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Femme de distinction

Pourquoi Pauline Tchik est morte ?

Pauline Tchik a quitté la terre des hommes à la fin du mois d’octobre. Son corps sans vie a été découvert mardi 27 octobre 2021 à son domicile à Nanterre. Grande dame de la télévision congolaise des années 80, sa disparition en France a laissé tout le monde sans voix.

On était sans nouvelles d’elle depuis un moment.

« Nous la croyions en séjour à Nkamba dans le Bas-Kongo en RDC » dira sa cousine Brigitte Diaz.

En fait « Ya Pauline » avait rejoint les étoiles.

HECATOMBE

Ces temps-ci le Congo écrit sa page noire politique. Plusieurs membres de la nomenklatura ont quitté ce bas-monde en un laps de temps. Ce taux de mortalité élevé dans cette couche sociale fait dire au commun des mortels que la technique de l’assiette roumaine aurait repris du service à Mpila et que l’acteur principal de cet hécatombe se trouve être l’inquiétante « clinique Leyono », située à Ouenzé-Mazanza-Brazzaville, le même centre de soin où Guy Brice Parfait Kolélas séjourna avant de venir rendre l’âme en France la veille des élections présidentielles de 2020.

On parle en effet d’une mortalité adulte très élevée au sein des hommes sous la responsabilité desquels se trouvent nos structures hospitalières mais qui ne font rien pour leur amélioration. Jugez qu’en plus des présomptions funestes qui entourent Antoinette Sassou et son époux ; Clément Mouanmba, ancien Premier Ministre de Sassou, Djibril Bopaka Mwana Mboka, homme d’affaires et Président de la communauté musulmane du Congo ont, pour leur part, rejoint le pays des ancêtres à quelques jours d’intervalle. Motif officiel : le Covid 19. Motif réel : empoisonnement délibéré. Bopaka Peinture aurait eu ces derniers temps la langue trop fourchue. Ses adversaires ont vite eu raison de lui en deux temps trois mouvements.

Justin Lekoundzou Itihi Ossétoumba a été également donné pour mort. La nouvelle du décès de ce membre important du PCT ( tombé en disgrâce) qui pleura Marien Ngouabi à chaudes larmes a été démentie par ses proches.

A en croire le site en ligne « Sacer », les amis de Rigobert Roger Andely (mis en quarantaine à cause du Covid) s’apprêteraient à sabrer le champagne en attendant l’annonce de son trépas. Il aurait été contaminé par son directeur de cabinet qui se savait malade.

TOUTES LES MORTS NE SE RESSEMBLENT PAS

Franklin Boukaka, grand penseur et grand artiste chanta que tout homme est mortel mais toutes les morts n’ont pas la même signification. Ni la même valeur, du reste.
Autant la mort des membres de la classe politique laissent les Congolais de marbre, autant celle des Mbiki de Nanitélamio, Aloïse Moudiléno Massengo, Lion de Makanda, Marc Mapingou, Christophe Moukouéké suscite le sanglot du peuple.

Notre compatriote Pauline Tsidékéle dite « Pauline Tchik », fait partie de ces personnes dont la mort a beaucoup de significations et cristallise une grande valeur que le temps aura du mal à effacer. Le chagrin de son décès pousse à la fois à la méditation et à la révolte. Mais pourquoi est-elle morte ?

A 77 ans, elle n’avait pas tout donné. Sa disparition laisse le goût amer du combat inachevé.

C’était une madone dans l’esprit de laquelle émergeait une force de caractère insoupçonnée. On dit que, jeune, son oncle la soutira du Couvent où elle allait faire le vœu d’être sœur religieuse. En sortant du Cloitre, l’âme de Kimpa Vita la Jeanne d’Arc du Congo la pénétra pour ne plus la quitter tout le long de sa période laïque professionnelle.

La nature de Pauline Tchik était nourrie de la sève de la militance, la même matière qui façonna des figures comme Angela Davis, Rosa Parks, Rosa Luxemburg, Mama Ngounga, Mama wa Ndombi...

EXIL

Grande dame de la presse congolaise qui avait tout à gagner en restant dans la routine de la compromission sassouphile, Pauline Tchik prit la route de l’exil dans les années 2000. En effet au moment où nombre de confrères retournaient leur veste cette femme des Lettres fit comme Victor Hugo qui passa en Belgique après le coup d’Etat de Napoléon III : elle s’expatria. Elle le fit pour échapper à l’atmosphère polluée du Congo.

« Elle avait le choix de jouir du confort douillet que lui procurait sa présence dans l’entourage présidentielle d’Antoinette Sassou » nous dira une proche parente. Elle quitta tout, laissant carrière et famille derrière elle.

« L’exil c’est dur » pleurnichait un opposant sous Lissouba (Florent Ntsiba pour ne pas le nommer)

Stendhal disait de l’exil que c’était le coffre-fort qu’aucun homme politique kleptomane ne peut voler. Des généraux trichent sur leurs grades, des chefs d’Etat usurpent leurs titres. Mais l’exil est un galon que seuls gagnent les révoltés, les irrévérencieux, les insoumis, ceux qui refusent de se coucher.

Laissant aux spécialistes de la duplicité la gloire des appareils idéologiques d’Etat et de l’argent facile, Pauline Tchik embrassa le parti de la liberté d’expression, celui que connaissent tous ceux qui battent le pavé de Paris et manifestent leur présence assidue dans les réunions, les débats, les assises, les colloques, les réunions spontanées, en bravant le froid des villes occidentales, loin du farniente et de la frénésie du « lé dza, lé nwa le béré mbonda » de Brazzaville.

Elle était de tous les combats de la diaspora. Ayant inachevé sa vocation religieuse dans sa jeunesse on peut dire que son ultime voyage en Terre Sainte de Simon Kimbangu a bouclé la boucle.

Le seul regret pour cette grande dame c’est de n’avoir pas pu assister à la chute de Sassou.

Pauline Tchik, la maman de Laure, de Rita, la frangine d’Honorine Badiabo Angela, sera mise en terre le 3 novembre 2021, loin de sa terre natale, près du cœur de tous les militants congolais.

Thierry Oko

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