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Soni

Sassou, étranger au sentiment de la honte

Télégramme à Mme Antoinette et aux enfants Sassou Nguesso :
en guise d’honneur à mon père qui m’a appris à éviter la honte, un sentiment qu’on ne prend pas à la légère dans la société arabe et qui vaut généralement au contrevenant le surnom d’amabul, c’est-à-dire fou !

Voici une anecdote concernant notre père, mon géniteur, scandalisé par l’indifférence de Madame Antoinette, les enfants Sassou Nguesso ainsi que ses neveux vis-à-vis du comportement politique de leur mari, père et oncle, Denis Sassou Nguesso qu’on prendrait pour maboul.

En effet, c’est diablement stupéfiant que les parents de Sassou n’aient pas le bon sens d’arracher la coupe de la honte que ce dernier boit goulument, depuis des années. Sans doute, prendra-t-il encore des gorgées l’année prochaine, puisque son parti politique, le PCT, la lui tend encore pour gagner les prochaines élections présidentielles.
Encore récemment, aucun membre de cette famille ne s’est inscrit en faux quand Alassane Ouattara l’a ironiquement affublé du sobriquet d’Empereur. Même pas celui de maréchal (comme Mobutu) ou proconsul (comme Napoléon), simplement Empereur, comme le tristement célèbre Bokassa.

Pourtant, il faut déjà craindre que la coupe soit, cette fois-ci, remplie de ciguë. Mais est-il Socrate pour la boire jusqu’à la lie ?

Mon père, ce héros

Ce qui est vrai, à titre comparatif, notre père, notre propre géniteur, Ange Zanzala, n’était pas un saint ni un ange ; mais il savait éviter la honte, le déshonneur.

Il nous apprenait à ne pas commettre des actions indignes et à ne pas subir des jugements défavorables. Il est, à mes yeux, le père que Marcel Pagnol eut, un papa respectueux des valeurs cardinales de la morale.

Voici trois anecdotes

Première anecdote : un certain 1er janvier, notre père est convié par un de ses meilleurs amis à aller partager une bouteille de vin que ce dernier venait de recevoir de son neveu rentré de France, après de longues études.

L’ambiance y était très bonne puisque Papa y est resté toute la matinée.
Cependant, vers douze heures, alors que nous l’attendions pour monter à table et prendre notre premier repas de l’année, Papa n’était toujours pas là. Pour cause, sa bouche sentait l’odeur de l’alcool et ne voulait pas que ses enfants soient incommodés par les relents éthyliques. Pourtant, à en croire son ami, il n’était pas ivre.
Il avait pris un taxi et était allé se refugier chez un couple ami, sans enfants, pour éviter la honte d’être traité d’ivrogne par les siens.

Puis, il demanda à ce jeune voisin de venir discrètement informer notre mère de sa mésaventure, afin que nous ne l’attendions pas au dîner.
Maman alla enquêter sur la situation pour en avoir le cœur net. Pourtant, ce n’était effectivement qu’une question mineure de look. Elle trouva son mari assis confortablement dans un fauteuil en train de suivre la télé. Que tout le monde l’appelle soulard dans le quartier, c’est ce que mon père n’aurait jamais supporté.

Ce geste de Papa nous parut très exagéré pour justifier son absence à table, le jour du Nouvel An.

Mais, avec le temps, nous comprîmes et nous lui avons donné raison, d’autant plus que les odeurs du vin ne sont pas plus nauséabondes que celles des crimes de sang, de démocratie et économiques.

Deuxième anecdote

Elle concerne le couple présidentiel Sassou Nguesso.
Dans une vieille vidéo qui avait été mise sur les réseaux sociaux, et s’exprimant sur la Conférence Nationale Souveraine au Congo, en 1990, Madame Antoine Sassou Nguesso révèle que pour épargner leurs enfants de toutes les injures ou les histoires qui étaient racontées sur elle et son mari, ils envoyaient tous les enfants dans leurs chambres.

Envoyer les enfants dans leurs chambres veut bien dire qu’ils voulaient bien éviter la honte, de paraître ridicules devant leurs enfants, ou les scandaliser devant les actions ( crimes de sang, de démocratie, de moralité et économiques) dont ils étaient présumés être des auteurs. Qui, diantre, a immunisé Maman Anto et son époux contre le sentiment d’abaissement, d’humiliation qui résulte d’une atteinte à l’honneur et à la dignité ?

Aujourd’hui, le couple Sassou Nguesso n’est plus vilipendé à la Conférence Nationale ; mais dans la presse internationale et les réseaux sociaux, chaque jour, matin, midi, soir. C’est pire qu’à la Conférence Nationale Souveraine.

Même ses homologues chefs d’Etat tournent Denis Sassou Nguesso en dérision. Cas du Président français, Emmanuel Macron, qui l’avait reçu à l’Elysée par la petite porte, sans fanfare et sans tapis rouge alors qu’il l’avait reconnu comme chef d’Etat. C’était, à notre avis, une grande offense faite publiquement avec la volonté de marquer son mépris, de le déshonorer, de l’humilier.

Comme aussi, nous pouvons rappeler le voyage-fiction de Denis Sassou Nguesso aux Etats-Unis lorsqu’il n’était pas attendu à la Maison blanche alors que son avion s’était déjà posé sur le sol américain. Nous ne parlerons pas de la risée dont il a fait l’objet dans le long métrage de son gouvernement avec le Fmi, et du le lessivage dont il a fait l’objet aux obsèques de l’ancien Président du Congo, Jacques Joachim Yhomby Opango, lorsque le père Urbain Braginel Ikonga l’a nettoyé au karcher devant tous les officiels et les membres de son clan. Est-ce pour venger cet affront et châtier sévèrement les Kouyous que l’un des fils de Marien Ngouabi serait, aujourd’hui, accusé de préparer un coup d’Etat ? C’est sûr que cette histoire emportera les cadres militaires et civils originaires d’Owando.

Troisième anecdote

Le mois dernier, nous avons publié, sur notre mur de Facebook, une brève sur l’arrestation des travailleurs au domicile de Me Alexis Vincent Gomèz. Voici ce que nous avons écrit : Victime d’un vol d’ordinateur, Me Alexis Vincent Gomèz serait-il prêt à commettre le crime ? Me Alexis Vincent Gomèz serait victime d’un vol d’ordinateur à son domicile de Brazzaville. Ce qui choque dans le comportement de cet ancien Directeur International du Lions Clubs mais aussi avocat d’affaires de renommée internationale, est que l’homme se fait justice lui-même et ignore le principe de la présomption d’innocence. C’est lui qui impose les méthodes à utiliser dans l’enquête. Tenez, il fit incarcérer au Poste de sécurité du Plateau de 15 ans, pendant des jours et des nuits, tous ses travailleurs : des mères et des pères de famille. Sans respecter le délai de la garde à vue.

Gomez le maboul

Pire, ces derniers ont été, tous et nuitamment, conduits au Cimetière La Grâce où ils ont été séquestrés pendant des heures et des heures et ont subi des tortures et des humiliations, les yeux bandés, et des morceaux de tissus enfoncés dans les bouches pour étouffer leurs cris de détresse.

Pendant ce temps, les policiers tiraient des rafales, comme au temps du monopartisme dans les scènes du Petit Matin, lorsque Denis Sassou Nguesso faisait tuer des innocents citoyens qu’il accusait d’ennemis de la révolution.
Malgré leur innocence recouvrée après toutes les tortures subies et leur libération par le chef de la Police du PSP du Plateau, Me Gomez s’est permis non pas d’engueuler et ridiculiser l’Officier de Police, mais d’appeler son ami, le Directeur Général de la Police, Jean François Ndenguet, pour obtenir une deuxième arrestation de son personnel et son transfert au Commissariat central de Brazzaville.

Cette affaire serait dénouée par un des enfants de Me Gomez, qui vivrait aux Etats-Unis et qui serait avocat de carrière. Il aurait, en effet, parlé à son père avec responsabilité pour non seulement sauver l’honneur de son père ; mais aussi celui de toute la famille Gomez, devant ce qui commençait à être vécu comme un affront. Et, le père fit la volonté de son fils. Les prisonniers furent libérés. Nous saluons ce courage !

Cependant, y aura-t-il une voix qui pourra faire entendre raison ou une main qui pourra arracher des mains de Sassou Nguesso la coupe de la honte qu’il boit depuis des années, afin de sauver le peu d’honneur qui lui reste ?

Serge Armand Zanzala, journaliste et écrivain

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