J’ai pu lire sur internet de nombreux articles concernant la mort de mon frère Roland Bienvenu Faignond... Aucun parent proche n’a pu exprimer ses sentiments profonds sur ce drame qui a désatabilisé toute la pyramide d’une famille dont l’aura remonte au nom du patriarche Emile Faignond disparu le 23 mars 2003..
Six mois après la disparition tragique de mon frère je souhaite que l’oraison funèbre que j’ai écrite et lue lors de ses ses funérailles soit transcrite sur internet et qu’elle soit le témoignage d’une famille brisée par le chagrin, et l’effroi.
A Bienvenu notre frère bien aimé,
Dans le pauvre langage de l’espèce humaine dont nous faisons partie nous n’avons pas pu trouver des mots assez puissants pour traduire et exprimer toute l’acuïté de notre souffrance, toute la profondeur de notre chagrin, toute la grandeur de notre colère et de notre révolte face à ta disparition prématurée et inopinée...
Te perdre dans des circonstances aussi tragiques est le début d’un cauchemar qui n’aura pas de fin pour tous les êtres de ton sang, pour tes amis et tes collègues, pour tous ceux qui te portent dans leurs coeurs. Tu nous manques déjà, tu nous manqueras toujours...
Bienvenu, tu es mort pour ta patrie, cette somptueuse terre congolaise que tu chérissais et pour laquelle tu avais une inneffable allègeance. Que chaque enfant de ce pays ne l’oublie jamais !
Bienvenu, fils de Ma Jacqueline et d’Emile Faignond, toi le papou adoré de tes enfants, le frère chéri des tiens, l’oncle aimé de tous ses neveux, il nous faut seulement 10 mois après la disparition de notre père t’adresser un ultime au revoir ; alors que tu avais encore tant de choses à faire sur cette planète bleue, alors que chacun de nous avait encore infiniment besoin de toi pour continuer à marcher sur le chemin que le ciel a tracé pour lui. Nous pensons tout particulièrement à ta maman, à tes enfants aujourd’hui orphelins.
Bienvenu, tu étais pour notre famille pareille à la pierre angulaire qui soutient un grand édifice. tout s’est écroulé maintenant que tu n’es plus... Que ferons nous sans toi à qui notre père avait passé le flambeau au moment de sa disparition ?
La justice et la vengeance appartiennent à Dieu, cependant une grande vague de douleur et de colère submerge nos âmes à cet instant précis. Nous ne pouvons nous empêcher de penser à cet homme, cet étranger sans visage et sans nom qui en fauchant ta vie a brisé nos existences. Que savait-t-il cet homme de l’être merveilleux que tu étais ; toi dont nous étions si fiers pour tout ce que tu représentais pour chacun de nous :" Lokumu ya famille"...
Chacun ici présent dans cette assemblée habillée d’effroi et de chagrin avait son histoire intime avec toi. Une histoire où revenaient comme dans les notes d’une belle musique les mots : amour, fraternité, amitié, générosité, respect et admiration. ces mots nobles qui à eux seuls faisaient ton aura prestigieux, ton charisme puissant qui se répandaient sur tes proches en les édifiants inéluctablement. Pour tout cela nous te disons merci !
Dés que tes yeux se sont fermés, en cascade des souvenirs ont surgit du fond de nos mémoires. Oui, ils sont arrivés au galop ramenant avec eux un éventail d’images illuminées par ton visage au sourire enjôleur, l’éclat brillant de tes pupilles noires, mais aussi l’écho de cette voix chaude et suave qui dansait dans ces belles chansons que tu as composées et chantées pour nous ces dernières années. Tu m’avais confié en septembre dernier que tu étais devenu un rêveur à l’esprit aussi poète que notre feu papa et ta soeur Emilie Flore...
Tu avais de nombreuses cordes à ton arc et cela te donnait l’aisance de remplir tous les rôles qui t’incombaient tant au sein de ta famille, qu’auprès de tes amis et collègues de travail. Nous t’avons connu étudiant studieux, brillant juriste, exemplaire adjoint au Maire de la ville de Brazzaville, administrateur chevronné à Hydro-Congo et Maire protecteur de la grande agglomération de la commune de Poto-Poto où tu étais le Maire chanteur et enchanteur de cette commune hétéroclite où tu as grandi.
Bienvenu, toi qui a été notre fils, notre père, notre frère, notre oncle, notre ami, notre collègue et qui dans ses chansons s’interrogeait sur l’existence de l’être humain sur la terre.
Yebisa ngai tina ya mokili
To yaki na mokili ko yekola
Mpoto sukuama na miso ya nzabe
Malili na nzoto to ko zonga...
Tu connais aujourd’hui les réponses à toutes ces questions et aux mystères de la vie et de la mort. Et sur lesquels chaque être humain s’interroge et qui devraient lui faire prendre conscience de la fragilité et de la précarité de l’existence quel que soit son rang, sa classe sociale, sa religion ou sa race... Car l’homme est né poussière et il retournera poussière comme le disent Les Saintes Ecritures.
Nous avons encore tant de choses à te dire avant le grand voyage mais ce serait trop long ; aussi avons nous choisi de le faire en silence quand nous serons seul avec toi par la pensée et la prière. Maintenant tu sais tout de nous là, où tu es...
Nous souhaitons de tout notre coeur que sur l’autre rive celle des rires et des fleurs que t’aient attendu papas, Germaine notregrande soeur, Gracia notre petite soeur, Ma Gaby notre tante, Ma Thérèse notre tante et Samantha ta nièce... Et que là-bas auprès d’eux et de Dieu tu trouves le repos, la paix et le bonheur loin de la perversion qui se love trop souvent dans le creuset de l’âme humaine...
Bienvenu, un étranger a fait couler ton sang sur la terre de nos ancêtres ; un étranger nous a privé à jamais de ta présence, mais jamais il ne nous empêchera de t’aimer toujours, car tu continueras à vivre en chacun de ceux de ton sang en particulier ; ta mère, tes enfants, tes frères et soeurs.
Nous demandons au Seigneur de diluer dans nos âmes tout le fiel qui s’y est infiltré depuis ce fatidique jour où tu as été lâchement abbatu dans la rue...
Bienvenu, que le Seigneur Tout-Puissant t’offre sa rédemption, son salut et qu’il t’accueille dans sa lumière éternelle.
On t’aime, on t’aimera toujours. A bientôt frérot !
Ta grande soeur Emilie Flore Faignond