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Congo-Brazzaville : Henri Djombo accusé de "pédophilie et d’inceste" devant le tribunal de la presse

Le ministre de L’Environnement, du Développement durable et de l’économie forestière, Henri Djombo, a été accusé par une jeune fille d’avoir abusé d’elle durant des années. Pis, le ministre « aurait goûté à l’inceste en se chargeant bien de ses nièces et cousines. » Toujours selon le témoignage de la jeune fille, c’est un homme « irrécupérable dans le domaine sexuel. »

Informations vraies ou campagne abjecte de déstabilisation ? En tout état de cause, le ministre Henri Djombo pourrait ne pas se remettre de ces accusations.

Témoignages des victimes

"Dieu est mort ! Alors tout est permis", s’exclame un personnage de Dostoïevski. Ainsi les coups bas, les coups tordus, les coups abjects sont-ils permis au pays de la tambouille politique sous le couvercle du remaniement gouvernemental à venir. Dans la fumée que dégage cette rumeur, les Congolais ont dégusté la semaine dernière un ragout exécrable, servi par une pseudo-presse. Dans Brazza-News, un quotidien qui fait fureur dans les réseaux sociaux, une jeune fille accuse le ministre de l’Environnement de "pédophilie". Extrait : " Par sa désinvolture couplée d’une dépravation de mœurs, Henri DJOMBO a gâché ma vie pendant plusieurs années...", confie, les larmes aux yeux, mademoiselle R... qui avoue avoir été abusée par le sexagénaire Henri DJOMBO. Et le quotidien de poursuivre : « Aujourd’hui cette jeune demoiselle comme d’autres sont prêtes de se mettre à table pour étaler au grand jour la bestialité de leur bourreau. C’est pourquoi elles se sont rapprochées de notre Rédaction. »

On frôle ici la préhistoire journalistique. Une presse sans déontologie ni sérieux.

Les membres du Cabinet

Non, la mayonnaise ne prend pas. Une tambouille exclusivement concoctée à base de l’huile de palme crasseuse des témoignages de ces "minettes qui seraient tombées dans la trappe et passées à la casserole" et des membres du cabinet du ministre, lesquels, selon le quotidien, auraient requis l’anonymat. La description que font ces "minettes" de la maison du ministre est invraisemblable : « ... l’entrée de la maison du ministre se trouve dans son garage, à partir duquel on accède au salon. A l’intérieur est située la chambre du propriétaire des lieux dans un couloir. »

Oui, dans toute maison, avant d’accéder dans une chambre, on passe forcément par le salon. Inutile donc d’insister. Les phrases semblent jaillir de la tête d’un singe. De quelle couleur sont les meubles ? Le lit est-il en chêne ? Combien y a-t-il d’écrans de télé ? De tout ça, silence radio. Le roman est faussé. Quand bien même Henri Djombo eût été un Marc Dutroux congolais, il ne se serait pas permis d’emmener ces "minettes" chez lui. Ou alors le ministre de l’Environnement est malade et, dans ce cas, sa place est dans un asile de fous.

Depuis quand Henri Djombo est-il le sérénissime Grand Maître du Droit humain ? Seul Brazza-News le sait et l’on est en droit de se demander si la rédaction de ce quotidien n’est pas composée d’âmes torturées, "d’îles sonnantes". Ils ne servent pas le journalisme, mais leurs envies barbares. C’est à croire que le Congo demeure une jungle au sens étroit du terme.

Akouala aussi

Deux ans auparavant, le sapelogue et ministre chargé des zones économiques spéciales, Alain Akouala, avait déjà été victime d’une campagne de la sorte. Quel plaisir prend un rédacteur, pour ne pas dire un journaliste, à souiller l’image d’un homme public, fut-il d’un autre bord politique ? Sans doute à exprimer sa haine.

Trêve de plaisanteries ! L’on ne joue pas avec l’honneur d’un père de famille, ça ne se répare pas, pour paraphraser Corneille.

A qui profite le crime ?

Oui, quel crédit aura le ministre de l’Environnement auprès de ses enfants s’ils venaient à mettre leur nez dans la casserole de la tambouille ? Aucun. C’est un homme livré en pâtures à la meute enragée. Et l’on sait ce que cela provoqua chez l’ancien Premier ministre français Pierre Bérégovoy...
Selon nos informations, le brûlot aurait été pondu par un certain Milex et Assane Kamara, à la demande de certaines autorités politiques de la Likouala. Et, à défaut de convaincre ou de manier l’imparfait du subjonctif, ils ont franchi l’iconostase de la pudeur et du respect de la vie privée de l’autre. Cette attitude devrait pousser davantage l’élite congolaise, dont le ministre de la Communication, à repenser le devoir de la presse et à établir ses limites. Hélas ! L’on ne peut rien attendre de tel de cette élite savourant plus l’impensée discursive que la verticalité. Seul le poste ministériel fixe le tempo de la politique au Congo quand la calomnie fixe celui de la presse. L’homme public congolais ? C’est "L’homme unidimensionnel (Herbert Marcusse), dont "le mouvement de la pensée est arrêté par des barrières qui apparaissent comme des limites de la raison elle-même". On ne l’écrira jamais assez.

Coupable d’être discret

Henri Djombo est-il coupable ? Que diantre oui ! Il est coupable d’avoir choisi son camp, celui d’accompagner Denis Sassou Nguesso dans le suicide ou la renaissance du Congo ; il est coupable d’avoir fait du Congo le premier pays au monde en matière de lutte contre la déforestation (à ce propos, le rapport de Breton Woods est clair) ; il est coupable d’être discret et de ne pas avoir un gros ventre - signe d’enrichissement rapide au Congo - ; il est coupable d’avoir épousé la tolérance et de respecter l’opinion de l’autre ; il est coupable d’être inamovible à son poste... La seule question qui vaille à son adresse est celle de savoir à qui profite le bois congolais. le reste n’est que littérature immonde. L’attaquer sur son bilan, oui. Mais sur sa personne, non. C’est l’essence même de la démocratie qu’appellent les Congolais de leur vœu qui est remise en cause.

En fait, la presse congolaise n’a que deux aspects : muselée, c’est la barbarie des phrases ; libre, c’est la sauvagerie des mots.

Florence Banzouzi et Viviane Bantsimba

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