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Avis d’expert : Le monde de l’entreprise

Suite à notre article paru sur Congopage sur le contrat de partage de production et l’Ohada, vous aviez été nombreux à nous écrire à titre privé par e mail et à nous encourager à mettre de temps en temps nos réflexions à votre disposition ; nous en sommes très honorés et avons convenu de ne pas vous décevoir : Ainsi nous mettrons à la disposition de Congo page au moins une fois par mois un article qui traitera des sujets liés à l’économie et au monde de l’entreprise.

Le présent article traite de la situation économique actuelle du Congo vue sous l’angle de l’entreprise, en ces périodes de crise financière internationale et de pré élection présidentielle.

A l’heure où le prix du baril de pétrole ne cesse de baisser et surtout les premières décisions prises par l’administration Obama de réduire la dépendance américaine en produits pétroliers risquant de maintenir durablement le prix du baril au deçà de cinquante dollars selon certains analystes ; nous continuons de penser que c’est le moment où jamais pour les autorités économiques de notre pays de mettre l’accent, cette fois dans les faits sur les autres secteurs de l’économie en brisant certains obstacles qui minent l’esprit d’initiative en matière de création d’entreprise, le coût prohibitif pour une personne qui veut créer une entreprise et enfin de faciliter les choses aux partenaires de l’entreprise tels que les banques, les experts-comptables, les avocats, les notaires pour que ces derniers puissent jouer le rôle de premier plan dans le développement économique de notre pays.

Arrivé récemment au Congo, Je découvre avec émoi le manque de politique volontariste d’accompagnement des opérateurs économiques (malgré les efforts des membres de la chambre de commerce) en matière de création d’entreprise, l’accès impossible aux jeunes de pouvoir créer une entreprise et pour la création d’une Sarl avec un capital de 1 000 000 F CFA par exemple, les frais de constitution s’élèvent à 700 000 f Cfa soit 70% du capital qui partent déjà en fumé avant que l’entreprise ne soit opérationnelle, l’absence de conseil et d’assistance appropriés, par des professionnels aux créateurs et surtout le rôle résiduel accordé à la comptabilité dans nos entreprises privées ou publiques alors que cette dernière est un outil de gestion indispensable pour leur développement : A vouloir mépriser les règles de gestion, elles finiront toujours par nous rattraper, telle est la maxime qui gouverne le monde économique et en la matière, les exemples ne manquent pas.

Il ne suffit pas de sortir d’une grande école de gestion, ou des universités de Havard, paris12 … pour être un bon gestionnaire, ce qu’il faut c’est tout simplement s’entourer des techniciens ou faire appel à des professionnels qui ont fait de la gestion leur métier pour aider les opérateurs économiques à réaliser leurs rêves. Une entreprise constitue un tout et il faut l’apport de tout un chacun pour la développer, dans le cas contraire, elle restera une naine ou elle disparaitra aussi vite après sa création.
Dans notre pays, nos opérateurs économiques ne tiennent de comptabilité que dans le but de satisfaire aux obligations fiscales et d’autres personnes qui ont des affinités avec cette administration pensent que la tenue d’une comptabilité est inutile, si non comment peut on expliquer que des entreprises aussi stratégiques de notre pays puissent cumuler des retards dans la production de leurs états financiers ? Loin l’idée de pouvoir enfoncer mes collègues experts-comptables et commissaires aux comptes qui font leur travail avec dévouement et implication personnelle sans faille, je suis de ceux qui pensent que la mise en place des institutions professionnelles telles que l’ordre national des experts-comptables, la compagnie nationale des commissaires aux comptes dans notre pays deviennent urgentes car ces institutions ont un rôle de sensibilisation, d’information, et d’avant-garde à jouer dans le développement économique du Congo ; développement qui va de paire avec le rôle jouer par des partenaires de l’ entreprise, des pays comme le Cameroun, le Gabon et tous les pays de l’Afrique de l’ouest l’ont compris, raison pour lesquelles ils jouissent d’une économie à nous faire pâlir, pourtant nous n’avions rien à leur envier au point du vue potentiel économique, comment expliquer qu’un pays comme la cote d’ivoire, divisé en deux depuis 2002 puisse disposer encore d’une économie qui fonctionne ?

Unissons-nous dans une réflexion globale, et mettons en place des conditions pour des actions locales et nous verrons que notre pays le Congo sera encore meilleur car la crise financière qui touche le monde économique ne nous fera pas de cadeau, les occidentaux ne vont penser qu’à régler leurs problèmes et les nôtres resteront à jamais devant nos yeux si nous ne faisons rien.

Depuis le quatrième trimestre 2008, notre économie est entrée en hibernation suite à la crise financière et à la situation pré électorale : les grandes décisions dans nos entreprises publiques et privées sont reportées en 2010 ! Les filiales des multi nationales sont beaucoup plus préoccupées par la situation internationale, nos quelques PME et PMI sont en quasi-cessation de payement, nos banques sont de plus en plus frileuses et se refugient derrière des dossiers mal montés pour refuser l’octroi des découverts bancaires et des crédits à nos entreprises…

Je suis de ceux qui pensent que l’économie de notre pays va à l’abîme et ne saura longtemps supporter la présente situation et qu’un plan de sortie de crise avec l’appui des économistes et du monde économique congolais devient impératif ; dans le cas contraire tous les efforts que nous avons faits depuis, risquent de partir en fumée :

Nos cabinets qui disposent maintenant de mêmes compétences que nos autres collègues occidentaux doivent aussi être accessibles aux acteurs économiques de part les services offerts et le prix de nos prestations ; cette idée véhiculée depuis une trentaine d’années dans notre pays qui rend les cabinets d’expertise comptable accessibles qu’aux grandes entités a causé beaucoup de tort à notre économie et a mystifié ce métier pourtant (sous d’autres cieux ) ouvert à la fois aux artisans, aux pharmacies, aux boulangers, aux garagistes du coin, qu’aux grandes entités du CAC 40 : Dans un pays comme la France, dans des conditions précises, un créateur d’entreprise est accompagné presque gratuitement par un cabinet d’expertise comptable, des dispositifs d’aide financière aux créateurs d’entreprise existent , le premier reflexe d’un acteur économique est d’ouvrir ou d’appeler son expert-comptable, son avocat ou son banquier avant de prendre toutes décisions concernant son entreprise et ça marche ; pourquoi nous ne le faisons pas ? Sommes-nous plus bêtes que les autres ? N’avions nous pas fait les mêmes écoles ? Obtenu les mêmes diplômes ? Travaillé dans des cabinets occidentaux en Europe avant de nous installer chez nous ? Peut être je réfléchis beaucoup sur des choses importantes à mes yeux mais négligeables dans notre pays mais je suis persuadé que si cela marche sous d’autres cieux, il ne fait aucun doute que cela marchera au Congo.

La mise en place d’un chèque conseil créateur d’entreprise par exemple et l’obligation citoyenne faite à des cabinets de la place d’accepter et d’ accompagner au moins quelques entreprises par an en phase de création (à un prix forfaitaire) peut être un début de réponse, c’est ce que je qualifierai d’acte citoyen face à la crise car seules les entreprises sont capables de créer de la richesse dans un pays (afin de nous offrir un avenir meilleur à la fois pour nous et pour nos enfants). Notre économie en a besoin ; quid à voir les réflexions, les énergies et fonds publics mobilisés et mis à la disposition des entreprises par les Américains, les Occidentaux et les Asiatiques au service de leurs entreprises pour comprendre ce que représente une entreprise dans un pays.

La réconciliation de notre jeunesse avec le monde de l’entreprise doit être une priorité, il n’est pas normal que des jeunes qui sortent de nos universités soient complètement désorientés dès qu’ils mettent pieds dans une entreprise, le génie d’un pays passe par sa jeunesse et sa créativité et les jeunes congolais ne doivent pas regarder le train de la connaissance passé devant eux sans le prendre, l’histoire de Bill Gate est là pour nous le montrer.

Des institutions comme la BDEAC et la MUCODEC sont en sur liquidité et sont prêtes à financer des projets dans notre pays mais, elles se plaignent de la mauvaise qualité des dossiers qui leur sont présentés et de manque de vision de la part de nos entrepreneurs, conséquences directes de conseils inadaptés et d’une politique économique non coordonnée au service de nos entreprises.

Guy Patrice AGUINGO
Expert-comptable diplômé
Associé Gérant du Cabinet Elohi-Congo

L’article du mois prochain aura pour titre : "Le comité d’entreprise et l’expert-comptable"

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