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Pourquoi le colonel Marcel Ntsourou refuse de sortir de prison

10 juin 2012

Voilà comment on fabrique un dangereux adversaire. « Je te donne tes galons de général. Tu es hors de tout soupçon. Tu es libre. Redevenons amis.  » C’est ce qu’aurait dit en substance Sassou à Marcel Ntsourou. D’ennemi public n°1 qu’il était, il est devenu le chouchou de la République, courtisé comme un amant. Marcel Ntsourou tient sa revanche.

RENVERSEMENT DE SITUATION

Nous avons appris de source sûre que le colonel Marcel Ntsourou refuse la liberté. Emprisonné pour sa supposée implication dans les explosions du 4 mars 2012 à Mpila, le colonel Marcel n’a cessé de clamer son innocence. Il lui était reproché d’avoir tenu un discours anti-Sassou à l’occasion de son anniversaire. Selon ses détracteurs Marcel Ntsourou ruminait également un sérieux grief contre le régime : les galons de général qui lui passèrent sous le nez à l’inverse de ses camarades de promotion, tous montés en grade.

On pourrait d’autant plus comprendre son ressentiment que ses étoiles de colonel, Marcel Ntsourou les doit aux prédecessurs et non moins adversaires de Sassou (Milongo et Lissouba). Là où le bât a blessé l’amour propre du colonel Ntsourou c’est que (selon les rumeurs) il aurait beaucoup contribué au retour en force de Sassou à la tête de l’Etat. Il s’est copieusement sali les mains. Mieux ou pis : Ntsourou aurait joué un grand rôle dans les massacres du Beach.

Voilà que non seulement on le remercia en monnaie de singe mais lorsqu’il exprima son mécontentement on lui mit sur le dos l’une des tragédies les plus sanglantes jamais vécues par le Congo sous Sassou après la boucherie du Beach : la réduction en fumée d’une caserne militaire avec de terribles dégâts collatéraux.

Dossier vide

Plusieurs enquêtes plus tard (dont celle d’un détective indépendant d’origine canadienne) chacun, à commencer par le pouvoir, s’est rendu compte que le dossier de l’accusation était totalement vide. Ntsourou était blanc comme neige dans le drame de Mpila.

Corruption

C’est donc à un homme profondément blessé que Sassou, bon an mal an, a proposé la liberté et une très forte somme d’argent assortie du grade de général. Ca s’appelle corruption. Avec tout le pognon qui circule, au Congo ce système pervers fonctionne à merveille. Mais à la grande surprise de tous, Ntsourou a opposé un niet catégorique. « Je veux un procès en bonne et due forme  » a exigé l’ancien agent de renseignement et de répression de Sassou. « Tes sous et tes grades tu peux te les mettre où je pense  » a pensé fortement l’ancien caïd du Chemin d’avenir. Peut-être que le grade de maréchal pourrait lui faire changer d’avis (sait-on jamais !)

L’épine Ntsourou

C’est qu’un procès, ça ne fait pas les affaires de Sassou. Marcel Ntsourou en sait trop sur les «  affaires  » du régime. Lui donner un micro dans un prétoire risque de mettre le feu à la baraque. Car c’est un Ntsourou très remonté qui va sortir tout ce qu’il a dans le ventre. Ca risque de sentir mauvais, très mauvais. Aujourd’hui Marcel Tsourou réclame la vérité, toute la vérité sur le drame de Mpila. Le prisonnier Ntsourou est devenu une épine dans le pied de Sassou. Celui-ci ne sait plus comment s’en débarrasser. Le grade de général et la très forte somme qui lui ont été proposés ont fait l’objet d’une fin de non-recevoir.

Le grade des grades

C’est un prisonnier qui, désormais, tient Sassou par les couilles. Maintenant que Sassou lui a offert lui-même le fouet, il ne va pas se gêner pour bien le « chicoter » et exiger tout ce qu’il veut. Même la lune dans un seau d’eau. Puisqu’il s’agit d’une histoire de galons, par exemple, en se livrant à un bon chantage en règle, Marcel Ntsourou qui, soit dit en passant, considère Jean-Dominique Okemba comme un cancre , pourrait exiger le grade des grades : celui du chef des armées, c’est-à-dire Président de la République. Mais cette clef-là passe passe par un procès public. Ntsourou le réclame à cors et à cris. Ce n’est pas Me Emmanuel Yoka qui pourrait le lui reprocher.

Pourquoi Marcel Ntsourou refuse de sortir de prison ? Peut-être pour entrer dans une autre dimension.

Qui a dit : «  même les Batéké voulaient diriger ce pays » ?

Mpila n’a pas fini de nous surprendre.