L’Afrique est devenue un champ de bataille potentiel entre "les forces du terrorisme et les alliés antiterroristes" et, à ce titre, elle est appelée à devenir de plus en plus importante du point de vue des intérêts stratégiques des Etats-Unis, a déclaré, le 8 juillet, un ancien responsable du département d’Etat des Etats-Unis, M. Chester Crocker.
"L’Afrique est très proche du Moyen-Orient et revêt une grande importance pour cette partie du monde ainsi que pour l’Europe et les Etats-Unis", a déclaré M. Crocker, qui a été secrétaire d’Etat adjoint aux affaires africaines de 1981 à 1989.
M. Crocker était l’un des participants à une conférence organisée par le Centre d’études stratégiques et internationales à l’occasion de la publication d’un nouveau rapport sur la politique africaine des Etats-Unis. Préparé à la demande du Congrès, ce rapport, dont le titre anglais est "Rising U.S. Stakes in Africa" (Les enjeux croissants des Etats-Unis en Afrique), recommande une expansion ambitieuse de la présence des Etats-Unis en Afrique sur les plans de la diplomatie et du renseignement et insiste sur l’importance de la "diplomatie de réaction aux crises".
"La diplomatie de réaction aux crises en une question de vie ou de mort en Afrique. Mises en oeuvre correctement, les mesures préventives et les interventions en faveur de la paix peuvent sauver la vie de milliers de personnes et promouvoir les intérêts fondamentaux des Etats-Unis qui sont l’ordre et la stabilité en Afrique", indiquent les deux auteurs du rapport, MM Jeffrey Herbst et Princeton Lyman.
Ils recommandent que les Etats-Unis consacrent plus de fonds à l’appui des opérations de maintien de la paix de l’ONU en Afrique et à la formation des armées africaines. En outre, ils préconisent un recours renforcé aux sources humaines de renseignement et une lutte plus efficace contre la prolifération des missiles sol-air dans l’ensemble du continent.
Au niveau régional, disent-ils, les Etats-Unis devraient multiplier leurs engagements auprès des communautés musulmanes dans le nord du Nigeria, au Kenya, en Tanzanie et ailleurs, et concentrer leurs efforts de lutte contre le terrorisme dans les trois pays suivants : le Soudan, la Somalie et le Nigeria.
Ces recommandations reflètent la place de plus en plus importante que prend l’Afrique dans la politique étrangère des Etats-Unis, ont indiqué des participants à la conférence.
"L’Afrique est dans la ligne de mire. Elle est en train de prendre de l’importance. On s’éloigne des préoccupations essentiellement humanitaires (...) Il est difficile d’imaginer qu’un gouvernement des Etats-Unis, qu’il soit démocrate ou républicain, puisse à l’avenir inverser la tendance", a déclaré le secrétaire général du groupe qui a formulé ces recommandations, M. Stephen Morrison.
La crise humanitaire au Darfour (Soudan) exige un engagement soutenu des Etats-Unis et de la communauté internationale, a déclaré pour sa part M. Rick Barton, codirecteur du projet de reconstruction après les conflits au Centre d’études stratégiques et internationales.
"Nous pensons que le déploiement rapide dans l’ensemble du Soudan d’une force de maintien de la paix et d’observation sous l’égide de l’ONU, en vertu du chapitre VII de la Charte de cette organisation, est nécessaire. Cela signifie une force de réaction rapide pleinement équipée et forte de 500 à 600 soldats internationaux."
De son côté, le secrétaire d’Etat, M. Colin Powell, qui a parlé de la crise au Darfour dans le discours qu’il a prononcé à la conférence, a souligné que le gouvernement des Etats-Unis continuerait à presser le gouvernement du Soudan de mettre fin à la violence qui avait forcé quelque 1,2 million de personnes à quitter leurs foyers.
Il a également évoqué plus généralement les intérêts des Etats-Unis en matière de sécurité en Afrique, tout en soulignant que les Etats-Unis coopéreraient avec leurs alliés afin de lutter contre le terrorisme et de régler les crises dans l’ensemble du continent.
"Nous oeuvrons, a-t-il dit, dans le cadre de partenariats afin de mettre fin aux conflits déstabilisateurs dans le continent qui causent tant de dévastation et de misère, des conflits du genre de ceux que l’on observe au Soudan, au Liberia, au Congo et ailleurs."
