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Le goût de ça

L’inflation continue d’asphyxier les ménages de Brazzaville

Le feu couve. La flambée des prix embrase les foyers à revenu modeste. L’inflation, qui ne fait pas de quartier, poursuit son travail de sape sur les consommateurs du Congo-Brazzaville en dépit du plan de résilience annoncé avec tambours et trompettes par les collaborateurs de Denis Sassou Nguesso. La hausse des prix agit comme un coup de bambou sur la tête. Les ménages du Congo-Brazzaville étranglés par le niveau des prix continuent de tirer le diable par la queue. Et ce n’est pas fini.

L’ ALIMENTAIRE AU SOMMET

Dans sa dernière mise à jour sur l’inflation alimentaire, La Banque Mondiale souligne que plus de 90 % des pays ont connu, en septembre, une inflation supérieure à 5 %, et que cette augmentation était bien supérieure dans l’alimentaire.

Hausse de 18 % pour le blé entre octobre 2021 et octobre 2022, de 27 % pour le maïs et de 10 % pour le tournesol. Des prix qui resteront élevés jusqu’à la fin de 2024, souligne l’institution de Washington qui s’alarme sur la situation catastrophique des pays pauvres (Le Monde, 20 octobre 2022).

Le septième producteur d’or noir d’Afrique n’est malheureusement pas épargné. Au Congo-Brazzaville, pouvoir faire un ou deux repas quotidiens de sakasaka, de bouillon ébémbé ya Adoula, de bouillon de poisson d’eau douce de mboto ou de ngola, de « maboké » ou de koko-manioc accompagné de safou, d’oranges et de mangues est, jour après jour, un casse-tête.

HAUSSE DES PRIX

Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l’inflation est une perte du pouvoir d’achat de la monnaie qui se traduit par une hausse généralisée et durable du niveau des prix.

Généralement, pour évaluer le taux d’inflation, on utilise l’indice des prix à la consommation. L’indice des prix à la consommation du Congo-Brazzaville est supérieur à la moyenne de la sous-région de l’Afrique centrale (CEMAC) qui est de 4,5 % et de 4,4 % pour la zone UEMOA.

Les experts du Comité Monétaire et Financiers du Congo avaient fait savoir, dans un communiqué publié le 13 mai 2014, que le taux d’inflation du pays pourrait atteindre 11% au cours de l’année 2014. Et, depuis, la situation n’a significativement pas changé. Les dernières prévisions du FMI sur la conjoncture économique mondiale annoncent un ralentissement de la croissance économique, une hausse de l’inflation et une aggravation des risques d’endettement.

Autant dire que les carottes sont cuites.

La reprise de la croissance positive en 2022 en République du Congo pourrait être marquée par une poussée de l’inflation, dont le taux ressortirait à 2,8% au cours de l’année, selon les données officielles du gouvernement, dans sa stratégie de la dette à moyen-terme. En 2023, l’inflation se situerait à 3% et y demeurerait jusqu’en 2024 (Les dépêches de Brazzaville, 6 janvier 2022).

On n’est pas sorti de l’auberge.

MAQUILLAGE

LES STATISTIQUES CONGOLAISES : UNE SCIENCE SANS SAVANT

L’inflation a atteint les 10 % dans la zone euro en septembre 2022 et fin octobre, l’inflation avait atteint 6,2 % en France sur douze mois, et l’inflation au Royaume-Uni les 11,1 % sur un an en octobre, son plus haut taux depuis 1981.

A quel niveau se situe-t-elle au Congo-Brazzaville ? Quelle crédibilité économique accorder à un pays, le Congo-Brazzaville, qui a fait fi des statistiques, ces agrégats économiques d’aide à la décision ? Denis Sassou Nguesso et Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas ont relégué les statistiques au rang de simple machin.

Dans les marchés de Brazzaville, Pointe-Noire, Dolisie et Ouésso, les produits alimentaires locaux (saka saka, bitékoutékou, badi, moussosso, oignons, ndunda bololo, singa, mbéssé, nzombo…) sont hors de prix. Ces produits alimentaires s’échangent à prix d’or et les ménages se rabattent sur les produits surgelés, histoire d’avoir quelque chose dans l’assiette et de se remplir la panse.

C’est la fin des haricots.

Pas étonnant de croiser des petits enfants avec des gros ventres que Sassou Nguesso trouvait le plaisir, à la limite de la jouissance, de brocarder lors de la dernière campagne présidentielle. Quel crédit accorder à ces chiffres sachant que le Congo-Brazzaville est passé maître dans l’art de maquiller les taux ? Le Fonds monétaire international (FMI) en a été victime au sujet de la dette de ce petit pays pétrolier d’Afrique centrale.
Du pur bluff.

Les statistiques ressemblent à une jolie fille qui montre les apparences, fait fantasmer et qui cache l’essentiel.
Montrer sans faire voir : c’est la ficelle du strip-tease.

Dans un contexte d’inflation galopante au Congo-Brazzaville, en dépit des taux officiels qui ne reflètent pas la réalité du terrain, force est de constater que malgré les exonérations fiscalo-douanières prises par Anatole Collinet Makosso, Jean-Baptiste Ondaye, Ludovic Ngatsé, Claude Alphonse Nsilou « Tata yombo » et Paul Valentin Ngobo « Mister Zap », malgré tout cela, le compte n’y est pas.

Et les mauvais comptes font les meilleurs ennemis.

Les populations du Congo-Brazzaville n’arrivent pas à joindre les deux bouts du mois. Elles tirent le diable par la barbichette. « Kaka passi, bouboté mona pélé » dirait Passi Mermans.

La paupérisation des travailleurs pauvres qui se tuent à la tâche et rémunérés par des salaires de misère et celle des agents économiques évoluant dans le secteur informel aux salaires aléatoires devient une urgence sociale. Ce sont eux qui prennent de plein fouet l’envolée des prix des produits alimentaires.

Osons un néologisme : ce sont des réfugiés climatiques de la panse.

La situation idéale serait une réhabilitation des bassins des activités pastorales (Mindouli, Mpassa, Vinza, Kindamba, Mbanza Nganga, Mbanza Mpoudi, Mouyondzi,Bouansa, Louéssé, Diéssé…), une mécanisation de l’agriculture, une forte incitation du gouvernement à une augmentation de biens alimentaires locaux et un mouvement naturel conduisant la Fonction Publique à faire un geste envers ses agents et les entreprises à augmenter les salaires en ponctionnant sur leurs marges ou, pour celles qui sont cotées, sur les dividendes qu’elles reversent à leurs actionnaires.

Le fameux « Allons seulement » devrait se faire vers cet idéal. Alors, comme « perspective d’avenir » tant bassinée par la propagande, cet idéaltype est loin d’être une utopie à la Thomas Moore. Au contraire ! Il s’agit d’une Genèse, puisque ces activités pastorales fonctionnèrent jadis, sous Massamba-Débat, l’âge d’or d’une économie désaliénée du pétrole.

Sous le nouvel empire de L’Alima, l’inflation a entraîné l’érosion du pouvoir d’achat des ménages qui broient du noir, désespérant d’apercevoir la moindre bonne nouvelle. Elle consume, si tant est qu’il en existe encore, les capacités des ménages à faire face au marché.

Le Congo-Brazzaville aborde une période difficile, en particulier pour les ménages. La valse des cartons d’affichage et des étiquettes s’est enclenchée dans les travées des marchés du Congo-Brazzaville, au marché Bouémba, au marché Total, au marché de Ouénzé, au marché du fond Tié Tié à Pointe-Noire, au marché de Dolisie... Et le rythme ne ralentit pas.

Au Marché Total, que les prix s’affichent en lari ou en lingala (selon les jérémiades d’une lanceuse d’alerte congolaise ) l’inflation ronge avec la même fureur le client mbochi, téké, bembé ou vili et, bien sûr kongo-lari.

L’inflation ne connaît qu’un langage : l’orthodoxie financière.

En conséquence, l’inévitable se produit : les dépenses des ménages pour les biens d’équipement et les produits de première nécessité a subi une chute drastique. Le plan de résilience imaginé par Sassou, Makosso, Ondaye, Ngatsé, Nsilou » tata yombo » et Ngobo peine à produire les effets escomptés, c’est-à-dire contenir la poussée inflationniste, c’est-à-dire devient un plan de résignation.

Benjamin BILOMBOT BITADYS

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