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Biens mal acquis. A qui profite le crime ?

A l’aune de l’élection présidentielle congolaise, un rapport du Comité Catholique Contre la Faim et pour le Développement, épingle, entre autres le régime du président congolais. S’agit-il là d’une manœuvre destinée à booster l’opposition ? Voici la partie qui concerne le Congo [1]

Denis Sassou Nguesso est de retour au pouvoir au Congo-Brazzaville depuis 1997, à la suite d’un coup d’État et d’une guerre civile meurtrière. Il avait déjà dirigé de façon très musclée le Congo Brazzaville de février 1979 à août
1992. En 1991, la conférence nationale souveraine du Congo Brazzaville imputait 3 000 assassinats à sa première dictature. Durant l’été 1997, puis en 1998-1999, l’ancien dictateur revient et se maintient au pouvoir par les armes, n’hésitant pas à lancer contre les civils ses milices, les Cobras, qui auront recours à des méthodes criminelles [2]. Le conflit fera plusieurs dizaines de milliers de morts en quelques mois. En juillet 2002, la Cour d’Appel de Paris a donné raison sur le fond à François-Xavier Verschave, auteur de "Noir Silence – Qui arrêtera la Françafrique ?", qui avait qualifié Denis Sassou Nguesso de « dictateur », auteur de « crimes contre l’humanité » au Congo-Brazzaville [3]. En mars 2002, après avoir fait adopter une constitution taillée sur mesure, il est élu officiellement pour un mandat de 7 ans (il était de 5 ans précédemment) avec 89,54% des suffrages exprimés. Il prépare sa réélection en juillet 2009. Le beau-père d’Omar Bongo (Édith Sassou Nguesso, sa fille, décédée en mars 2009, était l’épouse du président gabonais) s’adonnerait aux mêmes pratiques de détournements de fonds, avec toujours la complaisance du gouvernement et des entreprises françaises. [4]

Selon le FMI, entre 1999 et 2002, 248 millions de dollars provenant de l’extraction
du brut n’ont pas laissé de traces dans la comptabilité nationale [5]. Dans le budget 2003, sur les 800 millions de dollars de rente pétrolière, seulement 650 millions $ ont été inscrits … Un fonds vautour [6], FG Hemisphere (), a montré qu’entre 2003 et 2005, c’est près d’un milliard de dollars que les autorités congolaises ont « oublié » de comptabiliser [7] ! Dès 2001, le FMI relevait les affectations de fonds publics congolais dans des comptes privés autres que ceux du Trésor public. [8] Dix ans auparavant, en décembre 1991, la conférence nationale souveraine dénonçait déjà « la responsabilité du chef de l’État dans la mauvaise gestion du patrimoine du pétrole congolais de 1979 à 1991 » [9]. Sassou Nguesso pille ainsi, depuis des années, les richesses du pays. Il a profité des bonus - des prêts gagés ou préfinancements [10] - des diverses commissions sur la vente du pétrole, et de la PID « provision pour investissements diversifiés », véritable caisse noire, non budgétisée de 1997 à 2002. Elf, puis Total, qui fournit à l’État congolais 70% de ses revenus pétroliers, ont été au cœur de ces malversations. Il est aujourd’hui avéré que c’est avec l’argent d’Elf que Sassou a repris le pouvoir par les armes en 1997 [11] . Dès janvier 1999, alors qu’on enfouissait à peine les cadavres dans les rues de Brazzaville, les contacts reprenaient de plus belle entre le Congo et Bolloré, Vivendi, Suez, PPR, etc. Parmi les sociétés forestières, [ tristement célèbres pour la falsification de leurs comptes » [12], on trouve aussi des françaises comme Rougier (également présent au Gabon) et Likouala Timber [13].
André Milongo, unique candidat de l’opposition contre Denis Sassou Nguesso
aux élections présidentielles de 2002, avant de se retirer deux jours avant le
scrutin estimant que les conditions de transparence du scrutin n’étaient pas
garanties, déclarait que « le Congo tire 2 millions de dollars de son pétrole par
jour mais les fonctionnaires ne sont pas payés pendant des mois »
 [14], reprenant
à son compte les accusations répétées de la Banque mondiale selon laquelle le
rendement de l’exploitation pétrolière au Congo est l’un des plus bas du monde.

En effet, même si le Congo a gagné plus de 3 milliards de dollars en 2006 en
revenus pétroliers, il reste l’un des pays les plus pauvres et les plus endettés du
monde. En mars 2006, alors que les ONG congolaises s’étaient mobilisées contre
l’octroi d’un chèque en blanc (allégement de dette) au régime de Sassou et que
le FMI et la Banque mondiale avaient rappelé leurs « sérieuses préoccupations sur la gouvernance et la transparence financière » basées sur la mauvaise gestion du secteur pétrolier [15], le Congo a tout de même bénéficié d’un allégement de dette dans le cadre de l’initiative Pays Pauvres Très Endettés (PPTE), allégement finalement accordé par les institutions financières internationales sous la pression du gouvernement français.

Comme son gendre Omar Bongo, Denis Sassou Nguesso a en effet construit de
solides relations avec Paris. Il est adoubé par les présidents de la République de
gauche comme de droite, y compris Nicolas Sarkozy, qui avait pourtant promis
pendant sa campagne qu’il ne soutiendrait « ni les dictatures, ni les pays dirigés
par des régimes corrompus »
 [16]. Sassou fut reçu à l’Elysée début juillet 2007, quelques jours après l’ouverture de l’enquête du Parquet de Paris pour recel de détournements de fonds dans laquelle il était mis en cause. Il rencontra, à cette occasion, une demi-douzaine de dirigeants de grandes entreprises françaises et quelques ministres à l’hôtel Meurice à Paris, signe du soutien encore constant de la France pour son régime. Comme d’autres chefs d’État africains, il a vraisemblablement su huiler cette amitié hexagonale en alimentant les caisses des partis politiques, comme l’explique Jean-François Probst : « Denis Sassou Nguesso avait été consterné par l’accolade [Chirac-Lissouba, prédécesseur de Sassou Nguesso à la présidence de la République] en juillet 1996. (...) Mais il n’était pas rancunier et déversait à nouveau des sommes faramineuses sur les partis politiques français et leurs équipes dirigeantes ». [17] Une amitié qui coûte cher au peuple congolais, de l’aveu de l’ancien président d’Elf, Loïc Le Floch-Prigent : « tous les mois, lorsque leur pétrole est vendu, les Congolais voient une partie de leur argent aller directement chez Elf pour rembourser [les] armes [de la guerre civile de 1998-1999] » [18].

Des actions judiciaires qui lèvent le voile sur les détournements de fonds

En 2005, l’action judiciaire des « fonds vautours », ces fonds d’investissements
qui rachètent à bon compte la dette des pays pauvres pour mieux les attaquer
devant les tribunaux, a mis à jour au Congo-Brazzaville, un système de détournement à grande échelle de la rente pétrolière via des sociétés écrans contrôlées par des proches du président Denis Sassou Nguesso. Selon les jugements de juridictions britannique et américaine [19], ces sociétés déviaient une partie de l’argent du pétrole vers des comptes bancaires situés dans des paradis fiscaux.
Le 28 novembre 2005, la chambre commerciale de la Cour royale de Londres
condamnait ainsi le Congo à rembourser des créances impayées à Kensington
International, un fonds vautour lui aussi basé dans un paradis fiscal, les Interaméricains.

Au cœur du dispositif, on découvre une petite entreprise basée aux
Bermudes, Sphynx Bermuda, au capital de 12 000 dollars seulement, qui a réalisé des opérations pour un montant de 472 millions de dollars ! Elle achetait du pétrole à la Société Nationale des Pétroles du Congo (SNPC), souvent au-dessous des prix du marché et le revendait sur le marché international. Selon la Cour royale de Londres, il n’y a « aucun lien entre les espèces qui transitaient par ses comptes bancaires et les sommes d’argent qu’elle aurait dû recevoir en contrepartie du pétrole qu’elle vendait ». Ces deux sociétés ont le même dirigeant : Denis Gokana, un proche de Sassou Nguesso. Le fils du président ferait aussi partie du montage. [20]

En avril 2006, c’est au tour d’un juge fédéral américain de juger recevable une
plainte de Kensington International contre le groupe bancaire français BNP
Paribas et la SNPC pour blanchiment d’argent. Ces deux sociétés se seraient
associées pour cacher sciemment aux créanciers de Brazzaville des revenus tirés de la vente de pétrole par le biais d’un système de prépaiement « complexe et structuré de manière inhabituelle. » [21]. Sous la conduite de M. Jean-Bruno Itoua, la SNPC aurait, de 2001 à 2004, réalisé une importante série de transactions fictives complexes avec des compagnies paravents pour piller la richesse pétrolière du pays. Parmi les intermédiaires supposés, on trouve une société enregistrée aux Îles Vierges britanniques avec « pour seul identifiable lieu d’activité... une résidence privée à Monaco ». [22]

Le gouvernement du Congo Brazzaville cache donc sciemment ses revenus
pétroliers. Alors même que 70 % de la population congolaise vit avec moins d’un
dollar par jour, le président Sassou Nguesso et ses proches collaborateurs mènent grand train. Venu prononcer un discours de quinze minutes contre la pauvreté au sommet du 60e anniversaire de l’ONU en septembre 2005, il aurait dépensé 226 000 euros (dont 134 000 euros réglés en liquide !) en notes d’hôtel, pour une semaine [23]. En visite à Paris pour la conférence sur les mécanismes innovants de financement du développement, fin février – début mars 2006 [24], Sassou serait descendu, accompagné d’une délégation de 87 personnes, au luxueux hôtel Meurice [25]. Il aurait réitéré les mêmes exploits en 2006 lors de deux voyages à New York, dépensant plus de 400 000 dollars en factures d’hôtel ! [26]

Procédures

2007 aura été une année un peu plus laborieuse pour Denis Sassou Nguesso. Mis en cause dans la première version du présent document, voilà que son patrimoine est l’objet d’une enquête préliminaire du Parquet de Paris. L’office de répression de la Grande Délinquance Financière, chargé de l’enquête, confirmera
la liste des biens établie dans la plainte déposée en mars 2007 par les ONG françaises sur la base de l’inventaire dressé par le CCFD. On peut ainsi lire que Denis Sassou Nguesso ne fait qu’ « utiliser », selon les policiers, la Villa Suzette du Vésinet (Yvelines). Il y reçoit régulièrement des hommes politiques et entrepreneurs français. [27] Cette coquette demeure de 485 m2 appartenait en fait à son frère aîné Valentin Abemdet Nguesso jusqu’à ce que, quelques semaines avant le décès de ce dernier à la fin 2004, elle soit cédée à une société de droit luxembourgeois aux actionnaires anonymes. La même société offshore aurait été utilisée par Wilfrid Nguesso, neveu du président, selon le journal Libération, pour s’acheter à Paris une Aston Martin (172 000 euros) [28]. En réalité, c’est bien Denis Sassou Nguesso qui possède cette villa au Vésinet. Il explique l’avoir « acquise en 1983 pour abriter [ses] enfants qui faisaient leurs études en France », dans un entretien au Figaro en mars 2009 [29]. La villa Suzette fait aujourd’hui l’objet d’une enquête judiciaire puisqu’une entreprise de travaux réclame plus de 500 000 euros d’impayés [30].

Le président congolais possède également un pied à terre, avenue Rapp, dans le
VIIe arrondissement de Paris. Il déclarait en juillet 2007 que cet appartement ne
possédait que deux chambres [31], mais à en croire les procès verbaux des policiers, il s’agirait plutôt de deux luxueux appartements, appartenant alors à Édith, sa fille et épouse d’Omar Bongo. Les enquêteurs ont également répertorié un appartement de 9 pièces (328 m²), situé avenue Niel dans le XVIIe arrondissement de Paris et acheté en 2007 pour 2 470 000 euros par l’épouse du président, Antoinette Sassou Nguesso. Ils mentionnent aussi le logement de 10 pièces à 1 600 000 euros acquis en 2005 à Paris par leur fils Denis Christel, ainsi que l’hôtel particulier de 7 pièces avec piscine intérieure à Neuilly-sur-Seine acheté 3,15 millions d’euros en 2006 par Julienne, leur fille cadette. Au total, les enquêteurs ont établi qu’onze membres de la famille détenaient pas moins de dix-huit propriétés de luxe en France et 112 comptes bancaires à leur nom dans les établissements hexagonaux [32].

De plus, le travail accompli par le journaliste franco-congolais Bruno Jacquet
Ossébi sur les biens mal acquis « des nouveaux riches congolais » [33] laisse àpenser que beaucoup des proches de Sassou possèderaient des propriétés dans la région parisienne. Ainsi, son neveu Wilfried, qu’il a nommé conseiller politique et qui dirige la société congolaise des transports maritimes (Socotram), possèderait à Courbevoie un appartement de 550 m2 avec une belle terrasse de 100 m². Selon les chiffres des agences immobilières proches, le logement peut être évalué entre 2,5 et 3 millions d’euros. Le neveu du président congolais aurait aussi un faible pour les voitures de luxe : Porsche, Mercedes, BMW, Jaguar et une Aston Martin DB9 auraient leur place dans les sous-sols de l’immeuble. [34] L’enquête de la police révèle que le neveu du président congolais aurait réglé le solde d’achat de l’Aston Martin par un virement émis par Matsip Consulting, une société de droit luxembourgeois aux associés inconnus qui apparaît également comme propriétaire de la villa Suzette… Le frère du président, Maurice Nguesso, PDG de la compagnie pétrolière Likouala SA, plusieurs fois mise en cause par la justice, possèderait une propriété à Argenteuil. Un autre neveu, Edgard Nguesso directeur du domaine présidentiel, posséderait un bel appartement dans le XVIe arrondissement à Paris. L’enquête de la police à Paris a montré qu’il ne possédait
pas moins de 12 comptes bancaires, dont 7 courants. [35]

La liste est longue et hormis la famille de Sassou Nguesso, elle révèle de nombreux biens au Congo ou en France, détenus par l’entourage du président congolais et par de hauts fonctionnaires… à croire que les ressources du pétrole ne profitent qu’à eux ! Les conclusions de l’enquête préliminaire sont tout à fait claires. Le clan de Denis Sassou Nguesso possède en France plus de 18 propriétés et pas moins de 112 comptes bancaires, sans compter les véhicules… Ils possèderaient aussi de nombreuses propriétés en Espagne, au Maroc et au Congo-Brazzaville.

Une chose est sûre, c’est que le clan Sassou ne se cache pas de cette richesse. Le fils du président Sassou Nguesso, Denis Christel Sassou Nguesso, dirigeant de la Cotrade, la filiale de la compagnie pétrolière d’État, la SNPC, en charge de commercialiser le pétrole, a en effet dépensé des centaines de milliers de dollars pour faire ses achats de luxe à Paris, Marbella, Monaco et Dubaï. L’ONG anglaise Global Witness a ainsi révélé fin juin 2007, diffusant sur Internet [36] les factures et relevés de carte bleue, les dépenses extravagantes du fils Sassou (35 000 dollars en août 2006 sur des articles de marque comme Louis Vuitton, Dior et Roberto Cavalli) ! Ces informations ont été communiquées suite à l’enquête d’un juge à Hong Kong, qui a déclaré que les achats avaient été payés avec des fonds provenant de compagnies basées dans le paradis fiscal d’Anguilla, Elenga Investment Limited (EIL) et Long Beach Limited. EIL et Long Beach Limited appartiennent respectivement à Blaise Elenga et Denis Christel Sassou Nguesso. Ces deux compagnies auraient reçu, via d’autres compagnies écrans, des fonds liés à la vente du pétrole congolais. [37]

L’enquête de la police française révèle que Denis Christel Sassou Nguesso possède un appartement 10 pièces avec une chambre de service et un garage, rue de la Tour, dans le XVIe arrondissement de Paris, acheté 1,6 million d’euros en 2005.

Denis Sassou Nguesso s’est ainsi constitué avec ses proches une richesse colossale, qu’il est difficile aujourd’hui de chiffrer. On trouve en 1997 un compte
numéroté de 140 millions $ déposé dans la banque luxembourgeoise SEB et géré
par son ministre de la Justice. Il détiendrait d’autres comptes en Suisse, aux
États-Unis et en France, pour lesquels il n’a jamais été inquiété. Il contrôlerait,
avec sa famille, une bonne partie de l’économie de son pays [38]. Sa fortune était évaluée à plus d’un milliard de francs français (150 millions d’euros) en 1997 par F.-X. Verschave. [39] À l’aune du patrimoine découvert en France et devant l’ampleur des détournements observés par le FMI, il est possible que dix ans plus tard, la fortune du clan Sassou avoisine davantage le milliard d’euros. Un patrimoine imposant pour quelqu’un qui gagnerait environ 30 000 euros de salaire mensuel au sommet de l’État. [40] Le premier intéressé s’en défend, expliquant ne posséder que deux biens en France et que ses « enfants sont majeurs, [qu’] ils organisent [leur vie] comme ils l’entendent. À l’instar de nombreux Congolais hommes d’affaires, commerçants et chefs d’entreprise, ils possèdent des biens immobiliers en France » [41]. Sur le fondement de l’enquête préliminaire menée en 2007, l’antenne française de l’association Transparency International et un contribuable gabonais se sont portés partie civile, avec le concours de l’association Sherpa, dans une nouvelle plainte déposée devant le Parquet de Paris à l’encontre des clans Bongo et Sassou Nguesso, en décembre 2008. C’est cette plainte qui pourrait donner lieu à une enquête approfondie, si la cour d’appel confirme la décision favorable prise en première instance, comme nous l’évoquons plus haut concernant le Gabon et la Guinée équatoriale (voir aussi les chapitres 3 et 5).

Quant à Pascal Lissouba, l’ancien président élu du Congo (1992-1997) renversé
par Sassou Nguesso, il séjourne toujours en France, après son exil à Londres,
dans un hôtel particulier rue de Prony dans le XVIIe arrondissement de Paris.
Il aurait acquis cette villa alors qu’il était encore au pouvoir. C’est M. Houdray,
directeur de la banque d’Elf, la FIBA, qui aurait procédé à l’acquisition à partir
d’un compte du président Lissouba à la FIBA, lequel était alimenté par le ministère des Finances et par des fonds d’origine inconnue. C’est aussi à partir de ce compte que l’épouse Lissouba aurait effectué de nombreux retraits d’espèces qui, parfois, dépassaient le million de francs français. La villa se situe curieusement à côté de la résidence de l’ancien « Monsieur Afrique » de l’Élysée, Jacques Foccart… [42] En juillet 2006, le tribunal de Grande Instance de Paris donne raison au président Pascal Lissouba dans le litige qui l’opposait à l’État congolais au sujet de cet hôtel. Ce dernier en réclamait en effet la propriété…
Pascal Lissouba aurait également profité des largesses de la société Elf. Alfred
Sirven, ancien directeur aux Affaires Générales d’Elf, a reconnu lors du procès Elf
avoir transféré plus de 50 millions de francs français, appartenant à P. Lissouba
du Liechtenstein à Jersey et Monaco. « Il était à l’époque nécessaire de vider
ses comptes et de transférer physiquement l’argent ailleurs. »
 [43]. La caisse noire d’Elf aurait continué de fonctionner sous la présidence de Laurent Jaffré. Benoît Koukébéné, ancien ministre du Pétrole du Congo sous Lissouba, aurait ainsi perçu des pots-de-vin de la compagnie française, 4 millions de dollars versés en 1996 via Jean-Claude Marchiani, préfet du Var et ami de Charles Pasqua. [44]
Une chose est certaine, c’est qu’il ne fait bon enquêter ni pour savoir où va
l’argent du pétrole au Congo Brazzaville ni sur le patrimoine du clan Sassou.
Le régime en place n’hésite pas sur les moyens pour faire taire ses détracteurs.
Nous revenons sur les intimidations et une mort suspecte en marge de la plainte
déposée à Paris à la fin de ce rapport (chapitre 5).

Pendant ce temps, Denis Sassou Nguesso, lui, continue de faire l’objet de tous les égards de la République française. Le 6 décembre 2007, il était invité d’honneur du Forum mondial sur le développement durable, qui se tenait au Sénat, sous le haut patronage du président de la République, devant les représentants du peuple français, consentants. Et ce, malgré les lettres de protestation et la manifestation des ONG devant le Palais du Luxembourg. En avril 2008, l’ambassadeur de France au Congo annonce une rallonge de 80 millions d’euros au plan d’aide de 180 millions octroyé en décembre par Nicolas Sarkozy, contre l’avis des différents services ministériels qui n’en prévoyaient que 113 millions maximum [45]. Le mois suivant, D. Sassou Nguesso reçoit la visite d’Alain Joyandet, le nouveau secrétaire d’État à la Coopération internationale officiant tel un ministre du Commerce extérieur, pour l’inauguration du dernier champ pétrolier de Total, à Moho-Bilondo.

Fin mars 2009, c’est Nicolas Sarkozy qui s’est rendu à Brazzaville.

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