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Disparus du Beach

Des victimes des massacres de 1999 dénoncent le rôle de M. Sassou Nguesso

PARIS, 19 fév (AFP) - 19h23 - Des victimes des massacres perpétrés en 1999 au Congo Brazzaville contre des réfugiés ont dénoncé mercredi à Paris le rôle du président congolais Denis Sassou Nguesso, lors du contre-sommet organisé à Paris en marge du sommet France-Afrique.
Entre avril et mai 1999, plus de 350 Congolais, qui rentraient dans leur pays après avoir fui en République démocratique du Congo (RDC) les combats à Brazzaville, ont été portés disparus.Ils auraient été arrêtés par les forces de sécurité à leur arrivée au débarcadère fluvial de Beach (Brazzaville) ou dans les sites d’accueil.

Le premier témoin, qui n’a pas souhaité décliner son identité, est rentré en mai 1999. "Deux militaires et un ministre sont venus nous voir sur le site de Mbanzangungu pour nous dire qu’on pouvait sortir, nous promettant que toutes les conditions étaient réunies pour notre sécurité" explique-t-il, caché derrière des lunettes noires.

"Lorsque nous sommes arrivés au Beach, nous avons été séparés en trois groupes. A la nuit tombée, nous avons été livrés à la garde présidentielle du Général Blaise Adoua qui nous a bastonné à coups de crosse. Je suis resté deux semaines interné, avec 67 autres personnes dans le sous-sol de leurs locaux. Quand on venait nous prendre par petits groupes pour nous exécuter, on nous disait +Ninja+ (ndlr : milicien opposant au régime en place) ou pas, vous y passerez. D’ici, on n’en sort jamais vivant+", se rappelle-t-il.

"Un jour, ils nous ont emmenés en 4x4 derrière la présidence. Avec moi, il y avait un homme qui avait une balle dans la cuisse, c’est un soldat qui lui avait tiré dessus à bout portant, par jeu. Quand est venu mon tour, j’ai tenté le tout pour le tout, j’ai sauté dans le précipice parmi les corps en pourriture. J’ai fait le mort. Mais ils continuaient à tirer par rafales pour s’assurer qu’on était morts. Je ne peux pas expliquer comment j’ai fait pour survivre", ajoute-t-il.

Le deuxième témoin, qui n’a pas non plus donné son identité, s’est retrouvé dans la même situation. "On nous montrait les corps au bord du fleuve Congo et on nous disait +vous voyez ça, c’est bientôt votre sort+" dit-il. Il affirme avoir été sauvé par la gendarmerie.

Le colonel Marcel Touanga, déjà à la retraite au moment des faits, assure que "Sassou Nguesso a été l’initiateur de ces massacres". Il est aujourd’hui Président du Collectif des familles des disparus du Beach.

Son fils de 28 ans, gendarme, a disparu en mai 1999. Après plusieurs jours de recherche, Marcel Touanga a pu voir des charniers. "On m’a emmené dans plusieurs sites où il y avait des grappes de cadavres. J’ai tenu de mes mains chacun de ces corps, je les ai soulevés pour retrouver mon fils en priant le Seigneur pour qu’il n’y soit pas"...

Une information judiciaire a été ouverte pour faits de torture par le tribunal de Meaux (Seine-et-Marne) dans cette affaire, à la suite d’une plainte déposée en décembre 2001 par les victimes. L’enquête vise le président congolais Denis Sassou Nguesso, le ministre de l’Intérieur Pierre Oba, le commandant de la garde présidentielle Blaise Adoua et l’inspecteur général des armées Norbert Dabira.

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