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L’armée angolaise annonce avoir tué Jonas Savimbi

LUANDA (AP) — L’armée et le gouvernement angolais ont annoncé vendredi la mort du chef de l’UNITA, Jonas Savimbi, à la tête depuis plus de 30 ans du mouvement rebelle qui tente de prendre le pouvoir en Angola.
Selon l’armée, Jonas Savimbi est mort vendredi après-midi aux environs de 15h (14h00GMT) lors d’une attaque de l’armée contre des forces de l’UNITA (Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola) dans la province de Moxico dans le sud-est du pays.

Le porte-parole du président angolais Jose Eduardo dos Santo, Aldemiro Vaz de Conceicao, a déclaré que l’armée détenait la dépouille de Savimbi dans la province de Moxico et s’apprêtait à diffuser des images de son corps.

La mort de Jonas Savimbi n’avait encore pu être confirmée de source indépendante. Les responsables de l’UNITA, cachés dans le maquis angolais, n’ont pu être joints.

Jonas Savimbi, 67 ans, a été l’un des personnages clé de la lutte pour le contrôle de l’Afrique du temps de la Guerre Froide, avant que son refus de la démocratie ne l’isole sur le plan international. Il n’est pas apparu en public depuis plusieurs années.

Si elle est confirmée, sa mort pourrait ouvrir la voie à une paix durable en Angola où la guerre civile fait rage, avec des interruptions, depuis 27 ans. L’hostilité nourrie par Jonas Savimbi envers le président Jose Eduardo dos Santos, au pouvoir depuis 1977, a en effet frustré à plusieurs reprises les efforts de la communauté internationale pour mettre fin au conflit. Trois accords de paix ont échoué successivement.

Mais la menace persistante constituée par l’UNITA a aussi permis à MPLA (Mouvement populaire de libération de l’Angola) de rester uni contre cet ennemi commun. La mort de Jonas Savimbi pourrait ainsi faire éclater une lutte interne au sein du parti au pouvoir.

Le gouvernement angolais a annoncé qu’il allait désormais se préparer à la fin de la guerre civile. Il s’est dit prêt à mettre pleinement en oeuvre l’accord de paix conclu sous l’égide des Nations unies en 1994 et qui prévoyait la tenue d’élections démocratiques. L’accord avait été rompu en 1998 et la guerre civile avait repris.

Au cours de l’année écoulée, les forces gouvernementales avaient réussi à déloger l’UNITA de son principal fief. Ces derniers mois, l’armée angolaise disait se rapprocher des forces de Jonas Savimbi dans la province rurale de Moxico, à environ 700km au sud-est de Luanda. Plusieurs hauts responsables de l’UNITA ont récemment été capturés dans cette zone.

On ignorait encore si un successeur à Jonas Savimbi pourrait être trouvé dans les rangs de l’UNITA, qu’il avait fondé en 1966 pour combattre la puissance coloniale portugaise et dirigé depuis d’une main de fer. Le vice-président de l’UNITA, Antonio Dembo, ainsi que le proche conseiller de Savimbi, Paulo Lukamba Gato, seraient en vie et se cacheraient dans des parties rurales de l’Angola.

Fils d’un employé des chemins de fer, élève des missionnaires protestants, Jonas Savimbi est diplômé en sciences politiques de l’université de Lausanne, il parle quatre langues européennes et trois langues africaines.

En 1975, peu avant le départ des Portugais, la puissance coloniale, Savimbi rejoint les mouvements nationalistes d’Agostino Neto et Holden Roberto et tente de mettre sur pied avec eux un gouvernement transitoire pour conduire le pays à l’indépendance. Mais cette tentative échoue et le MPLA (Mouvement populaire pour la libération de l’Angola, pro-soviétique) de Neto prend et garde le pouvoir à Luanda, avec le soutien des Cubains.

Savimbi se replie alors dans le centre et le sud de l’Angola, où avec l’aide de soldats sud-africains et d’armes américaines, il organise la guerilla, se présentant comme un défenseur de la démocratie et un rempart contre le communisme, les Soviétiques et les Cubains. En 1986, Jonas Savimbi se rend à Washington, où il est reçu comme un chef d’Etat par le président de l’époque Ronald Reagan dans le bureau Ovale de la Maison Blanche.

Mais après l’effondrement de l’Union soviétique, le gouvernement angolais laisse tomber les théories marxistes pour se rapprocher des Etats-Unis, incitant les compagnies pétrolières américaines à investir des milliards de dollars dans le pays.

En 1992, lors des premières élections organisées en Angola, Savimbi refuse de reconnaître sa défaite et reprend les armes, ce qui accentue son isolement international alors que les puissances occidentales pressent pour la démocratie en Afrique.

La plupart des responsables de l’UNITA viennent de la tribu des Ovimbundus. Mais Savimbi a toujours refusé l’idée que la guerre civile était une guerre ethnique.

En 20 ans de guerre, l’UNITA a ammassé une force de combat de plus de 60.000 hommes mais a souffert du manque de moyens aériens. L’UNITA est censée détenir un stock de diamants, vendus au marché noir international, qui lui a permis de continuer la lutte malgré les sanctions des Nations unies. De son côté, le gouvernement angolais a financé la guerre contre les forces rebelles grâce à la production de pétrole off-shore.

Depuis l’éclatement de la guerre civile après l’indépendance en 1975, les deux camps se sont rendus coupables d’atrocités, selon les organisations humanitaires.

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