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Encore une réaction à propos des élections locales

Mfumu Fylla Saint Eudes : « Le taux d’abstentions qui frôle les 90 % est un signe manifeste du discrédit du pouvoir en place à Brazzaville »

jeudi 10 juillet 2008 Herman Bangi Bayo(AEM)

Éditeur, journaliste, producteur, Mfumu Fylla Saint Eudes [1] était tête de liste du Parti Républicain et Libéral aux élections locales du 29 juin 2008 organisées au Congo-Brazzaville. Le faible taux de participation qui n’aurait pas dépassé les 10 % est, à ses yeux, un indicateur significatif.

Interview

AFRIQU’ÉCHOS MAGAZINE (AEM) : Que retenez-vous des élections locales de 2008 qui viennent de se dérouler ?
MFUMU FYLLA SAINT EUDES (MFSE) : Le taux d’abstentions est très élevé : entre 75 et 90 %, c’est un signe manifeste du discrédit du pouvoir en place. D’autre part, le RMP s’est livré à un vol électoral jamais vécu dans ce pays. Dans ce domaine, le PCT était plus subtil. Nos électeurs, ceux du PRL, tout au moins la frange résiduelle qui a accepté de voter, ont permis au parti de briller au cours de ces élections. Notre parti s’impose désormais comme une force politique incontournable. Au-delà des élections locales, il faut craindre, après ce que nous venons de vivre, que les présidentielles de 2009 ne soient qu’une farce électorale supplémentaire. Les démocrates doivent tout mettre en œuvre pour qu’une commission nationale électorale indépendante soit mise sur pied ; qu’un recensement général soit fait, que le découpage électoral soit revu et que le corps électoral soit maîtrisé. Ce n’est qu’à ces conditions que l’on parlera enfin d’élections libres, transparentes et équitables. Ce que nous vivons depuis 2002 est inadmissible.

AEM : Le Parti Républicain et Libéral (PRL) est l’une des forces montantes de la scène politique congolaise, qu’est-ce qui expliquerait cette percée ?
MFSE : Son credo : faire la politique autrement. Cela suppose au moins trois choses : Envisager le Congo comme un ensemble intégral en tournant le dos à la partition factice Nord/Sud sur laquelle prospèrent les hommes politiques des années 60 ; Mettre l’éthique au cœur de la pratique politique ; Cesser d’agiter, à des fins électorales, le spectre de la guerre comme argument politique. Au Congo, il n y’a pas un camp dépositaire de la paix, donc capable d’assurer son maintien et sa pérennité.

AEM : Les Congolais reprochent aux partis politiques de n’avoir pas proposé des programmes…
MFSE : Cette carence tiendrait, au fond, à la procédure. Le parti au pouvoir, plombé par un bilan désastreux, manie et entretient désormais le réflexe de la peur dans le pays. Cette attitude inquisitoriale est tout, sauf démocratique. La paix est l’un des principes fondamentaux du développement. Or depuis 1997, malgré la paix ‘’armée’’, on constate un recul du pays sur tous les plans. C’est une autre politique qu’attend le peuple congolais. Lorsqu’on parle de paix au Congo, on pense généralement à l’absence de confrontation armée. On occulte, à dessein sans doute, le front de la paix sociale qui est menacé quotidiennement par la misère et la pénurie généralisée. Et cela est un vrai danger. La restauration d’un Congo uni, indivisible et solidaire, voilà une des préoccupations du PRL. La seule façon de développer le Congo, c’est de l’envisager dans sa globalité et non à travers le prisme de la tribu, de l’ethnie et de la région. Cette approche serait suicidaire pour la communauté nationale.

AEM : Êtes-vous satisfait du résultat obtenu par le PRL ?
MFSE : Oui, je suis content des performances du PRL. Le parti a fait sauter les écluses de la fraude et a réussi à gagner, non seulement dans les deux principales villes, mais aussi dans l’hinterland. Il se présente dès lors au dessus des considérations Nord/Sud qui fondent la démarche des politiciens anachroniques qui peuplent encore l’échiquier politique national.

| Propos recueillis à Brazzaville par Herman Bangi Bayo (AEM)

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