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Le 1er tour des législatives de 2012 au Congo-Brazzaville

Dire, comme le font les agences de presse, que le PCT du Président Sassou a « remporté 57 des 135 sièges de l’Assemblée au 1er tour » en omettant de préciser les conditions dans lesquelles ce parti les a obtenus (car il s’agit tout de même d’un score brejnevien) c’est prendre les Africains pour des imbéciles.

LA DEMOCRATIE, UN LUCRE EN AFRIQUE

Dire comme les observateurs étrangers dépêchés à Brazzaville que les élections se sont globalement bien déroulées, c’est surtout donner raison à Jacques Chirac qui, dans un moment de condescendance paternaliste, affirma que la démocratie était un luxe pour les Africains. Comment lui donner tort quand Lissouba surenchérit qu’on "n’organise pas les élections pour les perdre". En vérité, à voir la manière dont le PCT a arrosé candidats et électeurs, la démocratie est un luxe et un lucre au Congo. On suppose aussi que les fameux "observateurs étrangers" ont eu leur part de dessous de table.

Comme pour enfoncer le clou, La France de François Hollande s’en est mêlé en faisant des recommandations d’autant plus surprenantes qu’elles viennent d’un homme qui fustigea les dictateurs africains au célèbre discours du Bourget. Certes, ce furent des propos de campagne. Après, il y a la realpolitik avec sa hectolitres d’eau qu’on met dans le vin.

On a appris par la voix du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero, que La France "veut le respect des résultats des législatives au Congo-Brazzaville."

La France, dit-on, a pris "bonne note". Elle appelle différents candidats au "respect des résultats". C’est loin d’être le cas à Gamboma où Sassou a tiré sur la foule (NDLR). "Nous suivrons attentivement le déroulement du deuxième tour et nous appelons les candidats à la retenue et au respect des résultats", a déclaré ce porte-parole. (Le Point.com, 20 Juillet 2012)

Mathias Ndzon, candidat de l’Opposition, a failli être mis aux arrêts pour avoir exigé au Pouvoir de respecter les résultats qui le donnaient gagnant face à Hugues Ngoulondélé, maire de Brazzaville et, par ailleurs, beau-fils de Sassou.

On ne peut qu’être intrigué par les propos du Ministre des Affaires Etrangères de François Hollande qui semble s’adresser particulièrement aux partis de l’Opposition. Décidément la françafrique a la vie dure.

En parlant de « luxe », Jacques Chirac ne croyait pas si bien dire car quand on voit toutes les liasses de CFA alignées par les candidats du PCT (à commencer par la fille de Sassou, Claudia Ikia Lemboumba) pour convaincre les électeurs de voter pour eux, on peut dire, qu’en effet, battre campagne pour entrer au Parlement est un luxe que peuvent se permettre les voleurs, en l’occurrence le clan Nguesso habitué à détourner impunément l’argent du pétrole . Mais la France semble trouver tout ça "régulier" puisqu’elle invite nos voyous locaux de poursuivre la farce politique commencée le 15 juillet dernier.

Abstention record

On reste, en effet, dubitatif quant aux intentions réelles de François Hollande sur l’Afrique. Le vainqueur de Nicolas Sarkozy n’a pas hésité de valider ce que l’Opposant Mathias Dzon appelle « scrutin complètement truqué ». Si le successeur de Sarkozy voulait conforter le dictateur congolais, il ne se serait pas pris autrement. Si ce n’est pas couper l’herbe sous les pieds de ceux qui luttent au Congo pour instaurer le changement, comment peut-on qualifier les déclarations du gouvernement français à propos de la mascarade de ce mois de juillet 2012 où le taux d’abstention a atteint 70% ? Comment les qualifier si ce n’est de la complaisance ou une profonde méconnaissance de la situation congolaise par le nouveau locataire de l’Elysée ? Ou alors l’idée gaulliste selon laquelle « La France n’a que des intérêts, jamais d’amis » reste également valable aux yeux de François Hollande.

Voici l’occasion de rappeler ici cette vérité tactique : «  on doit compter sur ses propres forces pour se libérer.  »

Election partielle à Vindza

N’en déplaise au Ministre français des Affaires Etrangères, les conditions dans lesquelles le PCT de Sassou a raflé dès le 1er tour la majorité des sièges sont simplement scandaleuses. A la corruption des électeurs, le PCT a associé l’intimidation et l’arbitraire. En témoignent le parachutage de l’oncle de Sassou, Emmanuel Yoka à Vindza, pays Lari et l’imposition de Cristel Sassou en tant que candidat unique à Oyo, pays Mbochi.

Hier dimanche 22 juillet, l’élection a été reprise à Vindza où, la semaine dernière, Me Emmanuel Yoka, avait été déclaré persona non grata par les électeurs locaux. Le scrutin fut alors reporté.

Guerre et paix

Interrogé dans la matinée, un notable de Vindza a dit que les habitants de la localité voulaient la paix. Pour peu qu’on procède à une analyse du contenu du discours, on sait que le mot-clé paix associé à celui de PCT veut dire, dans l’entendement de Mpila, qu’il faut laisser Sassou « diriger le pays » au risque de prendre le chemin de la forêt comme en 1998. En d’autres termes le Mbochi Emmanuel Yoka est condamné d’être élu dans ce pays kongo ; de préférence dès le 1er tour. Il pourrait même ne pas se présenter qu’il serait élu. Tout porte à croire que si l’oncle Yoka n’est pas élu à Vindza, il ne répondra plus de rien. A bon entendeur, salut.

En tout cas, ce notable lari qui a peur de la guerre, en cas de défaite du PCT, peut dormir en paix, puisqu’on ne voit pas comment Emmanuel Yoka qui est capable de mettre des avocats en prison (Mes Malonga et Hombessa) pourrait ne pas se mettre des électeurs dans la poche ?

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