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La Cnuced demande l’annulation de la dette africaine

LEMONDE.FR | 30.09.04 "Au rythme où vont les choses, aucun des objectifs du millénaire ne sera réalisé en Afrique non seulement au cours des dix prochaines années, mais au cours des cent prochaines années", affirme dans le rapport le chancelier de l’Echiquier du Royaume-Uni.

Comment sortir l’Afrique de la pauvreté ? Partant du constat que le continent verse davantage d’argent à ses créanciers qu’il n’en reçoit, la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) préconise, dans un rapport rendu public mercredi 29 septembre, d’annuler la dette africaine.

Entre 1970 et 2002, l’Afrique a reçu 540 milliards de dollars environ (438 milliards d’euros environ) en prêts et en a remboursé 550 milliards (446 milliards d’euros) au titre du capital et des intérêts, selon le rapport intitulé Le Développement économique en Afrique - endettement viable : oasis ou mirage ?

Compte tenu de l’accumulation des intérêts, l’Afrique affichait fin 2002 une dette de 295 milliards de dollars (239 milliards d’euros), et les chiffres sont encore plus frappants pour l’Afrique subsaharienne. Celle-ci a reçu pendant la même période 294 milliards de dollars (238 milliards d’euros) de versements, en a remboursé 268 milliards (217 milliards d’euros) au titre du service de la dette mais reste débitrice de 210 milliards de dollars (170 milliards d’euros). La Cnuced souligne également que la dette extérieure de l’Afrique a été multipliée par trente entre 1970 et 1999 alors que le revenu par habitant a stagné.

Dans ces conditions, il est illusoire selon la Cnuced d’espérer que l’Afrique puisse réduire la pauvreté de moitié d’ici à 2015, conformément aux objectifs du millénaire fixés par l’ONU. Pour ce faire, il faudrait au minimum que les taux de croissance actuels doublent pour s’établir à 7 ¨% ou 8 % par an pendant la prochaine décennie, ce qui est "incompatible avec les niveaux actuel et prévu du service de la dette", selon la Cnuced.

Le rapport cite le chancelier de l’Echiquier du Royaume-Uni, Gordon Brown, selon qui "au rythme où vont les choses, aucun des objectifs du millénaire ne sera réalisé en Afrique non seulement au cours des 10 prochaines années, mais au cours des 100 prochaines années". "Etant donné l’importance que la communauté internationale accorde à la réalisation des objectifs de développement du millénaire", conclut la Cnuced, ces objectifs "rendent nécessaire l’annulation de la quasi-totalité de l’encours de la dette".

ABSENCE DE VOLONTÉ POLITIQUE

Mais "en l’absence de volonté politique d’annuler la dette", les auteurs du rapport recommandent dans un premier temps un moratoire sur la dette, en attendant qu’un groupe d’experts indépendants évalue la capacité de remboursement des pays africains sur la base d’un large ensemble de critères.

L’agence de l’ONU souhaite que cette évaluation porte sur la totalité de la dette publique, expliquant que l’initiative visant à réduire la dette des pays pauvres très endettés (PPTE) ne tient pas compte de la dette intérieure. Or, celle-ci est devenue ces dernières années un élément important de l’endettement total des pays africains.

Tout en reconnaissant que le surendettement de l’Afrique est en partie "l’héritage de gouvernements africains irresponsables et corrompus", le rapport fait valoir que les chocs extérieurs, la dépendance à l’égard des produits de base, des programmes de réformes mal conçues et l’attitude des créanciers ont joué un "rôle décisif dans la crise de la dette".

La Cnuced rappelle notamment que la dette africaine a explosé pendant la période 1985-1995 où le continent était sous l’influence des programmes d’ajustement structurels et la surveillance du FMI et de la Banque mondiale. L’endettement extérieur de l’Afrique avait alors atteint un sommet en 1995, à près de 340 milliards de dollars (275 milliards d’euros).

Avec AFP

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