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Les sans papiers se connectent au Sommet de Nice

31 mai 2010. Calfeutrés dans le blockhaus qu’est le Palais des Expositions de Nice, les chefs d’états africains et leur chef Nicolas Sarkozy (lequel somme toute ne fait que suivre la politique du général de Gaulle tracé dès les années 1960) ne peuvent évidemment pas entendre le bruit que font le collectif des marcheurs sans papiers et les organisations syndicales qui les soutiennent.

La longue marche

Mais la presse a suffisamment relayé l’info pour que les dirigeants noirs se doutent qu’il se passe quelque chose dans la capitale azuréenne. Quelque chose qui tenait de Mao Tsé Toung qui, après avoir effectué un long parcours à travers champs, campagnes et villes changea le visage de la Chine, puissance économique qui aujourd’hui fait peur aux entrepreneurs français réunis autour des chefs d’etats africains et de Nicolas Sarkozy. Ce mouvement mené jadis par le "Grand Timonier" est connu sous le nom de « Longue marche ».

Ce lundi 31, à l’ombre du Sommet françafricain, il y a un air de révolution culturelle dans le regard des manifestants défilant entre Libération et gare ferroviaire en passant par le Bd Malausséna et l’avenue Thiers.

En ce jour, le soleil se lève. Le temps est quasi estival. A l’issue des 1000 kms avalés par ces "déracinés du capital" même si les apparences ne le montrent pas, quelque chose a vu le jour dans le « mouvement de luttes ouvrières » car pour reprendre les propos d’un « sans papier » les travailleurs immigrés font partie du phénomène social que l’histoire répertorie dans la lutte des classes. « Nous avons beaucoup à apprendre des sans papiers qui viennent de nous donner une leçon de luttes sociales » analyse un intervenant lors du débat place de la Libération à Nice. « Nos manifs durent une journée. Or celle des sans papiers a mis un mois » commente l’intervenant qui invite chacun à méditer sur la philosophie des marcheurs. De la détermination, il y en avait chez les marcheurs. Malgré le nombre (une centaine) les "sans papiers" savent qu’ils menent un combat qui concernaient des milliers de personnes en France et qui allait faire date.

Coeurs d’aryenne

Exploités dans leurs pays, chassés de la France : tel était le sort des Africains. Ils savent que leur problème ne toucherait pas ce lundi 31 mai les cœurs des chefs d’états africains endurcis par cinquante ans de mainmise sur l’économie africaine et par autant d’années d’impunité. Démagogie ou réalisme (on ne sait) Joseph Kabila (RDC) aurait exigé la régularisation de tous les sans papiers. Quant au Président Sassou de l’autre Congo, ses préoccupations sont à des années-lumière des problèmes pour lesquels plus d’un millier de manifestants font du bruit dans la ville où lui et ses compères tiennent meeting en salle. Dans une interview à RFI, Sassou aurait exigé, au nom des chefs d’états africains, que l’Afrique ait un siège au Conseil de Sécurité de l’ONU. Pas même une pensée pour les milliers d’Africains que par exemple la politique du « Chemin d’avenir » met dans une totale insécurité matérielle et morale.

Cependant Denis Sassou-Nguesso n’est pas royalement indifférent à ce qui se passe dans la région méditerranéenne où se tient la farce françafricaine qui en est à sa 25 è édition (rien que ça). A en croire Médiatis, la plupart des biens immobiliers pour lesquels les chefs noirs ont ruiné leurs économies sont concentrés sur la Côte d’Azur. Or il y a un vaste contentieux entre les Bongo et les Nguesso depuis la disparition du père Omar. La succession serait ouverte et, visiblement le père Sassou a du mal (Lire La Lettre du Continent) à faire valoir l’héritage que le décès de sa fille Edith devrait lui permettre de capter. Manifestement, comme pour la Villa Suzette du Vésinet, se pose la question du titre de propriété sur les biens immeubles de Nice. La maison de Mont Boron sur les collines de Nice, selon le bureau des hypothèques, est au nom de Bernard Albert Bongo. Edith Bongo y résidait mais elle n’en était pas propriétaire. Encore un caillou logé dans le soulier de Sassou qui doit vachement le faire clopiner.

En marge du Sommet

Ce dimanche 30 mai, une célèbre notaire congolaise a précipitamment fait le voyage Paris/Nice pour rencontrer Denis Sassou-Nguesso au célèbre palace Le Palais de la méditerranée où il adore descendre et où la bouteille de vin coûte 3000 euros. Motif du discret voyage de la notaire : présenter un confrère à Sassou. De quoi s’occupent les notaires si ce n’est de succession et d’héritage !

Lésé dans la succession Ambendet (villa Suzette) Sassou n’entend pas se faire flouer une seconde fois dans la villa du Mont Boron (Lettre du Continent) . Cette fois-ci il veut mettre toutes les chances de son côté pour triompher dans la bataille procédurière qui le met aux prises avec les héritiers d’Omar Bongo.

En marge du sommet de Nice il y a donc, en arrière-plan, un combat familial où Sassou n’entend pas se faire marginaliser. Personne dans ce cas ne saurait dire s’il s’agit d’une courte ou d’une longue marche qui l’attend.

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