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"11-M le jour où le temps s’arrêta !" roman de Bakala Kimani

Le 11 mars 2004, la ville de Madrid est frappée par des attentats violents et meurtriers et dont la parfaite planification et exécution rappelle les dramatiques et spectaculaires événements d’un certain 11 septembre 2001 au pays de l’oncle Sam. Aux environs de 9 heures du matin, des bombes explosent simultanément dans trois gares différentes : Atocha, El Pozo et Santa Eugenia. Le choix de ces trois lieux par les terroristes s’explique par la grande affluence humaine en ces points de transit à des moments de pointe de la journée particulièrement le matin et le soir. L’objectif (macabre) étant de faire de nombreuses victimes. « C’est le jour de notre malheur, de nos pleurs et de nos souffrances » (p. 14). C’est le jour où le temps s’arrêta dans tout le pays.

Pour son premier coup d’essai littéraire, l’auteur revient donc sur ces événements douloureux du 11 mars qu’il relit sans passion et avec beaucoup de recul. Il a attendu quatre ans pour les mettre par écrit. Il le fait en ressortissant venu d’un pays colonisé d’Afrique (p. 25). Cependant, l’alternance de l’emploi des pronoms personnels de la première personne du singulier « Je » et du pluriel « Nous » traduit un état de fait : différent mais faisant parti du peuple espagnol (p. 23), donc vivant avec les autres.

En compagnie d’Elena, son amie, (p 8. ), au corps svelte et aux beaux yeux (p. 108), Bakala Kimani fait ressortir les angoisses, la douleur et aussi l’impuissance de tous les habitants de l’Espagne et du monde entier devant une telle tragédie. « Au lieu de murmurer, c’est en silence, l’attitude que la nature humaine impose à l’Homme devant un horrible massacre comme celui-là », écrit l’auteur (p.15). Les nouvelles technologies aidant, « On était là, souligne l’auteur, regardant douloureusement les corps entassés jonchés le long des rails » (p. 13), « on voyait des centaines de corps à la gare d’Atocha » (p. 14), « des milliers de blessés à la gare El Pozo et les débris d’un wagon de train saccagé par les explosions à la gare de santa Eugenia » (p.15).

Mais, ce n’est pas à ce port que veut nous faire accoster Bakala Kimani. A travers les différentes péripéties, l’auteur nous fait entrer progressivement au cœur du sujet dont la pointe est en fait l’exploitation politique qui en était suivie. Ce qu’il a appelé « le festin des corbeaux » (p . 21). « Pendant que nous étions affolés…les hommes politiques de tout bord, s’étaient repliés dans leur Quartiers Généraux… et se frottaient les mains » (p. 21). Ces adaptes de la fameuse école de Machiavel de « la fin justifie les moyens » trouvent là une occasion pour marquer un coup politique. La structure même du roman en dit long. Sur les six parties qui le composent, une seule parle des événements du 11 mars. Dans les cinq autres, l’auteur fait un réquisitoire avec des expressions dures de l’inhumanité des hommes et femmes politiques espagnols de gauche « parti de maman » comme de droite « parti de papa » qui se moquent éperdument des victimes et de la douleur des familles éplorées. Le choix et la vigueur des termes employés pour décrire cette situation rappellent Sony Labou Tansi dont une citation sur le terrorisme fait l’incipit de cette œuvre.

On s’accroche à la lecture lorsque advient le moment pour les deux grands partis du pays de chercher à identifier les auteurs des attentats. L’auteur, avec ironie, qualifie cette situation de « Toto tire Nama et Nama tire Toto » (p. 41) des manuels scolaires des années 1970 au Congo communiste. Uter l’ETA ou de Al-Qaïda, deux mouvements qui ont en commun leur mode d’agir mais pas forcement pour les mêmes raisons… Si le parti au pouvoir ou de papa dirigé par Tio Zana comme l’appelle l’auteur penche plus pour la première thèse pour des raisons politiques qu’ETA est l’indubitable auteur de nos attentats (p. 59), le parti de l’opposition ou de maman dirigé par Tio Zapatu opte pour la seconde thèse pour les mêmes raisons. Derrière, se profilait l’ombre du « western » W. Bush dont l’amitié et la proximité avec le parti au pouvoir avait rendu imminente l’attaque terroriste. C’est au cœur de ce duel qu’advient le jour officiel du deuil national, quelques temps après le « Triste dimanche du bonheur » (p. 78), jour de la cérémonie officielle pour les obsèques des victimes devant le couple royal (avec de nombreuses personnes en la cathédrale de Madrid. Là aussi, un autre invité non moins de taille se pointe à la cérémonie sans y être convié par les canaux officiels : l’ombre de Oussama Ben Laden (p. 99).

Cette ombre hante désormais tous les habitants de ce pays. Et sur cette note négative que se termine le roman avec la déclaration d’Elena, fille du pays ; « Cari, il est grand temps que nous allions nous installer en Afrique. Car l’Occident n’est plus un refuge pour personne, pas même pour nous les occidentaux » (p. 109).

Ce roman vaut la peine d’être lu car Bakala Kimani met à nu les mécanismes des luttes politiques pour la conquête du pouvoir. Toutes les opportunités qu’il présente sont à exploiter pour atteindre cette fin. L’insouciance et la froideur des politiciens espagnols devant les drames humains nous aident à comprendre certains choix politiques sous nos tropiques.

Mais, comme tout œuvre humaine, ce roman de Bakala Kimani porte avec lui quelques insatisfactions :

 Tout comme pour les politiciens, les événements du 11 Mars semblent être pour l’auteur un tremplin pour passer au peigne fin le comportement des politiciens. Il est sans doute tombé dans le même piège que les hommes politiques qu’il critique.
 Nous comprenons mal le retour vers l’Afrique que l’auteur préconise. Aurait-il idée un peu négative de l’Afrique ? Nous ne pensons pas davantage que la peur de la mort peut se vaincre par un changement d’espace géographique.


L’auteur :

Né en 1975, Bakala Kimani, congolais de Brazzaville, réside et travaille à Madrid depuis 2003. Familier de la plume, il est l’auteur de plusieurs études et articles et a assuré, pendant ses études théologiques (2000-2002), la direction de la rédaction de la Revue de Théologie Aube Nouvelle de l’École de Théologie Saint-Cyprien de Ngoya (Yaoundé-Cameroun). Il a publié quelques articles sur des sites congolais dont mwinda.org (Un pardon qui fait couler de l’encre et de la salive)

Ce roman est disponible sur la page web de l’éditeur :
http://www.lulu.com/content/2003724 où vous pouvez l’acheter directement.
Il est aussi disponible sur le site de l’auteur www.bkimani.com.
Très prochainement vous pourrez le demander à votre libraire habituel.

Bakala Kimani, "11-M Le jour où le temps s’arrêta !" ,
Lulu Editeur
109 pages.
ISBN : 978-1-8479964-3-5
Prix : 12, 80€

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