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Hildvert Moigny

"Détention illégale d’armes et de munitions de guerre" : une accusation tarte à la crème en pays de non-Droit

Photo: "La détention d’armes de guerre" : une accusation interchangeable à souhait

Hyldevert Moigny a été mis au gnouf pour le chef d’accusation ci-après :
« Diffusion et propagation de nouvelles de nature à porter atteinte à la sécurité et à la défense nationales, à ébranler le moral des populations ; de diffamation et de propagation de fausses nouvelles susceptibles de troubler la paix publique ou de nuire à l’intérêt national ou encore d’ébranler le moral de la Nation et, enfin, de détention illégale d’armes et de munitions de guerre ».(Horizon Africain, 8 avril 2024)

La rage du chien

Logorrhée judiciaire, toute cette langue de bois est une tarte à la crème qu’on met à toutes les sauces judiciaires quand un innocent est traduit en justice dans l’espoir secret de le condamner sans autre forme de procès ou avec un procès sans formes. Quand on fabrique, pour les besoins de l’incrimination, un faux mobile, c’est généralement la même antienne du faux et d’usage du faux ou du crime imaginaire que les tortionnaires déguisés en juges mobilisent.

La locution « accuser son chien de rage pour le noyer » illustre bien la démarche des enquêteurs de Sassou dans l’affaire Hildevert Mouagny, petit révolté, qui bien qu’il ait copieusement servi avec zèle ses bourreaux, est accusé de toutes les abominations dans lesquelles pourtant eux-mêmes excellent dans le quotidien de ceux qu’ils gouvernent ( malgré eux ) sans avoir mandat d’être aux commandes de ce pays, du moins si on peut encore appeler « pays » le Congo quand on veut en céder une portion de terres arables à des métèques Rwandais, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes et surtout pour parer au plus pressé en cas d’insurrection populaire, par exemple en 2026 ou avant.

C’est pour ça que nos Etats de Droit où il y a irrespect décomplexé du Droit sont dits « Etats honteux » (Sony Labou Tan’Si). Les Mouches, La Nausée, Les mains sales, le Congo de Sassou est une synthèse structurelle symbolique des fameuses œuvres de Jean-Paul Sartre.

Hiérarchie des griefs

Passe encore pour les premiers griefs : sédition, critique des autorités, trouble à l’ordre sécuritaire, diffamation, fausses nouvelles et patati et patata et patatras . En effet dans la conscience des Congolais on n’a pas fini de parler, commenter, approuver les 3 ou quatre vidéos Youtube qui ont réellement fait mouche précisément à un moment où 99% des Congolais sont fatigués des dérives et de l’arrogance d’un petit clan dont les membres sont tous issus à 100% d’un petit village de pêcheurs situés au bord de l’Alima, dans le septentrion.

En revanche, pour l’ultime chef d’accusation : « détention illégale d’armes et de munitions de guerre » c’est la goutte qui fait déborder les raisins de la colère. Les bourreaux de Mouangy ne sont pas allés par quatre chemins.
La détention des armes à feu, le nec plus ultra de l’ignominie judiciaire fait infailliblement mouche quand ceux qui t’accusent savent que tu es innocent. Quand un Etat policier veut en finir avec un partenaire dont la tête ne lui revient pas (ou plus), il sort de sa boite à malices cette arme de destruction massive de la raison, allié de la fourberie appelé subrepticement « détention illégale d’armes et de munitions de guerre ».

Diawara, Mokoko Okombi, Ntsourou, Dabira, Albert Oniangué y ont eu droit

Le général Jean-Marie Michel Mokoko (JMMM) eut droit à cette cerise sur le gâteau de la forfaiture. Dans le paquet des crimes qu’une accusation est capable de vous mettre sur le dos, en temps de paix, figure le redoutable flagrant délit de détention de kalach, de grenades, de roquettes, de lance-roquettes , et que sais-je encore, dans la cave de sa maison ou dans le coffre de son véhicule.

André Okombi Salissa n’échappa pas non plus à ce terrible coup de Jarnac des experts en fausses preuves, sbires des l’enquêtes montées de toutes pièces, professionnels des enquêtes à charge et rien qu’à charge.
Anges Diawara, Marcel Ntsourou, Norbert Dabira (lui aussi) eurent droit aussi au piège des armes découvertes après avoir été déposées par ceux qui les avaient découvertes. Comme par hasard.
La propagande pécétiste présenta les citernes d’essence de Mpila comme étant les cibles sur lesquelles Diawara et ses compagnons projetèrent faire pleuvoir des bombes. C’était fou mais faux. Des moyens d’attaques aériennes, le Maquis du M22 n’en possédait point.
Norbert Dabira comptait abattre l’avion à bord duquel voyageait Sassou grâce, selon les enquêteurs, aux roquettes qu’il détenait chez lui.

Le traquenard est imparable : on dépose fusils et munitions à domicile, ensuite on accuse le propriétaire des lieux de les avoir cachés. C’est futé, c’est irréfutable. Le tour est joué et tu deviens le jouet tout désigné de l’arbitraire.
Ce guet-apens est vieux comme le monde. Depuis la « Révolution prolétarienne », depuis Ngouabi, les « réactionnaires », les « chiens couchant de l’impérialisme » sont mangés à cette sauce épicée de la manipulation et des faux chefs d’accusations. Les victimes n’ont pas d’alternative si ce n’est se coucher devant ces preuves (in)tangibles exhibées par nos faussaires.

Mwana ndéssi a léa

Pauvre Moigny, pauvre gueux, pauvre « mwana ndessi » oui tu peux pleurer comme dans la chanson des Piroguiers d’Emile Oboa, les tiens t’ont lâché. A tort ou a dessein ?

Ces armes qu’on l’accuse détenir à l’insu ou au su de son plein gré, n’avait-il pas, lui, chef Cobra, jusqu’à la veille de sa convocation à la ex-DST et avant ses malheureuses vidéos-audios, ces armes, n’avait-il pas le devoir et la mission de les détenir ? Dans la division du travail de mise en coupe réglée du Congo, la députation et les armes, c’était bien son métier non ? lui Oloma niama !

Soyons un peu cyniques, chers amis, soyons « Kia ngui ého !  » : qui mieux qu’un milicien exemplaire et modèle, de la trempe du député Mouagny, a la légitimité de détenir kalachnikovs, revolvers et fusils à pompes à domicile ?
Un milicien sans armes n’est-ce pas le comble du ridicule chers Philippe Obara et Jean-Dominique Okemba ? « Wa tara, wa obia ! Ibo ?  » (en mbochi alima)

Le comble de l’absurde c’est d’attraper un milicien en flagrant délit de détention d’armes de guerre quand, précisément, c’est de son droit et de son devoir d’être en possession desdites armes.
Le métier de milicien, auxiliaire militaire, c’est de tuer les ennemis du régime, de les « kia ngui ého » avec des armes blanches ou à feu.

Comment voulait-on que Mouagny (Cf. entre autres vidéos celle où il est cagoulé) comment voulait-on que ce chef Cobra tuât tous ceux qui en 2016 allaient oser s’opposer au changement de la Constitution préconisé par l’oncle Sassou ? Dites-nous.

Falsifiez, mais faites-le avec finesse, voyons !

Tout ça, manque de cohérence. On reproche à un faucon du régime de posséder par devers-lui, des griffes, instruments de production de la terreur, sans lesquels point de raids.
Innocent comme Ontsou en 1977, Moigny peut pleurer en Téké : « mein nkwui pour la Révolution ». Ontsou, totem sacrifié à l’autel de la conspiration.

Okemba Morazambé

Si du jour au lendemain, Jean-Dominique Okemba alias « Moranzambé » est pris à son tour dans les filets du diable (oui c’est une hypothèse recevable) jouera-t-on les candides quand on trouvera un arsenal dans son Bunker des Quartiers Nord de Brazzaville ? Ce sont pourtant des outils de travail légaux que doit détenir un cadre supérieur du registre sécuritaire du régime de Sassou. Posséder des flingues, Okemba ne s’en cache jamais . Danseur Ekongo, Kébé-kébé, Okemba Jean-Dominique a toujours dansé avec un colt à la main. En pleine chorégraphie il arrive au vice-amiral de faire feu à bout portant, sans raison, juste pour intimider. Si, si, les YouTube de ses chorégraphies viriles existent.

Qu’on arrête le folklore. Détenir des armes de guerre, à titre personnel, est si on ose dire, un droit inaliénable dans une Dictature... comme celle du Congo de Sassou.

Certes, dans le système judicaire congolais, d’abord on accuse, ensuite on invente les preuves.
Puis on te met sur le dos des motifs les plus kafkaïens : « diffusion et propagation de nouvelles de nature à porter atteinte à la sécurité et à la défense nationales »
Pour reprendre le lot d’esprit du député insoumis Louis Boyard : « C’est l’hôpital qui se moque de la charité, en mettant la charrette avant les bœufs ! »
C’est la ruse qui triomphe en métamorphosant l’innocence en culpabilité : Le Châtiment avant le crime. Dostoïevski à l’envers.

Parcours de vie

Le curriculum de ceux auxquels l’ex-milicien Moigny doit preuves et actes d’accusation, notamment Philippe Obara, mérite philippiques.

Sacer du 2 avril 2024 s’en est chargé.

« Ce prêtre piètre policier n’a ni charisme ni personnalité, il a vu sa carrière décoller grâce à sa cruauté vis-à-vis des Congolais. C’est un véritable médiocre pro-max qui cache ses faiblesses professionnelles et intellectuelles par la terreur envers les populations, même dans de la police, personne ne connaît son histoire, on ne lui reconnaît ni compétences ni qualités professionnelles, sauf traquer les opposants et les voix discordantes au sein du régime avec son célèbre chef d’inculpation « d’atteinte à la sécurité de l’état. »
il a été nommé général pour avoir maté dans le sang les contestations des jeunes pendant le changement de la constitution en 2015. Il a été formé à Moscou dans les années 80, où il a fait un stage au KGB , il tient le rôle du boucher de Sassou-Nguesso. »

On pourrait en dire autant de Jean-Dominique Okemba. Les oiseaux de proie de même plumage volent la liberté des honnêtes gens avec le même parti pris.

Mutatis mutandis, en maison d’arrêt, Moigny doit méditer ceci : « En dictature, la repentance des anciens voyous est un délit. »

S. M.

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