Sauf changement de dernière minute (car rien dans les contrats politiques n’est jamais assez certain)Bernard Kolélas rentrera à Brazzaville en compagnie de sa famille pour accompagner son épouse dans son ultime voyage. C’est en tout cas ce que dit le communiqué produit ce vendredi 7 octobre 2005 par la présidence de la République du Congo.
Ci-après le communiqué de la présidence du Congo
Ce communiqué a été lu par le porte-parole de la présidence, Ayessa.
Articulé sous cette forme ce document comporte un enjeu politique évident. Bien que, depuis le début du deuil, aucune prise de parole officielle n’ait eu lieu de part et d’autre, ce communiqué montre qu’il y a eu des tractations dans les coulisses.
De toute façon, il faut s’entourer de nombreuses précautions sémantiques pour interpréter les termes d’un texte qu’on avait d’abord annoncé sous forme de décret et qui s’est transformé en simple communiqué. Un communiqué qui ne "communique" pas assez clairement
Que signifie, par exemple, au sujet du statut judiciaire de Bernard Kolélas, la proposition selon laquelle : "le président de la République a décidé que soit ouverte en sa faveur une procédure d’amnistie" ?
Les jeux ne seraient donc pas encore faits ? Autrement dit le décret qui écraserait la condamnation par contumace de Kolélas n’est pas encore dit puisque le président congolais en est encore à la phase d’invitation du parlement à voter une loi d’amnistie, si ce n’est demain du moins dans les jours à venir.
Mais cela n’a pas empêché de tenir pour acquis dans le milieu Mcddi parisien que la dépouille de Mme Kolélas, accompagnée de sa famille, voyagera pour le Congo ce vendredi 14 octobre. L’arrivée à Brazzaville étant annoncée pour 16h.
L’invitation présidentielle d’ouvrir la procédure d’aministie est à peine formulée que déjà la date et l’heure d’arrivée au Congo de Bernard Kolélas sont déjà connues.
Problème : la charrue a-t-elle été mise avant les boeufs et, par conséquent rien ne ressemble plus à un habillage juridique que le communiqué de la présidence ci-dessus ainsi que la séance parlementaire censée discuter de cette amnistie ?
De toute évidence, le vin a été tiré durant les nombreuses tractations qui ont lieu avant la "sortie" présidentielle de ce vendredi 7 octobre 2005.
On a signalé comme émissaires et agents dans ces tractations, entre autres : l’épouse du président congolais, Antoinette Sassou ; le président congolais en personne (à son retour de Chine), l’ambassadeur du Congo à Paris Henri Lopès (omniprésent auprès de Kolélas), le ministre Alphonse Silou.
L’une des clauses les plus évidentes de ces négociations est l’engagement de Kolélas d’observer une prudence de Sioux durant son séjour parisien. Cette prudence ou cette loi du silence a dû être renforcée avec le décès de son épouse.
En effet, d’ordinaire loquace, tout le monde a été impressionné par le mutisme du leader du Mcddi et de ses ténors parisiens dont personne n’a eu la langue fourchue. Un vrai silence de cathédrale.
Mais personne n’est dupe. En politique tout est monnayable. La question est : qu’a exigé le Mcddi en contre-partie ?
Les mauvaises langues disent : "la prise en charge financière du séjour parisien du couple Kolélas".
Dans ses nombreuses navettes auprès de Kolélas, Henri Lopès avait, semble-t-il, pour mission de convaincre Kolélas de ne pas faire le voyage du Congo. Seuls devaient s’y rendre ses enfants pour accompagner la bière de leur mère.
Kolélas, cela va sans dire, ne l’entendait pas de cette oreille. "Là où sera enterrée mon épouse, je dois y être" n’avait-il cessé de marteler auprès de l’émissaire plénipotentiaire de Sassou.
Le vin a été tiré mais la partie gouvernementale a été contrainte de mettre de l’eau dans son vin. La condition de la présence de Kolélas à Brazzaville a ainsi été mise sur la balance pour faire contre-poids à l’exigence radicale du mutisme de l’ancien maire de Brazzaville formulée par le régime de Brazzaville.
Bref, étant donné le hapy end vers lequel semble s’acheminer le drame sociocongolais de Paris, tout porte à croire que les termes du contrat tacite entre les deux parties ont été respectés.Un accord est parfait, en effet, lorsqu’aucun des signataires n’est satisfait.
Or, vu la colère des partisans de chaque partie (il suffit de lire les réactions sur notre site et sur les autres) cela prouve que cet accord à huis clos est parfait.
De quoi s’agit-il en fait ? De paix, c’est-à-dire de concessions. Qu’on se souvienne seulement de tous les noms que les deux advesaires s’envoyaient à la figure en 1997. Qu’on se rappelle de la farce ridicule à laquelle Kolélas s’était prêté lorsqu’il voulut rentrer de force à Brazzaville via Kinshasa provoquant des sueurs froides chez l’homme de Mpila.
Depuis, beaucoup a coulé sous le pont.
Kolélas, d’ordinaire si tonitruant, a mis la pédale douce durant tout son séjour à Paris. Inimaginable. Sassou si parano dès qu’on évoque le noms des exilés se pourfend désormais dans des communiqués lénifiants. Ne tombe-t-on pas des nues quand on lit par exemple : "L’élan du coeur du Présient de la République exprimé en cette circonstanc intègre son souci constant de consolider l’unité, la réconciliation nationale et la paix si chèrement acquise afin que plus jamais notre pays ne retombe dans la violence et l’horreur."
"C’est de la théorie" diraient ses détracteurs.
Disons que même si ce qui est arrivé au couple Kolélas a fait l’objet d’une exploitation politique de part et d’autre, il reste que rien, voici encore un mois, ne paraissait nous indiquer que Kolélas mettrait pied à Brazzaville en octobre 2005. Le hasard a beaucoup joué dans ce changement politique, ensuite la nécessité a fait loi.
Les chances de la paix, si Kolélas rentre à Brazzaville, sont supérieures aux risques de la "violence et l’horreur" s’il n’y retourne pas.
En tout cas, au regard de ce communiqué, Sassou a pesé le pour et le contre. Il a choisi le "Oui au retour au pays de son adversaire".
Cela dit, rien ne dit , après huit ans d’exil, si le retour de l’ancien maire dans son pays, est définitif ou provisoire....
Le communiqué est flou à ce propos.
Nota :
Prenant la parole à la veillée de ce jeudi 6 octobre, un fils Kolélas a indiqué qu’un cahier de souscriptions avait été ouvert. Bernard Kolélas n’a pas été visible cette nuit du jeudi à Nanterre.
Une veillée funèbre est prévue ce samedi 8 octobre au même endroit à Nanterre.