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Interview de Me Hervé Ambroise Malonga à RFI

L’ANCIEN BATONNIER ACCABLE SASSOU SUR LES DISPARUS DU BEACH

IL Y A EU PLUS DE 353 DISPARUS

Des hommes et des femmes courageux osent aller à contre-courant de l’idéologie négationniste en vogue à Brazzaville. Me Hervé Ambroise Malonga fait partie de cette catégorie de Congolais qui ne veulent pas baisser les bras face à l’arbitraire du régime et l’impunité dont bénéficient les assassins.

Interviewé par Christophe Boisbouvier, Me Hervé Ambroise Malonga ,ancien bâtonnier du barreau de Brazzaville persiste et signe qu’il y a eu des gens qui ont été tués. Il y aurait même plus de 353 personnes .

Le Président Sassou promet un procès libre au Congo sur les disparus du Beach . Est-ce que vous êtes satisfait ?

* Non ! Nous ne sommes pas satisfaits. Mr Sassou et ses proches sont nommément cités dans cette affaire,ça m’étonnerait que ces magistrats congolais soient à même de juger Mr Sassou. Vous savez que ces Magistrats sont nommés par Mr Sassou lui même.Un procès à Brazzaville serait truqué.

Il y a quand même des magistrats courageux et indépendants. Est-ce qu’on ne peut pas leur accorder le bénéfice du doute ?

*Il y en a quelques-uns uns. Mais je ne pense pas qu’ils puissent juger cette affaire. Il y a eu des procès dans ce pays, des procès qui ont condamné Messieurs Kolelas, Yhombi et Lissouba . Ces personnes ont été condamnées par contumace et lorsque Kolelas demande de venir ici à Brazzaville pour s’expliquer, le même pouvoir le lui interdit. C’est pour dire qu’on ne peut pas faire confiance en notre magistrature

Il y a une deuxième instruction en France, elle est menée par le tribunal de Meaux, près de Paris. Et le président Sassou dénie à ce tribunal le droit d’instruire cette affaire. Qu’en pensez-vous ?

*C’est un tribunal qui a été saisi pour les crimes contre l’humanité, je ne vois pas comment M. Sassou peut dicter sa volonté. Je pense qu’il appartient à ce juge de Meaux qui a été saisi avant qu’il puisse continuer son instruction et d’ailleurs ce qui s’est passé il y a à peine un mois est un peu inhabituel pour la France. Que quelqu’un soit mis en garde à vue et qu’on l’ait sorti de nuit ? C’est inédit, ça n’honore pas la France.

Vous faites allusion au chef de la police congolaise Jean François Ndenguet qui a été arrêté sur ordre de ce tribunal français puis libéré sur ordre du Ministère des affaires étrangères ?

*Oui je fais allusion à ce Monsieur, parce que c’est inhabituel

Justement, le Président Sassou polémique avec la justice française, puisqu’il traite le juge d’instruction de Meaux de petit juge gauchiste. Mais est ce que le président Sassou n’a pas été encouragé dans cette polémique par des autorités françaises qui ont traité ce juge de petit juge de Meaux ?

*Je crois effectivement que le président Sassou a été encouragé par le président français Jacques Chirac. Mais cette attitude est quelque peut déshonorante pour la France, pays de démocratie où il y a la séparation des pouvoirs, la chose a surpris les Congolais. Que l’exécutif puisse se mêler du judiciaire ? En tout cas les Congolais attendent beaucoup de cette procédure qui est ouverte en France et pour laquelle le Congo avait sollicité à l’époque la cour de la Haye pour l’incompétence de ce tribunal. La cour de la Haye avait débouté le Congo au profit du tribunal de Meaux.
Nous pensons que c’est ce tribunal qui va juger cette affaire en toute compétence.

Sur le fond maintenant, le président Sassou affirme qu’il n’y a pas eu de massacre

*Je crois qu’il a poussé le bouchon trop loin ; si vous me permettez le terme, il y a eu des gens qui ont été tués. Il y a son ministre de la communication qui avait dit, qu’on aurait retrouvé quelques personnes. On ne les a jamais vues.

Oui, en effet il y a quelques mois le porte-parole du gouvernement congolais, Alain Akoualat Atipault a affirmé que plusieurs disparus avaient été retrouvés vivants

*C’est archi-faux, ces personnes n’ont jamais été présentées, au départ, ils avaient d’abord dit qu’il y avait des dérapages et enfin, ils vont reconnaître effectivement qu’il y a eu tueries au Beach de Brazzaville.

Est ce certain qu’il y a eu 353 disparus ?

*En tout cas à ma connaissance, il y aurait même plus de 353 personnes, c’est celles qui ont été dénombrées à kinshasa qu’on a amenées au Beach, sans compter celles qui ont été tuées dans les commissariats.

Le Président Sassou affirme : <>

*Moi qui vous parle, j’ai été détenu pratiquement un an sans être jugé. J’ai écrit à M. Sassou ,il ne m’a jamais reçu ; ces cas sont multiples

Le pouvoir de Brazzaville dit également que les morts ont été tués par les leurs, dans les règlements de compte entre Ninja et les personnes qui ont été transportées à Kinshasa, mise à la disposition des autorités congolaises au Beach de Brazzaville

*Il n’y a pas des Ninjas au Beach de Brazzaville, ce sont des militaires et des policiers qui sont au Beach . Comment les Ninjas qui sont dans la forêt peuvent-ils venir donner la mort aux personnes qui ont été mises à la disposition des autorités congolaises ?

Est-ce qu’il y a des indices matériels ou des témoignages qui confirment un tel massacre ?

*Vous savez, M. Touanga qui est à Paris a eu l’occasion de voir son enfant au Beach de Brazzaville. Il a trouvé d’autres personnes qui étaient là, et les autorités lui ont demandé de repasser le lendemain pour chercher son enfant. Malheureusement quand il est reparti, il n’a plus retrouvé son enfant jusqu’à aujourd’hui. Ces cas sont multiples, il y a des rescapés qui vivent en France, il y en a certainement au Congo, et qui se cachent, qui ne peuvent pas s’exprimer

Ils ne parlent pas parce qu’ils ont peur ?

*Ils ont peur.

Est-ce qu’il y a des gens comme vous qui sont prêts à parler sur place ?
*C’est un peut difficile

Et vous, vous n’avez pas peur ?

*J’ai peur ; Mais, J’ai perdu des parents dans ce massacre , il faudra bien que nous arrivions à connaître ce qui s’est passé

La soif de vérité est plus forte que la peur ?

*Je voudrais qu’il y ait la vérité dans ce dossier, que de continuer à avoir peur. Si tout le monde devait avoir peur, on ne ferait rien.

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