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Dolisie :

Centre de formation professionnelle Sala-Ngolo

Comment le mieux est l’ennemi du bien

Je me suis fixé dans cet article une tâche bien ardue : démontrer qu’une réalisation de qualité dans laquelle les prix pratiqués sont moins élevés que partout ailleurs peut être pernicieuse et doit être combattue.

Dolisie voit depuis quelques années se développer sous la direction de la congrégation du Saint Esprit, un centre de formation professionnelle couvrant divers secteurs. Le Centre d’Apprentissage des Métiers Sala-Ngolo bénéficie de très grosses subventions (+/- 1 milliard à ce jour pour l’ensemble de ses activités), le centre bénéficie aussi de la contribution financière des élèves à leur enseignement, il a peu de salaires, les élèves travaillant gratuitement, il n’a pas de charges fiscales, il est exonéré en tant qu’ONG, la multiplicité des métiers qu’il enseigne lui permettent de se doter à moindre frais de structures de qualité.

Parmi diverses sections professionnelles, les pères ont créé une section d’hôtellerie restauration belle et confortable où il fait bon se délasser. Ils y pratiquent des tarifs plus que concurrentiels et bénéficient donc d’une forte clientèle. Vitrine de Sala-Ngolo, cette section pose un vrai problème dans la ville. De ce qui précède, il résulte que Sala-Ngolo peut se permettre de pratiquer des tarifications inférieures à celles du secteur tenu par les opérateurs économiques, qui eux ne bénéficient d’aucun des avantages ci-dessus énumérés.

Si le consommateur y trouve son compte, l’économie locale en pâtit. Devant cette concurrence déloyale les restaurants périclitent et les élèves diplômés ne peuvent pas y trouver d’emploi. La ville ne perçoit plus les taxes et impôts afférents. Sala-Ngolo ne devrait donc pas se poser en concurrent du secteur hôtelier, sa vocation étant de former les jeunes techniciens de ce secteur. Seule solution, relever les tarifs au niveau d’une concurrence de qualité égale.

Le réveillon de la Saint Sylvestre est traditionnellement le meilleur jour de l’année pour les restaurateurs. Je l’ai passé cette année à Dolisie, chez un ami restaurateur. En dépit d’une qualité d’accueil, de services et de prestations d’une très bonne qualité, nous étions 4 convives, il en était de même dans un restaurant concurrent, alors que plus de 300 personnes se pressaient à Sala-Ngolo. On prend ainsi la mesure du désastre.

Sala-Ngolo, a donc bénéficié de près d’un milliard de subventions et la source n’est pas tarie. Dans le même temps une structure d’état existante : le Lycée Technique obtenait du PNUD l’aumône d’une trentaine millions de FCFA pour l’installation d’une salle informatique et d’un atelier de menuiserie. Deux poids deux mesures.

On trouvera ci-après un article et une interview du Père Favre issus du N°1 des ECHOS DU NIARI de décembre 2003

SALA-NGOLO : UN EXEMPLE DE FORMATION QUALIFIANTE

Le centre d’apprentissage des métiers Sala-Ngolo, créé en 1996, par l’association des Pères Spiritains du Congo, se présente aujourd’hui, un véritable creuset de formation des jeunes dont l’âge varie entre 15 et 25 ans ou en difficulté d’insertion sociale. L’objectif est de dispenser une formation professionnelle et qualifiante à ces jeunes dans plusieurs filières : agro-pastorale, menuiserie, arts ménagers, mécanique, soudure/plomberie et informatique, pour une durée d’études de deux ans.

Inauguré le 15 Mai 2003, par le ministre de l’enseignement technique et Professionnel, Pierre Michel Nguimbi, en présence des autorités politiques, administratives et religieuses du département du Niari et bien d’autres invités de marque, le centre de formation Sala-Ngolo spécialisé dans l’encadrement des jeunes se fixe, entre autres objectifs, de partager son expérience aux autres départements du pays.

Section soudure

Implanté, au coeur même de la ville de Dolisie, le centre Sala-Ngolo a eu, pour la première fois, l’initiative d’instaurer les taxi-motos
, dans le cadre des pratiques des enseignements dispensés. Actuellement, le centre accueille 247 apprenants, toutes sections confondues. Il propose aussi à tous les candidats à l’apprentissage des activités développant créativité et le goût de l’entreprenariat : enseignement de base avec remise à niveau : maths/français ; formation civique, religieuse, sanitaire ; activités culturelles et créatives : sport, chant, théâtre, dessin et sculpture ; initiation à l’informatique ; stages en ateliers ; orientations personnalisées ; conception des projets.

Un porc de la section élevage

Dans la section agro-pastorale, le centre Sala-Ngolo est en relation avec le centre agro-pastoral de Mbounda ; réhabilité par le PNUD, grâce à un financement de la banque mondiale. Près de 32 jeunes y pratiquent de l’agriculture et l’élevage des porcs d’une manière autonome car, chacun d’eux est responsable de sa production comme l’a pu le confirmer Mabiala Lucien : « Nous avons été installés par le centre Sala-Ngolo. On évolue indépendamment chacun avec son potager et les produits nous reviennent. Sala-Ngolo n’a pratiquement rien dans ce que nous produisons. L’objectif de ce geste est d’occuper et de lancer la jeunesse, afin de la rendre responsable. Nous bénéficierons également des crédits de porcs de la part de Sala-Ngolo que nous entretenons nous mêmes ».

Le centre est également en partenariat avec le Forum des Jeunes Entreprises, Fal’h Vétérinaires qui assure le suivi sanitaire et zootechnique des élevages et la fabrication d’aliment de bétail. Mais aussi, la ferme avicole de Dolisie dont il assure la distribution des poussins,

Produits finis de la section habillement

Conjointement financé, à hauteur de 349 millions de FCFA, par le secours catholique (20 millions FCFA), l’Ambassade de France (56 millions de FCFA), Auteuil international (7,9 millions de FCFA) et l’Union européenne (149 millions de FCFA), le centre Sala-Ngolo parait, a ce jour, comme l’unique alternative de formation professionnelle, des jeunes déscolarisés ou en difficultés et très souvent délaissés.

Par ailleurs, Sala-Ngolo lutte actuellement, pour avoir le réseau Internet afin que la communication entre la Ville de Dolisie soit à la portée de tous. Un véritable projet qui, nécessairement devrait attirer l’attention de toutes les femmes et de tous les hommes de bonne volonté qui s’attachent aux vertus de développent. Car, la Ville de Dolisie est, aujourd’hui, à reconstruire aussi, à moderniser.

Cyr Armel YABBAT-NGO


Père Lucien Favre, gestionnaire du centre de formation professionnelle de Sala-Ngolo

"DONNER AUX JEUNES LA POSSIBILITE DE S’OUVRIR AU MONDE"

Propriété de la congrégation des Missionnaires du saint Esprit, représentée au Congo, par l’Association des Spiritains du Congo, le centre de formation professionnelle Sala-Ngolo entend œuvrer au développement de la ville de Dolisie, en donnant aux jeunes les possibilités de:s’ouvrir au monde, à partir d’une qualification professionnelle. Dans 1’interview ci-après le gestionnaire du centre, nous rappelle les enjeux de ce dernier.

Le père Lucien Favre

Pourriez-vous nous faire la genèse du centre de formation Sala-Ngolo ?

Le centre de formation Sala-Ngolo est né d’une initiative : des Spiritains au Congo et plus exactement de l’association des Spiritains au Congo qui, dans les années 1970, ont bien voulu mettre l’action sur les œuvres sociales et de développement. C’est ainsi qu’est née l’idée de former les jeunes à des métiers. Aujourd’hui, nous avons franchi 1a première étape, grâce au financement de l’union européenne, de l’appui de l’ambassade de France, du secours catholique et de l’Auteuil international qui a permis la réalisation de ce centre.

A cette étape de réalisation peut-on parler d’une réussite ?

Notre devise est : effort, progrès et réussite. Nous pouvons reconnaître les efforts fournis par les uns et les autres. Lesquels ont abouti, aujourd’hui, à un certain nombre de réalisations. La réussite elle-même est donc pour demain, parce qu’elle se jugera par la capacité d’insérer la jeunesse dans la vie sociale et plus particulièrement dans la vie professionnelle. C’est d’une étape que nous attendons donc avec impatience et, pour nous, la réussite sera la capacité d’insérer nos jeunes dans la vie active.

En un mot, vous avez donc le devoir de donner à cette jeunesse la possibilité de s’ouvrir au monde ?

C’est une illusion de croire d’ailleurs que c’est le paradis. Aujourd’hui, trop de jeunes Congolais rêvent de prendre la fuite de quitter le pays parce qu’ils ne croient plus à leur avenir. Je pense que si certains d’entre eux sont fiers de rester à Dolisie, c’est parce qu’ils sont convaincus de ne point aller chercher ailleurs, c’est déjà bien et nous et nous avons donc à contribuer en faisant en sorte que cette jeunesse puisse se stabiliser, trouver un épanouissement là où elle vit. Nous ne voulons pas décevoir cette jeunesse car, on sait qu’elle peut être dangereuse si elle est trompée dans l’espérance que nous lui avons fait naître. Nous devons aider cette jeunesse à s’insérer totalement dans la société, en lui donnant les possibilités actuelles de s’ouvrir au monde, à travers les petits métiers

Votre rêve le plus fondamental ?

Mon rêve, c’est que chacun puisse trouver sa place dans la société, de redonner espoir parce que les événements qui ont frappe la ville de Dolisie, en particulier, et le département du Niari en général, ont démoralisé plus d’un. Certains jeunes ont perdu la vie. Comme religieux, c’est peut-être une espérance de foi. Mais, faut toujours croire qu’un jour, la vie renaîtra et aujourd’hui, je crois que nous partageons cette foi à Dolisie, qui est celle de ne pas baisser tes bras devant les difficultés, d’aller toujours de l’avant. Je crois que les choses sont telles que nous les fabriquons quand nous sommes découragés. Parce que, nous-mêmes religieux, nous ne croyons pas assez à la capacité de l’homme de contribuer à changer les choses.

Recueillis par Cyr Armel YABBAT-NGO


J’ai très modestement participé à la création de ce centre. J’en connais bien la direction et je n’oserai en rien prétendre que celle-ci n’est pas honnête dans sa démarche. Que ni le père Lucien, ni le père Mathieu ne me tiennent rigueur des propos qui sont ici les miens. Ils ont l’immense chance dans un pays où l’argent ne circule pas, d’en disposer avec un confort dont peu d’ONG peuvent bénéficier.

Leurs réalisations sont remarquables, et j’y ai passé il y a encore quelques jours des moments agréables. Je pense cependant que la rentabilisation par la casse des prix est une faute que la ville et les opérateurs économiques vont payer très cher.

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