Anti-urbains :
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Politiques antiurbaines
Les idéologies antiurbaines des États influencent directement l’aménagement du territoire national ou ont des conséquences claires sur la société.
Exemple français
La conception antiurbaine de la France a été fortement influencée par l’ouvrage Paris et le désert français de Jean-François Gravier, paru pour la première fois en 194724. Ce livre, profondément urbaphobe, a depuis guidé les politiques d’aménagement du territoire en France25. Il recommande, à l’aide de méthodes brutales, de décentraliser l’État français, réduire l’influence de Paris, capitale macrocéphale, et de redistribuer les emplois et les personnes sur le territoire26, tout en équipant équitablement le territoire, ce qui revient à assurer un déséquilibre dans l’équipement des ménages, la majorité des Français vivant dans les villes27. Progressivement, la vision antiurbaine française changera de cible, se tournant alors vers les périphéries, les banlieues28 vues comme des zones de violences, « hors de la République29 », toujours en opposition à la campagne, à la France rurale, la « vraie France30 ». Paris et le désert français semble rester le livre de chevet de beaucoup de dirigeants de ce pays31. En France, la politique de la ville repose sur une vision catastrophiste et misérabiliste de la banlieue et sur une vision valorisée de la ville centre32. Depuis longtemps la société française reste impregnée d'un sentiment d'hostilité à l'égard de la ville. La campagne et la civilisation rurale sont perçues comme le foyer et le conservatoire des valeurs « authentiques », celles relatives notamment à la fidélité envers ses racines et sa famille, au respect de l’autorité, à l’attachement à la propriété et au sens de la responsabilité33.
Dictatures
L’hostilité à l’égard de la ville et l’apologie du rural font partie de la propagande officielle des régimes d'Italie fasciste, d'Allemagne nazie et de Vichy, dans les années 1930-194510, mais également quelques décennies plus tard du régime des Khmers rouges. La politisation du concept d’antiurbain, dans sa forme la plus sévère, peut amener, au-delà d’une ignorance de la ville, à détruire toute urbanité.
Dans le régime nazi, la ville est vue comme traîtresse de la nation et favorise la déchéance des hommes, mais plus particulièrement de la race aryenne. Les ruines de guerre seront alors rasées au lieu d'être reconstruites et le réaménagement dans les campagnes sera favorisé34. Le régime de Vichy prévoyait qu’après la guerre la France devrait délaisser son industrie et redevenir un pays agricole. L’idée de Pétain est de « ré-enraciner » le Français dans la terre de France10.
Pour les Khmers Rouges, la ville est une construction occidentale et une menace pour les valeurs traditionnelles de la société cambodgienne. Les paysans khmers, seuls détenteurs des vraies valeurs cambodgiennes, vont devoir lutter contre la ville et favoriser la désurbanisation. Cette politique antiurbaine va contraindre les citadins à retourner à la culture de la terre, travailler avec les paysans pour la grandeur de la nation cambodgienne35.