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Les présidentielles vues de Brazzaville

De notre correspondant à Brazzaville

Les candidats se sont faits connaître ;

« Mes chers Compatriotes, je partage avec vous la
conviction que les principaux fondements sur lesquels
notre pays repose sont encore fragiles et précaires,
et qu’il faut les consolider. Notre responsabilité
serait grande devant l’histoire si nous devons gâcher
tout ce que nous avons bâti pendant la transition au
prix de tant d’efforts et de sacrifice. Je ne suis pas
l’homme à engager des combats et des entreprises que
je n’achève pas ».

C’est en ces termes que le
président sortant Denis Sassou Nguesso a levé le voile
quant à sa participation à la présidentielle du 10
mars prochain quelques heures avant la clôture de
dépôt des dossiers de candidature le 10 février
dernier. Répondant ainsi aux multiples et pressants
appels de sa famille politique et des sympathisants.

Avant lui, plusieurs candidats s’étaient bousculés au
portillon pour annoncer leur candidature. Le premier
d’entre eux Côme Mankassa, professeur de sociologie
et président de l’Union Congolaise des Républicains
(UCR) avait annoncé sa candidature dès juin 2001. Se
sont prononcés : André Milongo, président de l’Union
pour la Démocratie et le Rassemblement (UDR-Mwinda),
ancien premier ministre sous la Transition de
1991-1992 au sortir de la Conférence Nationale, ancien
président de l’Assemblée nationale sous le règne de
Pascal Lissouba, Bonaventure Mizidy de la Convention
Républicaine des Libéraux, Martin Mbéri qui avait
hérité, au sortir de la guerre de 1997, de l’Union
Panafricaine pour la Démocratie Sociale (UPADS), parti
du président Pascal Lissouba en exil, avant d’être
désavoué par ce dernier.
Il y a ensuite Luc Adamo Matéta de l’Union pour le
Redressement et le Développement du Congo (URDC),
Angèle Bandou, seule femme à se présenter une deuxième
fois depuis la présidentielle de 1992, Anselme
Mackoumbou Nkouka, général médecin à la retraite et
indépendant, Antoine Miété, peu connu et Kignoumbi Kia
Boungou qui se présente sous le label de l’UPADS sans
toutefois avoir le soutien du président déchu Pascal
Lissouba.
La campagne électorale s’ouvre le 20 février 2002.

Grande mobilisation autour du candidat Sassou Nguesso

On ne compte plus les formations politiques,
associations et autres groupements qui apportent leur
appui à la candidature de Denis Sassou Nguesso. Le
Parti Congolais du Travail (PCT) dont il est issu, a
signé des accords avec un certain nombre de partis les
plus représentatifs de la classe politique congolaise.
Ces accords font du président sortant leur candidat
commun à la course pour la magistrature suprême. Ces
partis se sont ainsi engagés à ne présenter aucune
candidature à la présidentielle de mars 2002. On
retrouve dans cet ordre : le Rassemblement pour la
Démocratie et le Progrès Social (UDPS) de Thystère
Tchicaya, l’Union des Forces Démocratiques de David
Charles Ganao, ancien premier ministre de Pascal
Lissouba rentré d’exil, l’Union Patriotique pour la
Démocratique et le Progrès (UPDP) de Célestin Gongarad
Nkoua, actuel ministre de l’agriculture et de
l’élevage, Union pour le Progrès (UP) de Jean-Martin
Mbemba actuel ministre de la Justice, Union pour le
Redressement National (URN) de Gabriel Bokilo, l’Union
National pour la Démocratie et le Progrès (UNDP) de
Pierre Nzé, membre des Forces Démocratiques Unies
(FDU) auxquelles sont affiliés plusieurs partis
politiques et associations, il est aussi conseiller
politique de Denis Sassou Nguesso.

Deux autres grandes formations politiques ont rallongé
la liste déjà longue de ceux qui soutiennent la
candidature de Sassou Nguesso. Il s’agit du Mouvement
Congolais pour la Démocratie et le Développement
Intégral (MCDDI) parti de Bernard Kolelas en exil mais
récupéré par Michel Mampouya depuis la fin de la
guerre de juin 1997. Ce qui lui a valu le portefeuille
du développement minier dans le gouvernement actuel.
Rappelons, en outre, que le PCT et le MCCDI s’étaient
ligués au sein de l’alliance FDU-URD (Union pour le
Renouveau Démocratique) au lendemain de la victoire de
Pascal Lissouba à la présidentielle de 1992 pour
former une opposition. Mais, cette alliance sera
disloqué pendant la guerre de 1997 du fait du
retournement du Bernard Kolelas qui avait accepté le
poste de premier ministre que Pascal Lissouba lui
avait proposé.
L’autre parti, le RDR de Raymond Damase Ngollo, ancien
général de l’armée congolaise s’est, lui aussi, aligné
en faveur de la candidature de Sassou Nguesso.

Grâce à ce jeu d’alliances, Denis Sassou Ngusso se
présente plus fort que jamais pour la victoire finale
face à ses adversaires. Il a réussi à créer autour de
sa candidature un consensus, surtout que l’opposition
n’arrive pas, jusqu’à présent, à parler d’une seule
voix et à faire un front solide contre lui. Une
opposition minée par des querelles intestines liés aux
problèmes de leadership. Le général président est
conforté dans son statut de favori par le fait que
beaucoup de ses adversaires ne pèsent pas lourds sur
l’échiquier politique congolais. Qui peut donc arrêter
Denis Sassou Nguesso ? Telle est la question que tout
le monde se pose. Les regards se tournent de plus en
plus vers André Milongo qui a fait ses preuves pendant
la Transition de 1991-1992 et qui est soutenu par une
coalition de 7 partis politiques.

André Milongo : un concurrent de taille ?

Bénéficiant du soutien de l’Alliance pour la
Démocratie et le Progrès (ADP-Bongwana), une coalition
de 7 partis politiques, André Milongo, de par son
parcours, se présente comme seul concurrent de poids
devant Denis Sassou Nguesso en l’absence des grands
ténors tels que l’ancien président Pascal Lissouba et
ses deux anciens premiers ministres Bernard Kolelas et
Jacques Joachim Yombi Opangaut, tous en exil depuis la
guerre de juin 1997. On sait qu’André Milongo a dirigé
la Transition de 1991-1992 de main de maître.
Lors du Référendum constitutionnel du 20 janvier
dernier, qui a été approuvé par 84,5% des congolais,
il n’a pas hésité à dénoncer les irrégularités
relevées dans son organisation.
Au cours d’une assemblée générale du 2 février 2002
pendant laquelle il a annoncé sa candidature, André
Milongo a interpellé les congolais " C’ est ensemble,
main dans la main, que nous éclairerons et bâtirons un
Congo nouveau car le Congo d’aujourd’hui est plongé
dans les ténèbres, la misère, la pauvreté généralisée,
la mauvaise gestion et le détournement de l’argent…".
Il a aussi dressé une esquisse de ce qui devrait être
les principales articulations de son programme dont on
peut retenir : la réorganisation de l’Etat, le
redressement de l’économie nationale, l’assainissement
des finances publiques, le développement des
infrastructures, la relance de l’agriculture et
l’élevage, l’amélioration du système éducatif et
sanitaire, la promotion du sport, des arts et des
loisirs, la création des emplois pour les jeunes.
Parmi ces priorités, André Milongo veut assurer la
dignité des retraités, promouvoir une force
républicaine et régler la situation des sinistrés
depuis 1993. Conscient de la situation dans laquelle
se trouve le Congo, il a souligné que cette politique
"ne peut avoir une portée que si le climat politique
change radicalement dans notre pays. Toute politique
efficace doit, nécessairement, s’appuyer sur un climat
de paix véritable". Il a promis régler le problème de
tous ceux qui sont, aujourd’hui, exilés à l’étranger
en favorisant leur retour au pays.
Ce programme alléchant du candidat André Milongo fait
de lui le seul concurrent solide, créant par la même
occasion une certaine peur du côté des sympathisants
du président sortant Denis Sassou Nguesso.

Une élection terne

L’élection présidentielle de mars ne suscite pas,
cependant, un grand enthousiasme auprès des congolais.
On se souvient que la présidentielle de 1992 avait
enfiévré tout le pays au lendemain de l’ère
démocratique. Aujourd’hui, traumatisés par les guerres
à répétition que le pays a connues, les Congolais ne
se font plus d’illusions. Ajouté à cela le fait que
l’opposition considère cette élection sans grand
enjeu. Car, estime-t-elle, les résultats sont connus
d’avance. Elle prend comme exemple le référendum
constitutionnel du 20 janvier pendant lequel elle
avait relevé et dénoncé des fraudes et exigé
l’annulation du vote et la reprise de l’ensembe du
processus électorale. Ces contestations n’ont pas été
prises en compte par le pouvoir en place. Une partie
de l’opposition dénommée "plurielle" menace même de
boycotter les élections si ces conditions ne sont pas
remplies.

Ce qui est sûr, c’est que la campagne électorale
s’ouvre le 20 février. Elle permettra aux uns et aux
autres de convaincre les congolais sur le choix à
faire le 10 mars prochain lors du premier tour.
L’opposition décidera t-elle de se battre au lieu de
s’avouer vaincu d’avance ? La campagne nous le dira.

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