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Les barbouzes congolaises sont-elles tombées sur la tête ? + version officielle

Suite à une alerte invérifiable reçue par mail, Ya Sanza annonçait au conditionnel, voici quelques jours, l’enlèvement par la DGST de monsieur Jean-Pierre Lokenia, membre du PCT et collaborateur de monsieur Justin Lekoundzou Ossetoumba. Depuis la parution de son article, nous avons cherché, sans les trouver, des éléments probants de ces faits. Le Pr Marion Ehouango joint au téléphone nous promettait les copies de dépôts de plainte et d’un constat d’huissier que nous n’avons jamais reçues. Contre toute attente, la confirmation des faits, nous est parvenue du porte parole du gouvernement, le ministre de la communication Alain Akouala Atipault qui a accordé une interview à RFI dans laquelle il semble sous entendre que les preuves contre le prévenu sont en cours de fabrication puisqu’il dit que des armes de guerre ont été trouvées ce qui n’est absolument pas avéré. [1].

Jean-Pierre Lokenia aurait été arrêté pour atteinte à la sûreté de l’Etat et conduit dans les locaux de la DGST où, au mépris de ses droits élémentaires, il n’a pas pu être vu par son conseil Me Hervé Malonga. Nous n’avons aucune intention de prendre prendre parti pour les idées de la branche dissidente du PCT dont fait partie Jean-Pierre Lokenia. Les raisons qu’on invoque pour justifier son enlèvement nous importent peu.
Nous nous insurgeons sur les procédés illégaux et barbares qui entourent cette arrestation, le secret qui l’a couverte 5 jours durant, l’atteinte aux libertés individuelles qu’elle représente et les méthodes destructrices de la perquisition qui a littéralement dévasté le domicile du prévenu.

Vues du domicile de JP Lekonia après le passage des hordes policières

La police congolaise use des pratiques caricaturales que l’on peut voir dans les pires films d’action. Ne pourrait-elle pas suivre de meilleurs exemples ?
Quel que soit le délit commis, il doit aller de soi que les droits élémentaires de l’individu doivent être préservés. Dans cette affaire ils ne l’ont manifestement pas été.

On doit s’étonner dans cette période d’intense activité politique avec l’imminence des élections locales et sénatoriales et l’effervescence marquant le départ de la préparation des présidentielles de 2009, de la maladresse bien peu démocratique qui a présidé à cet enlèvement. Est-ce ainsi que le pouvoir compte recouvrer la confiance du peuple congolais, sérieusement écornée par le simulacre des élections législatives ?

Après l’interdiction temporaire de certains journaux politiquement très engagés dans l’opposition, voici un nouvel accroc au processus démocratique. Si l’alerte n’est pas donnée on peut redouter d’autres atteintes aux quelques libertés que le gouvernement semblait avoir octroyées avec parcimonie aux congolais. Mais ne sont ils pas habitués à ce qu’on leur reprenne avec la main gauche ce qu’on leur avait donné avec la main droite ?

Alain Akouala Atipault martèle dans ses communiqués la nature d’Etat de droit du Congo, et certes le pays est doté de tout l’arsenal législatif pour qu’il le soit. Pourtant ce sont ceux qui édictent les lois, ceux qui sont sensés les faire respecter et ceux dont le rôle est de juger les contrevenants qui les violent en toute impunité. Il n’est pas suffisant de se prétendre démocrate, encore faut-il appliquer les règles de la démocratie et que les responsables aient pour la législation le même respect qu’ils exigent au petit peuple. Le jour où ils le feront, on pourra parler d’Etat de droit au Congo et on n’y verra plus d’enlèvements policiers tel celui dont est victime Jean-Pierre Lokenia.


La version officielle :

Bulletin-Justice
Samedi 10 Mai 2008 à 11:00:00
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(Congo-Brazza)

Affaire Jean-Pierre Lokegna : il ne s’agit pas d’un enlèvement mais d’une interpellation régulière par les services de police, selon le gouvernement

Le ministre de la Communication chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Alain Akouala Atipault, s’est expliqué le 10 mai 2008 en son cabinet de travail sur l’affaire relative à l’interpellation par la police, le mercredi 7 mai 2008, de l’adjudant retraité des forces armées congolaises, Jean-Pierre Lokegna.

En réponse à une certaine opinion qui évoque l’hypothèse d’un enlèvement de Jean-Pierre Lokegna par les services de police, le porte-parole du gouvernement a déclaré qu’il ne s’agissait nullement d’un enlèvement, mais bien d’une interpellation régulière par les services de police. « En effet, a déclaré Alain Akouala Atipault, ce compatriote n’a pas du tout été enlevé. Ce monsieur fait partie d’une association qui ne jouit d’aucune existence légale, pourtant elle se permet de tenir des réunions. Il faut rappeler que Jean-Pierre Lokegna était sous observation des services spécialisés. Et on a retrouvé chez lui des armes de guerre, de la documentation et quelques tracts que l’on peut qualifier de séditieux. À présent, il est en détention à la direction des renseignements judiciaires et sera transféré à la maison d’arrêt pour être ensuite jugé conformément à la loi, et son avocat assurera sa défense. Il n’a donc jamais été enlevé de façon rocambolesque, contrairement à certaines rumeurs qui ont circulé à Brazzaville. »

Pour le porte-parole du gouvernement, cette affaire permet de dire que le pays se veut un État de droit. Comme dans tout État de droit, la responsabilité du gouvernement est de veiller à la stabilité, et les services de sécurité font leur travail. C’est l’occasion de mettre en garde tous ceux qui sont tentés de ramener l’instabilité dans le pays, a-t-il poursuivi.

Abordant l’hypothèse des liens qui existeraient entre Justin Lekoundzou, membre du Parti congolais du travail (PCT), parti au pouvoir, et Jean-Pierre Lokegna, Alain Akouala Atipault s’exprime en ces termes : « On nous dit que cette association Marien Ngouabi et éthique est dirigée par le président Lékoundzou, à qui nous devons le respect parce qu’il a œuvré et continue à œuvrer pour le pays. À notre connaissance et en ce qui concerne ces liens, nous disons non. Nous savons qu’il est depuis plusieurs mois en France pour des soins, et nous sommes dans l’impossibilité d’affirmer que de tels liens existent. »

Willy Mbossa

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