email

L’audition de Robert Bourgi par les juges français

Médiapart a réussi à se procurer les procès-verbaux de l’audition de Robert Bourgi par les juges Robert Le Loire et René Grouman qui l’ont gaillardement cuisiné. L’ancien conseiller de Jacques Chirac s’est facilement mis à table. Il a confirmé tout ce qu’il avait balancé sur le duo Chirac/Villepin, de hauts personnages de l’Etat français copieusement arrosés par les dictateurs africains (Wade, Gbagbo, Compaoré, Idriss, Biya, Sassou et, bien entendu Bongo) lesquels parfois plaçaient le pognon dans des djémbés. C’est peut-être ça l’humour noir.

On dit Bourgi loquace, mais n’exagérons rien. Là où celui qu’on surnomme « La balance  », n’a pas voulu vendre la mèche, c’est sur le très lourd dossier des « Biens mal acquis ». Là-dessus, on se demande pourquoi, notre mouchard a été muet comme une tombe. L’« indic  » a sans doute estimé, qu’il a eu la langue trop pendue. C’est que dans toutes les mafias (africaine ou napolitaine) trop parler peut nuire et qu’en procédure pénale le meilleur moyen de faire attendre les juges c’est de de leur dire : « je sais une chose, c’est que je ne sais rien  »

Bourgi est un drôle de poisson qui mène les juges en bateau (à l’insu de leur plein gré ?) Figurez-vous que le bonhomme auquel nos juges reprochent ses connivences et ses accointances avec la françafrique (raison pour laquelle, entre autres, il a été convoqué au bureau des mêmes juges) continue de conseiller Ali Bongo ! En d’autres termes, récidiviste, Bourgi commet encore les crimes pour lesquels, vaincu par le remords, il s’est récemment confessé dans la presse (Le Journal du dimanche). Qui a bu, boira.

Secret de polichinelle

De toute façon nous avons ici la meilleure preuve que les juges français sont des pantins. Vous avez ici, devant vous, des acteurs consommés en train d’éventer un secret de polichinelle. Ces juges ont-ils besoin des tuyaux de Bourgi pour confondre Bongo, Sassou et Obiang dans l’affaire dite des « biens mal acquis » ? « Depuis, l’affaire a été classée sans suite  » dit Le Monde du 31/01/08 au sujet d’un rapport de police sur les achats non justifiés des chefs d’Etats africains en France.

Une foule d’éléments à charge

« Hôtels particuliers, villas, piscines, Bugatti et Mercedes... La police a enquêté sur le patrimoine de cinq chefs d’Etat africains en France. Cette démarche avait été interprétée à la mi-2007 comme une rupture avec la « Françafrique » » ( Le Monde idem)

Il suffit pourtant de se pencher sur le rapport des policiers de l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) déposé au parquet pour avoir des pièces à conviction. Les enquêteurs français avaient, entre autres délits, démontré que les 110 comptes bancaires de Sassou, le parc automobile de Willy Nguesso, les immeubles de Bongo n’étaient pas des fruits d’un dur labeur. Sherpa, Survie, La fédération congolaise de la diaspora s’étaient constitué partie civile dans cette ténébreuse affaire. Les juges ont du pain sur la planche. On parle de «  recel de détournement d’argent public  » au sujet de Bongo, Sassou.

Qu’ont-ils à cuisiner Bourgi pour un dossier dont ils ont une foule d’éléments à charge ?

Une affaire politique

Bien sûr, on a tous compris que l’affaire des biens mal acquis est politique, avec des présumés coupables qui semblent au-dessus de la loi et bénéficient de solides protections. « Trois des cinq régimes concernés bénéficient du soutien indéfectible de Paris. Cet appui, renouvelé récemment par Nicolas Sarkozy, ne devrait pas fondamentalement
être remis en cause…
 » (Le Monde ibidem)

François Hollande, candidat socialiste à la présidence, l’a tellement bien compris qu’il compte en faire un argument de campagne contre Sarkozy. D’ailleurs il a brandi le nom de Bourgi et ses pratiques douteuses après sa victoire aux primaires socialistes. Son adversaire Sarkozy n’a qu’à bien se tenir. Cela veut-il dire, qu’une fois à l’Elysée, en 2012, le sort des Sassou, Nguéma, Ali, Biya sera scellé ?

Pas si sûr. On a vu comment Lionel Jospin, Premier ministre socialiste sous la cohabitation, a ménagé les tyrans africains, en appliquant scrupuleusement la formule de De Gaulle : « La France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts. »

Or l’intérêt de la France (de droite comme de gauche) n’est-il pas de voir des hommes de main africains (Sassou, Bongo) qui, littéralement, lui donnent de l’énergie ?

D’autant plus que reconnaît notre confrère Le Monde : « une enquête destinée à faire la lumière sur d’éventuels " biens mal acquis " déborde rapidement les normes policières ou judiciaires.  » (ibidem)

Traduction : jusqu’à preuve du contraire, biens mal acquis profitent et continueront de profiter à nos lascars africains

Louvouézo

Laissez un commentaire
Les commentaires sont ouverts à tous. Ils font l'objet d'une modération après publication. Ils seront publiés dans leur intégralité ou supprimés s'ils sont jugés non conformes à la charte.

Recevez nos alertes

Recevez chaque matin dans votre boite mail, un condensé de l’actualité pour ne rien manquer.