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Le bloc-opératoire du CHU de Brazzaville en panne depuis deux mois sous l’oeil indifférent de l’Etat

Le plateau technique du CHU de Brazzaville (le bloc-opératoire) est en panne depuis au moins deux mois. En langage plus clair, il n’y a plus d’interventions chirurgicales dans cet hôpital. On ne sait pour quelles raisons, l’information de cette grave panne technique est gardée secrète par les médecins.

Photo d’archive : Sassou en visite au CHU (source Brazza.info)

Sassou prend soin de lui à l’étranger

Vous avez bien lu : aucune intervention chirurgicale n’est plus pratiquée depuis cette date. Les malades sont donc sur une liste d’attente avec toutes les conséquences médicales que cela suppose. On savait le CHU de Brazzaville (sans jeu de mot) « grand malade ». Mais on était loin d’imaginer l’ampleur du mal. Il est de notoriété publique que les ascenseurs ne marchent plus depuis des années, les malades sont transportés à dos d’homme. Aujourd’hui le bloc est bloqué. Le point névralgique de la chaîne thérapeutique ne fonctionne plus. Et, cet énorme dysfonctionnement ne semble pas émouvoir les pouvoirs publics congolais.
Théoriquement, le budget alloué à la Santé est en progression (en progression de 834,9 milliards de FCFA, cf.article)). Mais les résultats sur le terrain ne se font jamais voir. Les dignitaires du pouvoir qui tiennent tous à leur peau, vont se faire soigner en Europe. Le premier d’entre eux, le chef de l’Etat, vient de rentrer d’un séjour médical à Marbella en Espagne.
Récemment, un proche du Président, Michel Ngakala, a confié au cours d’une conférence de presse qu’il s’était absenté du pays pour un séjour en France où il était allé se soigner. Précisons que le frère de cet homme qui vient de se retaper dans les hôpitaux français est directeur du CHU de Brazzaville. On se souviendra que ce haut fonctionnaire de l’Etat piqua une colère noire contre la ministre de la Santé, Emilienne Raoul, pour avoir laissé diffuser un documentaire sur l’état nauséeux du CHU de Brazzaville. On comprend que la classe politique congolaise ait une peur bleu de passer sur le billard du bloc opératoire de l’hôpital central de Brazzaville.

Sassou évite avec soin de se faire soigner au CHU de Brazzaville (source : Brazza.info)

Ironie du sort, récemment encore (cf. Mwinda), le Président de la République a effectué une visite/ surprise au Ministère de la Santé. Choqué par l’état de délabrement des lieux il aurait, dit-on, lancé au personnel du ministère : « vous n’avez pas honte de travailler dans de telles conditions ? ». Il lui aurait été répondu (mezzo voce) : « Et vous-même, vous n’avez pas honte de vivre dans un environnement insalubre ? » On faisait probablement allusion aux détritus qui jalonnent la route menant à son palais de Mpila. Mais on peut supposer aussi que l’allusion concernait l’état général de la ville de Brazzaville, voire même du pays tout entier.

Histoire

L’inauguration de l’hôpital général date de la fin des années 1950. Depuis cette date, aucune humanisation n’a été effectuée en dehors de l’articulation technique des années 1980 où son statut à été transformé en Centre Hospitalier Universitaire. Ensuite, ce lieu hautement vital pour la population, a été laissé à l’abandon. Les gouvernements qui se sont succédé à partir des années 1980 ont laissé pourrir la situation.

Résignation

Depuis les guerres civiles, les brazzavillois, avec leur sens de la fatalité et de la résignation, appellent « mouroir » cet hôpital. En effet, le taux de mortalité doit y être le plus élevé de tous les CHU d’Afrique. Un signe qui ne trompe pas : l’enjeu de lutte que représente la morgue de Brazzaville à la mairie centrale de Brazzaville. Le monopole du marché funèbre est aux mains du maire Hugues Ngoulondélé, gendre du Président de la République et véritable vautour qui se repaît du malheur de ses concitoyens. Avec un zèle inouï, la municipalité a investi dans l’achat des corbillards et dans la réfection de la chambre froide funéraire afin (pour reprendre une incroyable formule d’un ancien maire pécétiste) « d’améliorer les conditions de vie des morts ».

La question qui vient à l’esprit de façon lancinante est la suivante : qu’est-ce qui empêche ce gouvernement extrêmement riche de réparer le bloc-opératoire afin d’empêcher ses compatriotes de mourir comme des mouches ?

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