Le calendrier est strict. Mission a visiblement été donnée au juge Apessé d’expédier le procès avant une certaine date. Or les choses trainent. D’où l’impatience notée chez le magistrat, impatience qui se manifeste par sa façon de balayer du revers de la main certaines règles élémentaires du droit.


La main basse du juge Apesse

Le commun des téléspectateurs et des auditeurs suit de très près le procès sur l’affaire des disparus du Beach. La manière et la dextérité avec lesquelles le président de la cour conduit les débats et les confrontations sont évidentes. Cependant une attention plus profonde montre une ruse dans son habileté et une orientation des auditions dans un cercle bien circonscrit d’où il ne souhaite pas voir les personnes écoutées sortir.

La devise prônée par M. Sassou Nguesso est d’établir la vérité sur cette affaire, en prenant le peuple congolais à témoin. D’où la radiodiffusion et télédiffusion des débats. Dans cette logique, plus les plaignants parleraient, plus le peuple en saurait long. Au risque de rendre ou de faire de ces débats un procès fleuve. Tout ce qui n’est pas directement lié à cette affaire est écarté par la cour. Le juge se plaint du temps, alors qu’il en a à profusion devant lui. La cour a tendance à ignorer que les causes indirectes d’un fait sont plus pertinentes et apportent plus de mesures de précaution pour le futur que les causes directes, avant que les effets ne soient apparents.

Ce 4 août 2005, un peu malmenée par les questions des avocats de la défense lors de sa confrontation avec le sergent André Ndoba, l’épouse Toutsi, née Ngoundou Marie avait voulu faire des déclarations publiques qu’elle avait jusque là gardées pour la dignité de son intimité en tant que femme mariée. Mais très habilement, doté d’un masque d’honorabilité feinte, M. Charles Emile Apesse a réussi à distraire cette femme déshonorée, en embrouillant les faits par la tenue des propos très intelligents relatifs à son inquiétude majeure : le temps. Pourtant l’épouse Toutsi avait bien déclaré que ce qu’elle voulait dire avait des connexions avec l’affaire des disparus du Beach. Et que cette révélation devait définitivement éclairer sur la véritable personnalité de M. Blaise Adoua.

Très rancunier, le juge en charge de l’affaire des disparus du Beach, n’a pas encore avalé les propos saboteurs du Me Malonga pour ce procès. A en juger par ses retours fréquents en termes bien voilés à la déconstitution du bâtonnier de cette affaire. Toujours ce 4 août, le juge Apesse s’était enflammé envers le témoin Pépin Malonga, lorsque ce dernier voulait revenir sur les conditions de sa détention. Il n’a pas hésité à le mettre dans le même panier que les parties civiles qui avaient vidé le prétoire au moment de la défection du Me Malonga.

Le juge Apesse a raison de sauter certaines étapes et de faire diligence. L’ordre était qu’il verse ce dossier au plus tard le 6 août 2005. Mais le temps n’appartient qu’à Chronos.


Keila Samuel,
Brazzaville, ce 5 août 2005.