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Antéchrist

A propos de l’Eglise que Sassou Nguesso va offrir aux catholiques : les Congolais utilisent déjà le « mbwakela » pour ironiser !

A propos de l’église que Sassou Nguesso va offrir aux catholiques, les piques spirituelles des Congolais fusent. Blasphématoires.

Denis Sassou Nguesso, Président autoproclamé du Congo-Brazzaville, a fait construire à Oyo, son district natal, une grande église dont la capacité est de 3000 places assises. Elle deviendra la troisième grande Eglise du Congo, après Sainte-Anne et Notre Dame de Pointe-Noire. Cette Eglise sera remise officiellement aux autorités de l’Eglise catholique congolaise, le 14 mars 2019, lors de la commémoration de la mort de Madame Edith Lucie Bongo Ondimba, fille de Denis Sassou Nguesso.

Pourtant Dieu apprécie le sou de la veuve dans le tronc, plus que les tonnes d’or du riche homme.

Néanmoins, Denis Sassou Nguesso ne sera pas le premier président africain à offrir une cathédrale à son peuple. Avant lui, les Présidents ivoirien, Félix Houphouët-Boigny, et gabonais, El Haj Omar Bongo Ondimba, ont fait preuve de générosité métaphysique populaire à nulle autre pareille, ce, à défaut… d’usines clés en main dont l’économie a tant besoin. Certes, dit La Bible, on ne vit pas que de pain, mais de parole aussi.

Félix Houphouët-Boigny donna la plus grande basilique du monde à son peuple. C’est la Basilique Notre-Dame de la Paix de Yamoussoukro, inaugurée en 1990 par le Pape Jean-Paul II en personne. Non, les nourritures terrestres ne suffisent pas.

El Haj Omar Bongo Ondimba, paix à son âme, a construit à Libreville, la capitale du Gabon, une grande Mosquée qui porte le nom de Mosquée Hassan II , symbole de la fraternité éternelle entre le Maroc et le Gabon. Elle avait été inaugurée en 1983 par son excellence le Président gabonais, en présence de son Altesse Moulay Hassan Ben Mahdi, représentant Sa Majesté Hassan II, Roi du Maroc. Et pourtant, Allah n’est pas obligé aurait dit Amadou Kourouma.

Des « mbwakela » (piques) pour ironiser

Déjà, les Congolais ironisent. Ils savent que Denis Sassou Nguesso ne vit plus sa foi chrétienne et est devenu grand maître en maçonnerie. Ils utilisent les « mbwakela » (quolibets), petites phrases, souvent extraites des chansons. Lutumba Simaro et Rapha Boudzeki sont braconnés pour leurs piques. Comme récemment Kévin Mbouadé revisité dans son refrain « Tonton partout partout  » parodié en : « Sassou partout, partout. Aboma awa ! Aboma kuna ». Dans La Bible, Hérode massacrant partout les premiers-nés d’Israël.

Simaro est pillé dans « Mandola  », homélie pour un agnostique. Dans cette chanson, Lutumba s’interroge : « Tina nini moto soki akomi mobangue, akomi nde ko sambela ? Kota ba ndako ya Nzambe, omona bilongui bikoma nde ba kristo. Tango bazala bilengue bayeba ka nzambe te » (…) « pourquoi c’est au crépuscule de la vie que l’on devient un fervent croyant ? » Lutumba répond à la question : « Lelo mokili e beti bango fimbo, bakoma nde ko sambela. Nzambe limbissa masumu na mbango bazali ko banga liwa !  ».

C’est parce qu’ils ont peur de la mort. Ils veulent que Dieu pardonne tous leurs péchés. Dans les deux derniers vers, les Congolais introduisent l’ironie et la provocation. A la place de « Tango bazala bilengue bayeba ka nzambe te (…) Lelo mokili e beti bango fimbo, bakoma nde ko sambela. Nzambe limbissa masumu na mbango bazali ko banga liwa !  », les railleurs mettent « Tango bazala ko boma peuple na ko yiba bongo bazala ka ba franc-maçon. Lelo peuple a beti bango fimbo, ba nzongeli ki mo kristo. Nzambe limbissa ki moyibi na kindoki na bango bazali ko banga nde verdict ya peuple. » En français : lorsqu’ils étaient franc-maçons, ils se sont tout permis : viol, vol, assassinat, sorcellerie, mensonge… Maintenant que le peuple les a démasqués, ils veulent redevenir chrétiens pour qu’ils soient pardonnés

Quant à Rapha Boundzeki, lui, veut qu’un bon chrétien brille par un comportement exemplaire. Le chrétien doit lier sa foi aux œuvres. C’est dans sa chanson « Christianisé » qu’il le proclame. « Un bon chrétien doit avoir un caractère chrétien quoi !  ». C’est ça l’Evangile.

Certes, Denis Sassou Nguesso avait été baptisé, dans sa jeunesse, en la cathédrale Saint Paul de Dolisie ; mais son comportement civil (polygamie) et politique (tuerie, vol et mensonge) l’ont complètement écarté du message chrétien. En plus, l’homme est devenu un gourou de la maçonnerie dont la foi est incompatible à celle des chrétiens.
Côme Mountouari, dit Kosmos, semble justifier dans Etape ya la vie, ce retour du refoulé. Ya Kome pense qu’effectivement c’est au troisième âge, dernière étape de la vie, que toute personne doit se réconcilier avec Dieu et avec ses semblables.

Denis Sassou Nguesso qui va avoir ses 76 ans en novembre prochain, vogue dans cette dernière tranche de la vie. Raison pour laquelle il veut se réconcilier avec Dieu et avec sa population dont il a massacrée une bonne partie, durant tout son règne ? Endeuillant ainsi de nombreuses familles, et fait une foule de veuves et d’orphelins ? Mais, aussi pillant, lui et son clan, toutes les richesses du pays.

Des phantasmes pour enfoncer le clou

Malgré les trois chansons de Lutumba, Rapha Boundzeki et Kosmos, les Congolais ne sont toujours pas satisfaits. Ils ont monté de toutes pièces une histoire qui entrelace phantasme, vraie information, fake, rumeur et moquerie.

Ils disent que tout aurait commencé au cours d’une promenade de Denis Sassou Nguesso dans son parc bovin. Le mwene mbochi aurait marché sur la matière fécale humaine. Il aurait enlevé ses chaussures et même changé de véhicule parce que les odeurs étaient insupportables. Elles étaient plus fortes que celles des cadavres pourris avec lesquelles il s’est familiarisé. L’opinion qui prend cette histoire au sérieux et qui replonge dans la tradition mbochi pense que c’est un mauvais présage pour un mwene. C’est un signe des temps qui annoncerait la fin d’un règne.

Pour convaincre, elle rappelle une autre histoire similaire vécue celle-ci par le Président Marien Ngouabi. L’homme aurait vu, à travers la fenêtre de sa chambre, quelques jours seulement avant son assassinat, un animal sauvage qui serait son totem, traverser la cour de sa résidence. Or il vivait à l’Etat-major général des Forces armées congolaises, en plein centre ville. Donc loin de la brousse.

Aussi, l’opinion relie-t-elle cette histoire du caca à la lettre que Denis Sassou Nguesso aurait adressée à l’archevêque de Brazzaville, Mgr Anatole Milandou, dans la même période, et dans laquelle il aurait demandé de prier pour le Dialogue national. Pour, les Congolais, cette intention de prière ne serait qu’une formule diplomatique qui voulait tout simplement dire de prier pour lui.

Néanmoins, une autre opinion qui veut être sérieuse demande si les Evêques du Congo emboiteront le pas à leurs homologues de la Côte d’Ivoire, du Benin et du Togo qui avaient affirmé qu’il y a incompatibilité entre la foi catholique et la franc-maçonnerie, et qui refusent des obsèques religieuses à un franc-maçon. D’ailleurs, eux-mêmes aussi le disent dans une adresse aux chrétiens du Congo.

Le nom de l’église d’Oyo

Cependant, pour terminer leurs « mbwakela », les Congolais veulent savoir le nom que les évêques voudront bien donner à cette église ? Basilique Edith Lucie Bongo qui fut femme de cœur, même si elle est n’est déclarée ni Bienheureuse ni Sainte ? Ou encore Les martyrs du Congo, allusion aux centaines de milliers de personnes tuées par Denis Sassou Nguesso dans sa reconquête du pouvoir en 1997, et la conservation du pouvoir en 2016. Mieux : La Basilique des trois évêques , Benoit Gassongo, Georges Singha et Ernest Kombo qu’il a tués par empoisonnement, histoire de demander pardon. Ou encore la Basilique du « Champ du potier » pour calquer avec l’histoire biblique du champ du potier que les principaux sacrificateurs ayant condamné Jésus avaient acheté pour abriter la sépulture des étrangers, car ne pouvant plus remettre au Trésor l’argent que Judas était venu leur remettre.

Cette allusion à Judas Iscariote est faite pour dire que dans cette magnifique église au bord de l’Alima, il y a l’argent volé au Trésor Public congolais.

Serge Armand Zanzala, journaliste et écrivain

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