Le président de la CSTC, Michel Souza justifie la trève sociale

Répondant aux questions de Blaise Kouahiwé Ngambé, le syndicaliste a été globalement satisfait des résultats de ces négociations et a estimé qu’un profond audit de la fonction publique est indispensable pour en maîtriser la masse salariale.

Blaise Kouahiwé Ngambé : Bonjour Monsieur le président !
Michel Souza : Bonjour Monsieur le journaliste.
BKN : Monsieur le président, quel avantage présente la moisson de votre concertation avec le gouvernement telle qu’elle apparaît dans le communiqué final sanctionnant ces négociations ?

M.S : L’avantage que nous retenons est le fait que les résultats auxquels nous sommes parvenus ont touché toutes les couches sociales, en commençant par les actifs, donc les fonctionnaires. Dès le mois de janvier 2006, ils seront payés non au point indiciaire 119, mais au point 132. En janvier 2007, ils le seront à plus de 140 et en janvier 2008 à 160. Cela veut dire que c’est au bout de 2 ans que nous allons couvrir les 160. Il y aura aussi pour les fonctionnaires le paiement de 3 mois d’arriérés de salaires chaque année. Pour les entreprises liquidées, nous avons obtenu au lieu de 450 millions de FCFA comme d’habitude, 4 milliards de FCFA, soit 1 milliard de FCFA par trimestre. Pour les deux caisses [la Caisse de retraite des fonctionnaires (CRF) et la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS)], nous avons obtenu la régularité du paiement des pensions. En d’autres termes, désormais, on ne devrait plus parler de pensions impayées au niveau de la CRF et de la CNSS. On s’est arrangé avec le gouvernement pour que celui-ci verse une subvention d’un milliard de FCFA pour couvrir entièrement le paiement des pensions pendant les 12 mois de l’année. La CNSS à elle seule a besoin de 3 milliards de FCFA pour payer les retraités. En ce qui est des arriérés de salaires des appelés et volontaires à l’enseignement auprès de la Caisse congolaise d’amortissement (350 millions de FCFA), ils seront payés au cours de l’année 2006, selon les recommandations que nous avons formulées au gouvernement. Le ministère des finances doit faire diligence pour que tous les problèmes de ces volontaires soient résolus courant cette année. Il y a eu aussi bien d’autres problèmes que nous avons traités lors de cette session. Le SMIG par exemple doit être de 40.300 FCFA au lieu de 25.000 FCFA comme on le constate. Voilà la moisson qui à mon avis paraît un peu satisfaisante pour l’intérêt des travailleurs.

BKN : Monsieur le président, pourriez-vous nous parler de l’effectivité de ces mesures ? A quoi peuvent s’attendre les travailleurs à la fin du mois de janvier ?
M.S : En janvier 2006, le salaire des fonctionnaires congolais doit augmenter de 14 points. Les salaires étant toujours traités au Congo à partir du 10 de chaque mois, il est probable de connaître un petit couac. La prudence est donc de mise. En revanche, en février, l’ajout des 5% dans l’indice de base devrait être effectif. Il doit passer donc de 119 à un peu plus de 130.

BKN : Quand serait-il publié le décret relatif à l’application de toutes ces mesures ?
M.S : Ce décret serait promulgué très rapidement. Certainement d’ici la fin du mois de janvier.

BKN : Qu’en est-il exactement de l’audit indépendant de la fonction publique prévu en milieu de cette année ? Aurait-il un impact sur la situation des travailleurs dans les années à venir ?
M.S : Nous nous sommes rendus compte que tous les recensements faits à la fonction publique ne donnent pas de résultats escomptés. Depuis 2001 jusqu’ à ce jour, l’effectif des fonctionnaires congolais tourne toujours au tour de 70.000 agents. Cet effectif devait normalement diminuer, puisque chaque année on enregistre les départs à la retraite. Il y a donc un problème. Ce même constat est aussi fait au niveau de la Direction du budget, au Service de la solde. Avec les départs à la retraite, la masse salariale, au lieu de baisser, elle ne fait que galoper. On a conclu qu’en réalité quelque chose ne marche pas sur les fichiers de la fonction publique et de la solde. Il doit y avoir des gens qui sont payés clandestinement. Pour clarifier cette situation, nous avons demandé un audit international et indépendant de la fonction publique congolaise.

BKN : Quelles réponses donnez-vous aux mesures restées en suspens tels que la journée sans travail de samedi, les fameux 12% du salaire des journalistes et bien d’autres encore ?
M.S : Les questions qui restent pendantes seront analysées après l’audit. Il est fondamental de connaître l’effectif exact de la fonction publique et par conséquent maîtriser la masse salariale des agents de l’Etat. Les employés fictifs, tout de même, ne devraient pas bénéficier de l’avantage des mesures prises !

BKN : Monsieur le président, quel est votre mot de la fin ?
M.S : Il faut que les travailleurs continuent à nous faire confiance. Quand on veut manger des œufs, on ne tue pas la poule. Il faut jouer à la prudence. Les gens ont raison de dire que nous avons du pétrole. Mais s’appesantir sur le pétrole pour arranger les salaires c’est courir beaucoup de risques. La guerre en Irak, deuxième pays producteur du pétrole à l’échelle mondiale, est la cause principale de la flambée du prix du baril du pétrole. D’où l’embellie actuelle de nos recettes. Qu’arriverait-il quand l’Irak serait pacifié ? La prudence est donc de rigueur. On doit éviter qu’on se retrouve encore un jour pour diminuer les salaires. Cela fait 3 ans que nous sommes à la tête de la CSTC et je crois que beaucoup de choses ont déjà été réalisées. Dans un futur proche, je peux me permettre de dire : mission accomplie.

BKN : Merci beaucoup Monsieur le président.