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Arrestation de Me Hervé Ambroise Malonga ; "éclairages" du Ministre Emmanuel Yoka

Il faut que la situation soit gravissime pour que le gouvernement congolais envoie au charbon un poids lourd du système, en l’occurrence le Ministre d’Etat Emmanuel Yoka. Les risques, en effet, de se salir les mains sont grands dans une affaire aussi ténèbreuse.

Dans une interview télévisée (Télé Congo), Monsieur Emmanuel Yoka, ministre et cousin du Président congolais Denis Sassou-Nguesso, juriste de son état, a puisé dans toutes ses ressources intellectuelles pour justifier l’arrestation de deux avocats, Mes Hervé Ambroise Malonga et Hombessa.

Les mains sales

L’exercice audiovisuel auquel s’est livré cet homme politique, ça se voit, a été laborieux. Point n’est besoin d’être spécialiste du Droit pour comprendre que, le Ministre, érigé, en procureur de la République, s’est sali les mains au point de donner la "nausée" à toute personne éprise de justice et de paix. Suivons son raisonnement.

Les raisons de la colère

Le ministre qui dit avoir été absent de Brazzaville (sans dire où il était réellement - ô le bel alibi en béton armé !) aurait appris que Me Malonga avait entrepris de donner une conférence de presse dans un hôtel de la place puis, ayant changé d’avis, aurait décidé de la tenir au domicile de son client, le colonel Marcel Ntsourou (dont on apprend qu’il résiderait à la caserne). Comble de tout, cette conférence comptait être dite devant un public entièrement d’ethnie téké.

A un moment où le pays était durement frappé, a poursuivi le ministre, la conférence de presse de Me Malonga semblait inappropriée et n’avait que pour but intellectuel se singulariser son auteur du peuple congolais fortement endeuillé par les centaines de morts et disparus de Mpila, le nombre officiels de victimes n’ayant aucun lien avec le chiffre officiel avançé (sic).

Cette façon de Me Malonga de procéder a été la goutte qui a fait déborder le vase. D’où les raisons de la colère au sommet de l’Etat. D’où l’arrestation de l’avocat qui fut (NDLR) dans un autre procès (celui des Disparus du Beach) avocat de la partie civile.

Privé de liberté mais pas "arrêté"

Selon Monsieur le Ministre, le colonel Marcel Ntsourou n’aurait pas encore été arrêté mais feraitt simplement l’objet d’une enquête administrative. En somme, il est privé de liberté sans être arrêté ! Emmanuel Yoka oppose ce propos digne d’un sophiste à la remarque du journaliste selon laquelle le gardé à vue, Ntsourou, avait besoin d’un avocat et que celui désigné par sa famille ne parvenait pas à entrer en relation avec son client. Pour le Ministre, à ce stade de l’enquête, le colonel Ntsourou, déténu à la DGST, n’avait pas (encore) besoin d’avocat puisqu’il n’était pas (encore) en état d’arrestation ! CQFD.

Dans ses études de Droit, Me Emmanuel Yoka a sans doute oublié que la première chose que les forces de l’ordre posent à un futur gardé à vue est de savoir s’il a besoin d’un avocat (en principe il en a toujours besoin). A moins que le Congo ne soit pas un pays de Droit (qui oserait en douter) la première action des policiers de la DGST aurait été de lire à Monsieur Ntsourou ses droits. Visiblement ce ne fut pas fait.

La Grande Muette

Puis le ministre Emmanuel Yoka de se lancer dans une explication sur les risques judiciaires encourus quand on tient une conférence de presse dans une caserne militaire ou même simplement dans un bivouac. Voilà sans doute pourquoi appelle-t-on l’Armée, La Grande Muette...

Sans doute aussi que dans une caserne militaire, une conférence de presse ou la présence de journalistes, c’est plus dangereux que des vieux obus mal conservés et potentiellement et massivement destructeurs.(Suivez notre regard).

A propos de casernes, si celle des pompiers (soit dit en passant) était bien équipées, il y aurait eu moins de morts à la caserne militaire de Mpila et ses environs. Passons.

Les résidences de Ntsourou

La question est la suivante : où réside Ntsourou ? De toute manière (cf ; Conférence de presse de Me Malonga sur Zenga Mambu) Marcel Ntsourou réside avenue de La Maison d’Arrêt.

Dans une lettre adressée à ses chefs militaires, selon la famille Ntsourou (voir site Zenga Mambu), celui-ci possederait plusieurs domiciles et que ceux-ci auraient tous été perquisitionnés par la police. Rien donc n’indique dans lequel des nombreux domiciles brazzavillois du colonel Ntsourou a failli se tenir ladite conférence de presse. Et pourquoi n’a-t-on pas laissé cette conférence se tenir à l’hôtel Saphyr puisque les casernes, selon la loi, sont des lieux aussi inviolables qu’un Tabernacle ?

Questions de bon sens

L’arrestation (fut-elle administrative) du colonel Ntsourou soulève un nombre important de questions de bon sens dont celles-ci : comment a-t-on su que le public de la conférence serait totalement téké alors que la conférence n’avait pas encore eu lieu ? Que reproche-t-on exactement au colonel Ntsourou, un fidèle du Président Sassou ? S’il s’agit de son éventuelle implication dans les explosions de la caserne de Mpila, pourquoi arrête-t-on cet homme puisque, selon l’explication donnée par le Chef des armées (en l’occurrence le Président de la République) le drame de Mpila était dû à un court-circuit ?

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