email
Anathème

Réception de l’église Notre-Dame de l’Assomption d’Oyo par Mgr Victor Abagna Mossa : scandale pour les chrétiens et folie pour les Congolais

Dimanche 10 mars 2019, l’évêque ordinaire du Diocèse d’Owando, Mgr Victor Abagna Mossa, a réceptionné, inauguré et consacré l’église Notre-Dame de l’Assomption d’Oyo, le district natal de Denis Sassou Nguesso.

La cérémonie qui s’est tenue en marge des festivités maquant le dixième anniversaire de la mort de Mme Edith Lucie Bongo Odimba, épouse du défunt Président gabonais, Omar Bongo Odimba, a eu lieu en présence d’autres évêques du Congo, en l’occurrence Mgr Yves Monot de Ouesso, et Mgr Urbain Gassongo de Gamboma ; mais aussi des personnalités politiques : Denis Sassou Nguesso, l’homme qui a personnellement financé la construction de cet édifice, l’ancien président béninois Thomas Boni Yayi, et l’ancien directeur du Fmi et conseiller de Sassou Nguesso, Dominique Strauss-Kahn, et bien d’autres.

Mais, cette manifestation a été vécue par les chrétiens comme un grand scandale, et qualifiée par les Congolais, comme une folie. Et, c’est en vain qu’ils ont tous attendu une déclaration de leur ministre de la Communication et porte–parole du gouvernement Thierry Lezun Moungalla, pour dénoncer l’immixtion de son chef politique dans la religion comme il le fait chaque fois que les évêques du Congo prennent position sur un débat politique.

Mais, ce n’est pas cela qui a choqué les chrétiens et les Congolais. Le fait immoral, injuste et révoltant vient de la personnalité de celui qui a fait ce don à l’Eglise, de cet œcuménisme qui ne dit pas son nom et que vivent l’Eglise catholique et la loge maçonnique dont Sassou Nguesso est le gourou. Mais, il y a aussi cette bagatelle de 10 milliards de Francs Cfa qu’aurait coûté le dixième anniversaire d’Edith Lucie Bongo, au moment où le gouvernement multiplie les taxes pour tenter de renflouer les caisses de l’Etat complètement vides, et demande, par ailleurs, aux Congolais de serrer les ceintures. Scandale pour les chrétiens et folie pour les Congolais avons-nous dit ?

Oui, scandale pour les Chrétiens

Les chrétiens de l’Eglise catholique du Congo sont scandalisés parce qu’ils savent tous que Denis Sassou Nguesso n’est plus un frère en Christ. Il est le gourou d’une loge maçonnique en dépit de son baptême en la cathédrale Saint Paul de Dolisie. Et, depuis longtemps, il ne pratique plus sa foi chrétienne. Pour preuve, ses actes barbares contre les Congolais à qui il fait souffrir le martyre, ses nombreux crimes de sang, crimes économiques et politiques.

Tenez ! Il a incarcéré, à la maison d’arrêt de Brazzaville des jeunes mères de famille avec leurs enfants à bas âge, parce qu’elles sont tout simplement les épouses des ninjas, la milice rebelle. Il avait enterré vivant le cardinal Emile Biayenda, juste pour des pratiques mystiques, et tué par empoisonnement trois évêques Mgr Firmin Singha, Mgr Benoit Gassongo et Mgr Ernest Kombo. Il a reconquis le pouvoir qu’il avait perdu lors des élections présidentielles de 1992, en tuant 400.000 personnes. Il conserve le pouvoir qui, pourtant, était arrivé à la fin, conformément à la loi fondamentale du pays, en exterminant un groupe ethnique jugé, à tort, rebelle. Dans sa guerre de reconquête du pouvoir, six jeunes miliciens avaient été enterrés vivants, et quarante pauvres paysans brûlés vifs dans un grenier. Il a fait arrêter arbitrairement et assassiner lâchement des opposants et leurs militants parce qu’ils ont tout simplement refusé de reconnaitre des résultats électoraux estimés truqués. Il a torturé les prisonniers jusqu’à leur arracher la vie. La violence est devenue sa forme de gouvernance et le détournement des biens publics ainsi que l’enrichissement illicite ne sont pas des délits à ses yeux. Il affame le peuple pour le soumettre.
Pourtant, ce n’est pas la première fois que les chrétiens congolais sont trahis par leurs chefs religieux. En 2017, par exemple, ils ont été trahis par la plus haute hiérarchie de leur Eglise, le Vatican.

Une haute trahison du Vatican

Rappel des faits : du 1er au 4 février 2017, le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’Etat où Premier ministre du gouvernement du Vatican effectua une visite de travail au Congo Brazzaville. Pendant son séjour, il fut reçu, tour à tour, par Denis Sassou Nguesso bien qu’il soit un Président illégal et illégitime. Ce dernier a profité de sa présence pour inviter le Pape François à visiter le Congo.

Quant au Premier Ministre, Clément Mouamba, il traduit l’impatience des Congolais sur l’aboutissement de la béatification du cardinal Émile Biayenda, archevêque de Brazzaville, assassiné le 22 mars 1977 par Sassou Nguesso.

Par ailleurs, le cardinal Pietro Parolin s’inclina sur la tombe du cardinal Emile Biayenda en la cathédrale Sacré-Cœur de Brazzaville où il participa à un temps de prière.

Aussi, a‐t‐il visité quelques maisons de retraite et orphelinats, présidé, le samedi 4 février, une messe en la Basilique Sainte‐Anne du Congo.

Mais, les Congolais étaient très perplexes et voulaient savoir si Dieu le père, le Fils et le Saint‐Esprit étaient vraiment présents dans la Basilique, et en communion avec les Congolais au cours de cette grande célébration eucharistique.

Ils se demandaient si le cardinal Pietro Parolin avait réussi, ce jour là, à mettre en communion le peuple congolais qui ploie sous une dictature d’un pouvoir clanique qui ne s’était pas repenti et qui n’avait même pas fait une trêve dans la guerre du Pool, pour respecter l’autorité religieuse et politique, puisque le Vatican est un Etat, qui était en séjour dans leur pays, avant de venir à cette messe.

Rappelons qu’au moment où avait lieu cette cérémonie, le pouvoir de Brazzaville faisait des centaines de morts, et forçait les déplacements à des milliers de Congolais dans le département voisin de Brazzaville, le Pool. Et, à cette cérémonie religieuse, il y avait, sans doute, des orphelins, des veuves, des familles éprouvées et des déplacées de cette guerre du Pool qui sont venus chercher un réconfort moral et spirituel. Mais qui sont repartis sans avoir trouvé la consolation, avec des cœurs et des plaies qui ont saigné davantage parce qu’ayant vu pavaner en la Basilique Sainte‐Anne tous ceux qui sont à l’origine de leurs malheurs. Sur l’esplanade de la Basilique Sainte‐Anne trainaient des éléments de la garde présidentielle, auteurs de la désolation dans leur département.

Comme Judas qui a trahi Jésus, le Vatican a trahi Mgr E. Kombo

Les catholiques congolais avaient déjà un mauvais souvenir du cardinal Pietro Parolin. En tant qu’autorité vaticane, il avait exposé Mgr Ernest kombo à tous les dangers politiques, dans l’affaire dite «  L’homélie de Mgr E. kombo lors des obsèques de Mgr Barthelemy Batantu ».

En effet, il avait adressé une lettre d’excuse aux autorités du Congo Brazzaville, alors que l’homélie de Mgr Ernest kombo s’inscrivait bel et bien dans le cadre d’une prière d’incantation (Mikwa en langue kongo) faite, selon la tradition kongo, à l’occasion de la mort d’un chef traditionnel.

Pourtant, le Vatican avait non seulement retiré à travers ce geste tout son soutien moral et toute sa protection diplomatique et spirituelle à l’évêque d’Owando (une sorte d’excommunion à peine voilée).
Du coup il avait donné plein pouvoir au régime de Brazzaville en vue de traiter les évêques sans ménagement. La suite, tout le monde la connait. Mort par empoisonnement de Mgr Ernest kombo et humiliations à plusieurs reprises des évêques du Congo.

Malgré le passage du cardinal Pietro Parolin qui a consacré le Congo à la Sainte Vierge Marie, au cours de cette messe qu’il avait célébrée en la Basilique Sainte-Anne et à laquelle Denis Sassou Nguesso et son gouvernement avaient participé, le pouvoir de Brazzaville n’a pas changé ses habitudes. Le pays reste sous l’emprise d’un clan brutal et violent. La guerre du Pool avait continué. Un prisonnier, le colonel Marcel Ntsourou, est mort dans sa cellule à la Maison d’arrêt, après avoir été torturé. Les milices politiques du pouvoir continuent à semer la terreur dans le pays et à traumatiser les paisibles populations.

Oui, une folie pour les Congolais

Le pays connait une crise multidimensionnelle très aigue. Les caisses de l’Etat sont complément vides, et le gouvernement prend des lois qui créent des taxes, sans passer par le parlement. Cas de l’impôt foncier créé par le ministre Pierre Mabiala, qui, en réalité, devait faire partie de La loi de finances 2019. Parce que la Loi de finances est le seul acte législatif par lequel le parlement vote le budget de l’État, et autorise le pouvoir exécutif c’est-à-dire le gouvernement à percevoir les impôts et à engager les dépenses publiques, pendant une période déterminée. Mais, la Loi de finances peut contenir d’autres dispositions relatives aux finances publiques. Or, l’impôt foncier n’est pas passé par le parlement. Il est une simple création d’un membre du gouvernement.
En plus, les Congolais apprennent que la fête d’anniversaire de la mort d’Edith Lucie Bongo aurait coûté la bagatelle de dix milliards de Francs Cfa. Or les salaires des fonctionnaires, les pensions de retraites, les bourses des étudiants… ne sont pas régulièrement payés.

Serge Armand Zanzala, journaliste et écrivain

Laissez un commentaire
Les commentaires sont ouverts à tous. Ils font l'objet d'une modération après publication. Ils seront publiés dans leur intégralité ou supprimés s'ils sont jugés non conformes à la charte.

Recevez nos alertes

Recevez chaque matin dans votre boite mail, un condensé de l’actualité pour ne rien manquer.