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Centrafrique : Patassé condamné à 20 ans de travaux forcés par contumace à Bangui

BANGUI (AFP) - L’ex-président centrafricain Ange-Félix Patassé a été condamné par contumace mardi à 20 ans de travaux forcés pour "faux et usage de faux" par la Cour criminelle de Centrafrique, qui a disjoint le dossier de détournement de deniers publics le concernant.

« La Cour déclare Ange-Félix Patassé et (son ex-conseiller) Luis Sanchez coupables de faux et usage de faux » et les condamne « à 20 ans de travaux forcés et à 6 millions de francs CFA (9.100 euros) d’amende », selon le verdict rendu en audience publique.

Les deux hommes sont également condamnés solidairement à payer 7 milliards de francs CFA (10,7 millions d’euros) de dommages et intérêts à l’Etat centrafricain.

La Cour « retient » également la culpabilité de M. Patassé et d’un autre ancien conseiller Michel Banguet-Tandet, concernant le détournement de deniers publics, mais ordonne la disjonction du dossier, jugé insuffisamment instruit, et le confie à un juge d’instruction qui a deux mois pour le clôturer.

La Cour les déclare coupables « mais en l’absence d’informations détaillées sur cette affaire se réserve de rendre une décision immédiatement », a expliqué un juriste à l’AFP.

La Cour condamne également l’ancien ministre délégué aux Finances de M. Patassé, Lazare Doukoula, à 20 ans de travaux forcés pour détournement de deniers publics, ordonne la confiscation de tous ses biens « meubles et immeubles » et le condamne à 15 millions de francs CFA (22.900 euros) d’amende et à verser 2 millions de francs CFA (3.000 euros) de dommages et intérêts à l’Etat centrafricain.

MM. Patassé, Sanchez et Doukoula sont en outre privés de leurs droits civiques.

Les quatre accusés étaient jugés par contumace. Le procès s’est résumé à la longue lecture par la Cour de l’acte d’accusation et de renvoi, qui a pris plusieurs heures. Le tribunal, qui siégeait en l’absence de jurés conformément à la procédure de la contumace, s’est ensuite retirée pour délibérer et a rendu son verdit après seulement 30 minutes.

Le cas d’un cinquième accusé, Simon Kouloumba, le seul présent en Centrafrique où il est incarcéré, a été disjoint. Cet autre ex-conseiller de M. Patassé devrait être jugé début septembre.

La justice estime à au moins 70 milliards de francs CFA (106 millions d’euros) les sommes détournées au détriment du Trésor public par les accusés.

Le produit de la vente de 55.000 tonnes de carburant données en 1999 par la Libye à Bangui, alors alliée du président Patassé, avait notamment disparu, selon la justice.

Selon l’accusation, M. Patassé et ses collaborateurs ont également détourné la moitié d’un prêt de 6,6 milliards FCFA consenti par la Libyan Arab Bank en 2000, pour le paiement des arriérés de salaires, bourses et pensions, de même que les montants des hypothèques de certains immeubles appartenant à l’Etat et devant servir au remboursement du prêt.

M. Patassé, élu en 1993 et réélu en 1998, a été renversé le 15 mars 2003 par le général François Bozizé, depuis élu président en mai 2005.

Interrogé par l’AFP à Lomé, où il vit en exil depuis sa destitution, l’ancien président a « récusé » dimanche la Cour criminelle, estimant qu’« elle n’a ni qualité, ni compétence ».

« Je suis un président légitime et légal. Nous ne pouvons éventuellement être jugés que par la Haute Cour de justice pour haute trahison. Or l’Assemblée nationale actuelle, issue d’un régime hors-la-loi et putschiste, n’a pas qualité pour siéger en la demeure », a-t-il estimé.

En avril, la Cour de cassation centrafricaine a renvoyé M. Patassé devant la Cour pénale internationale (CPI) pour divers crimes et exactions commis en Centrafrique contre des civils centrafricains et tchadiens par les forces loyalistes, lors de la répression d’une première tentative de coup d’Etat du général Bozizé, venu du Tchad, en octobre 2002.

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