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Mort d’un juge

Le face-à-face Mathurin Bayi / Jean-Dominique Okemba

C’est une sale et triste réputation qui colle au petit pays pétrolier d’Afrique centrale comme la tunique de Nessus. La capitale du Congo-Brazzaville a une longue tradition dans l’organisation des procès staliniens sous la houlette de Denis Sassou Nguesso et Joachim Yhomby Opango.

Sassou a finalement eu raison de Mathurin Bayi le juge qui lui tint tête en 2014. Il a utilisé la « technique du Covid » qui ne laisse pas de traces. Guy Brice Parfait Kolélas, Christophe Moukouéké, Clément Mouamba, Bopaka Peinture...ont été éliminés par le même procédé.

REVELATION

Les populations du Congo-Brazzaville, qui n’ont pas la mémoire courte, se rappellent encore comme si c’était hier en 1978 du procès radiodiffusé de l’assassinat du Commandant Marien Ngouabi le 18 mars 1977 présidé par Charles Assemekang et Jacques Okoko comme Procureur de la République et ponctué au début et à la fin des audiences par la voix du Huissier Malonga qui hurlait à tue-tête : « La Cour ! »
suscitant l’hilarité de l’assistance et de l’auditoire. C’est à l’occasion de ce faux procès que l’avocat Jean Martin Bemba fît ses premières armes. Et, c’est au cours de ce même procès que Jacques Okoko lança : « Je ne mangerai plus les avocats » et son tristement célèbre « Mêmes les Batéké veulent diriger ce pays ». C’est donc à la faveur du procès du Colonel Marcel Ntsourou que les justiciables du Congo-Brazzaville découvrirent le magistrat Mathurin Bayi, Président de la Cour d’Appel de Brazzaville et Corneille Moukala Moukoko, Procureur.

C’est comme une habitude, une coquetterie au Congo-Brazzaville, à chaque faux procès, des hommes de loi sortent du lot défiant la médiocrité judiciaire ambiante, provoquant ainsi le courroux du pouvoir. Mathurin Bayi, mwana ouénzé, et Corneille Moukala Moukoko voulaient signifier, à l’occasion du procès du Colonel Marcel Ntsourou, la marque de l’indépendance de la magistrature vis à vis du pouvoir qui trancherait contre l’allégeance et la soumission aveugle ambiante de la justice du Congo-Brazzaville. Mathurin Bayi aligna des moments et des actes de bravoure comme au spectacle, convoquant le tout puissant Jean-Dominique Okemba à la barre. Mathurin Bayi et Corneille Moukala Moukoko ne s’imaginaient pas qu’il paraphait leur acte de décès professionnel. Et, pour Mathurin Bayi, son acte de décès tout court.

PECHE DE LESE-MAJESTE

Comble de provocation, la convocation de Jean-Dominique Okemba à la barre par Mathurin Bayi qui le cuisina en bonne et due forme durant le procès des explosions de l’ECCRAMU. Cerise sur le gâteau, le juge d’origine mbochi Mathurin Bayi confronta le numéro 1 de la sûreté nationale Jean-Dominique Okemba au jeune Kevin, neveu de Marcel Ntsourou. « Je suis le patron de ce pays » aurait clamé l’amiral Okemba à Kevin au cours d’un interrogatoire musclé à son domicile dans les quartiers nord. (Entendez : Sassou était un pantin à ses yeux.) Fou de rage, Jean-Dominique Okemba proféra à la barre des menaces de mort à l’encontre de Kevin son ex homme à tout faire. Le président Mathurin Bayi ramena à la raison le contre amiral Jean-Dominique Okemba qui confondait droit mbochi et droit positif. Qu’on lui remonte les bretelles en public, le patron des services des renseignements garda une dent contre son compatriote, le magistrat Mathurin Bayi. C’en était trop. Le dentiste Okemba lui a présenté la facture en lui ôtant la vie.

JUGE MATHURIN BAYI DANS SON DROIT

Le réquisitoires du procureur Corneille Moukala Moukoko demandant la relaxe de Marcel Ntsourou et le verdict du président Mathurin Bayi le condamnant à 5 ans avec sursis, conformément aux règle de l’art et contraire au droit mbochi, avaient déplu et fait bondir Sassou Nguesso, Aimé Emmanuel Yoka, Jean-Dominique Okemba et Jean-François Ndengué. Les consignes de la condamnation à la prison ferme du colonel Marcel Ntsourou selon le code mbochi n’avaient clairement pas été respectées. C’était un affront. L’esprit et la lettre n’y étaient pas.

Le khalife d’Oyo, Denis Sassou Nguesso, déteste les gens qui lui tiennent tête. Le fils de « Mama Mouébara » préfère les magistrats qui lui obéissent au doigt et à l’œil et qui rampent à plat ventre à l’instar autrefois de Placide Lenga et aujourd’hui de Henri Bouka, Michel Oniangué, Christian Oba, André Oko Ngakala, Charles Emile Apesse…

Benjamin BILOMBOT BITADYS

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