email
Feed-back sur une interview de 2000 : Michel Mampouya dit des choses qu’il avait déjà dites

Michel Mampouya : pourquoi m’avoir reproché hier ce que tout le monde préconise aujourd’hui ?

L’esprit de suite chez Michel Mampouya, leader du MCDDI, aile de Brazzaville

Nous avons reçu ce texte de notre correspondant de Brazzaville. Cette interview de Michel Mampouya est vieille de cinq ans (2.000). Elle ne tranche pas avec celle qu’il a donnée récemment à MWINDA. Ses rapports politiques avec Bernard Kolélas, fondateur du MCDDI, demeurent mitigés. Kolélas qui a une dent contre Mampouya reproche particulièrement à celui-ci de lui avoir fait un bébé dans le dos après l’exil et considère comme nulles les actions qu’il mène en son nom. Mampouya, tout en souffrant de cette méconnaissance, s’étonne que Kolélas lui en veuille. Il n’a fait qu’appliquer ( se défend-t-il) la leçon de morale politique que celui-ci lui a apprise : être fidèle à ses alliances et ses alliés.


Retour sur une interview de Michel Mampouya, ancien Ministre des Mines et Président par intérim du MCDDI.

En marge de la session Extraordinaire du MCDDI qui s’était déroulée du 7 au 8 décembre 2000 dans la salle de conférence de la Cathédrale de Brazzaville, Michel Mampouya, à l’époque, Ministre de l’Industrie Minière et de l’Environnement du Gouvernement de Transition, nous avait accordé cette interview à l’hôtel Méridien où il logeait après avoir quitté sa maison à la suite des affrontements de décembre 1998.

À l’heure où la polémique s’enfle de plus en plus ; que le débat fait rage sur l’éventuel retour de Kolélas, le Président - Fondateur du MCDDI dans son pays, le Congo, la constance des thèses défendues par l’ancien ministre de Sassou sur le sort réservé à ce dernier, éclaire encore davantage sa dernière sortie médiatique le site Internet www.mwinda.org. Cette interview qui date de décembre 2000 reste d’actualité tant son contenu tranche avec les idées reçues et les débats de clocher qui animent les tenants de la ligne dure qui veulent imposer coûte que coûte, y compris par la force, la fin de l’exil de l’ancien Maire de Brazzaville, réfugié à Bamako, en faisant un pied de nez au pouvoir en place.

À l’époque, où l’interview avait été réalisée, le Congo était en pleine fièvre des préparatifs du Dialogue National Sans Exclusive et de la condamnation par contumace du président - fondateur du MCDDI et le parti de Bernard Kolélas en proie à une crise interne entre ses différents héritiers. C’est dans cette tourmente que Michel Mampouya nous avait accordé cet entretien.

C’est une interview « fleuve », mais captivante qui est retranscrite ici sans aspérités.

Michel Mampouya : "On m’accuse d’avoir bradé le parti"

Question : Monsieur le Ministre, merci de nous accorder cette interview malgré vos multiples occupations. Un journal de la place, Le Flambeau, s’est interrogé à la Une : « Qu’est-ce qui a provoqué la mort politique de Michel Mampouya ? » Vous venez d’organiser les 7 & 8 décembre 2000, la session Extraordinaire de votre parti. Êtes-vous considéré comme un miraculé ou comme un chef en sursis ?

Michel MAMPOUYA : Est-ce que le Flambeau, c’est l’organe du parti ? Qui est ce qui indique que le Flambeau reflète l’opinion de la base profonde du MCDDI ?

Il y a un mois et demi, le 9 septembre 2000, j’ai lancé un appel aux militants pour une conférence régionale du parti. Ils ont répondu massivement. Ils ont pris d’assaut la salle du Palais du Parlement. Et la salle était pleine de monde. C’est moi qui ai lancé cet appel. Les militants ont répondu présents. Est-ce cela le signe de la mort politique de Michel Mampouya ?

Question : Si je comprends bien, vous êtes en phase avec le parti et il n’y a pas de soubresauts à l’intérieur de votre mouvement ?

M.M. Vous connaissez un parti qui ne connaît pas de soubresauts ? Partout où il y a des hommes, il y a toujours des problèmes, à plus forte raison dans un parti politique. C’est même l’expression de sa vitalité.

Q. : L’opinion vous connaît pour être quelqu’un de très discret, courtois et avenant. Pourtant, dans votre propos introductif, le ton employé était dur et sévère à l’endroit de ceux dont « le but inavoué est d’affaiblir le MCDDI » Qui veut vous distraire et affaiblir le MCDDI ?

M.M. Effectivement, nous sommes en face de grands défis. Il n’est donc pas question de se laisser distraire par des gens qui veulent régler les problèmes du parti dans la rue. Le parti ne se gère pas dans les médias. Le parti a un espace d’expression démocratique. C’est le Comité National. Ce sont des instances du parti qui n’ont jamais été dissoutes.

Nous disons que ceux qui mettent dans la rue les problèmes du parti, font de la distraction. C’est pour aider le MCDDI à imploser. Et nous ne nous laisserons pas distraire par ces gens-là. Ils finiront par revenir à la raison.

Q. : Pour éviter que votre parti n’implose, vous avez ajouté entre autres, que votre combat était celui de la survie de votre parti. Ce combat, l’aviez-vous gagné ? Et contre qui ? Est-ce contre le pouvoir en place ou contre ceux que vous qualifiez de fanatiques et qui sont au sein de votre propre parti ?

M.M. Puisque nous existons, puisque nous tenons des réunions comme les autres partis, cela veut dire que nous avons gagné la bataille de la survie. Maintenant, il reste à consolider cette victoire.

Au lendemain du 15 octobre quand le régime tombe et tous les dignitaires prennent le chemin de l’exil, qu’est ce que Mampouya devait faire et n’a pas fait, que l’on ait en droit de lui reprocher ?

Comme tout le monde, je suis allé me réfugier dans la région [le Pool]. C’est à la suite des affrontements qui vont opposer un petit groupe de Ninjas aux Cobras partis à Kinkala, en reconnaissance, et qui vont tomber dans une embuscade tendue par les Ninjas qui s’étaient repliés à Matoumbou que l’on va avoir besoin de moi à Brazzaville. Une riposte avait déjà été programmée, mais Sassou, vainqueur de la guerre contre le Président Lissouba qui avait déclaré devant l’opinion internationale que le pays était sous son contrôle, ne pouvait plus permettre la poursuite de la guerre même à l’intérieur des régions. C’est pour cette raison qu’il va faire chercher Michel Mampouya, parce qu’il était Secrétaire permanent de l’alliance ; parce qu’il était l’homme de liaison entre Kolélas et Sassou. Pendant la guerre, c’est Mampouya qui assurait les contacts entre Sassou et Kolélas en passant par Goma Tsé - Tsé, derrière les lignes de front.

Ensuite, il a eu besoin de Monseigneur Milandou en tant que président du Conseil Oecuménique régional. Il a également eu besoin de Milongo en tant que chef de parti de cette région. Malheureusement, le Président Milongo avait déjà gagné le Congo - Démocratique et s’était réfugié à Kamba. Monseigneur Milandou pour des raisons que l’on peut comprendre avait décliné l’invitation.

J’ai pris alors mon courage à deux mains. Je suis allé à Brazzaville parce que le chef du MCDDI n’était plus là. Si nous sommes tous absents de Brazzaville, comment peut-on contrôler ces jeunes gens, qui sont labàs ! Et qui sont des miliciens du MCDDI, même s’ils sont démobilisés. J’ai eu ce souci et j’ai pris le risque de retourner à Brazzaville. J’ai même failli être tué à Madibou par un Ninjas, devenu Cobras. Bref ! Par la suite, j’ai rencontré les généraux Makoumbou et Kakou qui avaient reçu de l’armée un ultimatum de 6 jours. Au bout de six jours, ils devaient contrôler les Ninjas, faute de quoi l’armée rentrerait dans le Pool. Ces deux généraux étaient embarrassés et très angoissés parce que tout le monde savait que les Ninjas n’obéissaient à personne surtout pas aux militaires. Les relations ont toujours été conflictuelles entre les Ninjas et les militaires originaires de cette région. Beaucoup de militaires ont payé de leur vie pendant cette guerre, tués par nos propres enfants (Ninjas). Ils ne pouvaient donc pas avoir de l’ascendance sur les Ninjas. Et cela les rendait impuissants.

Lorsque je suis arrivé, cela a été ressenti comme un bonheur. Et nous avons aussitôt constitué une délégation pour rencontrer l’Etat-Major des FDP qui venaient de gagner la guerre. La discussion était très tendue. À l’issue de cette réunion, nous avons obtenu que l’armée ne soit pas déployée à Kinkala et à Matoumbou pour des opérations de représailles. Il fallait donc faire un travail politique. Je suis retourné à Kinkala le lendemain en compagnie du colonel Konta pour aller régler la rencontre des Ninjas avec la troupe angolaise qui était dépêchée labàs. Avant de retourner à Kinkala, j’ai fait une déclaration à la radio dans laquelle j’ai indiqué que les Ninjas n’avaient pas d’exigences à formuler au chef de l’État si ce n’est celle d’assurer leur protection. Ils s’étaient repliés dans leur région natale pour échapper à toute vengeance éventuelle et qu’ils n’avaient pas le dessein de se constituer en une résistance armée. Donc, nous avons réglé ces questions, évitant le pire. Est-ce que c’était une mauvaise chose de faire cela ?

Au lendemain de la victoire des FDP, deux voies s’offraient à nous : l’une conduisant à l’affrontement armée ; l’autre conduisant au dialogue et à la coopération avec les nouvelles autorités.

Q. : Quelle voie, aviez-vous choisi ?

M.M. Nous avons, bien sûr, choisi la voie du dialogue et de la coopération et du dialogue avec les nouvelles autorités. Le MCDDI n’avait pas déclenché une guerre dans ce pays. Ni en 1992, ni en 1993 pas plus qu’en 1997. Le MCDDI avait perdu les élections présidentielles et n’était pas au pouvoir. Le MCDDI n’était pas en alliance avec la Mouvance Présidentielle ; même si nous sommes entrés dans un gouvernement de cohabitation.

N’ayant pas fait la guerre ; n’ayant pas déclenché une guerre, nous n’avons donc pas perdu une guerre. N’ayant pas été au pouvoir, au nom de quoi, allions-nous nous engager dans la voie de l’affrontement ?

Nous avons choisi la voie de la coopération. Mais aujourd’hui, dites-moi que réclame tout le monde ? Ce n’est pas le dialogue ?

Aujourd’hui, sauf quelques extrémistes, tout le monde pense qu’il faut dialoguer, qu’il faut emmener le pouvoir en place à un dialogue national sans exclusive. Mais, dialoguer avec qui, me diriez-vous ! Mais avec Sassou bien sûr. Alors, pourquoi ne pas reconnaître que nous avions eu raison avant les autres ?

Il faudrait que nos frères nous réhabilitent dans leur opinion parce que nous avons eu raison avant eux. Mais, où est la différence ? La seule différence majeure c’est qu’en choisissant très tôt la voie du dialogue et de la coopération, nous avons pris le chemin qui n’est pas pavé de cadavres. Mais, aujourd’hui, pour aller dialoguer avec Sassou ; pour reconnaître enfin l’évidence, il leur faut marcher sur les cadavres de nos enfants ; de nos militants, des innocents...

Pour aller saluer Sassou, c’est-à-dire, dialoguer avec lui, il faut enjamber ces cadavres-là ! Vous savez que dans le Pool, il y avait des gens qui étaient UDR-Mwinda, PCT, d’autres étaient affiliés à aucun parti politique, ont été tués parce que le MCDDI et la région du Pool sont confondus à tort ou à raison par certains compatriotes.

Q. : En choisissant la voie du dialogue, comment expliquer que certains de vos proches aient affirmé que vous aviez fait allégeance au pouvoir de Sassou N’guesso ? Vos amis n’auraient pas bien compris votre démarche, ou pensez-vous que seule l’histoire va vous réhabiliter ?

M.M. Je n’ai pas besoin d’être réhabilité parce que je n’ai pas fait du tort. Les gens m’ont de vendu, de traître pour avoir dialogué avec Sassou ; pour avoir accepté d’entrer dans le gouvernement, pour avoir accepté d’aller au Forum. Ils m’ont qualifié de traître.

Mais comment pouvez-vous continuer à qualifier de traître celui qui avant vous, a fait ce que vous réclamez aujourd’hui ? Qu’est ce qu’on réclame aujourd’hui ? Le dialogue national sans exclusive. C’est ce que nous avons fait.

Tenez, au courant du 1er trimestre de 1998, je suis allé voir le Président Sassou. J’ai négocié avec lui la mise en route d’une délégation devant aller rencontrer le président Kolélas à Abidjan. Je peux vous dire, cette mission a été acceptée et soutenue par le président. Comment ne pas qualifier cette initiative d’appel de pied ?

Cette délégation devait emmener le président Kolélas à reprendre langue avec Sassou et donc, éviter d’autres catastrophes. Je ne peux pas dire comment le Président Kolélas a apprécié cette initiative. Il savait bien qu’en tant que membre du gouvernement je ne pouvais pas envoyer une délégation sans obtenir l’adhésion du chef du gouvernement. Et si le chef du gouvernement a adhéré à cette démarche, c’est qu’il en attendait quelque chose !

Est-ce qu’on a fait une bonne exploitation de cette initiative ? Pour moi, c’est déjà une tentative de dialogue sans exclusive, parce qu’en ce temps là, les partis en conflit s’excluaient mutuellement. À notre niveau, nous avons pris l’initiative d’établir ce contact. Et quand on dit Mampouya, traître ! J’ai envie de dire : traître par rapport à quoi ? Est-ce par rapport à Sassou ? Dans ces conditions, il ne faut pas négocier avec lui aujourd’hui.

Comment pouvez-vous continuer à me qualifier de traître et continuer à rechercher le dialogue avec Sassou . Il faut être cohérent. Dans ces conditions, il faudrait plutôt souscrire à la démarche de Makouta-Mboukou qui reste constant en affirmant qu’il ne peut pas négocier avec Sassou, ... C’est donc, un faux procès !

Q. : Constant dans vos déclarations, vous avez déclaré à Kinkala que l’alliance URD/FDU n’était pas morte. Aujourd’hui, avec le recul du temps, comment expliquez-vous que le président - fondateur de votre parti, Bernard Kolélas ait pu faire alliance avec le président Lissouba, alors que l’alliance n’était pas rompue ? Existe-t-il des éléments d’appréciation qui pouvant justifier cette situation ?

M.M. Il faudrait poser la question au président Kolélas, président - fondateur du MCDDI. Une alliance, c’est la rencontre de deux ou plusieurs personnes. Elle concerne un ou plusieurs partis. Dans le cas de l’alliance URD/FDU, l’une des parties a déclaré solennellement que l’alliance URD/FDU est morte de sa belle mort. Ces déclarations, il faut les situer dans leur contexte, bien évidemment.

À notre niveau, nous voulions considérer les FDP comme le bras armé qui était venu à bout du pouvoir en place. En tant que bras armé, élément principal, les FDU devaient faire appel aux autres membres de l’opposition congolaise élargie. N’oubliez pas que l’opposition avait signé un mémorandum sous l’autorité du président Kolélas. Cette opposition avait dépassé le cadre étroit de la simple alliance URD/FDU pour s’élargir aux autres forces vives qui gravissaient autour.

Il reste vrai que le président Kolélas depuis son exil n’avait jamais résilié notre contrat avec les autres. Il n’avait jamais déclaré cette alliance morte, tout comme le président Sassou d’ailleurs ! Mais pour tout dire, la vie de l’alliance se constate sur le terrain, et là-dessus, elle ne fonctionnait pas. Nous ne pouvons donc pas nous accrocher sur un véhicule qui ne bouge pas, alors que le pays avance et le paysage politique se modifie.

Q. : Cet immobilisme était-il dû au départ en exil de votre président ou du fait de l’indifférence de vos partenaires au pouvoir ?

M.M. Le président Kolélas est parti en exil, il n’a pas emporté les structures de l’alliance ; il n’a pas emporté les militants de l’alliance dans son voyage ; il a laissé son parti ici ainsi que les structures qui composent l’alliance. Et, cette alliance fonctionnait plus ou moins bien à travers ces différentes structures. Si Bernard Kolélas était le président, le président Sassou était le 1er vice - président et Thystère le 2ème vice - président. Le président parti en exil, le devoir de ceux qui étaient restés au pays était de maintenir la flamme.

Il ne faut pas se voiler la face, l’euphorie de la victoire a emporté sur le réalisme. Même si au sein de cette alliance, tous n’ont pas contribué de la même façon à la chute du régime du président Lissouba, ce n’était pas une raison pour cracher sur les autres. Les choses se gèrent ici au pays, il revenait à ceux qui étaient restés au pays de faire vivre cette alliance. Mais encore une fois, sachez qu’une alliance est une affaire de deux parties. Lorsque l’une des deux parties ne tient pas ses engagements, on ne saurait espérer mieux.

"Personne n’a jamais approuvé la condamnation de Bernard Kolélas par contumace"

Q. : On vient d’apprendre la naissance d’un Comité Provisoire de Réconciliation à la tête duquel trône Kiadi - Mboukou, -le frère de l’autre- Makouta - Mboukou. Ce Comité veut réconcilier le MCDDI avec qui ? Est-ce avec les exilés de l’étranger ou avec le pouvoir en place ?

M.M. Il faut poser la question à la personne qui a mis en place ce comité, donc au président Kolélas ; parce que les textes lui sont attribués, les actes portant création de ce Comité lui sont imputés. Comme je vous l’ai dit, il n’y a pas de groupes humains où l’on ne rencontre pas de problèmes. Nous ne sommes pas le seul parti où l’on trouve plusieurs courants de pensée. Je pense même que l’existence de courants au sein d’un parti est un signe de bonne santé et de progrès et concourt au développement de la démocratie.
Mais qui doit-on réconcilier ?

Est-ce que cette réconciliation concerne deux personnes ? Si tel est le cas, la mise en place d’un Comité Provisoire de Réconciliation n’a pas lieu d’être. Ce Comité est extra-statutaire pour ne pas dire anti-statutaire. Je leur ai demandé, en tant que structure de réconciliation, d’entreprendre des consultations régulières auprès des tendances antagonistes supposées ou réelles ; d’analyser les causes profondes de leur divergence. Leur mission ne devrait pas empêcher la machine du parti de fonctionner. Si ce Comité veut m’entendre parce qu’il me reproche quelque chose et parce qu’il a reçu mission du président Kolélas pour le faire, je suis disposé à répondre.

Moi, je ne me suis pas autoproclamé président du MCDDI. Imaginez un seul instant que nous ayons refusé d’aller au gouvernement ; d’aller au Forum, donc au CNT, ... Aujourd’hui, on ne parlerait plus du MCDDI. Et je vous dis que la guerre de 1998 aurait facilement été collée au MCDDI. Le MCDDI ayant refusé de coopérer avec les nouvelles autorités alors que l’UPADS qui a géré, qui était à la présidence acceptait d’entrer dans le gouvernement. Il aurait été alors plus facile de dire : cette guerre est la guerre du MCDDI surtout qu’elle est née dans le Pool, le « fief » électoral du MCDDI. On ne parlerait plus du MCDDI. On serait peut-être tous en prison. C’est pourquoi, pour notre part, nous considérons avoir réussi l’opération de survie de notre parti. J’ai bradé le parti parce que j’ai dialogué avant eux et que je n’étais pas qualifié de le faire ?

Les membres du CPR d’aujourd’hui étaient à la conférence du MCDDI du 22 décembre 1997 qui m’avait demandé unanimement d’assurer la gestion du parti, alors que le président Kolélas avait pris un acte en novembre 1997 excluant Michel Mampouya de la direction du parti. Letembet Ambilly, après analyse du contexte sociologique et politique du MCDDI lié à sa base électorale majoritairement de la région du Pool ; ajouter à cela son âge qui ne lui permettait plus de mener les combats hardis, avait choisi de me proposer à sa place.

En terme de transmission du pouvoir, le canal a bien fonctionné. On lui remet le pouvoir, il me le transmet. Ce sont les membres du Comité National qui à la faveur de la conférence, ce sont retirés dans une salle pour élire Michel Mampouya, Président du MCDDI par intérim jusqu’au congrès. Pour les autres, jusqu’à nouvel ordre. Ebosso et le doyen Senso sont les deux personnes que le parti a envoyées au CNT. Aujourd’hui, Ebosso parle d’insoumission et demande que les instances statutaires arrêtent de fonctionner pour laisser tourner le CPR, mais sans renoncer à son poste de conseiller. On ne peut pas réconcilier en excluant une partie du parti. Ce n’est pas sérieux.

Mais qu’est-ce que le Comité National ? C’est l’instance qui regroupe tous les co-fondateurs du parti ; tous les délégués des sages du parti, tous les anciens dignitaires. C’est le véritable Mbongui du MCDDI. Et vous venez suspendre ce foyer politique. En plus, je n’ai pas changé ce Comité qui n’est pas issu du congrès, mais qui a été mis en place par le président Kolélas. Tous les membres du bureau politique ont été nommés par lui. Si j’étais putschiste, je n’aurais pas gardé cette équipe. Ce sont les mêmes à quelques exceptions près pour ceux qui sont allés en exil. Ces gens-là lui sont redevables. Et s’il a quelqu’un qui doit avoir peur de la sanction du comité national, c’est bien Michel Mampouya. Vous comprenez bien qu’il s’agit de simples querelles de positionnement lié à l’imminence du dialogue national sans exclusive. Mais, face au drame que connaît notre pays, dépenser son énergie pour des problèmes liés au positionnement des uns sur l’échiquier politique, ce n’est pas aider le parti et encore moins le pays.

Trouvez-vous normal que nous puissions exiger un dialogue national sans exclusive de la part des autorités du pays alors que nous-mêmes nous n’arrivons pas à dialoguer à l’intérieur de notre parti ? Est-ce que vous pensez que les autres qui sont en face vont nous prendre au sérieux ?

Je suis pour que le président Kolélas rentre au pays pour dialoguer avec les autres. Mais : « charité bien ordonnée, commence, par soi-même ». C’est unis que nous pourrons négocier efficacement une mesure d’élargissement ou de libération du président Kolélas.

Q. : Le président de votre parti a été condamné. Même si les décisions de justice ne se commentent pas, quelle appréciation faites-vous de ladite condamnation ? Est-ce pour cette raison que votre bureau exécutif national a demandé l’amnistie générale pour permettre à votre président de rentrer au pays comme vous l’avez souhaité ?

M.M. Nous n’avons jamais (...) cette condamnation. Personne ne l’a voulu. Elle est tombée. Nous constatons le fait accompli.

Q. : Elle profite à qui ?

M.M. Vous voulez savoir si le président Kolélas va participer au dialogue ou pas ! Mais l’article 13 desdits accords, est sans ambiguïté puisqu’il dit que le dialogue est sans exclusive et concerne tous les Congolais, de l’intérieur comme de l’extérieur. Le président Kolélas est Congolais et à ce que je sache, il n’a pas été déchu de sa nationalité. Bien sûr qu’il doit prendre part au dialogue. Mais, il y a un obstacle qui a été posé sur son chemin. Cet arrêt de justice qui doit emmener les dirigeants du MCDDI à réfléchir, à s’unir pour imaginer des stratégies capables de conduire à l’élimination de cet obstacle.

Il est condamné. Est-ce que ce verdict est injuste ? Est-ce que ce procès est une mascarade ? Est-ce que c’est un verdict politicien ?

Aujourd’hui, je crois que le débat ne devrait plus se focaliser sur la valeur de ce jugement rendu. Il est là. C’est un fait accompli. Que faire pour lever cet obstacle ?

Le retour du président Kolélas sur sa terre natale est assujetti à un recours à la grâce présidentielle ou à l’amnistie. Mais la grâce présidentielle comme l’amnistie sont des actes politiques qui se négocient.

Q. : L’adoption dans votre motion de la demande d’amnistie générale répond - elle de cette stratégie visant à créer les conditions du retour au pays du président Kolélas ?

M.M. Un pays qui a connu une guerre aussi atroce, ne peut pas panser ses plaies si les acteurs politiques ne se pardonnent pas des crimes qui ont endeuillé le peuple. Lissouba, moi, Kolélas, Sassou et les autres, nous appartenons à cette classe politique. Quelque part, nous avons été incapables de gérer nos problèmes autrement que par la force. Nous avons une responsabilité collective. Ce qui n’exclut pas la responsabilité individuelle qui elle, est très déterminante.

Mandela qui a longtemps séjourné en prison a pardonné à ses bourreaux ; mis en place une commission « vérité et réconciliation » tout simplement pour que les générations futures n’oublient pas ceux qui ont eu des responsabilités individuelles dans le drame sud - africain. Mandela est un sage qui doit nous inspirer. La demande d’amnistie pour nous, s’inscrit dans la dynamique du dialogue.

Q. : Monsieur le ministre, depuis que ces événements tragiques ont secoué le pays, le président Sassou à la conférence nationale a dit : « j’assume » ; après la guerre du 5 juin 1997, il a demandé « pardon » au peuple ; lors des affrontements de décembre 1998, il a regretté ce drame. Peut-on, Monsieur le ministre, solliciter l’amnistie sans faire preuve de repentance ?

Est-ce que le président Kolélas est homme à se repentir ?

M.M. Je vous suggère de poser cette question au président Kolélas. Je voudrais simplement, avant de conclure, faire la distinction entre la grâce présidentielle et l’amnistie. La grâce présidentielle doit être demandée par l’intéressé qui écrit pour la solliciter. L’amnistie c’est, au contraire, un acte que prend le président de la République souvent motivé par la force des événements. Il faut convaincre le président de la République du bien-fondé de cet acte de grandeur. Pour le convaincre, il faut négocier avec lui.

(Interview réalisée à Brazzaville, le 9 décembre 2000)

Laissez un commentaire
Les commentaires sont ouverts à tous. Ils font l'objet d'une modération après publication. Ils seront publiés dans leur intégralité ou supprimés s'ils sont jugés non conformes à la charte.

Recevez nos alertes

Recevez chaque matin dans votre boite mail, un condensé de l’actualité pour ne rien manquer.