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Abus d’autorité dans un avion. Droits de l’homme bafoués

J’ai croisé Nadine B. "Je reviens de l’enfer" m’a-t-elle dit.
La compagnie Fly est une société qui vole haut dans le cœur de Sassou car sa patronne, d’origine Sud Africaine, est également conseillère à la présidence de Mpila. C’est dans un anglais de haut vol que Nadine s’est faite rabrouer par cette compatriote de Mandela qui a trouvé à Brazzaville un terrain propice pour échapper au chômage qui frappe ses frères noirs en Afrique du Sud.

"I dont speak french" a lancé la conseillère avant de décoller vers un delirium tremens avec l’assurance que confère à un étranger le fait d’avoir le bras long au point de "crasher" sans autre forme de procès tout empêcheur de tourner en rond.
Ce 23 février 2009, ça ne volait pas haut à l’aéroport Agostinho Neto de Pointe-Noire car les Droits de l’homme, de la femme et de l’enfant ont été allègrement largués au cimetière de la morale et de l’éthique.

Sur un coup de fil de la parachutée de Mpila, Nadine a été conduite manu militari au commissariat du Port, le terrible lieu d’incarcération où furent embastillés les militants du RDPS ayant conspué Sassou aux obsèques de Thystète Tchicaya. Pauvre Nadine. Là-bas, dans l’effroyable prison, la malheureuse a été gardée à vue par une espèce des gens d’armes ou des gens en arme (ce n’était pas des gendarmes) travestis en policiers. C’était en fait des Cobras aux yeux desquels, paradoxalement, l’évocation du nom d’un général susceptible de venir en aide à tout prisonnier fait rigoler. "Quand on est pris, me dit Nadine, il est fort déconseillé de monter qu’on connaît du monde dans l’armée. Ton calvaire sera énorme avant que ton protecteur, fût-il maréchal, ne vienne te sortir de leurs griffes. "
Nadine a été cuisinée selon les règles de la bêtise militaire : "Votre identité, d’où-venez-vous, pourquoi avoir empêché l’avion de décoller, vous vouliez montrer quoi, etc."

Toute ça pour avoir fait remarquer au commandant de bord le manque de considération envers des clients d’un vol qui avait accusé six heures de retard. Une explication, des excuses auraient pourtant suffi à apaiser les esprits. Au lieu de ça, la seule alternative offerte aux passager était soit de la fermer soit de sourire béatement. Car c’est la seule philosophie acceptable et acceptée actuellement au Congo. D’ailleurs, Nadine fera les frais de cette philosophie de l’écrasement générale de la population. Elle sera prise à partie par les autres passagers du vol alors que le bon sens aurait voulu que ceux-ci lui soient solidaires."Faites-la descendre" vota à l’unanimité cette bande de lâches. "A l’unanimité, moins une voix" précise Nadine. Un homme, un seul prit le parti de la rebelle. "Faites-nous tous descendre ou laissez-la dans l’avion" dit ce héros. En effet, cet homme appartient à une espèce longtemps disparue au Congo depuis le retour en force de Sassou au Pouvoir.

Bref, après une longue garde à vue, Nadine sera libérée des griffes des Cobras du port de Pointe-Noire.
"J’ai passé la nuit dans un hôtel, à mes frais. Et, le lendemain j’ai été obligée de prendre un autre billet. Son prix ? 40.000 frs cfa"
C’est utile dans ce pays de merde de connaître du monde. C’est un policier haut gradé qui a sauvé Nadine depuis Brazzaville en demandant à un ami policier de s’occuper du cas de "sa soeur".

Vous l’avez compris chers lecteurs, Nadine B. est cette Française (débarquée d’un avion) dont parle l’article de La Semaine Africaine.
Hier mardi 10 mars 2009, assis à la terrasse d’un café azuréen, cette belle demoiselle me narrait sa mésaventure ponténégrine en jurant qu’on ne l’y prendrait plus.


Rappel :

Une Française débarquée d’un avion de la compagnie Mistral à Pointe-Noire

Lasemaineafricaine.com

Pour avoir osé demander à l’équipage les raisons du retard du vol de la compagnie Mistral qu’elle prenait, une passagère de nationalité française a été débarquée de l’avion, sans ménagement. En effet, prévu à 16h, les passagers étant convoqués à 13h, le vol de Mistral du lundi 23 février 2009 n’a quitté l’aéroport de Pointe-Noire qu’à 19h.

L’appareil roulait déjà vers la piste d’envol, lorsque le chef de cabine, une dame à qui la passagère française avait posé la question, a ordonné l’immobilisation de l’avion, pour la faire débarquer, sous le regard médusé et impuissant des passagers à bord. On ne sait pas ce qui lui était exactement reproché.

La passagère française a été, ensuite, conduite au commissariat de police de l’aéroport où elle a été entendue sur procès-verbal. C’est le commissaire adjoint de la police, informé, qui est intervenu, pour la faire libérer, vers 21h.

Et comme un malheur ne vient jamais seul, Mistral a refusé d’embarquer cette passagère, le lendemain, sur ses vols et de lui rembourser son billet d’avion lequel a été confisqué par la police. Pour son voyage sur Brazzaville le jour d’après, elle a dû acheter un autre billet auprès de la compagnie TAC (Trans Air Congo).

Le Congo est-il devenu un far-west où les citoyens ne peuvent plus défendre leurs droits ?

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