte à cheval comme un homme ! Wend a parfois de ces choses qu’Il nous envoie !

Missowaogo chevauchait depuis plus de trois heures, quand elle entendit une voix la saluer :

-« Nê yiibéogo ! Bonjour ! »

Elle ne répondit pas : ce n’était pas l’heure à laquelle on salue par un « bonjour » ! Cette voix était une de ces obstacles auxquels elle s’attendait ! Elle ne répondit pas ! La voix reprit : « Yamb kéma mè, comment allez-vous ? » Elle ne s’était pas trompée, la voix venait de la vouvouyer : il ne fallait surtout pas répondre.
Elle se pencha sur son cheval et lui murmura de prendre le galop. Le cheval ne bougea pas. La sueur perla sur le front de Missowaogo.

Dans le crépuscule qui commençait à envelopper la savane, le chant d’un oiseau s’éleva au loin :

« Là nzonzi oto li béya nô Missowaogo, tô yambu, l’éku tséngé ô Missowaogo !
Lé swé lè pèbè li béya nô Missowaogo, tô yambu, l’éku tséngé ô Missowaogo !
Missowaogo, Missowaogo, Missowaogo, tô yambu, l’éku tséngé ô Missowaogo ! »

« Qu’un ongle tout seul t’appelle Missowaogo, ne réponds pas, la mort c’est la terre, ô Missowaogo
Qu’une mèche de cheveu au vent t’appelle Missowaogo, ne réponds pas, la mort c’est la terre, ô Missowaogo !
Missowaogo, Missowaogo, Missowaogo, ne réponds pas, la mort c’est la terre, ô Missowaogo ! »

Quand le chant de l'oiseau se tut, le cheval s'élança comme piqué par un aiguillon invisible.

La nuit était déjà fort avancée lorsque la jeune femme atteignit Bogandé. Elle venait de perdre son nom : elle n’était plus Missowaogo, la fille de Missolobélé !

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Posté le: 20 Sep 2002 15:35 Sujet du message: Supprimer ce message

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La jeune fille ouvrit lentement les yeux. Elle n'osait pas se lever s'étant aperçu que son compagnon, l'étalon n'était plus à l'endroit où ils s'étaient tous les deux allongés la veille au soir. Elle ne se souvenait plus rien et elle ne voulut se souvenir rien. A chaque instant suffit ses peines et ses joies. Elle s'étira comme un chat et... se recoucha. Elle refusait de revenir à la réalité. "Dormir, dormir, dormir et encore dormir! Si seulement je pouvais continuer à dormir" se disait-elle quand elle sentit comme un souffle sur la plante de ses pieds.

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Dernière édition par Nyelenga le Mar 01 Oct, 02 12:04, édité 1 fois.
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Message par Nyelenga » Mar 01 Oct, 02 11:54

Elle se retrouve seule sur les pistes du Sahel du côté de Pétélkollé au Niger. Elle ne savait pas comment elle était arrivée là. Son cheval avait disparu. Elle ne se souvenait plus depuis combien de temps elle marchait ou avait marché.

Où pouvait bien être passé son cheval? Comment atteindra -t-elle le Pays qui tue à pied? Le jaune sable des plaines du Sahel s'étalait devant elle à perte de vue. La jeune femme ne savait plus ni qui elle était, ni où elle se trouvait. La seule idée ayant survécu dans sa tête et dans son esprit était qu'elle devait rejoindre le plus tôt possible Le Pays- qui- tue!

Elle s'arrêta à l'entrée de Pétélkollé n'osant entrer dans ce village où personne ne la connaît, consciente qu'elle ne pourrait même pas communiquer avec eux.

"Quelle langue peuvent bien parler les gens de ce coin perdu?" se demandait-elle, lorsqu'elle entendit une voix lui dire: "Chez nous l'étranger est roi; bonjour la Reine!"

Elle se retourna et se retrouva face à face avec une vieille femme à la peau frippée qui lui tendait une main accueillante.

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Message par Benda Bika » Mar 01 Oct, 02 1:09

C'est une sorte de hâle, un souffle léger froid et chaud à la fois, qui l'éveilla à moitié. Où était-il? Qu'était'-il arrivé? Qui était-il?

Il écarquilla les yeux, chercha par delà sa vision un point de référence qui le remit sur la voie. Rien. Un silence ouatté, un vide plein, infinité de sentiments en lui qui mèlaient des visages familiers, des voix d'enfants et l'aboiement d'un chien. Mais qui étaient-ils?

Il ne sut et se rendormit, la tête pleine de vide, mais le coeur comme reposé d'avoir enfin atteint un but. Michel Diakouansamou revenait à la vie. La vie reprenait ses droits. Mais il ne saura que plus tard. Quand, au premier chant d'un coq matinal, se mèleraa l'aboiement - encore - de ce chien décidément si près et si affectueux. Dans sa tête swingait une complainte - de Makéba, mais il ne le savait plus - vantant un lointain royaume du Ghana. Le sommeil vint décidément, et un sourire illumina ses lèvres.

Dans le recoin où il suivait tout cela et comprenait la métamorphose, celui qui y avait contribué lissait sa barbe et disait: les cauris ne mentent pas, Ham Ndoulilayi! Meckhtoub! - c'est écrit - ce coeur-là va se réveiller à la vie pour aimer et confondre la haine, disait le vieux sage. Et mon rôle sera terminé, se dit-il aussi, dans un soupir résigné. L'aube au dehors luttait encore avec les reliquats de la nuit. La lumière va vaincre la ténèbre déjà évanescente. Le veillard soupira encore en lissant sa barbe.

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Message par Nyelenga » Mer 02 Oct, 02 5:55

La vielle femme regarda la jeune des pieds à la tête. Sa main restait tendue. Sans bouger, elle attendait que la jeune femme prenne cette main qu'elle lui tendait. La vieille sourit, découvrant des gencives édentées.

- D'où viens-tu, lui demanda -t-elle?

La jeune femme ne répondit pas. On lui avait dit qu'il ne fallait pas répondre aux étrangers ou étrangères de peur qu'ils utilisent ses réponses contre elle.

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Message par Benda Bika » Mar 15 Oct, 02 5:58

Puis un bruit de tam-tam. Puis un second. Puis un roulement infini dans sa tête. Tous les sens s'éveillaient. Et il eut envie de boire. Sans qu'il sache comment, des paroles sortirent de sa bouche sèche: "Hélène, es-tu là? J'ai soif".

... Hélène?
Puis tout devint clair comme du cristal. Il se rappela la tragédie: le verre à moitié plein. Les comprimés. L'étourdissement. Et cette couleur mauve au couchant. La somnolence de la mort aussi, qui s'en venait, ouattée, le délivrer de cette oppression d'un monde devenu vide par manque d'elle. Il frissona un peu, et s'assit tout à fait. Des bandages, des bouts de sparadrap restaient accrochés à lui. Par terre, une calebasse nauséabonde aussi. Et à son bras, enfin délivré de mille tortures, le bracelet de la vie. Il y avait incisé en lettres d'or: "Hélène".

Il frissona encore et prit sa résolution: il lutterait contre les vents et contre les marées et affronterait le destin; ne le brusquerait plus. Il chanterait des poèmes, vides de sens au besoin; des audes à son intention même si elle refusait de les entendre; s'inciserait cette inage en lui et mourait avec. Dieu l'avait décidé ainsi. Et une nouvelle fois, il appela le doux nom d'Hélène.

Témoin muet de la transfiguration, le vieillard dans le coin ramassa sa canne, se lissa la barbe et s'en fut. Les temps étaient arrivés de laisser l'homme au Ndunga. Les temps étaient accomplis; Diakouansamou revenait à la vie, avec sur les lèvres un début de refrain. Qui ne franchit pas la barrière de la voix. Car il s'agissait du refrain intime de qui a découvert le sens d'une vie. Et qui le garde pour lui. En lui.

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Message par Arc. Kani-I.Jefferson » Mar 26 Nov, 02 10:38

Oui, Helene? je viens de me frotter les yeux. Pourquoi le nom d'Helene vient se meler a la senteur du parfum sur les ecrits de Benda Bika?
Helene, c'est le nom de ma mere. Les autres femmes l'appellent par "Marie Helene"...Et tous qui connaissent le nom de famille de ma mere,
peuvent completer et commencer par-la...N'est ce pas Benda Bika?
Dernière édition par Arc. Kani-I.Jefferson le Mer 27 Nov, 02 5:33, édité 1 fois.
Arc. Kani-I.Jefferson
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Message par Benda Bika » Mer 27 Nov, 02 11:40

Bien sûr, frère: j'ai du respect pour Hélène, ta mère. Vraiment.
BB
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Message par Arc. Kani-I.Jefferson » Sam 08 Mars, 03 5:42

Benda Bika comment vas-tu?
J'avais dit ne plus intervenir ici. Suite a ton message, me revoici seulement pour aujourd'hui. Oui je vais tres bien :k
Dernière édition par Arc. Kani-I.Jefferson le Lun 10 Mars, 03 10:24, édité 3 fois.
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Message par Benda Bika » Sam 08 Mars, 03 5:51

Je vais bien, frère. Je suis très content de te savoir là. Continue à nous mener vers les voies de sagesse sans tenir compte des contigences. La Marguerita a des effets miraculeux, m'a-ton dit. Gus ne devrait pas tarder à nous revenir :wink: .

BB
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Message par Gustave Bimbou » Sam 08 Mars, 03 10:12

kani


J'ai des nouvelles de Félicien Michel Okombi. Ecris-moi sur mon e-mail si tu veux son téléphone. J'ai croisé sa frangine, Blandine, voici deux ans à un colloque sur le Congo organisé par les Verts de Noël Mamère à l'Assemblée Nationale. Je suppose qu'elle est toujours à Paris.
Je ne sais pas ce que devient son oncle Guy.
La meilleure preuve de la sorcellerie c'est la parenté. Hors du cadre parental, pas de magie. C'est donc normal que le conflit soit le rapport majeur entre l'oncle et le neveu, entre Guy et Félicien. L'un des rares moyens de pression dont disposent les parents entre eux c'est la sorcellerie. Rassure-toi, la tension dont tu parles n'est pas typique à votre famille. Ca fait partie d'un jeu social qui ne tourne pas forcément au drame.

La margaritta est un breuvage très fort. Il faut aller dans un Tapas pour en boire. Dans le bled où je suis, il y a un petit bar mexicain au nom très poétique de Tapas Movidas. Quand j'y vais, c'est pour écouter la salsa.
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Message par Nyelenga » Mer 30 Avr, 03 5:03

Michel Diakouassamou revenait de loin. Et même qu’on raconte qu’il avait vu la mort en personne mais la mort n’a pas voulu de lui. Sacré Diakouassamou ! A forcer d’avaler les problèmes et de ne jamais les exprimer, il avait paru indigeste à la Mort elle-même.

Il regarda autour de lui, se demandant ce qu’il faisait là, sur cette terre hostile du Sahel. La jeune femme s’avança et le prit par la main.

- « Il faut absolument que nous repartions là-bas ! Je n’ai plus mon cheval, mais je connais la route. Tu n’auras qu’à me suivre comme ça, main dans la main. Tu poseras ton pas sur la trace laissée par le mien. Je te transmettrai ma force et mon énergie ! Nous avons encore de longs jours de marche devant nous. Alors ne t’avise pas de lâcher ma main ; le contact sera coupé et ce sera la fin de tout. »

Michel Diakouassamou ne dit rien. Il fit une légère pression sur la main qui tenait la sienne. Il sentit comme un courant électrique qui passait en lui. Son esprit était ailleurs. Il se demandait qui pouvait bien être cette femme ? D’où venait-elle ? Où voulait-elle qu’ils aillent ? La jeune femme sentit que l’esprit de Diakouassamou divaguait.
-« Ne perds pas ton énergie avec ces interrogations. Concentre-toi sur ta marche, ne disperse pas ton énergie. Je te le répète, nous avons encore un long chemin ! »

- « Puis-je te poser une seule question ? » parvint-il à murmurer.
- « Vas-y, mais sois bref ! »
- « Qui es-tu ? »
- « Je suis celle qui caracole dans les vents. Je suis homme du Sahel et femme de la forêt ! Je suis… ». Il l’interrompit. –« Femme de la forêt ? Alors tu es du Nord ? Tu es de cette région cause de nos malheurs et de nos misères ? Tu fais partie de ces gens-là ? ». Elle s’arrêta net et prit un air grave qui fit se courber de peur l’unique baobab que l’on pouvait voir dans les parages.
- « Ecoute-moi bien Michel Diakouassamou : Je suis MOI, ni du Nord ni du Sud ! J’appartiens à tout ce pays de misères et de malheurs. Regarde autour de toi et dis-moi où nous trouvons-nous ? Est-ce au Nord ou est-ce au Sud ? Et si c’est au Nord, ce Nord l’est par rapport à quoi ? D’ailleurs es-tu certain qu’ici c’est le Nord et pas le Sud ? Ou sommes à l’Ouest et pas à l’Est ? »

Michel Diakouassamou leva la tête au ciel pour voir la position du soleil. Il se souvint avoir appris à l’école que le soleil se levait à l’Est et se couchait à l’Ouest. Le soleil était là, au-dessus de sa tête. Il était incapable de dire où est l’Ouest et l’Est. Il baissa la tête, tel un enfant prit en faute.
- «Encore une question et je ne dirai plus rien ! »
- « Oui vas-y ! »
- « Quel est ton nom ? »
- « Mon nom est Wend Kuni ? Ça te va, comme ça ? ». Elle commençait à perdre patience. « Tu veux sans doute savoir quel est mon prénom, n’est-ce pas ? Hé bien ! Je n’ai pas de prénom ! Je sais que dans ton pays vous aimez les prénoms parce que ça fait plus blanc, plus civilisé ! Et vous croyez qu’on écrivant vos noms en remplaçant un « o » par « ault » vous serez plus proches des blancs. Vous croyez qu’en vous affublant de prénoms fantaisistes européens et américains vous échapperez à votre condition de nègres sous-développés. Hé bien, non, mon cher ami, tu auras beau écrire « Dyhacouaçamhoult » au lieu de Diakouassamou, tu seras toujours le pauvre homme que je tiens par la main en cet instant précis. » Elle éclata d’un rire cristallin qui se répandit dans l’espace nu du Sahel et fit s’envoler une dizaine de mange-mil qui picoraient dans ce qui était il y a quelques semaines un champ de sorgho. « Mon pauvre ami, continua-t-elle, le cœur de l’homme ne change pas avec son nom ! Regarde ton pays ! Chacun veut changer son nom en le francisant, mais cela n’a pas changé vos cœurs. Ils sont toujours aussi noirs, vos cœurs ! Vous avez beau utiliser ces produits qui vous donnent ce teint jaune banane comme vous aimez à le dire, vos cœurs restent aussi noirs que le goudron tiré de vos barils de pétrole. Moi je reste Wend Kuni, c’est mon nom de circonstance, il signifie Dieu a donné ! Et mon nom de naissance est Wend Panga, qui veut dire la force de Dieu ! Alors comment vas-tu m’appeler ? Wend Kuni ou Wend Panga ? » Michel Diakouassamou avala ces paroles et ne dit rien.

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Message par Loukami Of Kouta » Mar 06 Mai, 03 10:11

Michel Diakouansamou était l'un des rares survivants d'une aventure politique qui avait mal tourné et qui avait emporté nombre de vies. A l'idée de penser à toutes ces vies qui avaient péri pour avoir voulu améliorer le sort de la population de son pays, les larmes perlèrent aux yeux de MD.

La tete enfoncé dans le sable, il n'écoutait meme pas ce que lui disait Wend Kuni. Quelles futilités se dit-il de me parler de francisation de noms alors des gens mourraient dans son pays parce que ceux qui l'avaient entrainé des cette merde sans nom, s'étant mal préparés, se comportaient finalement comme ceux qu'ils voulaient combattre ! Quelle connerie la guerre se dit-il encore en se débarbouillant de tout ce sable infini qui commençait à lui rentrer un peu partout.

Wend Kuni un peu surpris mais respectueux de l'attitude de MD, s'éloigna un peu, sans le perdre de vue, pour laisser son ami à ses pensées, pour le laisser faire le point avec lui-meme.

Où est Lissouba ? Où est Kolélas ? Que sont devenus tous les amis avec lesquels il voulait remettre le train congo sur les rails ? Pourquoi était-il là, en plein désert du Niger ? Que faisait-il là avec cet hommes qui lui parlait de coeurs noirs comme le pétrole ?

C'est au prix d'un grand effort de mémoire qu'il se souvint encore de jeune-homme de Baratier, l'homme de main de Kolélas... Comment s'appelait-il déjà ? Léon ? Michel ? Pris de nostalgie, il repensa à ce qui l'avait emmené en politique, ce qu'il voulait changer dans cette politique brutale et sans humanité que les Mbochis depuis Massamba-Débat avaient installée dans le pays de ses ancetres. Il repensa aux brutalités de hommes de la Défense Civile à la sinistre réputation, à tous ces simulacres de procès qui avaient emporté la vie de tant de personnes dont le seul tort était d'etre originaire du M'pombo. L'un de ces procès-assassinats dont-il se souvient était celui qui suivit la mort de Marien Ngouabi. Ce procès, se souvient-il, avait emporté les derniers grands administrateurs que le Congo avait connus.

Depuis ce jour se souvient-il encore, son peuple s'était soudain paupérisé. Les cadres vivaient sous sommation, ceux qui s'y retrouvaient encore étaient acquis à cette cause qui tuait le pays à petit feu : Les Niboleks avaient abdiqué leur coté kongo depuis longtemps, ils avaient meme inventé une langue qu'ils appellent le Kituba. L'un de leurs savants qui se dit pygmé avait adressé une lettre ouverte aux gens du Mpombo qu'il appelle bantou. Les gens du Kouilou ne se souviennent-ils encore qu'ils sont des kongo ? La plupart des jeunes avaient vendu leur ame à la déesse sape, au nom de laquelle, ils avaient quitté l'école, car un sapeur ne va pas l'école, ne travaille pas disaient-ils. Ceux qui avaient résisté aux appels de la sirène et avaient obtenu quelque bourse d'études pour un pays étranger tiraient le diable par la queue dans ce qui est devenu presque un exile où ils sont insultés à chaque rendez-vous électoral comme des immigrés qui mangent tout le pain de leurs hotes. Pendant ce temps, les nouveaux maitres envoyaient leurs enfants à Moscou, en Occident et meme aux Etat-Unis, pour les préparer la reprendre les places dont ils avaient éjecter les gens du Mpombo.

En pensant au sort qui avait été réservé aux filles, les larmes lui coulèrent davantage. C'est pour désamorcer ce qui ressemblait à une véritable bombe, à un virus, un cancer qu'il s'était engagé en politique... Mais hélas, ses partenaires n'avaient pas d'autres buts que de prendre les places et se mettre plein les fouilles comme les autres, pour jouir des memes privilèges.

Malgré cela, les gens du Mpombo se considéraient toujours les meilleurs, invincibles et criaient à qui voulait bien les entendre : "lorsque le pouvoir reviendra au sud, les mbochis rentreront chez eux à la nage".

Ejectés des administrations quand ils ne s'en sont pas fermés les portes eux-memes par adhésion à la sape, les hommes du mpombo se sont retrouvés à faire des petits métiers. Et comme pour bien les humilier, comme il souvent d'usage dans ces cas, les nouveaux maitres se sont arrogés leurs femmes. Les plus belles, les plus jeunes ou les plus ambitieuses sont se retrouvées "bureau" parmi d'autres d'un "grand" "mbébiste" qui pourvoit à ses besoins et par richocher à ceux de la famille. Est-ce là le partage des richesses dont ils parlent, se dit Michel Diakouansamou ironique.

Les moins méfiants ne virent là qu'une manière des chefs mbochi de suppléer à l'infidélité de leurs femmes. Car dit-on, leurs moeurs sont telles que le neveu peut copuler avec la femme de son oncle sans que ceci ne pose problème à personne. Et il parait meme qu'une bouteille de bière suffit pour enlever une femme mbochie, etc. Ce serait donc une marnière aux chefs mbochis de se civiliser que "d'épouser" une femme du mpombo réputée fidèle et travailleuse. Marien Ngouabi lui-meme avait épousé une femme larie pour échapper, dit-on, à ce qu'il considérait comme une infamie lorsqu'il avait quitté sa femme européenne ce qui était une autre infamie pour un président révolutionnaire disait-on.

mais Michel Diakouansamou, lui, en homme politique averti qu'il se voulait etre, y voyait là une machine machiavélique en marche. Ce d'autant plus que ces femmes n'étaient des "bureaux" parmi d'autres. Car les chefs mbochis avaient le pouvoir aphrodisiaque. Et que le plus souvent, elles habitaient chez leurs parents ou chez leur père pour etre plus précis. Et c'est là que Michel Diakouansamou voyait le plus grand piège jamais tendu aux laris.

En effet, en bonnes femmes kongo qu'elles sont, elles savent bien que le patrimoine, une parcelle et une maison notamment, sont les premiers besoin à remplir quand on a la possibilité d'avoir de l'argent... Elles les réclament donc à leur "grand". Quelques vers de Come Mountouari reviennent à la mémoire de Michel Diakouansamou : "Ozui chance ya ko zua mbongo, liboso somba lopango na yo tonga ndako, makambo mosusu ekoya sima..."

Mais lorsque ces "grands' accèdent à la demande de leurs dulcinées, rarement, ils n'achètent une nouvelle parcelle et construise une nouvelle maison. Au contraire, quand il y a un peu de place dans la parcelle, il y construise une nouvelle maison à coté de celle que le père avait batie quand ils ne la remplacent pas carrément.

Les sociétés Kongo étant matrilinéaires, l'héritage se fait d'oncle en neveux. Ces maisons de filles construites dans la parcelle de leur pères finissent par poser de problèmes d'héritages qui finissent très souvent mal. Car on y pensant bien, n'est-ce pas un problème d'héritage qui est à l'origine entre les Arabes et les Juifs ?

A ce propos, Michel Diakouansamou, se souvient de cette douanière qui du casser la belle petite villa qu'elle avait construite dans la parcelle de son père à Bacongo.

C'est pour essayer de résoudre ces problèmes que Michel Diakouansamou, après un doctorat de mathématiques avait préparé un deuxième doctorat de sociologie et une maitrise d'économie et s'était engagé en politique auprès de Bernard Kolélas, car pensait-il l'homme était intègre et voulait moderniser les infrastructures et les superstructures de son pays le Congo avant de se rendre à l'évidence, mais bien tard que l'homme était aussi fourbe que les autres.

Il se rendit également compte de ce que le fanatisme tribal pouvait agir comme un bandeau et empecher certains mbochis de voir leur propre misère car ils n'avaient pas plus que ces laris qu'ils voulaient qu'on assassine en leur nom. Cela MD le savait un peu, d'approcher le pouvoir lui a permis de bien s'en rendre compte.

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Message par Nyelenga » Ven 09 Mai, 03 7:12

Michel Diakouassamou serra la main de son amie. Il venait d’apercevoir au loin un cheval ailé qui se dirigeait vers eux. Wend Kuni, le dos tourné vers l’espace sans direction n’avait pas encore aperçu l’insolite scène. Ou alors, faisait-elle semblant. Michel Diakouassamou lui tira le bras avec force l’obligeant à se retourner et à regarder dans la même direction que lui.

« Ne crains rien, fit-elle, c’est sans aucun doute un ami ! »

Le cheval ailé atterrit à leurs pieds. L’homme dessus paraissait sorti des contes des Mille et une nuits. Il était enveloppé dans une cape jaune or. Il était à la fois noir et blanc. Un turban noir et blanc recouvrait sa tête. Son côté droit ressemblait à Cheikh Amadou Bamba dont il se souvenait avoir vu la photo à Mbénguène. Le côté gauche de l’homme ressemblait fort au Molha Omar, celui –là même qui avait réussi à s’échapper sur une mobylette sous le nez des Américains quelque part là-bas en Afghanistan.

L’homme descendit de son cheval et leur dit : « Je suis votre ami. Je viens à votre aide ».

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Message par Benda Bika » Mar 10 Juin, 03 2:19

On ne sait trop pourquoi; un fou rire prit Michel Diakouassamou. Il se tordait et se pliait, secoué par des quintes suivies bientôt de larmes. Il en perdait son souffle et était aux bords de l'étouffement.
Wend Kuni fut sur le point de lui taper sur le dos, tellement il était noué.

- Dis: tu vas bien?

Mais même cette question simple suscita un rire redoublé chez Michel, dont les yeux commençaient à sortir des orbites. Enfin, dans un calme précaire, il tendit la main vers le pégase. Il se contint avec peine, mais montrant l'animal, il parvint à susurer:

- Lui? C'est lui qui est venu nous sauver?

Et il repartit de plus belle vers des éclats et des quintes d'asthmatique, tellement il était habité par le doute.

Le cheval ailé regarda Wend Kuni, puis Michel Diakouansamou, alternativement. Puis, d'une voix grave, il indiqua encore:

- Oui, c'est moi qui vais vous sauver; je suis votre ami.

Cette intervention eut un effet immédiat. Michel s'arrêta net, tourna son regard vers la créature, incrédule, puis retrouva son sérieux comme par enchamenent. Ou plus exactement il tomba, dès lors, dans un grand trouble. Et il se lança dans un long solliloque où se mêlaient les mots et les noms. Tout son être exutait des cumuls douloureux. Il se savait attendu là-bas, près de Ekoti Monseigneur, mais ne savait plus le dire. Son coeur palpitait et sa langue balbutiait: son être venait de rencontrer l'irréel. Son trouble naissait de ce que c'était avec cela qu'il devait combattre le réel. Aucun son ne sortait plus de sa bouche; il haleta encore une peu, puis s'affalant plutôt que s'asseyant par terre, il décida de suivre les vents et de lire les signes. Inch Allah, dit-il; advienne que pourra. Dans l'inconnu c'est encore Dieu qui est le meilleur des guides. Au bord d'un cours impétueux, loin là-bas au pays, il avait sa tête remplie des têtons visionnaires: des montagnes juemelles, ou peut-être le coeur d'une femme aimée. Qui l'attendait.

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Message par Nyelenga » Jeu 31 Juil, 03 11:09

Le Mollah, car c’est comme ça que Diakouansamou et son amie avaient décidé de nommer l’Homme, leur dit :

- Montez sur mon cheval. Il y a assez de place pour trois.

Ce qu’ils firent. Le Mollah éperonna le cheval qui s’éleva dans le ciel. Diakouansamou s’agrippa au bras de son amie. Il n’osa pas jeter un coup d’œil sur les espaces qui filaient sous eux. Wend Kuni quant à elle admirait ces immensités qui se déroulaient de toutes parts. Elle reconnut les villages de Makourdi, Koumaï, Guidan, Amoumoune, Golondi, Maïlafia. Le Mollah était silencieux. Diakouansamou se demandait ce que cet être mystérieux qui se disait leur ami pouvait bien penser. Où les emmenait-il comme ça ? La réponse ne se fit pas attendre. Le cheval planait maintenant comme un Antonov de Lina Congo sur le point d’amorcer la courbe qui passe par Kin avant de piquer vers Maya Maya. Diakouansamou pensa à ses fils qui devaient être entre les mains des tortionnaires du Pays-qui-tue. Deux larmes brouillèrent sa vue. Wend Kuni sentit un courant de panique passer de la main de son ami à sa main à elle. Elle sera sa main en guise de réconfort.

Le cheval piqua du nez vers la terre ferme. Le Mollah prononça sa première parole : « Nous arrivons à Kano ! »

Kano ? Un frisson parcourut l’échine de Diakouansamou. Kano ? Mais c’est par-là qu’on lapide les femmes ! Des femmes qui ont eu le malheur de connaître l’amour. Des femmes-filles de Dieu dont les hommes décident qu’elles sont filles du Diable.

Le cheval se posa sur la terre ferme. Le Mollah mit pied au sol et donna la main à Wend Kuni qui descendit à son tour. Diakouansamou dit : « Je reste ici, je ne veux pas voir Wend Kuni lapidée parce qu’elle est en notre compagnie ! ». Il tremblait de toute sa chair.

Le Mollah prit de pitié pour celui en qui il voyait désormais un pauvre homme, le souleva comme on soulève un enfant et le posa à terre. « Suivez-moi » leur dit-il.

Wend Kuni prit son ami par la main et l’entraîna sur les pas du Mollah. Ils arrivèrent dans un campement. Partout des tentes aux couleurs vives et multicolores, excepté une qui était toute blanche. Le Mollah s’arrêta devant la tente blanche et lança un « Assalam Aleïkoum » tonitruant. Une voix se fit entendre de l’intérieur de la tente : « Maleïkoum Assalam ! Bissimilah ».

Le Mollah se baissa pour entrer dans la tente suivi de ses amis. Il posa le genou par terre pour saluer un homme dont la tête était recouverte d’un turban noir qui ne laissait entrevoir que deux yeux scrutateurs.

- « Je t’apporte deux étrangers, Maître ! »
- « Les étrangers sont des dons d’Allah ! Prenez place ! » fit celui que le Mollah appelait Maître.

Wend Kuni et Diakouansamou s’assirent sur le tapis que leur indiquait de la main le Maître. Il les regarda longuement, étudiant minutieusement leurs traits, pénétrant de son regard leur être le plus profond livré à la puissance qui émanait de son être à lui. Puis, il baissa la partie du turban qui recouvrait sa bouche, signe qu’il avait capturé leur personnalité, leurs pensées, leurs craintes et leurs espoirs.

- « Toi, mon ami, tu n’es plus Michel Diakouansamou. Tu t’appelleras désormais Ahmed Diakouansamou. Quant à toi, femme, tu deviens Olufunmilayo ! ». Puis, il recouvra sa bouche avec son turban. Il avait parlé et n’avait plus rien à leur dire.

Diakouansamou un peu plus rassuré regarda son amie qui lui fit un clin d’œil comme pour lui dire: « Qu’il en soit ainsi ».

Le Mollah les tira à l’extérieur de la tente du Maître, saisit l’un après l’autre leurs pieds et y marqua à l’encre noire: Omar, Sined Osseung, Salelok, Baoussli.

Et il leur désigna la tente sous laquelle ils devaient passer leur première nuit au pays du pétrole, de la Charia et de débrouillardise.


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Message par Nyelenga » Jeu 31 Juil, 03 11:09

Le Mollah, car c’est comme ça que Diakouansamou et son amie avaient décidé de nommer l’Homme, leur dit :

- Montez sur mon cheval. Il y a assez de place pour trois.

Ce qu’ils firent. Le Mollah éperonna le cheval qui s’éleva dans le ciel. Diakouansamou s’agrippa au bras de son amie. Il n’osa pas jeter un coup d’œil sur les espaces qui filaient sous eux. Wend Kuni quant à elle admirait ces immensités qui se déroulaient de toutes parts. Elle reconnut les villages de Makourdi, Koumaï, Guidan, Amoumoune, Golondi, Maïlafia. Le Mollah était silencieux. Diakouansamou se demandait ce que cet être mystérieux qui se disait leur ami pouvait bien penser. Où les emmenait-il comme ça ? La réponse ne se fit pas attendre. Le cheval planait maintenant comme un Antonov de Lina Congo sur le point d’amorcer la courbe qui passe par Kin avant de piquer vers Maya Maya. Diakouansamou pensa à ses fils qui devaient être entre les mains des tortionnaires du Pays-qui-tue. Deux larmes brouillèrent sa vue. Wend Kuni sentit un courant de panique passer de la main de son ami à sa main à elle. Elle sera sa main en guise de réconfort.

Le cheval piqua du nez vers la terre ferme. Le Mollah prononça sa première parole : « Nous arrivons à Kano ! »

Kano ? Un frisson parcourut l’échine de Diakouansamou. Kano ? Mais c’est par-là qu’on lapide les femmes ! Des femmes qui ont eu le malheur de connaître l’amour. Des femmes-filles de Dieu dont les hommes décident qu’elles sont filles du Diable.

Le cheval se posa sur la terre ferme. Le Mollah mit pied au sol et donna la main à Wend Kuni qui descendit à son tour. Diakouansamou dit : « Je reste ici, je ne veux pas voir Wend Kuni lapidée parce qu’elle est en notre compagnie ! ». Il tremblait de toute sa chair.

Le Mollah prit de pitié pour celui en qui il voyait désormais un pauvre homme, le souleva comme on soulève un enfant et le posa à terre. « Suivez-moi » leur dit-il.

Wend Kuni prit son ami par la main et l’entraîna sur les pas du Mollah. Ils arrivèrent dans un campement. Partout des tentes aux couleurs vives et multicolores, excepté une qui était toute blanche. Le Mollah s’arrêta devant la tente blanche et lança un « Assalam Aleïkoum » tonitruant. Une voix se fit entendre de l’intérieur de la tente : « Maleïkoum Assalam ! Bissimilah ».

Le Mollah se baissa pour entrer dans la tente suivi de ses amis. Il posa le genou par terre pour saluer un homme dont la tête était recouverte d’un turban noir qui ne laissait entrevoir que deux yeux scrutateurs.

- « Je t’apporte deux étrangers, Maître ! »
- « Les étrangers sont des dons d’Allah ! Prenez place ! » fit celui que le Mollah appelait Maître.

Wend Kuni et Diakouansamou s’assirent sur le tapis que leur indiquait de la main le Maître. Il les regarda longuement, étudiant minutieusement leurs traits, pénétrant de son regard leur être le plus profond livré à la puissance qui émanait de son être à lui. Puis, il baissa la partie du turban qui recouvrait sa bouche, signe qu’il avait capturé leur personnalité, leurs pensées, leurs craintes et leurs espoirs.

- « Toi, mon ami, tu n’es plus Michel Diakouansamou. Tu t’appelleras désormais Ahmed Diakouansamou. Quant à toi, femme, tu deviens Olufunmilayo ! ». Puis, il recouvra sa bouche avec son turban. Il avait parlé et n’avait plus rien à leur dire.

Diakouansamou un peu plus rassuré regarda son amie qui lui fit un clin d’œil comme pour lui dire: « Qu’il en soit ainsi ».

Le Mollah les tira à l’extérieur de la tente du Maître, saisit l’un après l’autre leurs pieds et y marqua à l’encre noire: Omar, Sined Osseung, Salelok, Baoussli.

Et il leur désigna la tente sous laquelle ils devaient passer leur première nuit au pays du pétrole, de la Charia et de débrouillardise.


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Message par Arc. Kani-I.Jefferson » Jeu 04 Sep, 03 8:18

Ici c'est tres calme, et personne n'ecrit plus rien.
Bon chanson francaise Antillaise ou Creole...

***Au bal, au bal masque(r) oye, oye
Au bal, au bal, au bal
Nous allons danser danser, danser
Au bal masque(r) oye!
Au bal, au bal masque(r)
Au bal masque(r), masque(r), masque(r)...


Enfin de compte c'est une chanson francaise quoi.
Salut, Alain rabault. :noel
Arc. Kani-I.Jefferson
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