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Ntoumi est rentré plus tôt que prévu à Brazzaville : quels sont les dangers politiques d’une telle présence ?

Quels sont les risques d’une coexistence bicéphale pour Sassou dans le cas de figure (devenu réel) d’un Ntoumi à Brazzaville ? Mainte fois repoussée, cette perspective s’est désormais concrétisée ce samedi 8 septembre 2007. Frédéric Ntoumi a fait son entrée à Brazzaville alors que Sassou est en France.

Chronique d’un retour annoncé

Ntoumi est rentré à Brazzaville ce samedi 8 septembre 2007 soit deux jours avant la date officielle ( 10 septembre).
En avait-il marre de ronger son frein aux portes de Brazzaville (Madibou) ou a-t-il voulu faire une surprise au chef (Sassou) ?
En tout cas ce retour anticipé n’a pas été au goût d’Isidore Mvouba, (Premier Ministre ) . Ce samedi, Mvouba n’a pas arrêté de pianoter son portable pour prendre les ordres auprès de son patron Sassou en villégiature sur la Côte d’Azur. Ce dernier, si loin de Mavoula, a toutes les raisons de se faire du mauvais sang. En dépit de "l’intelligence" que l’opinion soupçonne entre Sassou et Ntoumi, il faut dire aussi que notre curé de campagne est d’un tempérament imprévisible. De quoi donc donner le tournis à l’homme fort de Brazzaville.
Les Brazzavillois, échaudés par les précédents conflits, ont eu du mal à garder leur calme ce samedi.
"Vaquez tranquillement à vos occupations " a conseillé à la télé le Ministre de la Communication Alain Akouala.
En somme il n’y a pas à en faire un foin.
Selon l’AFP, les ex-rebelles, reconnaissables à leur look rasta, sillonnent la ville avec bagages, sans armes. Certains sont accompagnés de leurs familles.
Le retour du chef des Ninja était certes annoncé, mais pas pour cette date-là. Somme toute Ntoumi a posé un lapin (à l’envers) à Sassou. C’est ça aussi la politique : faire le contaire de ce que l’on dit.

Peur sur la ville

Quels sont les dangers liés à ce retour ?
Un problème de cohabitation sociale va se poser entre ces cohortes venues de la forêt et les Brazzavillois. Au-delà de ce problème sociologique, certains observateurs voient poindre à l’horizon une question de cohabitation politique entre le chef rebelle et l’homme de Mpila.
"Autant accepter de coucher dans la même chambre avec un serpent" a noté avec pertinence le chroniqueur de Kimpwaza en raisonnant du point de vue des autorités de Brazzaville. Pour elles (toujours selon Kimpwaza) accepter Ntoumi à Brazzaville correspond au cas de figure d’un promoteur qui construit sa maison sur un volcan.
Désigné pour s’occuper de la question humanitaire auprès de Sassou, l’ancien chef rebelle Frédéric Bitsangou dit Ntoumi ne demeure pas moins un acteur politique qui a des ambitions.
Maintenant qu’il est dans la ville/capitale, tout se passera comme si le système politique avait deux têtes ; une monstruosité que redouterait même un chef d’Etat élu démocratiquement ou qui aurait "la majorité à l’Assemblée"(cas du PCT).
Pour éviter d’en arriver là, Sassou devra jouer fin comme il a su le faire avec Bernard Kolélas dont le charisme, disait-on, allait faire de l’ombre à "L’homme des masses" à son retour au bercail.
Il n’en a pas été ainsi car deux ans après son come-back, sur fond de deuil familial, Kolélas, selon la formule consacrée, mange désormais dans la main de Sassou, comme un toutou.
Sassou pourra-t-il acheter (comme pour Kolélas) la docilité du fougueux guerrier de Loukouo/Vindza ?
Question bête car quand il s’agit de tranquillité du coeur et de paix de l’esprit, l’homme fort de Brazzaville n’a jamais lésiné sur les moyens aussi bien financiers que répressifs. La carotte et le bâton : Otchombé sait manier ces deux instruments indispensables à la gestion stable d’un pouvoir acquis à la sueur de son front.
Ntoumi n’a qu’à donc bien se tenir. Si Sassou ne le tient pas par les "couilles", il le tiendra par la bourse.

Mais en définitive tout est bien qui commence mal. Ce retour est une épine de moins dans le pied de Sassou : pour lui, vaut mieux un Ntoumi à portée de main qu’un rebelle qui joue au "Che Guevara" loin dans l’épineux maquis du Pool.

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