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Les Hydrocarbures face à la pollution

Dans le cadre de sa politique HSE (Hygiène, Sécurité, Environnement), TOTAL E&P Congo est sur le point d’inaugurer ses installations dites de landfarming sur le site du terminal de Djeno. Le landfarming est un procédé de traitement biologique des résidus pétroliers afin d’en casser les chaînes hydrocarbonnées. A quelques jours de la cérémonie, nous avons rencontré Valentin Tchibota-Goma, Directeur Central de la cellule anti-pollution du ministère congolais des hydrocarbures afin qu’il nous éclaire sur les objectifs de son département.

Valentin Tchibota-Goma : Le ministre procèdera lundi prochain à l’inauguration à Djeno, dans le cadre de la société TOTAL E&P Congo, d’une installation qui permet à la société de traiter les parafines et/ou des produits contaminés par les hydrocarbures. On appelle cela la méthode landfarming, elle n’est autre qu’une méthode biologique qui permet de casser les chaînes des hydrocarbures par un apport de certains nutriments. On fait donc un enrichissement des sols ou des terres contaminés ou pollués par les hydrocarbures. C’est la première fois que dans le Golfe de Guinée on installe un site d’une telle importance. C’est pour cela que le Ministre d’Etat monsieur Tati-Loutard, Ministre des Hydrocarbures et le Ministre de l’Environnement Monsieur Henri Djombo viendront à Pointe-Noire le 23 octobre prochain procéder à l’inauguration de ce site.

Daniel Lobé Diboto : Quel sera pour les population l’intérêt de ce site ?

TGV : Auparavant, certaines mesures de protection de l’environnement n’étaient pas prises en ce qui concerne les résidus et les déchets. Je préfère ne pas utiliser le terme de déchet, parce que pour les gens lorsqu’on parle de déchets, il s’agit forcément de déchets toxiques donc je parlerai davantage de résidus. Avant les sociétés se contentaient de faire de l’enfouissement avec le principe de chaulage, c’est-à-dire que les terres polluées étaient mélangées avec de la chaux vive. Mais avec le chaulage le problème de la pollution n’était pas résolu, il ne s’agissait que de méthodes conservatoires. A partir du moment où le Congo n’était pas doté des installations requises pour pouvoir traiter ce genre de résidus on s’est dit qu’il fallait traiter ces produits par le système du landfarming. Les populations environnantes vont donc bénéficier d’un plus parce qu’auparavant on faisait un grand trou dans lequel on plaçait les produits pollués mélangés à la chaux, on recouvrait le tout. Aujourd’hui avec les problèmes d’expansion démographique dans la ville de Pointe-Noire les populations sont susceptibles de venir s’installer sur des zones ayant servi à ces enfouissements.

Ya Sanza : Louable intention, monsieur le directeur, cependant, en quoi le landfarming résout-il le problème des décharges antérieures sur lesquelles les populations risquent de venir s’installer ? Quelle sera donc la politique de traitement de ces décharges anciennes ?

TGV : Conformément aux directives données par la tutelle, des opérations de balisage explicite vont être réalisées avec le concours effectif des opérateurs pétroliers. Ils auront un délai pour déclarer et signaler l’ensemble des sites, puis dans le cas de carences ou d’oublis nous passerons en phase répréssive.

DLD : Monsieur le Directeur de la cellule anti-pollution, quels sont les types de pollution que vous constatez ici à Pointe-Noire ?

TGV : La loi interdit aux pétroliers de torcher les gaz, donc de les brûler, mais comme l’a dit le directeur de cabinet, Alfred-Charles Sockath, ce matin au cours de la réunion sur la valorisation du gaz congolais : « Vous constaterez que la nuit Pointe-Noire est quand même éclairée malgré l’absence de courant électrique . C’est parce que nous torchons beaucoup de gaz sur les sites pétroliers. » Cette action est éminemment polluante car le torchage est producteur de gaz à effet de serre dont l’émission est réglementée par la convention de Kyoto. Aujourd’hui l’orientation du gouvernement va vers la valorisation du gaz. Je sors d’ailleurs d’une réunion où nous avons discuté de la limitation des gaz à torcher. Aujourd’hui, le Congo se dit qu’il doit valoriser son gaz, et pour la valorisation du gaz il faut effectivement que des disposition juridiques et techniques soient prises.

Les populations, en particulier celles de Djéno sont exposées aux nuisances provenant de l’odeur nauséabonde du H2S. Nous avons demandé à TOTAL d’envisager la captation de ce gaz, mesure qui bien entendu en supprimerait l’odeur dans l’environnement.

On a aussi bien entendu des problèmes de déversements accidentels que tout à chacun peut constater. Depuis 2003 nous relevons moins d’incidents, moins de déversements, mais sur sa façade maritime le Congo est entouré de pays producteurs de pétrole desquels il subit parfois des pollutions transfrontalières dont il nous est difficile de déterminer l’origine. Quand nous appelons nos amis du Gabon, ils nous disent qu’ils n’en sont pas les fauteurs, quand nous posons la question à nos amis angolais ils nous répondent qu’ils ne sont pas responsables, il en est de même lorsque nous appelons nos amis du Congo démocratique. Donc nous sommes obligés en tant que ministère des hydrocarbures de nous battre parfois avec les moyens que nous avons et parfois d’avoir recours aux sociétés pétrolières, qui Dieu merci répondent favorablement pour nous donner les moyens de maîtriser des nappes d’huile. Sans eux ce serait réellement difficile. Je dois quand même dire que TOTAL, Congorep/CMS Nomeco ainsi que les autres, nous aident beaucoup à lutter contre la pollution.

DLD : Le principe pollueur/payeur est-il appliqué au Congo ?

TGV : Je peux vous dire que depuis que je suis à la tête de la cellule anti-pollution, ce principe a commencé à être appliqué, même si ce n’est pas encore à très grande échelle. Il faut bien sûr aller de l’avant, d’exécution du principe pollueur/payeur. Mais il faut se l’avouer, lorsqu’il y a eu a payer, toutes les sociétés pétrolières de la place l’ont fait avec quelques difficultés. Il faut plus d’autorité et plus de perspicacité du côté de l’Etat pour que les autres suivent, puisqu’ils ont des chartes sur l’environnement, il faut qu’ils les appliquent. Dans les autres pays du monde ils respectent les conventions publier des textes, adhérer à diverses conventions. Mais pour l’heure il y a un début qu’ils ont signées. Il revient donc à l’Etat congolais de les faire respecter ici aussi. Je peux vous dire que nous sommes déjà fortement soutenus dans ce combat par Son Excellence le Ministre d’Etat Jean-Baptiste Tati-Loutard dans les actions de répression que nous menons, et quand les pétroliers vont le voir pour se dédouaner, le Ministre d’Etat les renvoie vers nous en leur disant : « Vous devez payer. ».

DLD : Là encore, monsieur le Directeur, que fait-on pour les populations ?

TGV : Il faut d’abord commencer à dire que depuis 1960 jusqu’en 2003/2004 ces problèmes de pollution ne sensibilisaient guère les pouvoirs publics. Le premier effort que j’ai initié, a été un effort de communication de telle sorte que l’on s’est enfin rendu compte que les problèmes de pollution existent. D’aucun n’avaient pas le courage de le dire au monde et à la face du monde, je l’ai fait et le Ministre Tati-Loutard l’a dit, les députés, l’ensemble des élus au Kouilou le disent.

Nous sommes tous conscients que Pointe-Noire est une ville très polluée. Maintenant en ce qui concerne les mesures coercitives qu’il faut appliquer, c’est là où nous buttons sur un vide juridique très important et en ce moment précis nous sommes en train de le combler. Je peux vous citer un cas : Quand les rivières Samba et Vemba ont été polluées, dans le district de Hinda, le Ministre des hydrocarbures à été intransigeant sur la nécessité de réaliser certains projets tels des centres de santé, des bornes fontaines, la fourniture d’ordinateurs et logiciels aux étudiants de l’institut de géologie pour faire des interprétations car ces jeunes risquent de se retrouver demain sur le marché du travail sans la moindre expérience de cet outil essentiel. Donc ceci à été exécuté, il manque encore quelques réalisations sur le plan local mais tout ça est en bonne voie.

Tout acte de pollution constaté en un lieu quelconque du pays doit être compensé par une action de développement durable. Il ne peut pas y avoir de développement durable sans amélioration de l’environnement et vice versa.

DLD : Cela résout-il les problèmes de santé ?

TGV : : Vous savez, les problèmes de santé sont un autre volet. La pollution zéro n’existe nulle part, déchet zéro n’est pas possible, mais nous faisons des efforts pour que les pétroliers respectent les standards de production mais face aux problèmes de santé... même dans les régions qui ne connaissent pas de production pétrolière on rencontre des problèmes de santé. En tout cas, les demandes faites aux pétroliers de subvenir aux besoins en eau potable doivent largement contribuer à améliorer les conditions sanitaires des populations.

DLD : Si je vous demandais de donner un titre à ce que vous venez de nous dire, que choisiriez-vous ?

TGV : Les Hydrocarbures face à la pollution.

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