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Théâtre et danse

Anatomies 2009 : "Comment toucher ?" à Brazzaville, Pointe-Noire et en Afrique

Le théâtre de Folle pensée de la compagnie Saint Brieuc a commencé sa tournée à Brazzaville le 20 mars 2009 sur les planches du CF de Brazzaville avec le spectacle « Anatomies 2009 : comment toucher ? », un mélange de théâtre et de danse. Il poursuivra sa tournée à Pointe Noire du 21 au 24 mars 2009 puis dans onze pays africains, à Malabo, Libreville, Lomé, Bangui, Cotonou, Ouagadougou, Niamey, Saint-Louis, Dakar, Conakry et Bamako, jusqu’au 3 mai 2009.

Le spectacle Anatomies 2009 est le résultat évolutif d’un processus de création de Roland Fichier, créateur de ce spectacle qui partage la mise en scène avec Orchy Nzaba, chorégraphe et metteur en scène congolais. Les répétitions et les représentations ont eu lieu au centre culturel français de Brazzaville (Congo), dirigé par Yves Ollivier, directeur du Centre et à la Scène nationale de Saint-Brieuc dirigée par Alex Broutard.

Ayant connu un succès retentissant, plusieurs théâtres se sont engagés à accueillir ce spectacle cette année et l’année prochaine (2010) : le théâtre national de Bretagne, le théâtre de l’Est parisien, le théâtre du pays de Morlaix, le théâtre de Cornouaille à Quimper. D’autres théâtres ont également manifesté le désir d’accueillir ce spectacle riche en couleurs.
Le spectacle réunit sur la scène des interprètes français et congolais issus du théâtre et de la danse. Il s’agit de Da,ien Gabriac, Marie-Laure Crochant pour la France et Princia Biyela Aucarré Wankazi Ikoli pour le Congo-Brazzaville. Ces artistes on ne peut plus remarquables, mettent en scène un spectacle qui a pour sujet : ce qui touche, ce qui ne touche pas, comment les corps se touchent et ne se touchent pas. Ce spectacle comme dit Roland Fichier « trame des histoires de corps. Il joue avec l’étrangeté des corps, des couleurs, des origines… »

Dans Anatomies 2009, la danse n’est ni moderne, ni traditionnelle. Dans le principe de la technique cette question est dépassée. « Une personne qui est en transe, va danser quelle danse ? la danse ne sera pas traditionnelle. On danse traditionnel parce que, on veut danser quelque chose qu’on a appris, quelque chose qu’on a déjà vu. Mais, si c’est en rapport du corps, un rapport d’espace, en ce moment là, on ne danse pas du traditionnel, on ne danse pas du moderne. On est artiste, on est une matière sur le plateau qui s’exprime. En définitive, ce n’est pas sur la danse qu’on se pose des questions, mais sur le mouvement » nous confie Orchy Nzaba parce que, poursuit-il « il y a le mouvement qui est rythmé et qui amène la danse. Si on commence à parler de la danse, on va commencer à parler du style de la danse. »

La danse et le théâtre sont des corps sur scène. Dans le théâtre, ce sont des corps qui parlent et dans la danse, ce sont des corps qui bougent. Ce spectacle Anatomies 2009 : Comment toucher, montre cette artificialité, les mélanges des choses : corps-paroles ; paroles-corps.


TOUCHERS

Ça vient du son. « Toucher » vient de « toccare » en latin, c’est une étymologie onomatopéique, c’est-à-dire qu’un son est à l’origine du mot, en l’occurrence c’est le son « toc », bruit de deux objets qui se cognent, qui est à l’origine du toucher. Du « toc » à la caresse le mot a fait du chemin.

Deux touchers. Dès la création du spectacle Anatomies 2008 en mars 2008 à Brazzaville, plutôt que de parler de « danse » et de « théâtre » nous avions préféré les mots « corps » et « paroles ». C’était une façon de réaffirmer que la question du corps ne se limite pas au champ de la danse, et que la question de la parole peut également devenir l’affaire des danseurs. La question « comment toucher ? », que nous avons posée comme fil rouge de ces nouvelles Anatomies 2009, découlait naturellement du premier spectacle de 2008. Elle a le mérite de relier corps et parole très directement. Le mot « toucher » permet d’embrasser à la fois le toucher physique – le contact d’un corps et d’un autre corps – et le toucher dans toutes ses connotations émotionnelles, psychiques, mentales. On pourrait ainsi grossièrement distinguer le toucher-contact et le toucher-mental, étant entendu que l’un et l’autre ont beaucoup de choses à se dire, ne cessent de s’influencer mutuellement.

Comment toucher ? Pour savoir comment toucher, il faut peut-être commencer par se demander comment ne pas toucher. Ou plutôt : comment faire sentir le toucher qui va venir ? L’intensité émotionnelle du toucher se joue pour une grande part dans l’ébullition imaginaire qui précède le contact physique. Sur scène, le regard et la lenteur des gestes sont les meilleurs traducteurs de cette ébullition intérieure.

Être touché. Il y a des membres, des parties du corps, qui semblent faites pour toucher, de manière plus évidente, ostensible, que d’autres. Elles s’offrent au contact. Mais le corps dans son entier est susceptible de toucher et d’être touché. C’est une des explorations du travail en cours : les contacts inhabituels, incongrus.

Et ça retourne au son. Ce qui relie physiquement le toucher-contact (physique) et le toucher mental (ce qui nous touche, nous marque, nous émeut), c’est le son. Le son nous fait vibrer physiquement (le tympan frémit d’ondes). Le son, quand il est voix ou musique par exemple, peut nous bouleverser, nous renverser. Le son ça touche.
Alexandre Koutchevsky

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